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Critiques de Jón Kalman Stefánsson (1124)
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À la mesure de l'univers

Car la littérature nordique, ce n’est pas que des polars…



La suite « D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds », une saga islandaise du 20e siècle.



Sur un coup de tête, Arni est parti vivre au Danemark et est devenu éditeur. Sur une lettre de son père mourant, il revient en Islande des années plus tard. Les événements se mêlent aux souvenirs de jeunesse, les amours, les amis et la société islandaise.



Un roman d’émotions et d'introspection, mieux vaut avoir lu le premier tome, car les histoires sont tout à fait imbriquées.



Une belle écriture (chapeau à la traduction), un roman intense, de plongées dans l’âme humaine et de réflexions sur le destin.

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D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds

Après avoir lu les précédents ouvrages que J.K Stefansson j'avais mis de côté ce livre, laissant trainer un plaisir anticipé tant m'avait émue l'histoire du gamin. C'est avec beaucoup d'entrain et d'attentes que je me suis mis à l'ouvrage.

Tout de suite j'ai retrouvé le style si particulier à l'auteur qui m'a de nouveau emporté.

Bien que la poésie soit toujours présente dans son texte, le sujet ici traité, la vie d'Ari et son environnement familial ne m'a pas parlé. J'ai dû louper quelque chose, en tout cas la mayonnaise n'a pas pris, je suis resté en suspend au dessus du texte, impossible de m'en pénétrer comme dans les précédents ouvrages... je ne pense pas que ce soit la construction du texte, ni les va et vient temporels, mais plutôt que je n'ai pas trouvé le sens que J.K Stefansson a voulut donner à son roman, ou peut être y a t-il trop effervescence pour faire émerger en moi quelque chose de significatif.

Je ne renonce pas pour autant, je referme le livre en le retournant dans ma pile de bouquins à lire avec la sensation que je le reprendrai dans quelques temps. Çà ne devait pas être le bon moment.
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D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds

« Jon Kalman Stefansson entremêle trois époques et trois générations qui condensent un siècle d’histoire islandaise. »

Cette phrase reprise dans la quatrième de couverture peut résumer ce roman. Mais il mérite un peu plus que ça. Avec J.K. Stefansson, je sais que je vais passer un bon moment. Son style d’écriture m’enchante ; j’ai l’impression de lire un classique mis au goût du jour, avec de la poésie, de la pudeur. Même lors des scènes dures, violentes, cela n’enlève rien à leur intensité.



Trois générations dans lesquelles je me suis perdue parfois. Peut-être, sûrement, parce que ma lecture a été trop souvent interrompue ces derniers temps. Mais quel plaisir de ressentir la profondeur des personnages. Et les grands moments de la vie politique de l’Islande, sans être détaillés à l’excès apparaissent à travers les dialogues. Et l’on sent toutes les implications et les chamboulements pour chaque protagonistes. L’implantation des Américains pendant plus de 40 ans a modifié le paysage en amenant le béton pour la construction d’un aéroport, d’un hôpital, quelques routes et infrastructures, mais uniquement dans la région du sud-ouest de l’île, ce qui ne représentait qu’un très faible pourcentage de sa superficie. Elle a aussi modifié les mentalités, les « pour » qui bénéficiaient d’un travail et les « contre » qui ne voyaient que l’aspect colonisateur de leur île et de sa richesse en poissons. Après le départ des Américains, qu’en est-il resté ? Des infrastructures abandonnées, l’absence de travail, mais surtout des accords gouvernementaux instaurant des quotas de pêche et des zones d’interdiction pure et simple de pêcher dans les eaux islandaises, entraînant comme on s’en doute misère, alcoolisme, départ de nombreux insulaires vers la capitale et renoncement à un métier pourtant inscrit dans leurs gênes.

Un très beau roman dont le côté social est traité avec beaucoup de finesse.

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Ton absence n'est que ténèbres

Lecture abandonnée après 100 pages d’ennui, à la lecture desquelles je me suis demandée, une fois n’est pas coutume, ce qui avait bien pu provoquer l’enthousiasme de François Busnel et de tant d’autres…



Décidément, la rencontre entre un livre et son lecteur est une mystérieuse alchimie, dont il est difficile de savoir pour quelles raisons elle se crée ou non.



C’est toujours frustrant pour moi d’abandonner une lecture (je le fais très rarement) mais mon temps libre se fait si rare que je ne souhaite pas le « gaspiller » à me contraindre à lire des ouvrages qui ne m’ « embarquent » pas (singulièrement lorsqu’ils sont épais de 600 pages, comme c’est le cas en l’espèce)…



A tord ou à raison, j’ai récemment décidé de laisser l’obstination à des temps futurs lointains aux vents plus favorables qui m’offriront, qui sait, la possibilité de faire cet effort intellectuel (nécessaire?) de pousser l’exercice jusqu’à son terme avant d’oser jauger une œuvre.



