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Critiques de François Cheng (462)
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Cantos toscans

J'ai vu qu'il n'y avait pas encore de critique de ce livre, alors je me lance. J'ai lu ce recueil dans l'édition Poésie/Gallimard sous le titre «A l'orient de tout ». A première vue, difficile de séparer ces poèmes des autres recueils. On y retrouve les thèmes chers à l'auteur comme la nature, l'unité de l'homme avec l'univers… que j'ai déjà détaillés dans la critique de ce titre. Il faut voir en quoi « Cantos Toscans » se démarque des autres titres. Comme le titre l'indique, l'auteur nous parle de la Toscane. Le titre interpelle un peu par sa consonance médiévale. Peut-être faut-il y voir une allusion à un passé immuable, un lieu où le temps se serait un peu figé ? Si la plupart des poèmes se fondent dans l'ensemble, on y trouve beaucoup de liens avec l'Italie. A travers les cyprès d'abord. Les fameux « cyprès toscans » que l'on trouve dans la poésie de D.H. Lawrence. C'est la référence première à la Toscane. Puis quelques noms de villages sont cités (Montopoli in Val d'Arno, Monterchi) - « Tours et coupoles toujours plus élevées » - , puis un nom d'artiste (Léonard de Vinci), et plus précisément la description d'une fresque particulière, des références au christianisme, aux anges… Il s'agit d'une description de la campagne toscane, avec ses collines particulièrement douces. A y regarder de plus près, François Cheng se laisse bercer par cette douceur, « les rondeurs des collines », et même « le mamelon du désir ». Mais cette nature italienne est entremêlée de notions taoïstes qui nous rappelle la Voie. Il fait magnifiquement la jonction avec les deux cultures. Pour mieux nous faire comprendre que tout se rejoint, que nous sommes dans l'Universel. Il faut prendre le temps de relire les strophes et les vers. S' imprégner de la magie de cette poésie. Voilà ce que je peux dire de ce recueil. Je vous invite à découvrir cette Toscane du Tao en suivant le guide François Cheng.
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L'éternité n'est pas de trop

Cette lecture est un peu liée à un concours de circonstances. Il y a longtemps que je voulais découvrir l'oeuvre de François Cheng et une amie m'a offert l'un de ses romans : L'éternité n'est pas de trop. Mais une fois tournée la dernière page, je me suis demandé si le genre romanesque était la meilleure porte d'entrée.

Bien sûr, je me suis immergée dans cette Chine des Ming, au XVIIe siècle : dépaysement assuré, voyage imaginaire haut en couleurs, bruits et odeurs grâce aux descriptions qui jalonnent le roman et qui ont parfois la grâce et la délicatesse des estampes chinoises ou bien donnent dans un foisonnement débridé lorsqu'il s'agit d'évoquer les scènes de fêtes ou celles qui se déroulent autour des temples, hauts lieux de la vie collective à cette époque.

J'ai évidemment suivi avec empathie les deux héros de cette histoire : Dao-Sheng, musicien puis devin et médecin, très fortement marqué par le taoïsme et qui est tombé éperdument amoureux de Lan-Ying, mariée à un membre de la famille Zhao. Cette passion va les mener à suivre un long chemin initiatique vers la forme d'amour la plus éthérée qui soit mais aussi la plus tragique.

Un remake de Roméo et Juliette, version chinoise ? A certains égards, oui. Mais dans ce roman, l'amour mystique qui lie nos deux héros ouvre parfois la porte à des monologues intérieurs -surtout chez Dao-Cheng- qui relèvent plus du discours philosophique que du dilemme né d'un amour impossible.

Il est vrai aussi que cette passion donne lieu à de merveilleux passages lyriques comme celui où l'auteur évoque le caractère ineffable du regard amoureux, point de convergence privilégié entre le corps et l'âme.

