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EAN : 9782283018934
144 pages
Buchet-Chastel (10/03/2002)
3.94/5   26 notes
Résumé :
JEANNE tint dans ses mains des livres dont nul, avant t elle, dans la litanie paysanne des siens, n'avait su, soupçonné, ou espéré l'existence. Quelques-uns, ou quelques-unes, sans doute, avaient, avant elle, mâchonné des lettres indécises, vaguement apprises, lentement dégluties et oubliées, tombées dans la désuétude certaine de ce qui ne nourrit pas. Les livres n'étaient pas dans la mémoire des siens, pas du côté de son sang.

Livre, plutôt que recu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Un petit recueil de cinq nouvelles, quatre d'entre elles ont comme titre le prénom du personnage au centre du récit, le dernier texte évoque un couple, en visite rituelle au cimetière à la Toussaint. le texte intitulé Roland figure tel quel dans le premier roman de l'auteur, le soir du chien, où il fait partie d'un récit impliquant d'autres personnages, avec d'autres résonances.

Comme à son habitude, Marie-Hélène Lafon évoque des vies simples, que l'on peut résumer en peu de choses, en peu de mots. Mais ces mots sont d'autant plus importants, il faut choisir le juste, l'exact, celui qui dira le plus en moins de syllabes. Il faut user d'un style économe, comme sont économes en tout les personnages. Ce qui ne veut pas dire que c'est une écriture pauvre, au contraire, elle est somptueuse, mais sans affectation, sans effet de manche, sans prétention, surtout sans aucune prétention. Juste celle de dire le vrai, au plus proche des gens évoqués.

Se dégage de ces textes, prosaïques en apparence, une tendresse, une poésie du quotidien, entremêlée à une nostalgie, parfois une tristesse, sans pathos cependant, de vies peu heureuses, d'un monde en train de disparaître également.

Fort et dense, sous un aspect anodin. du grand art avec des petites choses. Magistral.
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La nouvelle est un genre littéraire qui convient très bien à Marie-Hélène Lafon car elle a un style très épuré et minimaliste.
Il faut quand même avoir le moral avant de se lancer dans la lecture de ce recueil car le fond est noir, très noir et âpre comme peut l'être la vie dans le Cantal, milieu qu'elle décrit admirablement vu qu'elle y est née.
On retiendra des visages et des personnages touchants à cause de leur différence, de la solitude dans laquelle ils vivent. le portrait d'Alphonse est particulièrement émouvant. C'est un garçon un peu attardé, qui va vivre auprès de sa soeur toute sa vie, avec des passages en hôpital psychiatrique ; il n'a rien de masculin car il coud. La vie d'Yvonne est également d'une grande désespérance, elle, la bonniche polonaise que personne ne voit...
J'ai aimé le portrait de Jeanne qui, pour fuir son milieu rural, part enseigner dans la grande ville du coin puis à Paris et refuse les conventions qui veulent qu'une femme "fasse maison".
La vie et la mort de Roland serre le coeur également.
J'ai trouvé toutes ces histoires très fortes et bien vues. Je crois que je préfère lire ses nouvelles qui ont plus de puissance que ses romans.
Marie-Hélène Lafon fait incontestablement partie de mes auteurs préférés.
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N°672– Août 2013.
LITURGIE - Marie-Hélène Lafon – Éditions Buchet Chastel.

La nouvelle est un art difficile et bien plus difficile encore est l'intitulé d'un recueil.

