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Critiques de Honoré de Balzac (3274)
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La Maison du Chat-qui-pelote



Je n’ai que peu de lectures de Balzac comme référence mais je m’intéresse depuis quelques temps à cet auteur dont je découvre (enfin) les merveilles.

Il me semble donc pouvoir affirmer que cette nouvelle concentre les thèmes qui lui sont chers : les désillusions de l’amour, la goujaterie, le manque d’instruction des femmes, l’avarice, l’exercice du pouvoir entre les classes sociales.

Descriptions ciselées n'excluant pas l’humour voire l’ironie, personnages incarnés sans que la caricature alourdisse l’ensemble, la plume d’Honoré de Balzac est précise et immerge son lecteur dans un univers qui ressemble à un huis clos d’une frange de la société.

J’avoue avoir été touchée par le triste destin d’Augustine, aveuglée par l’amour, victime d’une société où la femme n’est qu’un faire-valoir.

Magnifique nouvelle.

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Le message

Encore une nouvelle de Balzac parmi les plus courtes, à peine vingt pages, comme Étude de femme que j’ai lu en même temps, et qui fut tout aussi savoureuse à lire.

Dans Le message c’est également une narrateur (mais dont on ne connaît pas l’identité) qui va nous conter une histoire dont il a été témoin et acteur : celle de sa rencontre avec un jeune homme dans une diligence avant la survenu d’un drame qui fera de lui le funeste messager auprès de la maîtresse aimé. Une très courte aventure, pour le narrateur et le lecteur, faite d’amour, d'amitié et d’émotion.

Même si, si je devais être tatillonne, j’aurais aimé que l’histoire soit un peu plus longue surtout au début quand survient le drame qui se déroule un peu trop rapidement peut-être, mais bon, c’est vraiment pas grand chose.

C’est rapide, simple et pourtant ça m’a emporté car Balzac sait toujours condenser tout ce qu'il veut.

Encore un bonbon de mon cher Honoré.

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Étude de femme

Décidément les nouvelles De Balzac sont toujours savoureuses même lorsqu'elles sont extrêmement courtes comme celle-ci. Etude de femme fait à peine vingt pages mais ça n'empêche pas qu'elle soit à la fois vive et dynamique.

Le narrateur c'est Horace Bianchon, le jeune médecin qu'on avait croisé notamment dans Le père Goriot ou La peau de chagrin, ici il va nous raconter l'énorme bourde commise par son ami Eugène de Rastignac. Ce dernier rédige une lettre d'amour à une femme mais l'envoie par inadvertance à une autre femme et se trouve à deux doigts de ruiner sa réputation. Les premières pages dans lesquelles Balzac nous fait le portrait de cette comtesse, archétype de la restauration, était particulièrement tranchantes et très plaisantes à lire.

J'ai adoré retrouver Eugène pour qui j'avais eu un coup de coeur dans le père Goriot, on le retrouve ici tout aussi nonchalant et séducteur qu'on l'avait laissé. Horace nous raconte la courte histoire de cette méprise dont il fut le témoin avec une pointe d'humour et sa personnalité sympathique qu'on avait pu aussi voir chez lui.

Bref, Balzac sait faire long comme il sait faire court et c'est toujours un délice.
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La Femme de trente ans

Un roman assez court et très inégal, composé de six tableaux dont le cinquième n'est vraiment pas à la hauteur des autres et, surtout, des trois premiers, qui sont une des peintures parmi les plus fines jamais réalisées par Balzac sur la condition féminine, l'insatisfaction sexuelle, l'échec conjugal et, plus largement, l'institution du mariage (qui, à l'époque, enlevait tous ses droits à la femme). Au point où j'en suis de La Comédie humaine, je ne vois guère pour le moment que le Lys dans la vallée et Honorine qui, sur ces thèmes précis, soient aussi subtils et achevés. Les femmes des années 1830-40, comme le rapporta Sainte-Beuve (contemporain habituellement très critique De Balzac), ne s'y trompèrent d'ailleurs pas et reconnurent dans ce roman, dans lequel Balzac adopte avec beaucoup de délicatesse le point de vue de la femme, un remarquable plaidoyer en leur faveur. (À noter également qu'une quinzaine d'années plus tard, Gustave Flaubert traitera du même thème avec le génialissime Madame Bovary, auquel il donnera le sous-titre « Moeurs de province » en hommage à Balzac.)



Hélas, il y a ce cinquième chapitre (« Les deux rencontres »), dans lequel Balzac entraîne son lecteur dans une histoire aussi rocambolesque qu'invraisemblable (avec des pirates !), une histoire dont il reconnaîtra lui-même en 1843 (un an après l'édition définitive) qu'elle dépare complètement le roman : « Entraîné par la rapidité de l'impression, j'ai maintenu une oeuvre indigne de cette oeuvre [le fameux cinquième chapitre], qui est à remplacer en entier, à remplacer par autre chose, je l'ai vu. Mais il fallait paraître, et je n'ai pas eu le temps de refaire ce mélodrame indigne de moi. »



Mon conseil aux bibliophiles : Achetez La Femme de trente ans malgré ce fichu cinquième chapitre ! D'une part, ce « chef d'oeuvre définitivement abîmé » (dixit Ferdinand Brunetière, Histoire de la littérature française, 1905) n'en reste pas moins l'un des tous premiers plaidoyers féministes du XIXe siècle (dans lequel l'auteur entend « faire penser » son lecteur sur la condition de la femme et, au-delà, sur tout le système social), un plaidoyer d'autant plus nécessaire que la Révolution n'a finalement pas apporté grand-chose aux femmes en termes d'émancipation ; d'autre part, ce bouquin peut se trouver sans trop de problèmes dans le commerce pour à peine 1 €. Bref, même si vous n'en aimez vraiment que les trois premiers chapitres (les chapitres 4 et 6 ne sont toutefois pas si mal que ça), je vous assure que vous en aurez très largement pour votre argent.