De très beaux passages aussi relatifs aux vertus de la médecine énergétique, surtout celui où grâce aux massages du corps et au souffle vital qu'il insuffle dans la bouche de la femme aimée, Dao-Sheng va réussir à la ramener sur le chemin de la vie. La phrase se fait ample, vibrante et peu importe que l'on croit ou non au Shen, le souffle à l'origine de toute vie, on est pris dans une scène dont l'enjeu nous dépasse et où l'on touche aux frontières de la Vie et de la Mort.

Mais j'ai trouvé parfois la prose de l'auteur moins inspirée et certaines descriptions très codifiées relèvent, pour moi en tout cas, d'un académisme qui n'est pas de mon goût. Même réserve pour la structure du roman très répétitive et uniquement fondée sur l'alternance des saisons et le passage des années. Et ce tempo très particulier qui marche fort bien au cinéma dans certains films asiatiques, a, pour mon goût personnel, moins bien fonctionné dans le récit.

Je ne vais pas rester sur cette impression un peu mitigée et vais me tourner vers ses essais et oeuvres poétiques pour parfaire mon jugement.
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Cinq méditations sur la mort

Du grand art ! la légèreté et la délicatesse des mots mais aussi une grande lucidité. Lire Cheng, c'est entrer dans les circonvolutions de la pensée, mais pas pour tourner en rond, non ! Il nous offre l'occasion du jeu des perspectives, des changements de points de vue "renverser notre posture, inverser notre perspective", et ne vous y trompez pas "cinq méditations sur la mort" est un hymne à la vie.
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Cinq méditations sur la beauté

Quand François Cheng se penche sur la question de la beauté, il nous entraîne dans une réalité pluridimensionnelle. Partant de l'univers dans lequel « nous sommes la conscience éveillée, le coeur battant de la matière », il explore la Beauté en s'appuyant sur les trois Idées platoniciennes - le Vrai, le Bien, le Beau - . Loin d'une vision angélique, pour le philosophe, la beauté n'exclue pas le mal puisqu'elle en est le pendant extrême.



Beauté de la Nature, beauté de l'être humain, beauté de l'art, beauté que François Cheng définit comme « le désir de chaque être de tendre vers la plénitude de sa présence au monde », une « présence rayonnante et reliante ». Parce que chaque être est unique et irremplaçable et qu'il porte en son sein cette capacité à la beauté, s'impose à lui un rapport au temps et à l'espace où la notion d'éphémère le renvoie à sa condition de mortel.



Ainsi la beauté conduit chacun à s'élever, se dépasser, se transfigurer. Elle ne se réduit pas à une beauté apparente, superficielle, artificielle destinée à séduire, manipuler, dominer. La Beauté est régie par une force bien plus puissante qui est le principe de vie, jaillissant du plus profond de l'Etre. En cela elle est reliée au sacré. La vraie beauté se nourrit de bonté. Elle y puise sa noblesse et la force de son rayonnement. La beauté inclue naturellement l'amour, la compassion, le sens de la justice, la dignité.



Enfin sur le plan de la création artistique, fort de sa double culture occidentale et chinoise, François Cheng, s'appuie sur ces deux grandes traditions esthétiques afin de dégager des critères pour juger de la beauté d'une oeuvre, l'art étant le résultat d'une rencontre, « d'un entrecroisement entre une présence qui s'offre à la vue et un regard qui la capte ».



Ces cinq méditations se dégustent avec délectation. Elles imposent la lenteur de la lecture, le temps suspendu de la pause, permettant de mieux goûter, la saveur du texte, l'intelligence des idées. Le regard se porte alors sur ce qui s'offre à sa vue, et peut saisir la beauté éphémère de l'instant…

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L'éternité n'est pas de trop

Les faits se déroulent au XVIIe siècle, à la fin de la dynastie Ming. Dao-Sheng vit dans la montagne auprès de moines taoïstes qui lui ont enseigné les arts de la médecine et de la divination. Il n’a pas prononcé ses vœux et décide de quitter ce lieu de paix pour retrouver la seule femme qu’il ait aimée, trente ans plus tôt, alors qu’il était un jeune violoniste, membre d’un cirque itinérant.