La liturgie est un culte, un cérémonial, un ensemble de codes, de gestes extérieurs qui règlent une cérémonie religieuse. Il y a bien dans ces nouvelles cet aspect liturgique. Dans la première qui donne son titre au recueil, le lavement du dos du père par ses filles tient du rituel codifié qu'il ne viendrait à l'idée de personne de transgresser ces habitudes. le père trône dans cette maison qui est la sienne, où il est le maître où on le respecte et de lui tout dépend, jusqu'à la vie de ses filles. Il y a un côté religieux dans ces ablutions dominicales qui rappellent un peu le lavement des pieds de l'Évangile et l'annonce de sa mort prochaine donne à cette scène traditionnelle une dimension particulière.
La mort qui s'accompagne d'ordinaire d'une liturgie religieuse ou laïque est évoquée quand Germaine, la « fiancée » de ce pauvre Alphonse choisit, de se suicider par honte d'avoir été violée par un rustaud et ainsi de ne plus pouvoir le regarder en face. La mort aussi de Roland, par pendaison comme celle de Germaine, un rituel quasi-immuable à la campagne quand la vie n'est plus supportable. La mort encore évoquée pour le jour des défunts dans « La fleur surnaturelle ». Elle se double ici du rituel annuel et incontournable de la visite des cimetières.
Jeanne, parce qu'elle est différente des autres membres de la famille attachés à la terre et ne vivant que pour elle, parce qu'elle a choisi d'être institutrice et célibataire dans un monde où il faut impérativement pour une femme « faire maison », c'est à dire se marier, avoir des enfants de préférence dans le village, rompt un peu cette liturgie laïque et contadine. Elle y sacrifie cependant, mais à sa manière, quand elle choisit un homme. Elle est vierge et lui porte soutane mais, même si cette passade ne peut perdurer, elle la vit quand même comme quelque chose d'exceptionnel : faire l'amour avec un jeune ecclésiastique tient un peu du rituel. C'est sans doute plus excitant et érotiquement différent. Elle continue de se singulariser lorsque, sa foucade terminée, elle devint kleptomane pour le seul plaisir de transgresser encore une fois l'interdit. le « modus operandi » du délit est une sorte de cérémonial.
Liturgie encore quand le narrateur, témoin privilégié de ces tranches de vies rurales, raconte les familles engoncées dans leurs conflits internes où l'indifférence et parfois la haine tiennent lieu de ciment. Ici, on peut avoir des maîtresses ou des amants, seul compte l'argent et surtout on ne divorce pas, on attend la mort, quand on ne la provoque pas. Liturgie toujours quand il faut impérativement quelqu'un parmi la descendance pour reprendre les terres, la boutique ou l'atelier. Que cela lui plaise ou non, celui qui est choisi doit de plier à la tradition, à cette sorte de liturgie. Et si d'aventure les mariages entre cousins des générations précédentes produisent des attardés mentaux, il faut les cacher, les dissimuler aux yeux des autres mais surtout en profiter, les exploiter puisque, bien entendu, ils ne se défendent pas. Si de pauvres filles de ferme ont succombé sous les assauts de garçons avinés et violents, qu'elles tombent enceinte, il faut impérativement les marginaliser, les désigner à la vindicte populaire, les spolier, elles-aussi.
Liturgie encore que ces grandes lessives au lavoir communal où tout se sait, où se distribuent les critiques et les clabaudages.

Je ne connaissais pas Marie-Hélène Lafon avant d'avoir, par hasard, pris un de ses livres sur les rayonnages d'une bibliothèque. J'ai commencé par lire « Mo » (La Feuille Volante n°671) mais le style haché et minimaliste m'a déplu. Cela semble être la caractéristique littéraire de l'auteur et c'est évidemment respectable. Ici, j'ai trouvé l'écriture plus fluide et poétique, assurément plus agréable à lire et donc pour moi un bon moment de lecture. J'observe que « Mo » est paru en 2005 et « Liturgie »date de 2002. Elle a donc abandonné le style de ce recueil de nouvelles au profit d'une façon plus épurée. Personnellement je le regrette mais j'apprécie qu'elle soit une talentueuse raconteuse d'histoires.

