À l'occasion du centenaire de la première guerre mondiale, un très grand nombre de livres a été publié ou déterré et reimprimé, et cela depuis 2012, sur cette charcuterie sans précédent dans l'histoire de notre 'civilisation'. D'autres ouvrages ont bénéficié d'un regain d'intérêt. C'est le cas du 'Retour du soldat' de Dame
Rebecca West. Une perle qui mérite d'être lue et relue.
Comme j'ai une grande admiration pour cette dame, j'aimerais vous faire partager mon enthousiasme pour Cicely Isabel Fairfield, nom sous lequel elle fut baptisée en 1892 à Kerry, actuellement en Irlande. le pseudonyme qu'
elle s'est choisie est le nom d'une héroïne rebelle d'un livre de
Henrik Ibsen.
La vie de celle dont
George Bernard Shaw a dit qu'elle maniait son crayon aussi bien que lui, mais en plus sauvage, et que le président Harry Truman a publiquement qualifié de 'le meilleur reporteur du monde', en 1948, avait pourtant commencé sous des cieux peu propices. Un père volage qui abandonne le foyer familial quand elle était gamine et la pauvreté qui forçait sa mère, une pianiste de talent, à abandonner son instrument pour assurer le pain quotidien de ses 3 filles par tout genre de besognes ingrates. Mais Rebecca aura sa revanche : propriétaire d'un domaine magnifique et se baladant en Rolls Royce ! Et cette richesse, elle ne l'a pas volé. le nombre d'articles et de reportages qu'elle a produits pour un nombre invraisemblable de journaux et revues, tant en Angleterre qu'aux États-Unis, laisse tout simplement rêveur, surtout pour quelqu'un qui n'avait même pas terminé ses études secondaires. En plus, elle a réussi a créer des
oeuvres littéraires jusqu'à pratiquent sa mort, en 1983.
Un aspect de
Rebecca West, que je ne peux laisser dans l'ombre est sa vie privée, non pas pour l'élément 'people's' comme on appelle cela aujourd'hui, et avant scandale, mais à cause des retombées sur son oeuvre. Une anecdote tout à fait révélatrice à ce propos, est sa rencontre avec le grand
H.G. Wells. En 1913, notre Rebecca traite le créateur de '
La machine à explorer le temps', '
L'homme invisible' et surtout '
La guerre des mondes' dans un journal de 'vieux jeu'. Il est vrai qu'il avait 26 ans de plus qu'elle, mais cela n'a pas empêché une passion amoureuse, qui a duré une décennie et lui a laissé un fils en 1914. La relation avec Anthony West a, malheureusement pour elle, toujours été fort compliquée. Notons en passant que son fils, également écrivain, est l'auteur d'une remarquable biographie de son père naturel : '
H.G. Wells, Aspects of a Life'. Tout en ayant eu toutes sortes d'affaires
après Wells, entre autres avec
Charles Chaplin et le magnat canadien de l
a presse, Lord Beaverbrook, leur amitié a duré jusqu'à la mort de Wells, en 1946.
Petit détail pittoresque, Dame Rebecca, car anoblie en 1949, a donné son nom à un groupe rock du Canada dans
les années 1990.
Son 'Retour du soldat' aborde le problème épineux d'une reprise de la vie 'normale'
après de longs mois de combat et de tranchées. D'autant plus que le héros de cette histoire, souffre d'amnésie, qui hypothèque gravement ses relations d'avant-guerre. En dire davantage serait dommage. Cet ouvrage, en fait guère plus qu'une longue nouv
elle, se lit en un temps-record, puisqu'il vous capte dès la première page. En effet, je n'ai pas peur d'affirmer qu'il est nettement plus captivant que '
Mrs Dalloway' de
Virginia Woolf, qui a cependant la côte. Il est aussi plus profond et réaliste.
Par ailleurs, il a fait l'objet de 2 films, un avec Alan Bates et Julie Christie, et 2 adaptations théâtrales.
Ce livre est, à mon avis, ensemble avec 'À l'Ouest, rien de nouveau' de
Erich Maria Remarque, un des meilleurs témoignages artistiques sur cette longue tuerie de 1914-1918. Ni son titre, ni le fait qu'il fêtera, l'année prochaine, aussi son centenaire ne devraient vous décourager à le lire. Je vous assure que le style et la langue de Dame
Rebecca West n'ont pas vieilli.