Quant aux étranges créatures qui peuvent se passer de l'objet livre, elles pourront toujours le lire ou le télécharger gratuitement sur Wikisource (ou sur deux ou trois autres sites).
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La Cousine Bette

« Depuis le sommet de l'aristocratie jusqu'aux bas-fonds de la plèbe, tous les acteurs de sa Comédie sont plus âpres à la vie, plus actifs et rusés dans la lutte, plus patients dans le malheur, plus goulus dans la jouissance, plus angéliques dans le dévouement, que la comédie du vrai monde ne nous les montre. Toutes les âmes sont des armes chargées de volonté jusqu'à la gueule. C'est bien Balzac lui-même. »



Charles Baudelaire



Dotées d’une vitalité hors du commun, ces âmes comme des armes chargées de volonté jusqu’à la gueule poursuivent avec hargne, avec candeur, avec abnégation, avec détermination leur objectif. Objectif, le mot est faible, il ne rend pas justice à la sorte de folie qui anime et habite les hommes et les femmes chez Balzac. Attachés de façon absolue à l’une des grandes illusions de l’existence — l’amour, l’art, l’argent, la politique, la beauté, la jeunesse, la religion… — voués à une unique passion qui le plus souvent vire à l’obsession, ils se hissent à des sommets d’où les excès, une monomanie les poussant à aller trop loin, à en demander toujours plus, à tout sacrifier à leur cause, les précipitent dans le vide avec pertes et fracas. Leur passion, feu dévorant qui les stimule, les aiguillonne et les amène à se surpasser, est aussi ce qui les consume et les détruit. C’est ça, Balzac. Et c’est grandiose et pathétique, c’est hideux, c’est repoussant et c’est d’une beauté stupéfiante. Ça vous souffle dans les bronches, ça vous requinque un moribond, ça vous réveillerait un mort tant c’est plein de vie. Comme le dit Stephan Zweig avec un sens admirable de la litote, « Les hommes tièdes n’intéressent pas Balzac ». Ah ça non!



Je n’avais jamais relu Balzac depuis mes années de lycée. Le hasard du calendrier, un engagement pris avec mon amie Hélène (@4bis) que je tiens à remercier pour sa compréhension et sa patience, ont voulu que je me plonge dans la lecture de La cousine Bette au moment où j’étais clouée au lit par une vilaine grippe. C’est peu dire que cet auteur incroyable, traversant allègrement les deux siècles qui nous séparent, est parvenu à m’insuffler son énergie vitale. Il m’a littéralement portée pendant cette semaine éreintante. J’en aurais pleuré de reconnaissance. Certes, il y a des choses qui ont vieilli chez Balzac, un style parfois un poil grandiloquent, des situations un peu trop rocambolesques pour paraître réalistes, des retournements de situations un peu trop théâtraux pour paraître crédibles… mais quelle énergie! Et quel sens de la psychologie! À force d’étudier ses personnages sous toutes les coutures, d’en décortiquer tous les rouages, il les rend plus réels à nos yeux que ceux qu’on côtoie tous les jours, pâles ectoplasmes traversant furtivement notre existence.



Mais de quoi parle La cousine Bette, roman tardif, paru en feuilleton en 1846? Eh bien, je dirais des passions humaines déclinées sous toutes leurs formes, et c’est à peu près tout. Le contexte socio-historique est à peine ébauché, on y trouve très peu de digressions d’ordre artistique, sociologique, philosophique, on reste collés aux personnages et à l’intrigue pendant 540 pages, ce qui, personnellement, m’allait très bien.

Lisbeth, la cousine qui donne son titre au roman, vieille fille laide et désargentée, est tout entière habitée par une passion dévorante, une de ces passions tristes susceptibles d’engendrer malheur et désolation : le ressentiment. Mue par une jalousie féroce à l’endroit de sa belle cousine Adélaïde Hulot, une jalousie recuite qui plonge ses racines loin dans l’enfance, la Bette voue sa vie à l’accomplissement de son unique obsession : la vengeance. Mais si la vengeance est un thème récurrent en littérature depuis l’Antiquité jusqu’au dix-neuvième siècle, j’ai trouvé particulièrement originale la façon dont le traite Balzac. Bette se venge non pas de personnes qui lui ont fait du tort, au contraire, puisque la famille Hulot l’a extraite de sa campagne pour l’accueillir en son sein. Non, elle se venge à des décennies de distance des humiliations reçues dans l’enfance, quand on réservait à sa cousine Adélaïde, en raison de sa beauté, les tâches délicates quand elle, Bette, devait s’adonner aux rudes travaux des champs. De même, j’ai trouvé très intéressant que Lisbeth ne soit pas réduite au rôle de fruit sec desséché racorni par l’amertume, incapable de sentiments auquel l’intrigue semblait devoir la cantonner. C’est une femme de passion capable de tomber éperdument amoureuse d’un jeune réfugié polonais sans le sou qu’elle va littéralement faire renaître à la vie, puis bichonner et soutenir, enfin entretenir financièrement jusqu’à ce que l’ingrat, lassé de ses soins constants et tyranniques, ne lui échappe et épouse Hortense Hulot, la fille de la cousine honnie. Le coup est terrible pour Bette qui, dès lors, poursuit le cours de sa vengeance avec une vigueur renouvelée, mais cela ne l’empêche pas de retomber en amour, d’une femme cette fois, l’irrésistible Valérie Marneffe.

