AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070453726
144 pages
Gallimard (24/10/2013)
4.13/5   62 notes
Résumé :
Une femme de la bonne société viennoise trompe son mari avec un jeune pianiste. Elle agit pas désœuvrement et ennui, pour briser le confort routinier de son univers bourgeois. Mais l'aventure tourne court: très vite, elle se sent suivie, espionnée, traquée. Une vielle femme la fait chanter. Chez elle, son mari l'observent la questionne, ses enfants la rejettent. Dès lors,l'angoisse ne la quitte plus, et le désespoir lui fait penser au suicide... jusqu'au coup de thé... >Voir plus
Que lire après AngoissesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
4,13

sur 62 notes
5
2 avis
4
6 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
La Feuille Volante n° 1269
AngoissesStefan Zweig – Gallimard.
Traduit par Bernard Lortholary.

C'est une histoire simple, presque banale que Stefan Zweig nous offre dans cette longue nouvelle : En sortant de chez son jeune amant, Irène, la trentaine, femme mariée et mère de famille de la bonne société viennoise est agressée par une femme pauvre et frustre qui se dit l'amie de l'homme qu'elle vient de quitter. Revenue au foyer, Irène y reprend sa place grâce à son aplomb et l'hypocrisie bourgeoise qui la caractérise. Cependant, le lendemain elle gamberge mais heureusement la mode féminine est à la voilette et elle ne craint pas d'être reconnue. Pourtant son agresseuse de la veille la retrouve et c'est le début d'un chantage au terme duquel elle peut tout perdre, sa famille, son confort , sa place dans la société... Elle est dès lors assaillie par des certitudes contradictoires. Certes elle est encore belle, désirable et est attirée par des passades, mais n'est pas prête à tout sacrifier d'autant que l'adultère qu'elle pratique n'est en rien une vengeance envers son mari à qui elle n'a rien à reprocher, mais n'a pour but que de briser l'ennui et le confort routinier de son univers quotidien,
C'est l'occasion pour elle de pratiquerun de ces retours en arrière qui donnent le vertige, son mariage arrangé par ses parents avec un jeune avocat pénaliste, huit ans de bonheur paisible plein d'indifférence et d'oisiveté, mais la certitude que pour elle son mari n'est qu'un étranger. Elle a donc parfaitement de droit de s'octroyer, de temps en temps, un petit accroc. Vient ensuite l'inévitable culpabilité judéo-chrétienne qui se double de la nécessité de rester chez elle pour échapper à la maître chanteuse, Cela brise ses habitudes et et elle vit sous la menace d'une révélation, ce qui ne manque pas d'éveiller les soupçons de son entourage. Elle essaie bien de rompre son isolement en dansant, lors d'une soirée avec un autre homme, suscitant la jalousie de son mari, mais rien n'y fait. Cette situation devient rapidement une obsession génératrice de panique, d'angoisse, de frayeur et de désespoir, une vraie descente aux enfers. On lui demande de payer de plus en plus et elle le fait, se mettant elle-même dans un état de dépendance qu'elle voulait éviter et dont elle ne voit pas comment sortir.  En réalité elle n'était pas préparée à cette vie de mensonge comme nombre de ses amies qui s'y complaisaient et elle fit ce qu'elle pouvait pour se déculpabiliser. Non seulement elle n'aimait pas cet amant, elle s'aimait elle-même et évidemment le plaisir qu'elle retirait de cette toquade, mais son bonheur était aussi celui d'enfreindre l'interdit. et elle chercha à se convaincre, dans une sorte de dédoublement de personnalité, que c'était une autre femme qu'elle qui avait commis ce faux-pas. Elle se voulait une femme libre, au mépris du code pénal de l'époque qui n'était pas tendre avec l'épouse adultère, capable de vivre en pointillés une vie quelque peu dépravée au mépris de son mari et de ses enfants, mais le hasard s'en était mêlé qui venait brouiller ce bel agencement. Elle se découvrait différente, certes attachée à son confort mais suspicieuse, persuadée que son mari connaissait son faux-pas mais n'en parlait pas (L'épisode où il fustige sa fille pour un mauvais geste n'est pas sans rappeler la scène où Raimu, dans « la femme du boulanger » tance sa chatte devant sa jeune épouse contrite), incapable elle-même de discerner les discordances dans l'attitude de la maître-chanteuse mais acculée à une décision qu'elle n'avait jamais imaginée.