Quoiqu’il en soit, ce ne sera pas pour cette fois-ci.
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Ton absence n'est que ténèbres

Un homme amnésique à la recherche de son identité…et de son passé, rencontre une femme qui le connait mais dont il ignore tout. Et il va l’inciter à parler. D’histoire en histoire se dessine le destin d’une famille et de leurs proches, le visage de ces ancêtres dont ils portent les gênes et sont les fruits de leurs choix. Car tous ont été confrontés à l’amour, aux lois cruelles de son implacable diktat, déchirés entre le désir de rester et celui de partir ; habités parfois par l’envie d’un ailleurs loin de leur île isolée, où les journées d’été se font rares, les hivers terribles ; entrainés dans des rêves lointains guidés par la contemplation des étoiles et de la mer, la poésie mais aussi par l’oubli que procure l’alcool…Peuple de paysans et de poètes, menacés par Bacchus et la mélancolie, mais toujours nostalgiques de leurs fjords lorsque parfois ils partent au loin. Comme l’aïeule Gudridur exilée aux Etats Unis suite à un amour impossible ou son arrière-arrière-petit-fils, Eirikur qui fuit à Marseille cette malédiction familiale et le secret de sa naissance.



Malédiction ou bien tragédie de la destinée humaine, Jón Kalman Stefánsson, à travers l’histoire de plusieurs générations, en saisit à la fois la continuité et l’évolution, les contradictions et les choix difficiles, évoquant la condition féminine, l’homosexualité, l’alcoolisme, mais aussi la force de l’amour, dans une prose toujours aussi poétique. Un peu difficile à suivre parfois car le texte est écrit en spirale, l’écrivain, l’homme sans mémoire, se mettant au service de la mémoire des autres pour nous conter la vie de ces morts et de ces vivants unis par ce lien mystérieux de l’hérédité, tous façonnés par la même terre et les mêmes horizons. Ils préparent une grande fête en l’honneur de la vie, de l’amour, de la mort, pour laquelle ils ont réuni une compilation de la Camarde, ensemble des musiques marquantes de ces destins mêlés.

Encore un très beau livre, malgré quelques longueurs, un hommage à l’existence humaine et à la terre qui la porte, quelque soient les chemins dans lesquels elle se perd et malgré la mélancolie qui l’assaille parfois.

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Ásta

La superbe trilogie de J. K. Stefansson découverte précédemment décrivait le combat de l’homme face à une nature plus forte que lui.

Asta relate le combat d’hommes et de femmes face à leurs démons intérieurs, le combat pour une vie simple et digne, sur une terre qu’il faut apprivoiser. Ici, les rêves n’ont pas leur place. Et quand on les laisse s’infiltrer dans l’esprit comme la brume qui avance pas à pas, il reste peu de choix sinon partir ou se noyer dans l’alcool. Ou chercher l’amour libérateur.



Un très beau roman qui se lit et se délit comme des pelotes de laine toutes mélangées mais qui, au final, dévoilent des vies entières. Les livres et la poésie viennent en toile de fond comme si les mots, qu’ils soient lus ou écrits, faisaient parti d’eux et leur apporte force ou désespoir.



Quelques passages m’ont frappé dans ce roman. Lorsque, dans des conversations, il est question du touriste prêt à payer une fortune pour goûter pendant quelques jours à la vie rude que la terre et le ciel réunis engendrent. Incompréhension de leur part... L’Islandais serait-il devenu une bête curieuse que l’on paie pour s’en approcher ? S’en suit évidemment la joie du profit.



Et je m’interroge.

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Le cœur de l'homme



Holà ! Qui va là ? Etes-vous vivant ou défunt ?

Je serai bientôt défunt si vous n’ouvrez pas la porte !

Jens, le postier, tambourine à la porte de la ferme perdue au milieu des montagnes, enveloppée de neige, muette face aux sifflements aigus du blizzard. Ce géant d’1 mètre 90, aux sourcils et à la barbe constellés de glace, est accompagné d’un gamin. Le gamin dont on ne connaîtra jamais le prénom. Mais qui sont-ils ? Et que font-ils en pleine tempête ? C’est un véritable périple que de distribuer courriers, livres et journaux dans les villages et hameaux les plus reculés. Et quand la neige cesse de tomber et que les vents s’endorment, le brouillard vient les remplacer. Un brouillard tel que si l’on tend le bras, on ne voit plus sa main.



Le gamin a tout perdu. Père, mère, sœur et plus tard son unique ami avec qui il récitait des vers qui les éloignaient, au moins en pensée, du dur labeur de pêche. Ce pourquoi, il part. Recueilli par une femme indépendante et libre de ses mouvements, il obtient gîte et couvert contre services et travaux. Le gamin n’est pas fait pour avoir les mains calleuses ni pour s’endormir comme une masse après la journée de travail et il est mal vu des pêcheurs à qui il a tourné le dos pour aller vers un ailleurs.

Mollasson ! Bon à rien ! Même pas un homme ! Il en a l’habitude mais rien ne le détourne de son amour pour les livres. Ce ne sont pas des mots qui vont remplir ton assiette ! Tout ça, c’est pour les mauviettes.