« Lisbeth, étrangement émue de cette vie de courtisane, conseillait Valérie en tout, et poursuivait le cours de ses vengeances avec une impitoyable logique. Elle adorait d'ailleurs Valérie, elle en avait fait sa fille, son amie, son amour ; elle trouvait en elle l'obéissance des créoles, la mollesse de la voluptueuse ; elle babillait avec elle tous les matins avec bien plus de plaisir qu'avec Wenceslas, elles pouvaient rire de leurs communes malices, de la sottise des hommes, et recompter ensemble les intérêts grossissants de leurs trésors respectifs. »



Quant à Valérie Marneffe, véritable coeur du roman, vortex dans lequel tous les personnages du livre semblent destinés à sombrer, elle incarne à elle seule l’objet de la passion. Devenu le bras armé et consentant de Bette dans l’accomplissement de sa vengeance, elle s’y adonne avec une rouerie, une bonne humeur, un naturel déconcertants. Mais là encore, si Valérie ne représentait qu’une Idée, la figure de la courtisane dénuée de tout scrupule qui ruine les hommes et leurs familles, ce serait certes édifiant, mais pas très intéressant. Ce qui est passionnant, c’est la façon dont Balzac s’attache à son personnage, nous décrivant sa coquetterie, son esprit, son élégance, sa beauté avec une telle minutie, avec une telle attention, une telle affection qu’il nous la ferait presque aimer en retour.

Comme Choderlos de Laclos avec sa marquise de Merteuil, Balzac campe un personnage particulièrement malfaisant mais grandement excusable. Ainsi que le résume le critique Hippolyte Taine, « Balzac aime sa Valérie ; c'est pourquoi il l'explique et la grandit. Il ne travaille pas à la rendre odieuse, mais intelligible. »

Et c’est pourquoi il me semble que ce livre, au-delà de l’indéniable plaisir qu’il procure, a encore beaucoup à nous dire.



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Une double Famille

En lisant une Double Famille, l'on peut comprendre pourquoi La Comédie Humaine est considéré par certain comme l'un des portrait les plus décapants de la société Française au XIXème siècle.



La vertueuse est punie, l'adultère est justifiée. Voilà comment il nous est possible de résumer cette œuvre, l'on ne mentirait pas en disant cela. Et pourtant! Balzac, comme il nous a habitué à le faire déjà, cherche à analyser la société en dévoilant les aspects essentiels qui la compose. L'on comprends donc bien que, malgré les apparences, la vertueuse est coupable et l'adultère inconsciente.



Angélique, par son éducation et son cœur janséniste tyrannise son mari malgré ses vertus extérieures. Elle ne le fait pas par un double jeu de sa part, mais comme une conséquence naturelle et morale de son être. En cherchant la vertu, elle s'évertue à mettre son mari sur ce qu'elle croit être le droit chemin et se faisant ne fait que de se l'aliéner.



Caroline, qui n'espère rien d'autre qu'un sauveur à sa misère. Pour qui l'horizon de son éducation ne permet pas de dépasser ses sentiments (n'oublions pas que la passion ne veut jamais avoir tord). Arrive donc à nier l'évidence même: Roger avec qui elle a deux enfants est déjà marié.



Ses enfants, dont l'avenir nous est dévoilé, n'est pas sans rappeler le caractère héréditaire et naturaliste dont Zola s'est fait le maître.



Enfin M. de Granville, personnage foncièrement bon mais qui par faiblesse de caractère, et par une sorte de variante moins héroïque que l'Adolphe de Benjamin Constant, persévère dans son malheur avec une femme qu'il entrevit dès le début comme néfaste pour lui. Persévérance qui dura jusqu'à la rencontre de Caroline.



Aussi bon qu'il puisse être, défiguré par la société et abandonné par la dureté de sa femme, il finira par se refuser à l'épanchement naturel de son cœur en faisant le mal pour le mal, à la stupéfaction d'Horace Bianchon. Grande leçon de psychologie pour notre meilleur disciple d'Hippocrate!



C'est une nouvelle essentielle à lire et qui aborde plusieurs types social encore courant dans notre société.





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Honorine

Honorine est l’histoire, absolument sublime, d’une femme qui, malgré les chagrins qui l’habitent, se croit libre et indépendante – elle ne dispose en fait que de la parcelle de liberté que la société (incarnée ici par l’époux et par l’Église) a bien voulu lui octroyer –, et de son mari, dont l’amour et le désir physique sont devenus au fil du temps une véritable obsession (à moins qu’il en ait toujours été ainsi et que ce soit justement pour cette raison que sa femme l’a fui…)

Impossible d’en dire plus sur ce très cours roman (ou cette longue nouvelle) sans en dire beaucoup trop et déflorer ainsi le dénouement. La revendication de liberté portée par Honorine, que son adultère semble paradoxalement avoir conduite aux sommets de la droiture et de l’intégrité, est d’une modernité tout à fait remarquable pour un texte écrit en 1843.