Ce roman est une merveille, l’auteur décrit avec justesse les sentiments et l’amour qu’éprouvent Dao-Sheng et Lan-ying, l’amante retrouvée, un amour qui demeurera platonique et qui trouvera sa plénitude dans la fusion de ces deux âmes qui enfin se sont découvertes.

L’éternité n’est pas de trop, un très grand roman.

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L'éternité n'est pas de trop

C'est bouleversée que je referme ce roman.



Émue par cette histoire magnifique.

Éblouie par l'écriture de François Cheng.

Touchée en plein cœur par sa finesse et sa sensibilité.

Admirative de cet auteur qui n'a appris le français qu'à l'âge adulte.



Ai-je besoin d'en dire plus pour vous donner envie de vous précipiter sur ce livre si vous ne l'avez pas déjà lu ?



Si pour vous, lire, c'est voyager dans l'espace et dans le temps, foncez : François Cheng vous transporte en Chine au XVIIè siècle.

Si pour vous, lire, c'est éprouver des émotions, foncez !

Si pour vous, lire, c'est vous attacher à des personnages, foncez !

Si pour vous, lire, c'est goûter le plaisir d'un style unique, foncez !



Ai-je besoin d'en dire plus ?

Je ne pense pas. Et ne comptez pas sur moi pour vous dévoiler l'histoire : partez à sa découverte !

À la découverte d'un ouvrage que je place très haut dans mon panthéon littéraire. Un de ceux qui me font dire : "Quelle merveille que la littérature !"



Ce livre est un bijou, François Cheng est un orfèvre !
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De l'âme

François Cheng, âgé de 91 ans est un homme de lettre d'origine chinoise. Il occupe un siège à L'Académie Française et est l'auteur de nombreux essais et romans sur la pensée, l'esthétique, l'art et la poésie. Il obtient plusieurs prix littéraires et le grand prix de la Francophonie pour l'ensemble de son oeuvre. Dans ce livre, l'auteur reçoit une lettre d'une amie chère à son coeur perdue de vue depuis trente années. Celle-ci lui lance une requête singulière, celle de disserter sur l'âme. « Sur le tard, je me découvre une âme, (…) Parlez-moi de l'âme.. ». C'est en sept lettres que François Cheng va répondre à ce qui lui est demandé. Le thème est abordé avec finesse, élégance, maitrise, érudition. de grandes notions sont évoquées, certaines sont spirituelles, d'autres plus scientifiques ou intellectuelles. Comment sépare-t-on l'esprit et l'âme ? Comment les reconnait-on ? De nombreuses citations à méditer sont ici réunies pour former un ensemble magnifique, une poésie empreinte d'expériences humaines tel que l'exode chinois. Certains philosophes sont cités telle que Simone Weil dont il résume le destin par la formule : « un cheminement vers l'âme ». Cet ouvrage invite à la méditation, permet de consoler, d'aller de l'avant empli d'optimisme et de motivation. Monsieur François Cheng est un grand Sage, je l'ai vu et écouté à de nombreuses reprises à la télévision et j'ai été profondément émue, éblouie. Ce livre est à lire, à relire, à garder près de soi.
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Cinq méditations sur la mort

Discussions sur tatami, ou plutôt monologue car aucun ne pipe mot quand le maître parle. Donc chut, on n'écoute même pas la mouche voler !

Il faut dire qu'il en impose le François, tellement il est cultivé, concentré et en phase avec son auditoire.

Ces premières méditations sur la mort (donc sur la vie) traitent surtout de philosophie à un niveau optimal pour moi, c'est à dire que tout le monde peut comprendre. Il ajoute même aux Anciens grecs quelques ajouts forts instructifs de philosophes chinois auxquels je ne suis pas accoutumé mais qui ont « la voie » en commun.

Tout se passait très bien. Je commençais à percevoir ce qu'était mourir - mais aussi « bien » vivre d'abord - quand tout à coup François Cheng se fit l'apôtre d'un autre François, pape de son état, et d'une pensée pourtant double millénaire qui me laisse de plus en plus de glace.