Je ne suis pas sûr cependant que cet épisode venant bouleverser leur vie commune se termine par cette forme de « happy-end » que je trouve toujours artificiel et un peu trop éloigné de la vraie vie. Je ne suis pas sûr non plus qu'il ne restera rien de cela dans leur vie commune future, d'un côté des adultères pas forcément avoués de l'épouse et de l'autre, ce montage un peu grossier d'un mari qui certes veut récupérer sa femme, mais apprend du même coup à la connaître vraiment et se rend compte qu'il a donné son amour et sa confiance à quelqu'un qui ne le méritait pas. Certes l'auteur joue sur la différence sociale entre le jeune pianiste et la maître chanteuse, laide et grossière, mais est-ce vraiment crédible ? L'auteur, puisant sans doute dans son vécu personnel (A cette époque Zweig a commencé une liaison avec une femme mariée qu'il finira par épouser), réussit non seulement à se livrer, selon son habitude, à une fine analyse de l'esprit humain et de ses passions, mais il le fait avec un sens consommé du suspens qui tient son lecteur en haleine jusqu'à la fin. Il montre comment la culpabilité finit par s'imposer à elle, puis le regret et enfin la réaction finale. Ce qui aurait pu être l'histoire d'une banale passade devient malgré tout, une étude psychologique passionnante.
Comme toujours, il déroule son récit avec un style fluide qui transforme une lecture en moment d'exception.
© Hervé Gautier – Août 2018. [http://hervegautier.e-monsite.com]
Commenter  J’apprécie          121
Stefan Zweig, né en 1881 à Vienne, en Autriche-Hongrie, et mort par suicide le 22 février 1942 à Petrópolis au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien. Stefan Zweig fit partie de la fine fleur de l'intelligentsia juive viennoise, avant de quitter son pays natal en 1934 en raison de la montée du nazisme. Réfugié à Londres, il y poursuit une oeuvre de biographe (Joseph Fouché, Marie Antoinette, Marie Stuart) et surtout d'auteur de romans et nouvelles. Angoisses, une nouvelle, date de 1913.
Irène, la trentaine, mariée avec un grand avocat viennois qui lui a donné deux enfants, a un amant. Amant pris, pour ainsi dire à l'insu de son plein gré, « cet adultère non désiré ne fut apaisé qu'en partie par la flatteuse vanité d'avoir pour la première fois, et par une décision qu'elle croyait autonome, dit non au monde bourgeois dans lequel elle vivait. » Un jour, tandis qu'elle s'esbigne de l'immeuble où elle faute, elle croise une femme qui l'injurie, lui reprochant de lui avoir volé son ami. Cette même femme va retrouver Irène et la faire chanter, lui réclamant chaque fois une somme d'argent plus importante…
J'ai été très étonné par ce texte de Zweig car comme le montre ce résumé nous sommes presque dans un polar, plus exactement dans un film genre Alfred Hitchcock. Toute la nouvelle consiste à faire monter l'angoisse chez Irène et indirectement chez le lecteur qui se demande comment tout cela va finir, car seules deux hypothèses semblent possibles : le crime et l'élimination de la maîtresse-chanteuse mais nous sommes chez Zweig, que diable ! ou bien, plus probable, le suicide d'une Irène désespérée. Sauf que l'écrivain nous a concocté un dénouement plus surprenant.
Le texte est très bien écrit, ce qui ne surprendra personne, on y retrouve ce rythme de la phrase bien balancée qui fait le charme de Zweig. La construction de la nouvelle s'appuie sur la montée en puissance de la tension, de l'angoisse qui paralyse Irène, une torture psychologique, modifiant ses attitudes dans sa vie quotidienne ce qui éveille questions et étonnement de son entourage comme des domestiques et par un effet de feed-back un accroissement des peurs chez Irène, peur de se trahir, peur de devoir avouer qu'elle est victime d'un chantage et donc d'une faute. Une très belle scène – un enfant suite à une grosse bêtise est grondé par le père – fait écho à celle d'Irène qui l'encaisse avec souffrance (un peu comme la scène de la Pomponette dans la Femme du boulanger…).
Une très bonne lecture, comme toujours avec Stefan Zweig, non ?

