Une encyclopédie !!
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Avec ce «
Dictionnaire amoureux de la Chine », de abalone, ce coquillage adoré des Chinois à Zhuangzi, alias
Tchouang Tseu, le sage taoïste star,
José Freches offre au lecteur un panorama vertigineux de cette grande civilisation humaine, sans doute la plus grande, de mon point de vue il n'y a guère que l'Egypte antique qui puisse rivaliser.
Une oeuvre digne de nos encyclopédistes des lumières qui ne se contente pas de dérouler le tapis rouge (rouge bien sur la couleur fétiche, du faste et du bonheur..) aux innombrables richesses de ce patrimoine.
Le lecteur (re) découvrira que s'immerger dans cette civilisation, dans ce livre, est une merveilleuse ouverture pour penser autrement.
Les amoureux des livres en papier, il en reste, j'en suis, apprendront que c'est en Chine que le papier a été inventé ainsi que l'imprimerie sous la glorieuse dynastie Song (960/1 279) bien avant Gutenberg. La boussole, la poudre à canon, les pâtes, la soie bien sur….etc etc une longue liste des découvertes de l'Empire du Milieu.
C'est d'ailleurs en grande partie cette richesse phénoménale conjuguée à l'absence de tendance impérialiste qui expliquent que la Chine n'a pas conquis sinon le monde tout au moins ne s'est pas bâti un empire colonial au-delà de ses frontières. Zheng He l'amiral à la tête d'une immense flotte dirigea bien sept expéditions au long cours entre 1 400 et 1 433 de notre ère, sous la dynastie Ming (1 368/1 644) qui le conduisit notamment sur les côtes d'Afrique. Ce n'étaient pas les trois coquilles de noix de
Christophe Colomb, mais le paradoxe est que ce sont les pauvres et/ou minuscules pays européens qui conquirent le monde et non la Chine impériale qui en avait les moyens mais dont la culture confucéenne privilégiait la tradition ; il était inconcevable que le reste du monde puisse s'intégrer dans cette tradition millénaire.
Richesse matérielle donc mais aussi spirituelle et pas seulement dans le patrimoine confucéen, taoïste…. En Chine comme dans le vase du Tao T King l'apparence formelle est souvent accessoire, voire illusion ; les paroles et les actes chargés de sens masqués. Ainsi
José Freches nous explique que même l'innocent panda est un agent de géopolitique.
A l'image de ces tableaux de paysage où le minéral, la brume, le ciel s ‘entremêlent, passé et présent semblent confondus depuis des siècles voire davantage d'années. Ainsi les pages de « La montagne de l'âme » de Gao Xinghan, prix nobel de littérature en 2000, ont des accents étonnants qui évoquent la poésie chinoise de la dynastie Tang ou l'esprit du Tao
Mais tout n'est pas que « luxe calme et volupté » au pays de
Confucius hier comme aujourd'hui.
José Freches aborde avec gravité et réalisme également les difficultés de la société contemporaine, les drames et les souffrances du passé. La Chine est malade des blessures terribles infligées à la nature à commencer par la pollution de Pékin.
La Chine est ainsi le monde de tous les paradoxes, le pays de l'idéal taoïste de vie retirée dans la nature est aussi celui de la foule innombrable, omniprésente, séculaire….la Chine de la dynastie Song comptait déjà cent millions d'habitants au temps d'Hugues Capet dans ce qui était le royaume de France.
Mao encore omni présent alors que le pays est devenu l'atelier du monde, que les produits de luxe sont fiévreusement convoités.
Un pays hors norme, complexe que ce dictionnaire d'une qualité rare permet de découvrir en parallèle avec d'autres ouvrages comme ceux de Cyrille JD Javary, d'Alexis Lavis,
Jean Levi… .
A lire absolument