Fin des bans, et là je suis sorti du tatami avant qu'il ne devienne un tapis de prières...
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Le Dit de Tianyi

Le Dit de Tianyi, roman gratifié du prix Femina en 1998, est l’œuvre de François Cheng, poète, écrivain et calligraphe né en Chine en 1929, arrivé en France en 1949, naturalisé français en 1971, aujourd’hui membre de l’Académie Française. C’est par un ami, fidèle lecteur de mes chroniques, que j’ai été amené à m’intéresser à ses écrits.



Le personnage principal du roman, Tianyi, est un double de l’auteur. Comme lui, il est né en Chine, à proximité du mont Lu, un site renommé pour ses extraordinaires paysages escarpés où les brumes restent suspendues (Allez voir des photos sur Internet !). Comme lui, son enfance a souffert de la guerre civile entre nationalistes et communistes, puis d’une guerre d’expansion effroyable menée par le Japon Impérial jusqu’à son anéantissement en 1945.



Comme François Cheng, Tianyi se découvre une âme d’artiste. C’est dans la peinture qu’il exprime son talent, en premier lieu dans la calligraphie, un art pictural majeur dans un pays comme la Chine, dépositaire d’une civilisation millénaire fondée sur les signes.



Comme son créateur encore, Tianyi s’installe à Paris après la guerre. Mais alors que c’est pour fuir une guerre civile meurtrière que François Cheng et sa famille s’expatrient, c’est pour guérir un chagrin d’amour – sur lequel je reviendrai – et grâce à l’octroi d’une bourse, que Tianyi vient étudier la peinture européenne et la confronter à celle de son pays d’origine. Des motivations différentes entre l’auteur et son personnage, mais probablement le même regard désenchanté sur la grisaille du ciel et des immeubles de Paris, la même prise de conscience brutale de leur singularité physique d’asiatique, et le même ahurissement lors de la rencontre de beaux esprits parisiens prétendant connaître mieux qu’eux les traditions chinoises.



Tianyi ira jusqu’à Amsterdam et Florence pour approfondir sa connaissance de la peinture européenne et en découvrir les grands maîtres classiques. A Paris, il nouera une relation intime avec une musicienne française, Véronique, qui l’inspirera et facilitera son intégration.



A la différence de Cheng qui reste en France où il mènera le parcours que l’on sait, Tianyi repartira en Chine à la recherche de son grand amour perdu. Un Amour avec un grand A, un idéal spirituel qui avait autrefois uni « Trois êtres faisant Un » : Tianyi, l’Ami et l’Amante. Un idéal qui s’était fracassé sur les contingences concrètes, charnelles, d’une relation amoureuse classique, et qui ne retrouvera du sens que plus tard, lorsque l’un(e) des Trois aura disparu. Une disparition physique, et non spirituelle, car « Deux » ne peut être une fin en soi. Entre le Yin et le Yang, il y a un vide qui n’est ni l’un ni l’autre, à moins qu’il ne s’agisse d’un tout qui serait à la fois l’un et l’autre…



Retour en Chine, donc, mais dans des conditions difficiles. Tianyi découvre les turpitudes absurdes et criminelles du régime mis en place par Mao Zedong, dont le narrateur ne cite jamais le nom, et qu’il dépeint comme un tyran insensible à l’humain, ignorant de l’économie, préoccupé par son seul pouvoir personnel, ce qui, quelques années plus tard, le conduira à tenter de le renforcer par l’inepte politique de Révolution Culturelle.



Considéré comme suspect par le régime, Tianyi passera plusieurs décennies en rééducation dans un camp dit de travail, copie conforme des camps de concentration nazis et soviétiques (je ne parle pas des camps d’extermination nazis que je mets sur un autre plan). Une vie de souffrances et d’avilissement dans le Grand Nord chinois, où une nature sauvage et des intempéries impitoyables ramènent l’homme qui veut survivre à son état primitif.



A l’insu de ses gardes, Tianyi réussira à peindre l’œuvre de sa vie, une fresque clandestine qui consacrera l’accomplissement de son talent.



