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EAN : 9782267005554
92 pages
Christian Bourgois Editeur (01/04/1988)
3.66/5   50 notes
Résumé :
Une ville au bord de la mer qui fait penser à Gênes, une obscure affaire de meurtre avec un cadavre anonyme, et un homme qui de sa propre initiative décide d'en découvrir l'identité. Mais Spino, l'employé de la morgue devenu détective, ne s'en tient pas aux apparences, il s'attache à d'autres signes ou indices d'un mystère qui échappe sans cesse. Des hypothèses se forment, on devine certaines activités clandestines, peut-être liées au terrorisme, ou à autre chose. L... >Voir plus
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Etonnant petit livre d'Antonio Tabucchi où l'on retrouve toute sa poésie, mais peut-être moins sa pertinence dans l'histoire, qui se termine un peu abruptement.

Mais cela n'enlève rien au plaisir de la lecture pour tous ceux qui aiment l'écriture de cet auteur magnifique.

Au-delà du fait divers, Antonio Tabucchi nous emmène bien plus loin comme à son habitude. Il décrypte les relations humaines et la profonde solitude qui est l'essence même de l'être humain, fût-il entouré, et ce, sans doute, par le simple fait que chacun a son histoire particulière.

Vous l'aurez compris, j'aime cet auteur, même si ce livre-ci ne figurera pas parmi mes préférés.
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N°1664 - Août 2022

Le fil de l'horizonAntonio TabucchiChristian Bourgois Éditeur.

Spino travaille à la morgue d'une ville portuaire italienne. Il passe donc une grande partie de son temps avec des cadavres autopsiés, vivant parmi les morts. Il tente d'apprivoiser cette ambiance morbide en donnant à ses clients des noms d'acteurs de cinéma ou de personnages et partage sa vie avec Sarah qui rêve de voyages. Cette cohabitation l'invite à la réflexion sur le passage de la vie à la mort mais le personnage de Sarah reste en filigrane dans ce texte . Or il se trouve qu'en ville un jeune inconnu vient d'être assassiné mais le mystère autour de cette mort est si grand que Spino se croit obligé d'enquêter à titre personnel, cela à cause peut-être de sa solitude et aussi peut-être parce que cet inconnu n'intéresse personne. La police se perd en conjectures mais lui veut en savoir plus sur lui surtout pour des raisons philosophiques tenant au destin, à la nécessité de ne pas mourir dans l'anonymat ce qui, à ses yeux, est pire que la mort.
Il se lance dans des investigations incertaines qui le promènent au rythme du hasard dans des contrées assez étranges à partir d'objets comme une photo ou une veste ayant appartenu au mort, où l'identité de cet homme se dérobe et il finit par oublier ce qu'il cherche. C'est une sorte de quête labyrinthique dont l'épilogue semble s'éloigner de lui au fur et à mesure qu'il avance dans ses recherches. C'est aussi mystérieux qu'un texte de Borges. En réalité Spino qui se transforme en détective privé bénévole cherche quelque chose qui n'existe pas et ses investigations finissent par dérailler, ce mort reste inconnu et c'est finalement sur lui-même qu'il enquête. Il y a un peu de ce « jeu de l'envers » pour reprendre le titre d'un autre roman de l'auteur, dans la mesure où, dans cette quête, il est à la recherche de lui-même et l'épilogue dans sa dimension de mort pourrait bien signifier le but si recherché et enfin atteint par lui, la référence à Hécube qui selon la tradition se jette à la mer, étant significative. Il mène son enquête dans des endroits improbables où la logique semble être oubliée, un peu comme s'il était dans un monde parallèle, se perd dans des détails au point qu'on a l'impression, peut-être fausse, qu'il en oublie sa véritable mission.
A propos de Spino qui n'est qu'un parfait quidam, un solitaire, je n'ai pu lire ce texte sans penser à Fernando Pessoa dont Tabucchi était non seulement le traducteur mais aussi l'admirateur. Comme lui Spino pourrait dire qu'il n'est rien, qu'il ne sera jamais rien mais porte sûrement en lui tous les rêves du monde. La police hésite beaucoup sur l'identité et les activités du mort et finit par lâcher un nom possible- « Nobody »- qui ressemble aussi à Spino) Comme lui peut-être Tabucchi prenait-il le relais de Pessoa dans la mesure où l'écrivain recherche lui aussi quelque chose, le fait d'écrire, de tracer des mots sur la feuille blanche, de les faire vivre, de planter un décor trompeur, de dérouler pour son lecteur une histoire qui n'a peut-être jamais existé, de se laisser porter par les personnages qui peu à peu conquièrent leur liberté d'exister et que l'épilogue peut être parfaitement différent de celui qu'il avait imaginé, est aussi une quête intime, nourrie peut-être par cette « saudade » qui fait tellement partie de l'âme lusitanienne. L'écriture est à la fois un miracle et une subtile alchimie et ce qui en résulte est parfois une découverte pour l'auteur et une sorte de mystère, un peu comme cette ligne qu'on appelle l'horizon et qui, plus on avance plus elle nous échappe et que ce mouvement ne s'arrêtera jamais. C'est peut-être aussi le sens de cette référence érudite à Spinoza, dont Spino est le diminutif ?


