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EAN : 9782253004899
187 pages
Grasset (01/02/1972)
3.71/5   1798 notes
Résumé :
« La guerre de Troie n’aura pas lieu », dit Andromaque quand le rideau s’ouvre sur la terrasse du palais de Priam.
Pâris n’aime plus Hélène et Hélène a perdu le goût de Pâris, mais Troie ne rendra pas la captive. Pour tous les hommes de la ville « il n’y a plus que le pas d’Hélène, la coudée d’Hélène, la portée du regard ou de la voix d’Hélène », et les augures eux-mêmes refusent de la laisser partir.
Hector, pour Troie, et Ulysse, pour la Grèce, tente... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (116) Voir plus Ajouter une critique
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sur 1798 notes
Jean Giraudoux - La Guerre de Troie n'aura pas lieu - 1935 : Subjugué par son immense beauté, Paris a enlevé Hélène à Ménélas son mari. Plus qu'une intrigue amoureuse, cette fuite est un affront total fait à un des rois les plus puissants De Grèce. Alors qu'elle est à l'abri sous les murs de Troie, une délégation est en route pour réclamer son retour. En cas de refus ce sera la guerre. Cette pièce est une relecture moderne du drame antique relaté par Homère dans l'Iliade. C'est aussi pour beaucoup une oeuvre visionnaire tant elle s'inscrivait dans son temps et dans son siècle (l'histoire ne préfigurait-elle pas l'opposition naissante entre les grandes démocraties Européennes construites sous le modèle athénien et un régime nazi confiscatoire des libertés et des biens d'autrui ?). Elle se lit comme un roman grâce à la fluidité des mots et aux ressorts dramatiques distillés par un auteur qui trouva souvent son inspiration dans l'écriture ancienne (voir sa version d'Electre par exemple). Les efforts d'Hector pour sauver la paix captivaient même si l'issue des négociations ne faisait aucun doute. Toutes ses tentatives pour renvoyer aux siens cette femme infidèle et envoûtante que chaque homme de la cité voudrait garder pour lui étaient vouées à l'échec. Car la guerre est une fatalité terrible qui entraîne dans son engrenage l'humanité tout entière y compris les volontés les plus pacifiques. le cataclysme mondial qui se profilait à l'horizon ne fera que confirmer la supériorité des armes sur la raison. Malheureusement aucun prétexte, aucune supplication ne peuvent détourner de sa route l'individu qui veut faire plier les autres par la force. Ce livre regroupe dans ses pages la beauté du texte et l'intérêt historique, il est bien le complètement idéal à la merveilleuse prose que le grand dramaturge ionien rédigea en Grèce plus de deux mille ans plus tôt. Captivant de ce point de vue, il donne un éclairage particulier sur la façon de penser à l'époque sur les rives du bassin méditerranéen et ce même si personne n'a jamais pu prouver archéologiquement l'authenticité de ce conflit. Il faudra dix années de siège, d'immenses sacrifices humains, d'insondables ignominies (le meurtre d'Iphigénie par son père le roi Agamemnon, immolée sans pitié pour rentrer dans les bonnes grâces de la déesse Artémis) avant que la ville de Troie ne soit détruite et Hélène rendue à Ménélas. Combien ces désastres auraient été évités si on avait écouté la sagesse d'Hector. Les mêmes qui n'écoutèrent pas Jaurès en 1914 ou De Gaulle en 1936 quand celui-ci proposa d'écraser Hitler alors qu'il était à peine plus puissant militairement qu'un chef de bataillon. La vie est un éternel recommencement et l'humanité dans son ensemble n'invente rien d'autre que des situations propre à la jeter dans la pire des violences. «La guerre de Troie n'aura pas lieu» rend justice à l'esprit de conciliation de certains et signale malgré le temps qui passe la redondance d'évènements aussi tragiques qu'inévitables…un texte incontournable
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Lorsqu'en 1935, Jean Giraudoux délivre sa pièce “la guerre de Troie n'aura pas lieu” il sait probablement déjà que celle de tente-neuf se prépare. Ecoutez, si vous en avez l'occasion, son message radiophonique aux élèves pour la rentrée des classes de 1939, une archive douloureuse pour les écoliers de ce temps.