Commenter  J’apprécie          60
C'est l'histoire d'une femme issue de la grande bourgeoisie et qui s'ennuie profondément dans sa vie quotidienne.
Pour palier à ça et se sentir un peu vivante, elle décide de prendre un amant.
Là aussi, la routine s'installe mais le frisson la tient. Elle mène une double vie et devient experte en mensonges.

Mais un jour où elle sort de chez son amant, une femme l'interpelle. Elle sait qui elle est et ce qu'elle vient faire chez cet homme.

Démarre alors un chantage qui va la plonger aux tréfonds des abysses.
L'angoisse que tout soit découvert la ronge petit à petit

Une très courte mais intense nouvelle, qui entraine le lecteur dans cette spirale infernale de la perte de contrôle.

On assiste à la déchéance de cette femme. On a peur pour son honneur, peur de la réaction de son mari et peur de ce qu'elle pourrait être capable de faire.

Petit à petit, elle perd pied et prend conscience qu'elle peut tout perdre.
Alors, elle échafaude des plans pour s'en sortir.

Ce récit porte bien son nom, il est angoissant et on comprend aisément ce qu'elle peut ressentir et tous les états d'âmes par lesquels elle passe.
Et au moment où on croit que tout est perdu, un final très beau, à la Zweig.
Je n'en dirai pas plus et vous laisserai le lire.
Commenter  J’apprécie          110
En lisant Stefan Zweig, le désir me taraude de revenir aux classiques de la littérature française tels que Balzac, Flaubert et Hugo. Zweig dépeint une frange de la société - la bourgeoisie - et souligne les travers de cette société bien pensante du début du XXe siècle. L'auteur autrichien expose devant le lecteur la vie confortable, routinière et quelques peu ennuyeuse d'Irène, trentenaire et mariée depuis huit ans avec un avocat reconnu. Ils ont deux jeunes enfants.
La scène d'ouverture est la descente de l'escalier dans l'immeuble où vit son amant. Elle est appréhendée par une femme robuste et vulgaire qui l'insulte. Pour s'en débarrasser, Irène lui abandonne l'argent qu'elle a sur elle. Et c'est l'engrenage, la surenchère de cette racketteuse en jupon.
Le style de Zweig démontre une maîtrise des tensions et des émotions. le lecteur suit le malaise et l'épouvante qui s'installent crescendo. Une tension psychologique mais aussi physique. Son maintien, les traits de son visage se décomposent.
Cet adultère dont Irène met fin dès la première rencontre avec la maître-chanteuse, lui révèle son existence quelconque. Elle ne connaît pas son mari ni ses enfants. Elle est étrangère à elle-même.
J'en pince pour son style introspectif.
Commenter  J’apprécie          50
Je suis une grande lectrice de Stefan Zweig. J'aime beaucoup ces romans que je trouve superbement écrit et qui donne de la place aux femmes. J'ai eu la chance de recevoir ce roman à Noel et j'ai pu ainsi découvrir cette histoire d'une femme qui trompe son mari et va être soumise à la peur de la découverte de son mensonge.
En effet, le personnage principal va être soumise à la peur, l'angoisse grandissante de la découverte de son mensonge qui peut lui faire perdre à la fois sa stabilité et détruire son mariage. Durant cette période, la femme va être nerveuse, redécouvrir le bonheur de son enfant mais aussi s'interroger sur son propre mariage et ce qu'elle désirait finalement en entretenant une petite aventure extra-conjugale.
Comme d'habitude, en quelques pages, l'auteur que je recommande fortement (que vous vous essayez ou non à la littérature classique) arrive à développer une intrigue en profondeur, avec les éléments essentiels et invite à une vraie réflexion concernant ses personnages. La plume de Stefan Zweig est riche, fluide et très accessible. Les personnages ne sont pas seulement acteurs dans une intrigue, ils nous interrogent nous-même sur nos propres actions ou notre propre conscience.