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Spino, le médecin légiste, de sa propre initiative, enquête sur l'identité d'un cadavre anonyme pour en découvrir l'identité.
Sa façon de faire ne suit pas une logique de cause à effet.
Au lieu des apparences visibles il cherche les significations que révèlent ces apparences. Sa recherche court sur le fil ambigu qui sépare le spectacle du spectateur.
Ainsi sa quête s'affole et de l'enquête sur une morte il glisse sur le plan des raisons secrètes qui guident une existence, se transformant en une chute libre vertigineuse et inévitable en même temps.
Une recherche sans respirer tendue vers un objectif qui, comme l'horizon, semble se déplacer avec celui qui le suit.
Un roman-énigme qui cache une interrogation sur le sens de la vie.
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Où l'on ne sait plus vraiment qui l'on est ;

Où l'on va de rendez-vous glauques en entrevues étranges ;

Où une mouette poursuit Spino et voudrait bien téléphoner.

L'incipit


« Pour ouvrir les tiroirs, il faut faire tourner la poignée en appuyant. Alors le ressort se déclenche, le mécanisme joue avec un léger déclic, les roulements à bille se mettent en mouvement, les tiroirs s'inclinent légèrement et glissent sur de petits rails. On voit d'abord apparaître les pieds, le ventre, puis le tronc et la tête du cadavre. »


Comment en suis-je arrivée là ?


J'avais déjà lu Piazza d'Italia (son premier roman, consacré aux anarchistes toscans), qui m'avait interpellée. Je tente donc de poursuivre mon exploration de Tabucchi, avec ce roman … il faudrait aussi que j'essaye Pereira prétend, son oeuvre la plus connue.


De quoi s'agit-il ?


Dans une ville mal définie, Spino, fonctionnaire de la morgue, enregistre, comme il le fait au quotidien, l'arrivée d'un défunt, à l'identité mystérieuse : Carlo Nobody. Les jours passent, et personne ne vient réclamer le corps. Qui était ce jeune homme ? Spino commence une quête dont il ne sait pas exactement où elle finira.


La citation


« Il y a des jours où la beauté secrète de la ville semble se dévoiler : par exemple durant les journées claires, de grand vent, lorsque la brise précédant le libeccio balaie les rues, claquant comme un drapeau. Alors les maisons et les clochers acquièrent une pureté trop réelle, des contours trop nets, comme une photographie contrastée, la lumière et l'ombre s'affrontent avec arrogance, sans se mêler, dessinant des échiquiers noir et blanc faits de taches d'ombre et d'éclats éblouissants, de ruelles et de petites places » (p. 76)


Ce que j'en ai pensé


Nous avons ici affaire à un magistral (faux) roman policier. Il ne se passe pas grand-chose, et pourtant on est irrémédiablement captivé, presque piégé dans ce court mais puissant roman.

Derrière le prétexte de l'investigation, un vieux négatif, l'étiquette d'un antique tailleur … tous ces menus objets sont propres à éveiller cette nostalgie et cette tendresse pour la vie derrière le corps. L'écriture est splendide, chaque mot, chaque inflexion du temps, paraissent fondamentalement juste.

On pense un peu à Biamonti, avec cette mélancolie profonde, un questionnement métaphysique sur l'identité et l'être, et ce personnage qui se cherche au travers d'un autre, sans d'ailleurs vraiment se trouver. Tabucchi écrit lui-même que les paumés et les vaincus sont les uniques sujets de ces livres.
Lien : http://le-mange-livres.blogs..
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Quand Mazarine Pingeot évoque la littérature italienne qu'elle aime beaucoup, elle cite des auteurs que je connais et que j'apprécie mais aussi un inconnu (pour moi) qu'elle m'a donné envie de découvrir. J'ai donc emprunté à la bibliothèque le roman intitulé le "Fil de l'horizon" d'Antonio Tabucchi. Et j'ai bien fait car j'ai vraiment beaucoup aimé ce livre.
C'est un livre court avec de petits chapitres qui vont à l'essentiel. Il y a un certain suspense puisque Spino, employé à la morgue d'une ville un peu sinistre et en pleine mutation, va enquêter sur l'identité d'un mort. Parce qu'une nuit la police lui apporte le cadavre d'un homme mort par balles que personne ne réclame et dont on ne connaît pas le nom. Les seuls indices sont une petite photo de famille qui se trouve dans la poche d'une veste fabriquée par un tailleur de la ville. Cet homme-là ça pourrait être lui alors il se met à faire des recherches, juste parce que lui est en vie.
En fait, c'est la fragilité de nos destins qu'Antonio Tabucchi met en scène. Il le fait avec une écriture ciselée qui donne une ambiance assez étrange. Une révélation.