Les marins durs, travailleurs, exténués et incultes se vautrent dans l’alcool, véritable fléau d’où il n’en sort que bassesse, vulgarité, violence. Violence physique envers les femmes, les faibles, les sans défense, violence verbale envers les fortes, celles qui ne suivent ni convenances ni lois, vilipendées par la communauté.

Violence aussi envers les Danois, l’envahisseur depuis presque mille ans. Et ces Norvégiens, installés dans les fjords, donnant du travail à quelques centaines des leurs dans la pêche à la baleine, dont les carcasses éventrées, exposées au vent et au soleil attirent mouches et puanteur.

Le gamin est en perpétuel questionnement. Est-ce que les idées que font naître les mots vont nourrir la famille ? Que faire à part pêcher, profiter de ce que la mer offre ? Les hommes sont en mer tandis que les femmes nettoient les poissons et les font sécher au soleil. Tous, exploités pour une bouchée de pain. Mais que dire au nabab du village lorsqu’il fournir le travail à deux mille personnes ?

Il n’y a que les montagnards qui troquent leur liberté contre une solitude bien pesante. Eux vivent de ce que la terre donne. De magnifiques pâturages pour leur élevage de moutons, quand ils ne sont pas prêts à se rompre le cou en escaladant les falaises pour récolter quelques œufs de macareux, qu’ils transportent en civières jusqu’aux villages, pour quelques sous.



Le gamin se sent inutile. Et pourtant… Sa sensibilité, sa soif de connaissances, son intelligence lui apprendront le coeur de l’homme. Comme il peut très vite se changer en pierre dans ces contrées si dures et sauvages. Il saura percevoir la petite étincelle dans le coeur de certains qui sont persuadés qu’elle n’existe plus ou qu’il est inutile de la raviver. Mais les mots ont cette force. Et l’étincelle devient flamme. Une flamme qui réchauffe et donne envie de s’en rapprocher. Hommes et femmes qui jamais n’auraient osé avouer leur amour des livres, de la poésie, de la musique, se rapprocheront. Et ça, c’est au gamin qu’ils le doivent.



« Entre ciel et terre », « La tristesse des anges » et « Le coeur de l’homme » constituent un seul et même livre et l’avoir divisé en trois en facilite la lecture. Je vous conseille de vous munir des trois avant d’entamer l’histoire du gamin et éviter la frustration des fins abruptes des premier et deuxième tomes. Pour ma part, j’ai enchaîné sans hésiter la lecture des trois et choisi de n’en faire qu’une seule critique.

Avec sa plume terriblement poétique, l’auteur rend hommage à ces hommes et ces femmes qui ont forgé le pays et, bien sûr, aux livres qui élèvent l’Homme.

J’ai trouvé cette trilogie magnifique  et prenante; ce n’est pas qu’un roman, c’est beaucoup plus que ça.

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Entre ciel et terre

Quelque part au Nord, entre ciel et terre, une île.

Des falaises abruptes sous un vent glacial, des roches volcaniques cernées de flots capricieux : voilà l'Islande.



Et pour nous raconter l'Islande, qui de mieux que Jón Kalman Stefánsson ?

Qui d'autre pour tout nous dire de cette terre sauvage et inhospitalière, pour nous soumettre alternativement au froid polaire des bourrasques et au feu ardent qui brûle dans le coeur des hommes, qui pour nous plonger dans cette lumière unique, "capable de te transpercer et de te changer en poète" ?



Une fois encore, le génial conteur islandais nous propose là un trés beau roman, soigneusement concocté sur la base de ses ingrédients fétiches (et largement éprouvés !) : beauté des paysages et finesse des descriptions, personnages à la fois farouches et sensibles, pétris d'espoirs et de rêves contrariés, introspections puissantes et très imagées, réflexions sur la mort et le sens de la vie... Divin mélange s'il en est, et teneur en poésie 100% garantie !

Pas de véritable surprise, donc, pour qui connaît un peu le bonhomme, mais un plaisir de lecture intact et toujours renouvelé !



Cette fois l'auteur nous transporte au début du siècle dernier. Il commence dans la première moitié du texte par nous faire partager le quotidien de six valeureux pêcheurs de morues, liés par une indéfectible camaraderie et habitués aux conditions extrêmes des périlleuses sorties en mer. Bien sûr Stefánsson sait y faire, et immédiatement le lecteur se trouve lui aussi embarqué sur leur frêle esquif, cramponné au banc de nage face aux embruns glacés.

Il est ainsi aux premières loges, transi avec eux, quand survient le drame. Pour s'être laissé prendre par la beauté d'un poème de Milton, tiré d'un ouvrage qu'on lui avait prêté et qu'il a souhaité relire encore au matin de l'expédition, le vaillant Bárður a laissé sa vareuse au dortoir. Funeste oubli sous ces latitudes ! Bárður n'a pas survécu, il est mort de froid, mort d'avoir laissé sa passion des mots prendre le pas sur sa rigueur de matelot.