“La première lâcheté est la première ride d'un peuple”. La guerre de Troie, Hector a tout fait pour l'empêcher mais en vain. La guerre fait la force pour Priam, elle n'est pas de taille à rivaliser avec la possession d'Hélène pour Pâris et, pour Hélène il est illusoire de croire qu'elle peut être empêchée par son retour chez Ménélas : pas d'issue. le mal est fait. le prétexte tout trouvé.

La langue, classique, de Giraudoux est d'une finesse remarquable, à la fois limpide et pointue. La pertinence de la dérision des va-t-en-guerre du XXème siècle, est avivée par les multiples touches de malices, offensives, ironiques et drolatiques des personnages.

Hector se veut lucide face aux glorificateurs de la guerre entre les hommes, pourtant il rencontre encore plus pragmatique que lui, Ulysse représente son Janus, tout aussi lucide mais pessimiste. le personnage d'Hélène personnifie-t-il l'opinion publique ? Aisément malléable ? L'apathie d'Hélène, contraste avec les passions que l'on prête ordinairement à la foule, mais finalement n'est ce pas la soumission indifférente qui, encore plus que les révoltes, caractérise les peuples ?

“Le privilège des grands, c'est de voir les catastrophes d'une terrasse.”

Qu'est ce qui mène à une guerre ? un geste malencontreux ? un prétexte ? une légèreté ? une glorification de l'homme guerrier ? un caprice ? un enchainement implacable que l'on ne peut enrayer ? le destin ?

Giraudoux semble prendre le parti, quoique lucide, de la paix contre la guerre qui “emprisonne le droit” et contre ceux qui adoptent une certaine légèreté coupable face à elle. de là à faire de celui dont l'attitude face à l'Allemagne, La défaite française et la société de son temps reste ambiguë un humaniste c'est un autre débat. Je préfère retenir de cette pièce que tout, ou en tout cas beaucoup de ce dont l'Europe fut témoin dans son Histoire, était déjà écrit… dans l'Iliade d'Homère.

Qu'en pensez-vous ?
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Voilà un livre que j'avais envie de découvrir depuis longtemps ! Quelle oeuvre !

Jean Giraudoux, adepte de l'Antiquité, comme pour son oeuvre "Electre" publiée deux ans plus tard, reprend ici les mythes antiques dans un récit moderne, puisqu'il fait référence à la Seconde Guerre Mondiale. Ainsi, Giraudoux met en scène la fameuse Guerre de Troie, entre les Troyens et les Grecs, à partir de l'enlèvement d'Hélène par Pâris, le séducteur. S'ensuit alors des discussions entre les partisans d'une nouvelle guerre, (comme Pâris, Priam et la majorité du peuple troyen) et ceux qui la condamnent en défendant la paix (ce qui est le cas d'Hector, d'Andromaque ou encore de Cassandre). J'ai beaucoup aimé replonger dans les légendes antiques tellement enrichissantes !

Cette pièce en deux actes seulement nous présente des facettes différentes, qui correspondent d'une certaine façon aux idéologies de l'époque de l'auteur : Giraudoux se cache en réalité derrière Hector, le personnage central de cette pièce, las de la guerre, et présentant vivement ses arguments favorables au départ d'Hélène et ainsi à une entente totale entre les différents "peuples"...Andromaque, celle que l'on retrouve notamment dans la pièce de Racine, bien que peu présente, joue un rôle majeur, car c'est elle qui encourage son mari (Hector) à continuer sa défense...D'autres personnages sont au contraire pour une guerre qui incarnerait le sacre de Troie et l'honneur des citoyens, mais échoueront finalement dans leur action...En effet, finalement, comme le suggère le titre, les Dieux s'opposeront à ce conflit ; et pourtant la véritable Guerre de Troie aura bien lieu tout comme la terrible Guerre de 39-45...

A travers de magnifiques répliques et dans un style étonnant, l'auteur nous délivre un si beau texte pacifiste encore valable aujourd'hui, mais qui m'a énormément plu...