Il terminera ses jours dans une sorte d’asile, libre de relier à sa façon les pages éparses d’une existence tourmentée, alimentée d’espoirs et de nostalgies. Une vie semblable au cours d’un fleuve, symbole chinois du temps qui n’en finit jamais de s’écouler. Car pour finir, il ne reste que cela : écrire, pour que tout soit Dit.



Le Dit de Tianyi, roman imprégné de culture et de philosophie chinoise, est écrit dans une langue française très harmonieuse et poétique. C’est aussi un documentaire passionnant sur les événements de vingtième siècle en Chine. Quelques pages sont difficiles d’accès. Je devine en François Cheng, un amoureux de la beauté et de l’humanité, même si l’on ne peut empêcher le Mal de s’y dissimuler.


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Enfin le royaume

La poésie de François Cheng sait être profonde tout en restant sobre. C’est le cas pour « Enfin le royaume ». Les quatrains qui le composent se rapprochent par leur simplicité et leur concision du haiku.

Chacun de ses quatre vers contient l’immensité de l’univers et l’homme, minuscule, qui doit lutter pour se faire sa place.

Le poète questionne l’homme, bien vivant, sur sa capacité à s’émouvoir de ce monde



« Sais-tu entrer dans la douleur

Du monde de toute ton âme,

Pareil au papillon de nuit

Se jetant dans la flamme ? »



Ses mots donnent sens à la vie, élèvent l’âme vers la beauté intemporelle. La spiritualité dépouillée de la poésie de François Cheng nous émeut car elle nous parle sans affèteries et sans prendre des chemins de traverse. La nature est là, sous nos yeux, qui nous invite à contempler la beauté, la célébrer.

« Un iris

Et tout le créé justifié ;

Un regard,

Et justifiée toute la vie. »



Quelques-uns de ces quatrains sont dédiés à des amis dont on ne connaitra que le prénom. Il y a, bien sûr, l’émouvant quatrain qui dit « Jusqu’au bout nous te chercherons » et qui s’adresse à Estelle Mougins, la fillette disparue.



La foi du poète est lumineuse et pure et ses vers sont immensément vivants et nous entrainent vers la lumière.



« Une grande chose a lieu : L’univers ? non, la vie »



C’est une poésie vivifiante et apaisante à la fois dont il serait dommage de se priver.



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Enfin le royaume

Dans les textes de son dernier ouvrage, "Enfin le Royaume", l'inspiration de François Cheng ne vient pas spontanément d'une volonté de démontrer, d'expliquer ou d'analyser les sagesses que l'on trouve dans le taoïsme. Ces textes expriment la beauté, comme "l'ultime goutte de pluie", la vie comme source inaltérable et féconde de la beauté, et pour le poète la beauté de l'âme.





Toute beauté est singulière écrit François Cheng dans le très beau livre consacré aux peintres chinois. Ce sont pas les peintres les plus classiques qu'il a choisi pour illustrer son goût pour ce qui est singulier, donc authentique et précieux. Ces peintres ont choisi les voies transverses, ce qu'il appelle la voix excentrique, puisque la volonté de ces peintres est de dépasser ce que nous voyons, peindre le temps, peindre l'absence, un peu à la façon de Patrick Modiano





C'est le vivre que l'on va arpenter décliner, à travers le monde des vivants, la terre, les plantes, la mer, le ciel et les éléments, une terre nourricière non seulement pour le corps mais aussi pour l'âme. Il se gorge d'émotions pour mieux ressentir l'harmonie du monde, le dur et le doux, le noir et le blanc, le rocher et l'orchidée.





François Cheng puise dans la poésie ancienne des perles d'éternité, comme ces vers de Wang Wei (701-761) .

"Si vous cherchez l'oubli des pensées,

venez me voir-

Vous pourrez arroser les doux

légumes de mon jardin."





La poésie de François Cheng, émerge de ces juxtapositions de mots inconsolables, de mots non miscibles, comme "ce vide est plein", ou

"Pour retrouver, jadis entrevue,

Depuis longtemps perdue, l'Étoile".