Son jeune et brave compagnon, dit "le gamin", ne s'en remettra pas. Tournant le dos à la mer, il prend la route pour rapporter le fameux recueil de poésie à son propriétaire, un vieux capitaine devenu aveugle, et la seconde partie du roman est le récit de son voyage. Aux magnifiques peintures des panoramas rencontrés, Stefánsson ajoute avec beaucoup d'à-propos des portraits de marins, de villageois - ici un commerçant, là un pasteur ou un notable local - et de quelques fantômes aussi...

C'est donc toute la vie d'une petite communauté insulaire qui se dessine sous nos yeux, avec ses drames, ses passions et ses mythes, et toujours en filigrane le souvenir des pêcheurs disparus, eux qui "pleurent comme pleurent les noyés" (n'est-ce pas d'ailleurs pour ça que la mer est salée ? s'interroge le poète).



Entre ciel et terre est donc une méditation d'une grande délicatesse sur le deuil et la renaissance, sur le pouvoir des mots et sur l'amitié (ou peut-être l'amour ?) par delà la mort.

Une bien belle entrée en matière pour la suite de la trilogie ... mais n'allons pas trop vite en besogne, et savourons comme il le mérite ce premier volet très réussi.

Si vraiment "le silence qui s'installe au terme d'une longue histoire nous apprend si elle a atteint son but ou si elle a été racontée pour rien", alors trêve de blabla et que Stefánsson se rassure : avec ce premier tome, le but est plus qu'atteint.

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Ton absence n'est que ténèbres

Tout commence il y a 120 ans par une lettre , un article scientifique sur les lombrics , c’est le destin qui se met en route , c’est l’amour , le saut dans le vide qu’est la passion mais aussi le manque , la trahison , le doute .

Il y a deux sortes d’hommes , ceux qui résistent à leurs passions , qui vivent des vies un peu figées mais qui s’ancrent profondément dans leur quotidien , qui obtiennent des racines solides qui soutiennent leurs familles quoi qu’il arrive , d’autres écoutent leurs cœurs et provoquent des secousses , elles aussi nécessaires .

Il faut la cohabitation de ses deux sortes d’hommes pour que le monde fonctionne .

Quoi de plus banal qu’un article sur les lombrics et pourtant tant de choses vont changer sur plusieurs générations .

Merveilleuse saga islandaise où la vie et la mort se croisent sans arrêt , l’amour et la tristesse auront une fin , tout a une fin dans ce monde .

Il y aura toujours , l’espoir , un nouvel amour et le temps qui passe .

Coup de cœur de ce début d’année 2022 , un roman comme je les aime , très bien construit , très bien écrit , sans pathos mais avec une large palette de nuances .

Première rencontre avec l’auteur islandais Jón Kalman Stefànsson mais pas la dernière .

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Le cœur de l'homme

Ce livre représente le dernier Tome de la trilogie de J.K Stefansson.

Il fait suite à la traversée du gamin et du facteur dans les étendues neigeuses Islandaises. Le temps est venu pour lui de se poser et de faire le point sur ses sentiments et tout en se questionnant sur l'existence et l'avenir, il dessine le sien par les expériences.

Il doit choisir entre un avenir fantasmé par un désir qu'il ne comprend pas et qui l'habite intensément et l'image obsédante d'une jeune femme qu'il se construit comme beauté naturelle.

Toujours entouré de son groupe de marginaux bien plus stratège qu'il n'y paraissait, il se bat avec eux pour pouvoir continuer à vivre dans les lettres et l'instruction et échapper aux stratagèmes des puissants.

Je salue le travail fantastique d'Eric Boury qui a traduit si magnifiquement ses trois tomes pour en faire ressortir toute la beauté de l’œuvre. Ce fut une rencontre émouvante avec cet auteur et l'ambiance poétique qu'il rend omniprésente tout au long de son récit. Après ces lectures, j'ai eu beaucoup de mal à reprendre un livre, l'esprit occupé par les images, les idées et le style.

J'espère pouvoir faire d'autres rencontres d'auteurs procurant de semblables effets rapidement!
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D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds

Ari revient, à la cinquantaine, de nos jours, en Islande après avoir passé plusieurs années au Danemark où il devenu éditeur. Il est porteur d'un petit colis contenant le diplôme d'honneur décerné à son grand père, capitaine de bateau de pêche et d'une lettre adressée par son père lui annonçant son décès prochain.

Après avoir évité la mort en mer Oddur jeune homme intrépide rencontre Margrét, jeune fille, revenant du Canada...

1976-80, le village doit faire face au départ de la base américaine, véritable poumon de la ville et Ari a trouvé un travail qui ne le passionne pas dans une conserverie de poissons...

Trois époque de la vie de la famille d'Ari, de celle de ses grands parents Oddur et Margrét....trois époques de la vie de l'Islande, de sa richesse grâce à la pêche, grâce aux américains et à la guerre froide, jusqu'à nos jours en passant par sa chute et sa faillite, faillite du pays mais enrichissement de certains qui ont vendu les quotas de pêche à l'étranger....