Hervé GAUTIER - Août 2013 - http://hervegautier.e-monsite.com




















































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« Liturgie » Marie-Hélène Lafon (138 pages, Editions Buchet-Chastel)
Cinq nouvelles, de longueurs mais aussi de densités inégales, avec des points communs néanmoins. D'abord, MH Lafon, comme dans tous ses livres semble-t-il, s'intéresse à des personnages modestes de son Cantal natal, des humbles souvent ployés sous la charge du labeur des champs, de la dureté des rapports humains dans certains milieux campagnards, qui conduisent parfois à une sombre désespérance. Ensuite son écriture ici est toujours extrêmement soignée, rigoureuse, ses images sont fortes, servies par la précision virtuose de ses observations qui sollicitent tous les sens du lecteur. Elle utilise des formulations accrochées à l'époque et aux paysages qu'elle dépeint, parfois avec une réserve elliptique, ou à l'inverse avec une crudité non retenue (elle emploie par exemple plusieurs fois le mot viande en référence au corps humain).
La première brève nouvelle, « Liturgie » qui donne son nom au recueil, déploie le cérémonial d'un « culte au créateur », celui qu'impose chaque soir un père à chacune de ses trois filles, en les convoquant à tour de rôle devant le lavabo de la salle de bain pour qu'elles lui lavent le dos. En apparence rien d'obscène, pas d'appel à des gestes ouvertement érotisés, en apparence seulement ; car ce qui ressort du tableau que dresse MHL, c'est le pouvoir absolu que s'arroge le géniteur sûr de son bon droit, le malaise et le dégoût que cela génère chez les filles « du vieux ».
La seconde, « Alphonse », est l'histoire poignante d'un enfant d'une famille paysanne, un peu simple d'esprit, et sa rencontre avec une employée, quasi esclave de la ferme, victime, victimes.
« Jeanne », la troisième histoire, nous fait prendre à peine un peu de distance avec la terre ; Jeanne fait quelques études, devient enseignante dans une école catholique à la ville, mais revient fréquemment à la ferme de son frère, auquel l'unit une complicité forte et muette. Elle rencontre un prêtre, deviendra (un peu) cleptomane...
« Roland » est encore un destin brisé au bout d'une corde de pendu ; ou plutôt qu'un destin brisé, c'est le récit à rebours d'un chemin de vie qui n'a semblé laissé d'autre issue, tant il semblait pavé d'insignifiance, de mutité, de solitude vide.
« La fleur surnaturelle » est un anecdotique et bref épilogue, un petit rien, un parfum de vie d'antan, ou d'hier à peine, un détour sur les sentiers d'un monde qui persiste à peine, même dans des voitures d'aujourd'hui.
Un livre fort, parfois dur et bouleversant, plein de respect pour les plus démunis, les sans voix, ou ceux qui sortent des sentiers battus, un livre à lire
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Un patriarche austère qui soumet chaque dimanche ses filles à la corvée de sa propre toilette, un jeune garçon "inadapté" amoureux d'une employée de maison exploitée et suicidaire, une institutrice maussade incomprise au sein de sa famille rurale, ou encore l'enterrement d'un menuisier taiseux et solitaire : vous l'aurez compris, l'ambiance générale de ce recueil de nouvelles est lourde. Très lourde même.
Mais pour peu que le lecteur y soit un peu préparé, et qu'il soit sensible au style ciselé de Marie-Hélène Lafon (que je découvre ici avec grand plaisir), il vivra probablement une expérience littéraire singulière ! Avec des phrases courtes, des épithètes criant de vérité, des métaphores originales et toujours justes (mais sans aucun dialogue), l'auteur nous plonge avec ses personnages dans un terroir âpre, noir, (presque trop) pesant. La rudesse des traditions paysannes est palpable, et pour moi la qualité d'écriture de Marie-Hélène Lafon a vite pris le pas sur le contenu narratif de ces cinq histoires, empreintes d'une poésie triste.
Mentions spéciales aux nouvelles 1 (Liturgie) et 4 (Roland) !
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Récupérer était son mot. Il récupérait tout. Ses mains, ses bras, son dos, son corps long se penchait sur les choses, les vieilles, les cassées, les usées, celles qui d'avoir trop servi finalement s'abandonnaient. Il les touchait ; il les mesurait de l’œil ; et il disait, on va voir. Et on voyait.
Les portes de caves, d'étables, de granges, de maisons ou de placards, les crèches des vaches, les timons des charrettes et des remorques, les boiseries, les cloisons, les coffres, les armoires, après lui, par lui, recommençaient le service de la vie des vivants pressés, affairés. Il donnait du sang nouveau.
Les gens disaient, Roland nous récupérera ça. Et ils l'appelaient. Et il le faisait. Mais pas avec de neuf. Pas à partir de rien. Il avait besoin de traces.
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La fleur surnaturelle est dans la voiture, à l'arrière, calée entre le siège avant gauche et la banquette, de son côté à lui. Elle est orange. Elle se dresse. Elle est invincible et flamboie en l'honneur des morts, en leur nom, pour leur mémoire. Elle est en gloire. Elle rassurera les familles, elle réjouira les vivants, elle ne faiblira pas, elle ne trahira pas, ni ne ploiera ni ne s'inclinera devant les perfidies nocturnes et hivernales.
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Elle le regardait, elle apprenait le grain de sa peau. Il vieillirait. Elle voulait se souvenir longtemps. Jamais il ne s'impatientait d'être ainsi bu. Dans le regard de cette femme se jouait un mystère très ancien dont il se savait l'instrument lisse et ardent. Il se sentit lâche.
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Personne n'a porté Roland; personne ne l'a regardé pendant toutes les années de sa vie d'homme, sauf son chien.
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Quelque chose de la pâleur des livres, peut-être, avait coulé dans la chair de Jeanne, qui parlait d'ailleurs et d'autrement. (p.76)
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Videos de Marie-Hélène Lafon (65) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie-Hélène Lafon
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