Curieux qu’un tel bijou ne soit pas plus connu…
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La Cousine Bette

Il ne faudrait pas revenir sur le théâtre de nos amours anciennes. Et encore, Honoré n’a pas été mon préféré. Quelle admiration j’avais pour Gustave, quel plaisir j’ai pris à dévorer Emile ! Oui mais voilà, tout passe. Ou plutôt tout change et il faut croire que mes lectures récentes ont tué Balzac et avec lui, l’affection que je lui portais. Lahire, Froidevaux Metterie, Bourdieu, Chollet et consorts, assasins !



La Cousine Bette est du côté sombre de la Comédie humaine. En existe-t-il un vraiment ensoleillé me demanderez-vous ? Le lys dans la vallée, les folles ambitions d’un Rastignac dans Le Père Goriot laissaient au moins croire qui à un amour heureux, qui à une ambition énergique porteuse d’avenir fructueux. Et les romans plein de fantastique comme La Peau de chagrin offrent le recours à un surnaturel jugement. Mais La Cousine Bette appartient aux « Scènes de la vie parisienne », cette section de 19 romans dont elle partage une sous-partie avec Le Cousin Pons au titre des « parents pauvres ». Elle est donc les deux pieds dans le réel, parfait rouage contribuant au vaste projet de son auteur de « faire concurrence à l’état civil ».



La Comédie humaine : 91 romans achevés, 48 ébauchés, entre 4000 et 6000 personnages selon les décomptes. Rien moins que l’établissement de tous les caractères humains classés selon leur appartenance sociale, leur tempérament et leurs lieux d’habitation. Une entreprise sociologique à la hauteur de ce qui fit Buffon et son Histoire naturelle pour la zoologie. Balzac écrit à Mme Hanska en 1844, trois ans avant la rédaction de Bette donc : « Quatre hommes auront eu une vie immense : Napoléon, Cuvier, O'Connell, et je veux être le quatrième. Le premier a vécu de la vie de l'Europe ; il s'est inoculé des armées ; le second a épousé le globe ; le troisième s'est incarné un peuple ; moi, j'aurai porté une société toute entière dans ma tête. » On retrouve la modestie proverbiale du bonhomme.



Allez, vas-y, mon Nono, prenons un exemple, explique-moi la vie : « En ceci peut-être consiste toute la différente qui sépare l’homme naturel de l’homme civilisé. Le Sauvage n’a que des sentiments, l’homme civilisé a des sentiments et des idées. Aussi, chez les Sauvages, le cerveau reçoit-il pour ainsi dire peu d’empreinte, il appartient alors tout entier au sentiment qui l’envahit, tandis que chez l’homme civilisé, les idées descendent sur le cœur qu’elles transforment ; celui-ci est à mille intérêts, à plusieurs sentiments, tandis que le Sauvage n’admet qu’une idée à la fois. ». Hum. Et cette pensée subtile s’applique à… ? La cousine Bette bien sûr, qui, depuis ses origines d’arriérée, ne peut pas avoir la lumière à tous les étages, ça se comprend… Mais ça vaudrait pour le baron Brésilien dont je ne vous ai pas encore parlé. Bah ouais, il est quand même un peu noiraud…. Bon… En fait, Nono, je préfère quand t’expliques pas(1). Ça promet une vraie partie de plaisir, ce roman... Mais mettons les choses dans l’ordre et faisons les présentations.



Nous voici donc avec Bette, cette solide vosgienne qui a le malheur de ne pas être belle, emportée à Paris à la suite de sa jolie cousine Adeline laquelle a fait un mariage d’amour avec le riche, brillant et volage baron Hulot. Bette est donc laide, pauvre et obstinée. Jetez à ce petit bois de prédispositions l’allumette d’un amour contrarié et vous en ferez un boulet de canon. La puissance qui ne peut s’épanouir en vertu se démultiplie dans la rancœur et la vengeance, postule et professe Balzac. Et pour que cette démonstration emporte avec elle d’autres illustrations de sa théorie sociale, pour qu’elle s’intègre dans la grande fresque de son « étude de mœurs », nous aurons 1) Adeline, une prude et admirable épouse immolée à sa famille et à sa réputation (l’impeccable Elvire de Dom juan version matrone ou la splendide Mme de Tourvel sans qu’elle ait jamais rencontré Valmont si vous préférez), 2) Hortense, sa fille, une tendre et passionnée jeune fille payant le péché d’avoir rusé pour assouvir son amour naïf (comprenez que la femme reste Eve, déchue et pécheresse donc, même - surtout ? - quand elle aime), 3) l’abominable Valérie, épouse au petit pied de l’insignifiant et corrompu Marneffe, belle à se damner - et elle le sait, la garce ! -, dont l’intrigue et la vénalité confinent au génie. Une que Balzac aimerait qu’on compare à Merteuil, et si je n’y suis pas parvenue, ce n’est pas faute qu’il me l’ait suggéré à moulte reprises, fin abominable comprise.