La richesse des mots est de nous conduire à l'extase...

"Ne te mens plus ni ne te

Lamentes. L'heure est venue

De faire face, peut le chant

L'extase ou le désastre."





L'art poétique de François Cheng affirme du point le plus haut que le sage peut atteindre, l'universalité de son écriture, une écriture qui n'efface rien, qui apaise ou réconcilie le désir de futurs épanouissements et la sauvegarde du passé.



"Au sommet du mont et du silence,

 rien n'est dit, tout est.

Tout vide est plein, tout passé présent,

 tout en nous renaît. "





L'appel de Cheng, est un appel insatiable, de se lier à la nature comme François D assise, ainsi écrit-il.



"Suivre les poissons, suivre les oiseaux.

Envies-tu leur sort ? Suis-les jusqu'au bout,

Jusqu'à te muer en bleu originel,

Terreau du désir même de nage, de vol."





Enfin, l'appel constitue la toile de fond de ce quatrain totalement inspiré page 153 du Taoïsme.

"Ne quémande rien. N'attends pas

D'être un jour payé de retour.

Ce que tu donnes trace une voie

Menant plus loin que tes pas."





De quelle nuit suis-je venu ? de quel jour ? Soudain l'absente est au cœur de tout. Les iris

Ont frémi ; le mot vivre est dit.

En plagiant François Cheng c'est à ce maître que je veux remettre mon chant, car tous ses mots me parlent, tous m'éblouissent et m'apaisent.,

Quand il associe des mots aux sens disjoints, la terre habillée ou une brise déchirure, qui donnent une mystérieuse puissance à ses émotions.

Je me délecte de ses fulgurances "vivre désormais entre ondes et ondées, d'éclats recueillis, d'ombres dispersées".



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Cinq méditations sur la beauté

Faisant appel aux cultures chinoise et occidentale, François Cheng essaie de définit ce qu'est la beauté. Que faut-il pour qu'elle existe ? Peut-elle exister si personne n'est là pour l'admirer ? A quoi tient-elle ? La seule beauté extérieure est-elle beauté ? Et la création ?

C'est parfois un peu compliqué, surtout les références chinoises que je ne connais pas. Néanmoins, il explique bien et c'est passionnant. Il faut le lire d'une traite, ou au moins le faire pour chaque méditation. C'est riche, ardu, et une fois terminé, comme c'est gratifiant ! , on se sent plus intelligent. Flottant comme la brume sur le mont Lu (allez chercher des photos, c'est vraiment... beau !) Et lisez François Cheng.
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Enfin le royaume

Parmi les hommes / femmes d'écrit actuels, quelques uns me font du bien. Soit leur pensée est indépendante et rebelle (comme Michel Onfray), soit parce qu'elle prêche l'altruisme et la sérénité intérieure (comme Matthieu Ricard, Frédéric Lenoir), soit parce que leur talent polymorphe et bi-culturel m'enchante et m'enrichit. C'est le cas de François Cheng.



François Cheng est aussi à l'aise dans la poésie que dans l'essai, le roman, l'histoire et la technique de la calligraphie et de l'art pictural chinois...sa sagesse et sa culture remarquables impriment et imprègnent incontestablement.



Avec Enfin le Royaume, la magie opère comme jamais. Le vieil homme érudit a choisi la forme du quatrain pour cette nouvelle livraison poétique, comme un retour aux sources de la poésie, aux bases universelles (tant en occident qu'en Chine, c'est bien une forme traditionnelle), à la simplicité la plus touchante.



En quatre vers, tout est dit de la place de l'homme dans l'univers, au sein de la nature, sur les émotions humaines, sur le sens de cette vie qu'on traverse finalement si vite. Tenir bon pendant la traversée, car nous avons tous un mandat du ciel, ne rien lâcher, se battre, mais toujours dans l'humilité, le respect de l'autre, de la nature, du Tout Puissant.



François Cheng atteint ici une forme de dépouillement, son minimalisme est comme un concentré de vie. Chaque quatrain est un diamant brut. Ils seront vite tous cités par ailleurs ici.

