Murdoch râle, rage, crache dans de longs et beaux monologues son « écoeurite la plus aiguë », sa colère face à la laideur d'un monde McDonalisé, consommatisé, l'absurdité d'une vie où les mêmes choses se répètent sans cesse: attendre le bus, aller en cours, revenir chez soi, « finir la soirée planté devant la télévision à se faire dire par une crisse d'animatrice ce qui est beau et bon d'acheter », dormir, attendre le bus... « Comme si on tournait en rond. » « Comme si on revenait toujours au même carrefour alors qu'on est déjà en retard, qu'on a plus ben ben le
temps de niaiser. »
L'intensité de la révolte de Murdoch contamine Boon qui lui aussi devient un assoiffé d'amour, de beauté, de sens, d'infini. Il écrit sur cette laideur envahissante qui vous donne envie de disparaître, sur ses ravages, parle de la beauté un peu comme dans un rêve, et sa création prend vie, fait irruption dans le « réel ».
L'imaginaire et la réalité, la poésie et la critique sociale, se mêlent d'une drôle de façon, troublante, belle.
Une pièce très forte, poétique et remuante, percutante, une écriture profonde ravivant ce qui donne le sentiment d'être vivant et pas une machine.