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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Il s'est dit qu'il y avait un ordre des choses et que rien n'arrivait par hasard; et c'est bien cela, le hasard : notre impuissance à saisir les liens véritables qui unissent les choses, et il a éprouvé la vulgarité et l'orgueil avec lesquels nous établissons des liens entre les choses qui nous entourent. Il a regardé autour de lui et s'est demandé quel lien unissait la cruche posée sur le coffre et la fenêtre. Elles n'avaient aucun point en commun, elles étaient étrangères l'une à l'autre; elles lui paraissaient plausibles uniquement parce qu'un jour, il y a des années de cela, il avait acheté cette cruche et l'avait posée sur le coffre, près de la fenêtre. L'unique lien entre elles était ses propres yeux qui les regardaient. Mais autre chose, une volonté, devait avoir guidé sa main lorsqu'il avait acheté la cruche : le véritable lien, c'était ce geste oublié et furtif; tout était contenu dans ce geste, le monde, la vie, un univers.
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Pour ouvrir les tiroirs, il faut faire tourner la poignée en appuyant. Alors le ressort se déclenche, le mécanisme joue avec un léger déclic, les roulements à billes se mettent en mouvement, les tiroirs s’inclinent légèrement et glissent sur de petits rails. On voit d’abord apparaître les pieds, le ventre, puis le tronc et la tête du cadavre. Parfois, lorsque les corps n’ont pas subi d’autopsie, il faut aider le mécanisme en tirant avec les mains, car il arrive que leur ventre soit gonflé et entrave le mouvement en faisant pression sur le tiroir supérieur. En revanche, les cadavres autopsiés sont minces, comme asséchés, et une sorte de fermeture Éclair court sur leur ventre rempli de sciure. Ils sont semblables à de grandes poupées, à de longs pantins jetés au rebut une fois la représentation terminée. D’une certaine manière, il s’agit là d’un entrepôt de la vie. Avant leur disparition définitive, les rebuts de la scène font ici un dernier arrêt en attendant d’être classés comme il se doit, car les causes de leur décès ne peuvent rester inconnues. C’est pour cette raison qu’ils font étape en ce lieu, et lui il les assiste et les surveille. Il gère cette antichambre de la disparition définitive de leur image visible, enregistre leur date d’entrée et de sortie, les classe, leur donne un numéro, les photographie parfois, remplit la fiche qui leur permet de quitter le monde du sensible, leur accorde un dernier aller simple. Il est leur ultime compagnon, ou mieux, une sorte de tuteur a posteriori, impassible et objectif.
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On ne connaît toujours pas le nom du mort de la rue Case Dipinte. C’est le titre d’un article de Corrado, ses initiales sont imprimées au bas du texte. Un article mesuré et las, plein de lieux communs : les démarches des enquêteurs, les pistes passées au peigne fin, l’enquête au point mort.
Spino a relevé l’ironie involontaire : au point mort. Il se dit qu’un mort il y en a un vrai, et personne ne sait de qui il s’agit, à tel point qu’on ne peut même pas le déclarer légalement décédé. Il n’y a que le cadavre d’un jeune homme à la barbe fournie et au nez effilé. Spino se met à faire des hypothèses. L’homme est arrivé à l’hôpital déjà mort, mais il a peut-être murmuré quelque chose dans l’ambulance : un gémissement, une supplique, un nom. Il a peut-être appelé sa mère, comme cela arrive, ou une femme, ou un fils. Il pourrait avoir un fils, il est marié, il porte une alliance, pour autant qu’elle lui appartienne ; bien sûr qu’elle lui appartient, personne ne porte l’alliance de quelqu’un d’autre.
Non, dit Corrado dans son article, durant son transport en ambulance, il n’a rien dit, il était dans le coma, il était pratiquement déjà mort, les policiers qui ont pris part à la fusillade en ont témoigné.
Spino a pris un stylo et a souligné les phrases qui l’intéressaient le plus.
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Il y a des jours où la beauté secrète de la ville semble se dévoiler : par exemple durant les journées claires, de grand vent, lorsque la brise précédant le libeccio balaie les rues, claquant comme un drapeau. Alors les maisons et les clochers acquièrent une pureté trop réelle, des contours trop nets, comme une photographie contrastée, la lumière et l’ombre s’affrontent avec arrogance, sans se mêler, dessinant des échiquiers noir et blanc faits de taches d’ombre et d’éclats éblouissants, de ruelles et de petites places.
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Il s'est dit que pour connaître un cimetière, il fallait sans doute y avoir ses morts, et les siens n'étaient pas d'ici, ni en aucun autre lieu d'ailleurs; à présent il visitait ce cimetière car il avait pris en charge un mort, un mort qui n'était pas là, auquel il n'était même pas attaché par les liens d'une vie passée.
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