A lire !!!
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La Guerre de Troie n'aura pas lieu est un des plus beaux pamphlets de la littérature française contre la guerre, contre toutes les guerres.
N'en déplaise à Jean Giraudoux son auteur, la Guerre de Troie eut bien lieu et tant d'autres après. Mais après, c'est quand ? Est-ce dans la traversée des vingt-cinq siècles qui nous séparent de cette guerre antique ou bien depuis 1935, date à laquelle Jean Giraudoux écrivit cette pièce de théâtre devenue elle aussi une oeuvre mythique.
Qu'importe ! Toutes les guerres se ressemblent, tous les champs de bataille aussi, qu'on soit sur la grande plaine de Troie ou dans les rues de Marioupol... Et les hommes qui font les guerres n'ont pas changé eux non plus... Ils sont à la fois misérables et grandioses dans leurs gesticulations tragiques et presque vaines...
Pourquoi ce récit de la mythologie antique, ce péplum extraordinaire vieux de plus de deux-mille cinq ans raisonne-t-il à nos oreilles avec tant de modernité ?
La Guerre de Troie n'aura pas lieu nous plonge dans les coulisses de la diplomatie qui tente par tous les moyens d'éviter la guerre. Ils sont là ces personnages entrés dans la légende, Priam, Cassandre, Andromaque, Hector, Pâris, Hélène... Bientôt Ulysse en émissaire venu De Grèce les rejoindra... Tout se joue dans ce huis-clos pour espérer encore, éviter l'innommable.
« La guerre de Troie n'aura pas lieu, Cassandre ! », dit Andromaque quand le rideau s'ouvre sur la terrasse du palais de Priam.
Cassandre, la prophétesse que nul ne croit jamais, pour une fois verra juste.
On dit toujours que c'est la der des der, Andromaque et Hector le disaient bien pourtant et tout le monde les écoutait avec émotion, elle attendant le fils qu'Hector allait lui donner. Quel couple ! Hector en vaillant guerrier connaît les affres de la guerre et ne veut plus vivre cela, à présent qu'il s'apprête à devenir un père... À eux deux ils offrent un couple étreint d'amour bien plus digne que celui qui sera la cause de ce gâchis épouvantable, à venir.
Mais justement, venons-en... Ce huis-clos nous ramène aux origines de cette guerre. Dire que celle-ci repose sur un malentendu serait un doux euphémisme, si le mot doux peut se prêter au vocabulaire belliqueux...
Bon, je ne vous apprendrai rien sur ce qui a déclenché les hostilités. Pâris fils de Priam roi de Troie, lors d'un périple, a eu l'idée inspirée d'enlever la belle Hélène femme de Ménélas, roi de Sparte. Pâris ici m'est apparu comme un jeune bellâtre et Hélène une reine plutôt écervelée. Tout ça pour ça, me direz-vous ? C'est ce que pense aussi Andromaque, pour qui vous l'aurez compris, j'ai la plus grande admiration. Tout ça pour ça, d'autant plus que les deux tourtereaux ne sont même pas sûr qu'ils s'aiment encore ou qu'ils se sont même aimés un seul instant depuis le fameux enlèvement. Tout ça pour ça, une amourette sans gloire, les guerres tiennent à peu de choses, il est parfois vain d'y trouver une raison profonde...
Tout le monde s'accorde à dire que la guerre est le pire fléau du monde, mais quelle injustice lorsqu'elle repose sur des sables mouvants !
En plus, nous avons une petite longueur d'avance, je dis ça pour celles et ceux qui ont lu l'Illiade, l'opinion d'Homère est clair sur le sujet, ces deux-là dans leur amourette de pacotille ne sont que deux pions sur l'échiquier des dieux qui se jouent des hommes comme de vulgaires marionnettes...
Tiens, les dieux, parlons-en ! Ils sont peu présents dans le récit, sauf dans un échange entre Andromaque et Hélène où cette dernière lui dit : « Si vous avez découvert ce qu'ils veulent, les dieux, dans toute cette histoire, je vous félicite. » Et la réplique d'Andromaque est à la fois belle et cinglante : « Je ne sais pas si les dieux veulent quelque chose . Mais l'univers veut quelque chose. Depuis ce matin, tout me semble le réclamer, le crier, l'exiger, les hommes, les bêtes, les plantes... Jusqu'à cet enfant en moi... »
Andromaque est dans ce récit d'une beauté douloureuse.
L'homme est-il libre de ses choix ou doit-il obéir à son destin qui lui est dicté quelque part plus haut que lui ? Jean Giraudoux se moque des dieux et renvoie la décision finale aux seuls personnages de ce huis-clos.
C'est la malédiction de la guerre, avec Ulysse qui entrouvre la possibilité d'échapper peut-être à celle-ci. Il se moque bien de savoir si Hélène et Pâris s'aiment. Pour l'honneur de Ménélas, la question est de savoir si l'amour a été consommé entre Hélène et Pâris. Cette interrogation lancinante offre l'occasion de savourer l'humour de Jean Giraudoux dans ce passage où est évoqué le retour en bateau des deux amoureux vers Troie. Trois jours et trois nuits sur le ponton d'un navire... Qu'ont-ils donc pu faire ? Parler du ciel, des étoiles ? Évoquer des lectures communes ? M'est avis que j'ai une petite idée sur le sujet...
Ici la grandeur des héros avant le combat est qu'ils se parlent, cherchent des solutions, personne ne veut de cette guerre. Ô combien certains soi-disant grands de ce monde pourraient aujourd'hui en être inspirés !
La diplomatie va bon train, même si elle échouera.
Le rideau se referme et je pleure contre l'épaule d'Andromaque, connaissant avant elle le sort qui sera offert au père de cet enfant qu'elle attend.
Comme ce texte est beau, sublime !
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La guerre de Troie n'aura pas lieu
Une merveilleuse pièce de théâtre! Comme qui dirait tout chemin mène à Rome, Avec La guerre de Troie n'aura pas lieu, Jean Giraudoux, par une position bien maquillée d'une forte négation, nous entraîne avec délicatesse vers la guerre mythique en prenant des tournures très surprenantes que le lecteur serait tenté de croire jusqu'à la dernière minute qu'effectivement l'auteur serait sur le point de nous présenter une autre version où la guerre de Troie n'aura pas lieu effectivement...