Trois époques que l'auteur mêle, qu'il abandonne pour y revenir....La vie d'Ari qui fouille dans ses souvenirs...un souvenir en amenant un autre...des allers retours permanents.....mais de grands absents dans cette vie : ses parents....L'auteur ne nous en parle pas....ce n'est certainement pas anodin. Nous prépare t-il quelque chose?

N'espérez pas lire ce livre dans le métro, dans un train, en levant le nez pour regarder de temps en temps le paysage...non, c'est un livre qui se mérite, à lire au calme. Mais que de poésie dans la description de la vie rude de ces marins, de leurs conditions de travail, de ces autres aspects de l'Islande décrite déjà dans "Entre ciel et terre", dans la description de la ville de Keflavik, de sa tristesse."Cette ville qui a perdu son quota de pêche, perdu sa base militaire, et où il n'y a pas grand chose à voir, si ce n'est du chômage, de vieux filets en lambeaux, le souvenir d'une armée, de l'argent disparu, et deux norvégiens à tête de couperet."

Que serait l'Islande sans ses pêcheurs, la mer -"Être en mer, c'est être en vie" - ses tempêtes, sans le froid, ses paysages de cendre noire volcanique...ses fjords....Quand c'est décrit par Jón Kalman STEFÁNSSON et traduit par Éric Boury, on a envie d'y goûter...

Souvent pour introduire une période Jón Kalman STEFÁNSSON, nous livre ses réflexions sur la vie, la vérité, l'environnement, le bonheur, les enfants, toujours empreintes de beaucoup d'humanisme.

Difficile parfois, "D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds" sera certainement dénigré par ceux qui certains, mais adoré par ceux qui ont envie de voyager dans le temps, dans l'espace, de se confronter à la rudesse de ce pays, de cet auteur


Lien : http://mesbelleslectures.com..
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La tristesse des anges

Islande, XIXe siècle, après « Entre ciel et terre » dans lequel un gamin affrontait la mer et la perte cruelle de son mentor, Jon Kalman Stefansson invite son lecteur à le suivre dans les landes désolées du Nord de l’Islande, figées dans un hiver glacial. Le gamin (le même) s’est réchauffé le corps et le cœur dans un foyer accueillant mais il va repartir pour épauler Jens le postier, qui ne peut affronter seul les fjords dangereux dans sa tournée du Nord.

Arc-boutés contre le vent qui souffle en tempête, la neige qui s’abat sans discontinuer, le froid glacial qui les étreint, le gamin et Jens font face aux éléments, déterminés à livrer le courrier au péril de leur vie.

Dans la même veine que « Entre ciel et terre », l’auteur poursuit sa quête sur le sens de la vie, la stérilité d’une existence exempte d’amour et offre au lecteur ébloui des pages sublimes et glacées, pleines de poésie et de questionnement philosophique. C'est très beau.

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Entre ciel et terre

A proximité du cercle polaire, à l’extrême limite du monde, dans une cabane de pêcheurs, est étendu Bardur. Son corps est froid, ses yeux sont vides, et le gamin le pleure. L’hiver, la mer, la tempête ont eu raison de cet homme passionné de livres et de poésie. Le gamin ne sait plus quel sens donner à sa vie, ni où est sa place… Avec le souvenir de son ami pour seule chaleur, il se rend au village et décidera alors de son avenir…



Cette première rencontre avec l’univers de Jon Kalman Stefansson a été pour moi assez réussie. Je me suis laissée porter par son écriture poétique, imagée, sensorielle.



Entre terre et ciel donne la parole à un jeune garçon, que la mort a frappé bien trop souvent déjà. Alors qu’il a perdu ses parents et sa sœur, il forme un binôme lumineux avec Bardur, un gaillard solide et courageux. Ils sont ensemble sur les routes, au fond d’une barque de pêcheurs ou tête bêche sur le matelas d’une cabane. On ressent toute l’amitié, l’admiration et la tendresse qu’ils éprouvent l’un pour l’autre.



La mer assure leur subsistance, c’est elle qui les nourrit. Mais c’est de mots, de poésie, d’histoires, qu’ils vivent. Ce sont les livres, empruntés au village, qui leur donnent la force de combatte les conditions difficiles qui bercent cette partie oubliée du monde.



La langue et la mélodie de l’auteur forment comme une ritournelle qui nous berce doucement. C’est bien au chaud, au cœur de cette histoire, que nous fabriquons à notre tour, le souvenir des mots qui font de nous les lecteurs que nous sommes…



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Ásta

Le récit d'une vie, celle d'Ásta, de sa naissance dans les années 50 à ses vieux jours, et l'auteur nous convie « dans l'univers qui la voit naître, [...] cette atmosphère, cet air du temps qui retient le ciel [...] ».



Ásta sans sa lettre a finale signifie amour en islandais, et dans l'esprit de la maman d'Ásta, Helga, il « était censé leur rappeler et signaler au monde à quel point l'amour est toujours à porter de main toujours ».

Un doux et beau voyage comme sait nous les proposer Jón Kalman Stefánsson. Une plume qui m'a conquise depuis un moment déjà, et qui me ravit encore aujourd'hui.