Cela sent le livre de chevet pour les jours de pluie, les jours de peine, mais aussi les jours lumineux et de joie. La vie, quoi !







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Cinq méditations sur la mort

Ce livre est pour moi une première découverte de ce grand poète et écrivain qu'est François Cheng. Je ne le connaissais que de nom, mais je n'avais jamais plongé dans son oeuvre. C'est chose faite maintenant et c'est avec une grande joie que j'ai lu ces "Cinq méditations sur la mort autrement dit sur la vie". Cet ouvrage montre la pluralité des cultures / connaissances de l'auteur : culture mêlant la sagesse chinoise et l'esprit occidental, culture littéraire, culture philosophique. C'est dans un mélange brillant de toutes ces influences qu'il nous propose une réflexion sur la mort et la vie, l'absolu, l'Être, la sagesse etc... Une très belle découverte !



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Assise

J’aime beaucoup François Cheng le poète, j’ai plusieurs volumes de ses poésies et ses essais sur la peinture chinoise sont d’une intelligence et d’une poésie folles.

Quand j’ai aperçu ce petit livre j’ai automatiquement tendu la main.

En 1971 il se choisit un prénom au moment de sa naturalisation : François.

Son choix le fait remonter dans le temps aux années de galère, de doute, de pauvreté et d’isolement total.

En 1961 il vit en France depuis 10 ans, il lui a fallu apprendre la langue, s’intégrer à une culture bien différente de la sienne, il est en plein doute.

Il a l’occasion de faire un voyage en Italie « heureux de m’arracher à la grisaille parisienne ».

L’arrivée à Assise est un choc « Je fus saisi, en sortant de la gare, par son apparition dans la clarté d’été. »

Le lieu réveille en lui la tradition du feng chui « un site exceptionnel est censé avoir le pouvoir de propulser l’homme vers le règne supérieur de l’esprit. »

Tout va l’enchanter, les paysages d’Ombrie, la vie même de Saint François et le Cantique des créatures.

Il reviendra et étudiera la vie du Saint, gravira la colline d’Assise comme dit-il les taoïstes gravissaient les montagnes chinoises perdues dans les brumes.

C’était la fin de son exil intérieur.

J’ai aimé ce petit livre où se rencontrent deux cultures mais une seule sensibilité. Un petit livre à offrir et pas seulement à un croyant.




Lien : http://asautsetagambades.hau..
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À l'orient de tout

Les poèmes de François Chang sont beaux, lisses et ronds comme des galets travaillés par la mer et patinés par le temps. Épurés comme des estampes, allant droit à l'essentiel, ils ne sont cependant pas dépourvus de cette souplesse qui fait du vers une sorte de calligraphie parfaite. J'en ai aimé l'élégance et la simplicité, la volonté d'atteindre le coeur de ce qui est dit à partir de leurs apparences et ce sens du mystère où derrière les mots les plus simples se cache la méditation la plus profonde.
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Poésie chinoise

Matin

Ne sais pourquoi

Ces

Quelques mots si simples

Quelques mots si apaisants

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Assise

En moins de 50 pages, François Cheng, livre un témoignage humain et spirituel d'une extrême richesse, écrit dans un style poétique qui coule comme l'eau sur la terre qu'il célèbre avec toute la création, sur les traces de Saint François d'Assise.



Il commente magnifiquement le portrait du saint dans une fresque de la basilique inférieure d'Assise dont le livre présente quelques photographies et les mots de François immergent le lecteur dans le visage auréolé et le corps stigmatisé de François.



C'est vraiment un livre de l'intériorité que chacun peut ressentir à sa guise, un livre dans lequel François Cheng raconte l'aboutissement d'une quête plus ou moins consciente dont il ignorait qu'elle allait trouver son aboutissement dans la ville d'Assise.