Pendant que Cassandre prédit que la guerre aura lieu qu'on le veuille ou non, Hector manage de fortes négociations afin que la guerre n'ait pas lieu. Il demande à Paris de remettre Hélène la femme de Menelas, alors que les troyens sont contre le départ de cette beauté, ils préfèrent se préparer pour la guerre...

Dans les négociations avec Ulysse, l'auteur feint au départ une espèce de volonté d'asseoir la paix, mais quand intervient la plus grosse insulte jamais adressée à un homme, ce qui remettrait même en cause l'honneur de tout un peuple, c'est de traiter les troyens d'impuissants, alors là c'est l'huile qui vient d'être jeter dans le feu, bien sûr qu'il serait or de question que la guerre n'ait pas lieu...

Un bon voyage dans une autre version de la mythique guerre de Troie!
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Citations et extraits (157) Voir plus Ajouter une citation
HECTOR
Écoute-la, Cassandre. Écoute ce bloc de négation qui dit oui !
Tous m’ont cédé. Pâris m’a cédé, Priam m’a cédé, Hélène me cède.
Et je sens qu’au contraire dans chacune de ces victoires apparentes, j’ai perdu.
On croit lutter contre des géants, on va les vaincre, et il se trouve qu’on lutte contre quelque chose d’inflexible qui est un reflet sur la rétine d’une femme.
Tu as beau me dire oui, Hélène, tu es comble d’une obstination qui me nargue !
HÉLÈNE
C’est possible. Mais je n’y peux rien. Ce n’est pas la mienne.
HECTOR
Par quelle divagation le monde a-t-il été placer son miroir dans cette tête obtuse !
HÉLÈNE
C’est regrettable, évidemment.
Mais vous voyez un moyen de vaincre l’obstination des miroirs ?
HECTOR
Oui. C’est à cela que je songe depuis un moment.
HÉLÈNE
Si on les brise, ce qu’ils reflétaient n’en demeure peut-être pas moins ?
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HÉLÈNE
Tu en as déjà embrassé ?
TROÏLUS
On les embrasse toutes. Je donnerais ma vie
pour n’en avoir embrassé aucune.
HÉLÈNE
Tu me sembles disposer d’un nombre
considérable d’existences. Pourquoi ne m’as-tu
pas dit franchement : « Hélène, je veux vous
embrasser !... » Je ne vois aucun mal à ce que tu
m’embrasses... Embrasse-moi.
TROÏLUS
Jamais.
HÉLÈNE
À la fin du jour, quand je m’assieds aux
créneaux pour voir le couchant sur les îles, tu
serais arrivé doucement, tu aurais tourné ma tête
vers toi doucement avec tes mains – de dorée,
elle serait devenue sombre, tu l’aurais moins bien
vue évidemment –, et tu m’aurais embrassée,
j’aurais été très contente... « Tiens, me serais-je
dit, le petit Troïlus m’embrasse !... »
Embrassemoi.