Une construction originale et l'auteur lui-même nous rappelle qu'il « est impossible de raconter une histoire sans s'égarer, sans emprunter des chemins incertains, sans avancer et reculer , non seulement une fois mais au moins trois--- ---car nous vivons en même temps à toutes les époques ».



🎶🎶 Quand va et vient

Le paradis des uns et des autres

Quand va et vient

Le courant qui nous mène jusqu'à l'autre 🎶🎶

Stéfi Celma



J'ai regardé ces vies au creux des vagues qui s'enroulent, au travers d'un œilleton brillamment manipulé par Jón Kalman Stefánsson. J'étais la Norvégienne aux côtés de Sigvaldi, et je l'ai écouté me raconter toutes les petites choses de la vie, les souvenirs, les émotions, les sentiments, les relations fraternelles, les fuites, la mort, la joie, le bonheur de vivre, des réflexions sur le rôle de la littérature, de la poésie, sur la politique de l'Islande, sur l'environnement, la mélancolie, la tristesse, la découverte de l'amour, l'amour dans toute son ivresse charnelle et psychologique, l'aventure de l'amour, ses premiers émois, ses désillusions, ses tourments, ses difficultés, ses peurs, ses joies et ses tristesses quand l'amour perd de sa tiédeur, qu'il s'affadit, qu'il s'égare ...



« Face au jour qui, véloce, décline, les tourments t'enseigneront que les hommes connaissent amour, deuil, larmes et douleur. »



J'aime définitivement sa plume, et celle du traducteur.



« On dirait parfois qu'un seul et même chemin

mène au bonheur et au désespoir

- mais à part ça, tout va bien, non ? »



Les histoires contées par Jón Kalman Stefánsson, empreintes de sagesse et de philosophie, sont « trop puissantes pour sombrer dans l'oubli. Ou peut-être trop vraies ? Trop douloureuses ? »



« Souvent, nous ne voyons que ce qui est grand et saillant parmi une foule de détails, nous oublions de regarder ou d'écouter l'infime. [...] Peu de choses sur terre sont plus belles que la discrétion, quand elle s'accompagne de douceur et non de soumission. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Ásta

Un roman très travaillé, poétique et dur qui nous amène dans les fjords de Norvège et à Reykjavik .L’histoire est celle d’Asta mais aussi de de Sigvaldi, d’Helga et des autres.On y parle d’amour sous toute ses formes:paternel, maternel, fraternel ou filial, passion amoureuse

Par choix , il n’y a pas de chronologie, ce qui rend la lecture difficile et , pour moi, plutôt exaspérante. Le style est excellent malgré quelques platitudes toutefois moins fréquentes que dans un de ses précédents romans D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds

Je cite « Son cœur bat si fort qu’on dirait qu’il veut s’échapper de sa poitrine.« 

Malgré cela, le roman est rempli de fulgurances littéraires magnifiques et il faut associer le traducteur à la réussite de cet ouvrage souvent sombre comme le climat de l’Islande

Ce pays que , clairement, Stefánsson n’apprécie pas beaucoup si on se réfère à ses autres romans.Un pays pluvieux, lugubre où l’alcool est obligatoire pour survivre malgré les aurores boréales et la beauté des paysages à la belle saison.Un pays pour touristes pressés mais difficile pour les habitants du cru

Je pense que les avis peuvent être partagés sur ce roman.Soit vous adhérerez à l’écriture complexe et poétique de l ‘auteur, soit , comme moi, vous serez gênés par l’absence de chronologie qui nuit à la fluidité de la lecture et au plaisir qu’on peut en tirer



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D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds

il m'aura fallu attendre la page 376 pour comprendre le titre de ce très beau roman de Jon Kalman Stefansson (pardonnez l'absence des accents).

Nous suivons le retour d'Ari en Islande après deux années passées au Danemark.C'est un message de Jakob, son père, qui le décide à rentrer.La quarantaine approche et ce retour va être pour Ari le moment de faire le point Arrivé à ce moment charnière ,Ari se doit de faire le bilan des années écoulées et peut-être enfin voir clair dans ses choix pour le futur . Comment essayer de comprendre ce que l'on est si l'on ne fait pas l'effort de savoir d'où l'on vient.Ari va donc nous entrainer dans le passé de sa famille et par la même occasion dans le passé de cette terre d'Islande.Oddur et Margret ses grands-parents , la fin du 19ème siècle, Jakob et sa belle-mère , les années 1980, les années de sa jeunesse, des premières musiques en provenance des USA, la base américaine de Kéflavik qui a apporté argent, prospérité et modernité à cet endroit réputé le plus noir du pays!

Il m' a certes fallu quelques pages pour "capter" l'écriture de Jon Kalman Stéfansson mais ensuite je me suis laissée séduire . Certes la mélancolie est présente à chaque ligne, certes le bonheur file entre les doigts, la vie est dure,l'alcool trop souvent présent,la femme mal considérée mais tant que la musique est là il y a de l'espoir.