Un livre à emporter lors d'un voyage vers Assise et à ouvrir de nouveau face au visage de François pour percevoir, peut-être, comme François Cheng , la joie du don de François d'Assise.
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Enfin le royaume

François Cheng fait partie des incontournables de la poésie actuelle, elle sait nous contenter de peu, minimaliste mais tellement pleine. C'est l'art de la poésie de dire en si peu la richesse du moment, de la vie, de la beauté sur terre. Peindre la nuit en jour et la mort en vie, c'est difficile de résumer un recueil de poésie . Pur équilibre du yin et du yang, savoir méditer texte après texte, les lire doucement comme l'alambic distille lentement pour tirer au coeur de la plante : l'essentiel. C'est un mot juste et pas un autre, une rime qui chavire le poème, savoir écouter le silence dans l'obscurité de nos pensées.

François Cheng, c'est un rendez-vous avec l'indicible, un voyage vers une sérénité retrouvée, l'épure d'un instant qui dure comme l'écho entre deux montagnes ou comme l'onde sur l'étang. Un long frisson qui vous parcourt et vous porte vers ce monde si particulier de la poésie.



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L'éternité n'est pas de trop

Dans la croyance taoïste, l'âme ne périt pas. À l'heure de la mort, elle réintègre la Voie. Cet infini de l'espace et du temps où règne la pensée pure et porte ses adeptes à l'espérance d'un prolongement de la vie. Un glissement vers l'infini.



Dao-sheng et Lan-ying brûlent d'un amour inassouvi. Les codes sociaux et moraux qui prévalaient dans la Chine de l'époque Ming ont placé entre eux des barrières infranchissables. L'un et l'autre sont réduits à vivre l'accomplissement de leur désir dans le désir lui-même. Dans la charnelle certitude de leur complémentarité ils subissent la loi des astres qui selon l'équilibre des forces contraires s'attirent et se repoussent en même temps, et restent ainsi à jamais à distance.



La rencontre charnelle de Dao-sheng et Lan-Ying, enracinés dans leur époque, soumis à leur condition, ne dépassera pas le frôlement des doigts dans de trop rares occasions. Dao-sheng est alors gagné par la passion mystique qui germe en lui. Il intériorise le mystère du féminin, avec la conviction qu’envers et contre tout l'amour relie le visible et l'invisible, le fini et l'infini. L'amour est quintessence de la pensée pure.



Cette attirance mystérieuse peut-elle se concevoir dans une immense attente, sans prolongement charnel ? L'amour peut-il être idéalisé au point de faire oublier l'appel du corps sous l'emprise tyrannique de l'instinct ? Dao-sheng doit-il son exaltation de l'amour aux seules entraves que la vie terrestre a opposées à sa rencontre avec Lan-ying ?



Toute manifestation de son aimée, aussi timide soit-elle, est prétexte à Dao-sheng pour entrer en communion de pensée avec elle. En désespoir du secours des religions qui se concurrencent à cette époque en Chine, dont celle enseignée par les nouveaux prédicateurs venus de l'occident, Dao-sheng se forge à la conviction, peut-être en résignation ou en consolation, que la force de l'amour trouvera sa consécration au-delà de la mort.



L'intimité n'est pas dans la nudité des corps. L'intimité est dans les tréfonds de l'âme. Cette part de la pensée qui ne se manifeste ni par des actes ni par des mots. L'essence de l'être. Dao-sheng sublime la femme dans sa féminité. Elle « est chair certes, mais combien cette chair se transmue sans cesse en murmures, en parfums, en radiance, en ondes infinies dont il importe de ne pas étouffer la musique". Voilà une vision de la féminité, de l'amour que n'aurait pas reniée Romain Gary, grand promoteur de la femme idéalisée.



Magnifique ouvrage sur la quête de cette part manquante à tout homme. À toute femme aussi, Dao-sheng en a l’ardent désir, tant les manifestations de son aimée sont rares et timides. Il conçoit cette épreuve comme la promesse, la preuve même d’un avenir à son amour pour Lan-Ying. La vie sur terre n'est qu'opportunité de rencontre. Deux êtres qui s’aiment rentreront en connivence à jamais quand les contraintes de la vie auront été effacées.

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