Même si, pour donner un avis complet, ce n'est pas mon favori de l'auteur autrichien. Je vous recommande plus particulièrement Vingt-quatre heures dans la vie d'une femme ou encore Confusions des sentiments.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Rien en elle, ni son sang pleinement satisfait par le bonheur conjugal, ni le sentiment si fréquent chez les femmes de végéter dans leurs intérêts intellectuels , n'avait fait qu'elle eût besoin d'un amant; elle était parfaiement heureuse au côté d'un époux prospère qui lui était intellectuellemnt supérieur et de deux enfants; elle était paresseusement lovée dans le confort et le calme plat de son existence de grande bourgeoise. Mais il est une molesse de l'atmosphère qui rend tout aussi sensuel que la touffeur et la tempête, il est un bonheur bien tempéré qui est plus excitant que le malheur et qui, pour beaucoup de femmes, du fait qu'elles ne manquent de rien, est aussi fatal qu'une perpétuelle insatisfaction tenant à la desespérance. La satiété n'agace pas moins que la faim, et le côté sûr et sans risque de son existence la rendait curieuse d'aventures.
Commenter  J’apprécie          40
Elle avait fait la connaissance de ce jeune homme – pianiste connu, bien que dans un cercle encore étroit – à l’occasion d’une soirée, et bientôt, sans vraiment le vouloir et quasi sans comprendre pourquoi, elle était devenue sa maîtresse. Rien dans son sang n’avait convoité celui de cet homme, rien de sensuel ne l’avait attachée à son corps, et presque rien d’intellectuel : elle s’était donnée à lui sans avoir besoin de lui ni même le désirer fortement, mais par une certaine indolence à résister à la volonté qu’il manifestait et par une sorte de curiosité inquiète.
Commenter  J’apprécie          50
La belle Mme Irène appartenait, par toute sa mentalité, à cette élégante communauté qu'est la bourgeoisie viennoise, dont l'ordre du jour semble consister, au terme d'une convention secrète, en ce que tous les membres de cette confrérie invisible se rencontrent sans cesse aux mêmes heures et avec les mêmes intérêts, et font peu à peu de cette perpétuelle rencontre et observation comparative le sens même de leur existence.
Commenter  J’apprécie          40
"Donnez-moi donc aussi l'aumônière, que je ne perde pas l'argent !" expliqua la bouche avec une moue sarcastique et un petit rire de gorge.
Irène la regarda en face, mais pas plus d'une seconde. Ce sarcasme impudent et méchant était insupportable. Elle sentit le dégoût lui pénétrer tout le corps comme une brûlure. Surtout partir, partir, ne plus voir ce paysage ! Détournant la tête, d'un geste brusque elle tendit la précieuse aumônière, puis, courant presque, pourchassée par l'horreur, monta l'escalier.
(P. 40)
Commenter  J’apprécie          10
Ses rêves nébuleux de jeune fille, grand amour et extase sentimentale, avaient été anesthésiés par les aimables apaisements des premières années de mariage et par l'attrait ludique de maternités pré-coces, mais ils commençaient à se réveiller, maintenant qu'elle approchait de la trentaine ; et comme toute femme elle se sentait capable d'une grande passion, mais sans associer à la volonté de la vivre le courage de payer l'aventure à son juste prix, le danger.
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Stefan Zweig (66) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Stefan Zweig
Stefan Zweig, auteur à succès, se voulait citoyen d'un monde qu'unifiait une communauté de culture et de civilisation. Il n'a pas survécu à l'effondrement de ce «monde d'hier» qu'incarnait la Vienne impériale de sa jeunesse.
Stefan Zweig et tous les grands auteurs sont sur www.lire.fr
autres livres classés : remordsVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (151) Voir plus



Quiz Voir plus

Le joueur d'échec de Zweig

Quel est le nom du champion du monde d'échecs ?

Santovik
Czentovick
Czentovic
Zenovic

9 questions
1884 lecteurs ont répondu
Thème : Le Joueur d'échecs de Stefan ZweigCréer un quiz sur ce livre

{* *}