Au final un roman émouvant, triste ou plutôt mélancolique paré d'une très belle écriture , à souligner la remarquable traduction d'Eric Boury

Un très grand merci aux éditions Gallimard et à l'équipe de Babelio pour cette belle découverte
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Entre ciel et terre

Précision : l’orthographe des noms et des lieux n’est pas celle du livre, mais je n’ai pas les caractères nécessaires pour les transcrire exactement.

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Pour s’être mis en tête de retenir quelques vers du Paradis perdu de Milton, le pêcheur Bardur a oublié sa vareuse. En pleine mer, par un matin de tempête glaciale, cet oubli est fatal et Bardur meurt de froid sous le banc de la barque de pêche. « Un homme sans vareuse se retrouve ruisselant en un temps infime, le froid s’empare de lui comme un étau et ne le lâche plus, en tout cas, pas ici, en pleine mer. » (p. 92) Cette tragique disparition bouleverse le gamin, jeune pêcheur de 20 ans, indéfectiblement lié à Bardur. Le gamin décide de rapporter le livre maudit à son propriétaire, un vieux capitaine aveugle. Pendant sa marche dans la neige, il se résout à mourir une fois sa mission accomplie, afin de retrouver son ami, mais aussi tous les êtres chers qui ont déjà dépeuplé son existence. Arrivé au terme de son périple, il rencontre le capitaine Kolbeinn, Helga et Geirbrudur qui forment une étrange trinité. « Il a rendu le livre, mission accomplie, merci bien, la prochaine affaire à l’ordre du jour consiste à décider s’il doit vivre ou mourir. » (p. 171) Alors que tous ses chers disparus semblent l’appeler depuis l’au-delà, le gamin ne sait pas s’il doit faire honneur à Bardur en mourant ou en vivant.



Le gamin est un personnage très touchant, notamment par le sentiment qu’il a de toujours être ridicule. Je le rejoins parfaitement en cela. « Il dit bien souvent de grosses bêtises qui le mettent dans l’embarras ou éveillent sur lui un intérêt inutile, ce qui revient presque au même que de s’attirer les problèmes. » (p. 239) Ah, cette envie constante de disparaître aux yeux du monde… Le gamin garde à l’esprit les lettres de sa mère qui lui parlait de son père, de ses frères et de sa petite sœur. Cette correspondance est le fondement de sa littérature intime. À celle-ci s’ajoute désormais la poésie de Milton qui a coûté la vie de son ami. On s’interroge alors sur le pouvoir des mots. « Lire des poèmes vous met en danger de mort. » (p. 103) C’est vrai pour Bardur, mais pas pour le vieux capitaine aveugle. Ce qui l’a sauvé du suicide, c’est de savoir qu’il y avait encore des mots à découvrir et à partager.



Ce roman est une belle peinture de l’Islande. La pêche à la morue est emblématique des pays nordiques. « La plupart des villages d’Islande ont été construits sur les arêtes de morue, lesquelles sont les piliers qui soutiennent la voûte des rêves. » (p. 81) Si on en doutait, on constate que l’Islande est le pays du froid, que ce soir sur terre ou sur mer. La neige, la glace et le vent sont autant d’éléments éternels et immuables de ce pays : ils semblent défier les vivants et se moquent bien des pêcheurs engloutis dans les profondeurs gelées de la mer. Je m’interroge d’ailleurs sur le titre : quid de la mer qui est tout de même un élément essentiel au nœud de l’intrigue ? Certes, le gamin s’en éloigne après la mort de son ami, mais sans elle, il n’y aurait pas eu de drame.



Voici enfin le point négatif de ce roman : pour moi, l’oubli de la vareuse est totalement improbable. Certes, Bardur était tout à sa poésie, mais il faisait glacial avant même qu’il monte dans la barque. En outre, comment ses camarades, et surtout le gamin si occupé de son ami, ont-ils pu ignorer que Bardur avait oublié sa vareuse ? Enfin, la barque attend un moment à l’arrêt le signal du départ : Bardur a forcément eu froid et je ne comprends pas comment il peut attendre la haute mer pour prendre conscience de son oubli. Mais peut-être est-ce moi qui projette mon confort de frileuse sur cet homme rude, habitué à une vie rugueuse. Toutefois, il me semble que le roman se fonde sur une invraisemblance qui rend peu crédible le drame.



L’amitié entre le gamin et Bardur est palpable et très émouvante. Il s’agit donc d’un beau roman, bien construit, hormis la réserve que j’ai évoquée. Certaines descriptions manquent un peu d’âme, mais on se laisse facilement emporter par cette histoire de mer et de deuil.

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Entre ciel et terre

En Islande, au XIXe siècle, des pêcheurs affrontent quotidiennement la mer, les vents déchaînes et le froid pour aller chercher la morue qui les fera vivre... ou mourir : la mer est cruelle et impitoyable...

Mais même les pêcheurs peuvent aimer les mots, la lecture et la poésie et c'est ce qui perdra Bardur qui a oublié sa vareuse en essayant de retenir des vers de "Paradis Perdus".