On comptera aussi a) un Comte polonais, Wenceslas Steinbock, artiste sculpteur aussi beau, jeune, idéal que velléitaire (Tragicomix dans La fiancée d’Astérix si vous voulez une image), b) un arriviste ancien boutiquier, le sieur Crevel, bourgeois gentilhomme façon 19e siècle, sans lustre et sans candeur, se réclamant du libertinage à la Louis XV quand son avarice de petit bourgeois le range plutôt dans la catégorie des tristes Harpagon. Le sommet d’une époque désespérante, quand les épiciers cupides ont fini de remplacer les héros émancipateurs. Quand les sombres manœuvres ont pris la place des grands desseins. Ajoutez-y c) le baron Hulot, déjà mentionné, tristement réduit - nous sommes chez La Bruyère cette fois - à un toupet qu’il met pour masquer ses cheveux rares, des favoris teints, un ventre que ne retient qu’un corset et des ambitions démonétisées de vieux beau aussi pathétiques que ridicules. Pour faire bonne mesure, mettez un peu d’exotisme facile et de racisme bien trempé avec d) le Maure qui sera ici Brésilien, baron de Montéjanos, richissime et premier amant de Valérie Marneffe ayant le double tort d’avoir abandonné la donzelle trois ans auparavant et de revenir quelques mois trop tôt avant que la belle ait liquidé, laissez-moi compter, son mari, ses deux, non trois amants ! Quatre avec lui ! Versez pour finir quelques utilités du monde des arts, des administrations comme autant d’arcanes capables de jouer le destin des personnages sur les deux seuls aspects ayant véritablement de l’importance à Paris : la renommée et l’argent. Et déroulez ! Ce sera cruel, ce sera sanglant, ce sera sans merci.



Alors quoi ? Pourquoi n’ai-je pas aimé ?



Parce qu’il en fait des tonnes, le père Balzac ! Non content de nous brosser des caractères selon les besoins de sa démonstration, de nous proposer une intrigue à désespérer le plus enthousiaste des optimistes, il faut encore qu’il pontifie, prophétique et péremptoire, qu’il assassine tout le sexe féminin à coup de phrases définitives : A propos d’Adeline, la Sainte de service, lorsqu’elle comprend que son barbon d’époux l’a trahie « La passion fait arriver les forces nerveuses de la femme à cet état extatique où le pressentiment équivaut à la vision des Voyants. Une femme se sait trahie, elle ne s’écoute pas, elle doute, tant elle aime ! et elle dément le cri de sa puissance de pythonisse. » Passez donc considération pour la capacité individuelle à jouer sa partition, liberté de penser et foi dans l’intelligence ! La femme est tragiquement, constitutivement fichue. Par son sexe, ses talents mêmes ne sont utiles qu’à la desservir. Là où l’homme désire, elle aime ou se vend. Là où il butine, elle se prostitue ou s’immole. Ou comment enterrer la moitié de l’humanité sous un tombereau d’hommages amèrement fleuris.



Vous me direz qu’il n’est pas tendre avec les hommes non plus. Certes mais lisez ce qu’il écrit par exemple à propos du baron Hulot lorsque ce dernier découvre que sa maîtresse, la démoniaque Valérie, le trompe avec l’affreux Crevel (entre autres), et jugez ensuite : « Les catastrophes poussent tous les hommes forts et intelligents à la philosophie. Le baron était, moralement, comme un homme qui cherche son chemin la nuit dans une forêt ». Voilà. Quoique sublime, la meilleure des femmes est damnée par son sexe, à l’image de toutes ses sœurs. Le plus lâche et lubrique des hommes reste lui en deçà d’une perfection, certes, mais cela n’entache en rien le reste de ses comparses, toujours appelés, eux, à prétendre à des idéaux philosophiques.



Juge et parti, voilà ce que je reproche à Balzac. C’est de son temps, Hugo, Zola et quelques-uns de leurs continuateurs ont, jusqu’à des époques pas si reculées, continué de nous assommer de leur vision du monde, colorant pour cela de leurs tristes opinions la peinture soi-disant objective qu’ils faisaient de leur siècle. On pourrait considérer donc la Cousine Bette comme un témoignage daté sur le monde, le résultat d’une certaine vision de l’écrivain, du rôle de la littérature et d’un talent à la mise en fiction romanesque. Ce serait, à ce titre précis, un très bon roman même si ses personnages ont plus à voir avec la charge d’une carricature qu’avec l’analyse psychosociologique la plus fine.



Ce que je n’admets plus aujourd’hui toutefois, c’est que, sur la base de son discours moral, on l’encense. Qu’on y applaudisse la peinture des mœurs passées comme si elle était objective et dépourvue de toute intentionnalité idéologique. C’est qu’on oublie qu’en l’étudiant, en le relisant et s’en délectant, on cautionne le monde qu’il dépeint et qui, sans l’existence de tous ces romans, de toutes ces œuvres de fiction corroborant un mercantilisme triomphant, une division des sexes à la défaveur des femmes, une hiérarchisation des humains avec les Occidentaux tout en haut, ne serait peut-être pas à ce point prédominant. Plus que simple peinture à visée moralisante ou critique, la Comédie humaine me semble avoir été, comme d’autres œuvres de son siècle, un précieux adjuvant à une idéologie patriarcale et capitaliste en train de se constituer. Vous me direz, l’œuf, la poule, qui de la Comédie humaine ou de l’idéologie capitaliste a fait qui ? Je vous l’accorde. Mais que cette œuvre soit conséquence ou cause partielle, on n’est peut-être pas obligé de continuer à lui faire tout ce crédit.



Est-ce que cela signifie qu’il faut déboulonner Balzac ? Naturellement non ! C’est un monument qui appartient à notre histoire. Pondérer sa lecture d’une analyse critique éclairée et la panacher d’autres œuvres moins colorées de cette orgueilleuse et délétère ambition, oui !



J’ai entrepris cette lecture sur l’impulsion d’Anna. Hélas, les circonstances ne nous ont pas permis cette fois de la suivre exactement au même rythme. Ses rendez-vous successifs avec des kleenex et des pylônes, mes propres aventures avec des bus scolaires enneigés et des frigos mystérieusement vidés se seront ajoutés à une différence initiale d’approche (elle a tout de suite adoré, en a fait une lecture plaisir, moi pesté, m’imposant de décortiquer les raisons de mon agacement, ce qui vous vaut cette micro critique, oui, je sais, je sais, moi aussi j’aimerais faire autrement parfois). Ca ne peut pas marcher à chaque fois et même s’il n’a pas été aussi plaisant qu’escompté, ce voyage commun avec la Cousine Bette m’aura bien dépaysée.