TROÏLUS
Jamais.
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BUSIRIS
Mon avis, princes, après constat de visu et enquête subséquente, est que les Grecs se sont rendus vis-à-vis de Troie coupables de trois manquements aux règles internationales. Leur permettre de débarquer serait vous retirer cette qualité d'offensés qui vous vaudra, dans le conflit, la sympathie universelle.

HECTOR
Explique-toi.

BUSIRIS
Premièrement, ils ont hissé leur pavillon au ramat et non à l'écoutière. Un navire de guerre, princes et chers collègues, hisse sa flamme au ramat dans le seul cas de réponse au salut d'un bateau chargé de bœufs. Devant une ville et sa population, c'est donc le type même de l'insulte. Nous avons d'ailleurs un précédent. Les Grecs ont hissé l'année dernière leur pavillon au ramat en entrant dans le port d'Ophéa. La riposte a été cinglante. Ophéa a déclaré la guerre.

HECTOR
Et qu'est-il arrivé ?

BUSIRIS
Ophéa a été vaincue. Il n'y a plus d'Ophéa, ni d'Ophéens.

HÉCUBE
Parfait.

BUSIRIS
L'anéantissement d'une nation ne modifie en rien l'avantage de sa position morale internationale.
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À la veille de toute guerre, il est courant que deux chefs des peuples en conflit se rencontrent seuls dans quelque innocent village, sur la terrasse au bord d'un lac, dans l'angle d'un jardin. Et ils conviennent que la guerre est le pire fléau du monde, et tous deux, à suivre du regard ces reflets et ces rides sur les eaux, à recevoir sur l'épaule ces pétales de magnolias, ils sont pacifiques, modestes, loyaux. Et ils s'étudient. Ils se regardent. Et, tiédis par le soleil, attendris par le vin clairet, ils ne trouvent dans le visage d'en face aucun trait qui justifie la haine, aucun trait qui n'appelle l'amour humain, et rien d'incompatible non plus dans leurs langages, dans leur façon de se gratter le nez et de boire. Et ils sont vraiment comblés de paix, de désirs de paix. Et ils se quittent en se serrant la main, en se sentant frères. Et ils se retournent de leur calèche pour se sourire…

Et le lendemain pourtant éclate la guerre… Ainsi nous sommes tous deux maintenant… Nos peuples autour de l'entretien se taisent et s'écartent, mais ce n'est pas qu'ils attendent de nous une victoire sur l'inéluctable. C'est seulement qu'ils nous ont donné pleins pouvoirs, qu'ils nous ont isolés, pour que nous goûtions mieux, au dessus de la catastrophe, notre fraternité d'ennemis. Goûtons-la. C'est un plat de riches. Savourons-la… Mais c'est tout. Le privilège des grands, c'est de voir les catastrophes d'une terrasse.

(Ulysse à Hector)
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PÂRIS - Hélène est une très gentille personne. N’est-ce pas Cassandre ?
CASSANDRE - Assez gentille.
PÂRIS - Pourquoi ces réserves, aujourd’hui ? Hier encore tu disais que tu la trouvais très jolie.
CASSANDRE - Elle est très jolie, mais assez gentille.
PÂRIS - Elle n’a pas l’air d’une gentille petite gazelle ?
CASSANDRE - Non.
PÂRIS - C’est toi-même qui m’as dit qu’elle avait l’air d’une gazelle !
CASSANDRE - Je m’étais trompée. J’ai revu une gazelle depuis.
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Vidéo de Jean Giraudoux
https://www.laprocure.com/product/1525906/chevaillier-louis-les-jeux-olympiques-de-litterature-paris-1924
Les Jeux olympiques de littérature Louis Chevaillier Éditions Grasset
« Certains d'entre vous apprendrez que dans les années 1912 à 1948, il y avait aux Jeux olympiques des épreuves d'art et de littérature. C'était Pierre de Coubertin qui tenait beaucoup à ces épreuves et on y avait comme jury, à l'époque, des gens comme Paul Claudel, Jean Giraudoux, Paul Valéry et Edith Wharton. Il y avait aussi des prix Nobel, Selma Lagerlof, Maeterlinck (...). C'était ça à l'époque. C'était ça les années 20. Et c'est raconté dans ce livre qui est vraiment érudit, brillant et un vrai plaisir de lecture que je vous recommande. » Marie-Joseph, libraire à La Procure de Paris
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