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(1) Pour ceux qui plaideraient le « autre temps, autres mœurs » et le tour déformant avec lequel notre regard contemporain peut indument exiger des hommes anciens une lucidité que la marche de l’Histoire ne leur autorisait pas, je rappellerais simplement la manière si humble et juste dont Montaigne, Jean de Léry, au 16e siècle donc, Montesquieu ou Diderot, au 18e siècle, envisageaient l’autre, qu’il soit noir, féminin ou sauvage.

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La Cousine Bette

Moi aussi je me serais laissé prendre dans les filets et séduire par la belle Valérie Marneffe. Est-ce sa faute, si elle a quatre prétendants tous plus transis et suffisamment benêts pour se croire chacun l'élu de son coeur ? Accordons les circonstances atténuantes au baron Hulot dont la passion des femmes agit sur lui comme une addiction dont il ne pourra jamais se défaire sa vie durant. Je n'ai pas été franchement séduit par ce roman dont les personnages et les situations me semblent caricaturaux. le livre porte le titre d'une des protagonistes de cette histoire, qui n'en est pas (à mon sens) le personnage central. On a quelque difficulté à se laisser prendre ou émouvoir par les acteurs de ce roman se déroulant à la manière d'une pièce de théâtre classique, l'unité de temps se dilatant sur une durée d'environ 7-8 ans. L'auteur de cette critique est un lecteur du XXIe siècle (l'eussions-nous cru ?) estimant que ce roman de Balzac est par trop daté et que cet écrivain d'il y a bientôt deux siècles souffre parfois mal la comparaison avec nos auteurs contemporains, moins auréolés de gloire parce qu'affrontant une sévère concurrence du livre. Mais ces contemporains savent aussi écrire des choses qui ont largement autant – si ce n'est plus – de valeur ou d'intérêt que certains romans de Balzac. Citons un écrivain remarquable, mille fois moins connue que Balzac, à qui il faut rendre justice : Anne-Marie Garat (pour sa trilogie Dans la main du diable). Et la liste des meilleures écrivaines n'en finirait pas si l'on devait les citer toutes, telles Marguerite Yourcenar, Jane Austen, Virginia Woolf, Elsa Morante, Yasmina Reza (pour le théâtre), etc. Faut-il écrire « écrivains » ou « écrivaines » s'agissant de romancières ? Si l'écrit est vain, alors la parole est vaine. Donc : écrivains au féminin.
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Le Père Goriot

Un très bon roman,

On entre très vite dans l’histoire, après quelques chapitres,l'intrigue devient captivante, et le livre se laisse lire sans aucun problème.

Balzac dépeint magnifiquement les caractères humains. Les thématiques sont très fortes : on y retrouve des intrigues familiales, on dénonce les injustices, les inégalités,...

L’auteur fait également une critique d’un certain arrivisme social.

J’ai apprécié retrouver l’ambiance et l’atmosphère du Paris de l’époque. Balzac manie l’art de la description à la perfection.

Un classique à lire !
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Le message

Deux jeunes gens font connaissance sur l’impériale d’une diligence . Ils se trouvent rapidement des points communs , surtout leur amour pour des maîtresses d’un « certain âge »… la quarantaine ! Leur entente est telle que lors d’un accident , l’un d’eux devra accomplir une mission à laquelle il ne se serait jamais attendu …

Une nouvelle très courte , une vingtaine de pages et des portraits très savoureux ! Des non dits plus parlants que des mots , bref un récit à chute très agréable à lire .

« Un point c’est tout. »
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Le Père Goriot

Écrire une critique sur un tel monument de la littérature me paraît futile tant de choses ayant été dites, écrites et débattues.

Aussi je me contenterai d'un humble avis, libéré du schéma scolaire imposé.

Je découvre en effet authentiquement, cette fois, ce cher Honoré à mon âge avancé.

Et je suis enthousiasmé.

- Tout d'abord, par son style et son art de la description. Un seul exemple très court: « Les bouches flétries étaient armées de dents avides ». Je n'aimerais pas partager mon déjeuner avec les convives de la pension Vauquer.



- Ensuite, par le caractère intemporel de la Comédie Humaine. L'époque a changé, certes, mais pas la nature humaine. « Parvenir » au temps De Balzac se traduit aujourd'hui par réussir.



Ce que l'on nommait morale ou vertu au XIXème siècle, pourrait se définir comme l'éthique dans notre société moderne. Et l'éthique est devenue éminemment plastique de nos jours!

Un chef d'oeuvre.

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La vendetta

Balzac dans cette nouvelle de 1830 entremêle l’art, l’amour, la passion, mais surtout la vengeance.



Par vengeance, je ne veux pas dire la loi du Talion. Non, bien plus que de rendre coup sur coup, les Piombo et les Porta se vouent une haine destructrice. La vengeance, ou plutôt la vendetta corse outrepasse les lois, même celles de Napoléon!



Pour l’art, Ginevra donne toute la passion et la patience que l’on attribue habituellement à cet âge à l’amant. Objet d’un amour paternel aussi fort qu’égoïste, Ginevra se voue à ses parents. Mais l’amour d’une Piombo avec un Porta vient tout basculer.



La passion dévorante succède à la passion enivrante. Cet amour que la société refuse, ce bonheur impraticable va mener Ginevra et Luigi à leurs pertes. Leur faute est leurs noms, leurs obstinations, mais aussi leur impossibilité de subsister. Qu’il est difficile de vivre à Paris, où coexistent le luxe et la pauvreté la plus éclatante.



Nouvelle riche dans sa variété des thèmes abordés, elle n’est néanmoins pas à bouder.
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Albert Savarus

Albert Savarus ou L'ambitieux par amour, 1842.

Court roman mais par lequel Balzac a tant à dire!



Ce roman à toute sa place dans les scène de la vie privée car "de tous les crimes secrets ensevelis dans les mystères de la vie privée, un des plus déshonorants est celui de briser le cachet d’une lettre ou de la lire subrepticement.". Par ce court extrait, la morale de l'histoire est exprimée. Conclusion sublime, épilogue mérité, chaque protagoniste reçoit son dû selon ses torts.



Thème central développé dans le roman: Comment bien fixer son ambition pour vivre heureux?

Balzac nous donne pour exemple trois objectifs d'ambition: un mariage pour faire fortune, une fortune pour faire mariage et une machination pour faire mariage. Il s'agit de placer l'horizon à bonne distance, ni trop ambitieux, ni trop content. C'est cela auquel tout les personnages du roman échoue si tragiquement, avec des fautes plus ou moins grandes, mais des conséquences à la hauteur de leurs fautes.



Le récit explore également les thèmes de l'amour, de l'ambition, de la trahison et des masques sociaux, offrant une analyse subtile des personnages et de leurs motivations.



Je le conseil à qui souhaite lire un Balzac un peu déroutant, car il faut bien l'avouer se roman imbrique plusieurs histoires l'une sur l'autre et peut surprendre par sa structure. Mais enfin, la forme est la fondation; elle porte le fond du propos de l'auteur, et rien n'est superflu chez Balzac!
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Louis Lambert - Les Proscrits - Jésus-Christ ..

L'importance de ces livres dans l'oeuvre balzacienne m'avait donné envie de les lire. Lecture qui me laisse assez dubitatif. Je ne sais pas si ce roman m'a plu ou pas. Fort différent de ses autres romans comme le père Goriot ou Eugénie Grandet. Balzac a-t-il voulu décrire les moeurs et croyances de l'époque? La doctrine de Swedenborg est en tout cas à explorer. Sans aucun doute, c'est du haut vol! Faut s'accrocher!

Une deuxième lecture est sans doute nécessaire pour comprendre. Pas conseillé pour commencer à lire Balzac.
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La duchesse de Langeais - La fille aux yeux..

Dans ce recueil, Honoré de Balzac met en lumière deux femmes évoluant dans un Paris mondain.



Au cœur d’un couvent Espagnol se cache une femme devenue religieuse. Pieuse et mutique, Soeur Thérèse cache un passé trouble. Derrière cette dévotion se dissimule une coquette, Antoinette de Langeais. Une femme à la beauté envoûtante qui règne sur les salons et côtoie les nobles familles du boulevard Saint-Germain. Pourtant, Antoinette a fui la vie mondaine. Un amour la relie à Armand de Montriveau, un marquis aventureux et passionné. Comment cette passion a poussé la Duchesse de Langeais à se couper du monde ?



La seconde nouvelle met en scène une autre femme, tout aussi mystérieuse. Lors d’une promenade aux Tuileries, Henri de Marsay un dandy parisien croise le regard d’une femme surnommée « La fille aux yeux d’or ». Elle est énigmatique et suscite l’intérêt du séducteur. Parviendra-t-il a la conquérir et à percer son mystère ?



Je n’ai malheureusement pas été totalement conquise par ce recueil. Si la plume talentueuse de Balzac dresse de beaux portraits féminins, je me suis perdue dans le fil narratif et je n’ai pas été complètement emportée par ces deux récits.
Lien : https://memoiresdelivres.fr/
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L'élixir de longue vie (précédé de) El verdugo

Sûrement les deux nouvelles de Balzac que j’ai le plus appréciées jusqu’à présent.



El Verdugo est une merveille de cruauté. En 1809, après la rébellion ratée d’une ville espagnole au nom imaginaire (mais qui pourrait être Santander), le général de l’armée napoléonienne décide de faire un exemple : les nobles de la ville seront pendus, et toute la famille du Grand d’Espagne possédant le château sera décapitée… par l’ainé de la famille. Balzac décrit à la perfection l’incroyable courage des membres de la famille face à la mort, et la brutalité des Français dont l’état-major continue à rire et manger pendant l’exécution. Les forces d’occupation sont conformes au modèle courant des conquérants, ressemblant aux Allemands de la seconde guerre mondiale ou à l’Empire de Star Wars (ou aux Espagnols eux-mêmes en terre américaines) : sans pitié, jouant de la terreur et jouissant de la violence sur les populations. Un seul Français, amoureux pathétique de l’ainée de la famille espagnole, montre des émotions que je qualifierais d’humaines (bien qu’elles le soient toutes). Une goutte dans l’océan.



L’élixir de longue vie est très différent. La nouvelle propose une biographie alternative, et quelque peu fantastique, de Don Juan. L’homme est en fait un noble du duché de Ferrare, en Italie, au XVIe siècle. Son père, sur son lit de mort, lui demande d’oindre son corps d’une eau miraculeuse quand celui-ci ne sera plus vivant. Mais Juanito est malin : il expérimente sur un œil et, au vu du résultat, garde la fiole pour lui, quand son temps sera venu. Il entame alors sa vie de séducteur patenté et d’opposant à tout ce qui fait la morale de son temps (voire de tous les temps). Cette nouvelle est une dénonciation sans nuances des êtres humains qui, sous des dehors honnêtes et généreux, cachent des sentiments égoïstes ou libertins. Les exemples des papes Alexandre VI et Jules II, croisés par Don Juan, ou des fils qui espèrent la mort de leurs pères pour hériter, sont éclairant. Face à ce comportement, Don Juan dit « soit » et décide de battre les hommes à leur propre jeu.

Je ne parlerai pas de la fin « miraculeuse », alors qu’il faut bien utiliser la fiole. La scène est assez horrible. Mais s’agit-il d’une punition ou de la dernière action d’éclat de Don Juan ?



Je regrette seulement la part conséquente prise par les notes de bas de page, qui parfois remplissent la moitié de ladite page.

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Le Chef-d'oeuvre inconnu

Ce court roman fait partie des études philosophiques de l’immense chantier de la Comédie humaine. Un peintre débutant y rencontre un collègue établi et un maître qui travaille depuis dix à un tableau qui sera l’apogée de sa carrière. On parle beaucoup de technique du portrait dans ce livre, mais, bien que je n’y connaisse strictement rien, ce n’est pas vraiment agaçant, d’abord parce que s’y cache une conception de l’art assez intéressante: “La mission de l’art n’est pas de copier la nature, mais de l’exprimer” comme dit le maître. Ensuite et surtout, la fougue avec laquelle Frenhofer énonce sa vision, la passion qu’il y met, les élans quasi mystiques qui l’emportent sont un délice en soi. Le conte n’est pas inoffensif non plus; le conflit de Nicolas entre son amour pour Gillette et celui pour son art fait réfléchir, de même que la fin abrupte questionne la relation entre ambition démesurée et folie. Bref, une courte, mais enrichissante lecture.
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Un début dans la vie



Un bien drôle mélange de personnages qui redoublent tour à tour de balourdises. Le gagnant de ce concours de maladresse est le plus bleu d’entre tous, Oscar Husson .



Un début dans la vie, qui est d’abord un roman d’apprentissage; apprentissage par la bêtise, la bévue, l’impair, bref de toutes les erreurs qu’il est donné à commettre.



Ses errances, jugées finalement fatal d’un caractère incorrigible , Oscar les commets, cela va de soi, contre l’avertissement de ses protecteurs (plus que) bienveillants. Toujours pardonné, notre chère Oscar ne paye pas moins amèrement ses leçons de vie qu’il tient peut être plus encore d’une faiblesse de caractère que de sa méconnaissance de la vie.



Faiblesse de caractère en effet, car tout les temps qu'il ne lui est pas permis d'échouer, Oscar brille plutôt bien dans les études et le travail. Mais, à la première opportunité, il sombre.



Oscar Husson apprends la discrétion, la probité, la hiérarchie sociale et l’obéissance à travers de foudroyants coups du sort (qu’il n’a pas volé). Mais il n’est pas le seul, tout les personnages voient leur destin se dévoiler et si la plupart sont médiocres, certains ont plus de chances que d’autres dans cet époque où les fortunes se font et se défont au rythme des magouilles, des tricheries.



J’ai apprécié le ton du livre, hautement ironique, peut-être bien jusqu’à plus soif. On découvre la France du XIXe siècle en voyage, celles des coucous et des voitures, que Balzac nous prédit déjà remplacé par les voies de chemin de fer et l’on découvre aussi une époque où la médiocrité s’accommode de la société et prospère.



Oscar, c’est le jeune homme naïf, l’homme du juste milieu, de la mesure, bref le bourgeois moderne sans aspérité qui creuse son trou à force d’échec cuisants et d’efforts vains.

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Les Chats : À travers 17 textes cultes comm..

"Les Chats" est un recueil de textes célèbres, une balade littéraire divertissante et instructive à travers les œuvres de Baudelaire, du Bellay, Dumas, Poe, Perrault, Carrol, Montaigne, Verlaine, Balzac, Renard, La Fontaine, Champfleury, Moncrif.



Textes commentés par Sylvain Trias à découvrir chez @VOolume grâce à l'interprétation de Simon Jeannin !



Pourquoi le chat s'en va-t-il tout seul ? Les chats anglais sont-ils vraiment les plus distingués ? Par quel prodige cet animal maléfique est-il devenu, au fil du temps, l'ami incontournable du monde de la culture ? Vous trouverez réponse à ces épineuses questions, et à bien d'autres, dans notre sélection de 17 textes cultes commentés et mis en perspective.



Je remercie @VOolume et @NetGalleyFrance de m'avoir permis cette écoute très agréable de trois heures que je n'ai pas vu passer. Cela m'a permis de (re)découvrir ces textes classiques qui rendent hommage à nos amis les chats, ces êtres si malmenés par certains et si adulés par d'autres. J'ai beaucoup apprécié découvrir l'image que la société portait sur eux et qui évolue au fil des siècles.



Le narrateur parvient à donner de la vivacité à ces textes anciens en les modernisant grâce à son interprétation très juste et son flux narratif fluide, ni trop lent, ni trop rapide, qui s'écoute comme une pièce de théâtre.



J'ai aussi beaucoup aimé le fait que ces textes soient commentés car cela ajoute une plus-value contextuelle qui permet une meilleure compréhension. Une façon distrayante d'aborder des textes classiques que je recommande aux amoureux des chats !

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