Un récit sombre et beau qui interroge sur la vie, le pourquoi de la vie, sa brièveté, ses aléas et sa fragilité, sur l'amitié, sur les gens que nous aimons et qu'il nous faut chérir tant qu'il est encore temps ; une quête métaphysique écrite et traduite de façon magistrale et poétique, tendre et envoûtante.
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Ton absence n'est que ténèbres

Le plus gros enfumage provenant d'Islande depuis la dernière éruption de l'Eyjafjallajökull..!



Après un bref développement en exergue, où Jon Kalman Stefansson essaye de vous faire gober d'entrée de jeu cette soi disante «loi fondamentale» de la génétique, à savoir que «les gènes charrient vos émotions, souvenirs, expériences, et traumatismes d'une vie à une autre et, dans ce sens, certains d'entre nous sont vivants après leur disparition» (Waouh ! Mais encore M Stefansson...? Pourriez-vous svp expliciter?), l'on est introduit sans transition à un personnage narrateur amnésique qui, lui, non seulement a oublié qui il est, mais ne sait pas s'il rêve ou pas, ni comment serait-il arrivé dans cette petite chapelle située dans un fjord perdu au fin fond de l'Islande (six cents pages après, d'ailleurs, je vous le préviens, l'on ne saura guère plus qui est-il (?) ni pour quelle raison il n'aura toujours pas réussi à retrouver toutes ses "bagages" - génétiques (?)



Bref, toujours est-il que sortant de cette chapelle, il aperçoit une (vraie) Volvo bleue garée le long d'un petit cimetière. Tiens, sa voiture peut-être ! Quelle chance, celle-ci n'est pas fermée à clef ! (Diantre, pourquoi ne cherche-t-il pas au moins sa carte grise ? -n'ai-je pas pu m'empêcher de m'écrier sur le champ ! - Et puis, en 2020, ne posséderait-il tout de même pas l'une de ces petites merveilles électroniques dont on a pris l'habitude de dire, souvent en larmes, quand on les perd ou se les fait chourer : « mais j'avais toute ma vie là-dedans » !!



J'en étais là, voyez-vous, page 4, déjà d'humeur légèrement contrariée, sans même savoir que le pire m'attendait encore :



De grosses ficelles généalogiques en copier-coller ; une succession de personnages caricaturaux, les uns plus gentillets que les autres ; une scénarisation emberlificotée cousue de fil blanc, sans aucun souci de vraisemblance (un mec, par exemple, risquait d'aller en tôle pendant les trois quarts du roman pour avoir tiré sur des gens dans un camion, et puis, oh non, ce n'était finalement pas ça ( ?) –le lecteur n'en saura pas plus- mais qu'importe, l'essentiel c'est qu'il pourra se montrer comme tout le monde à la grande boum pour les morts organisée à a fin du livre ; ou alors, en plein XIXe, au fin encore plus fond de l'Islande rurale, une femme pratiquement illettrée, écrit un article scientifique sur les vers de terre, fait tomber amoureux un pasteur, marié lui aussi, qui la fait entrer dans le comité scientifique d'une revue, avec l'accord du mari de la première, lui fait un enfant par la même occasion (le pasteur), lequel enfant fait un autre enfant avec une autre femme mariée, qui fait un enfant...basta !! On ne va quand-même pas y passer la journée !!)



Un style narratif tape à l'oeil, empoignant et sentimental, avec en prime des longueurs et des répétitions franchement insupportables – à faire peut-être lever des tombes et sortir des ténèbres les morts, à permettre de «ralentir la course du temps » et faire durer un max toutes ces émotions «charriées d'une vie à l'autre», mais hélas aussi à faire dormir debout un lecteur comme moi encore plus au moins en vie, Dieu merci !



Enfin, outre le fait de voir très énervé la pensée nuancée d'un Kierkegaard que j'admire tant être transformée ici en pain-saucisse islandais qu'on consomme sur le pouce (n'oubliez pas de prendre le temps de faire «sourire les défunts» au moment du cliché : « cheese » !), le pire pour moi, le pire de tout ici, croyez-moi, fut surtout de subir l'improbable, l'inimaginable concentration de poncifs de type «développement personnel» (tiens, peut-être que ce type sans nom, le narrateur, était au fond un vrai avatar islandais réincarné de Paulo Coelho?) Poncifs d'ailleurs que j'avais commencé à noter («pour le fun» si j'ose dire, et aussi pour les citer éventuellement, à l'occasion), jusqu'à ce que je me rende compte que ce n'était pas la peine : il y en avait à toutes les pages.



Allez, un petit florilège pour la route ! (Et avant de passer vite fait à autre chose !) :



«Le destin – nous le façonnons en vivant. Il est le tissu des dieux. Ou la flèche aveugle du hasard.»



«Pourquoi le bonheur ne reste-t-il pas quand il vient à nous pour que nous puissions l'emporter à travers la vie comme la tortue emporte sa maison ?» [C'est chou, n'est-ce pas?!]



« Vous avez toujours dans la vie deux choix possibles, quel que soit le vôtre, vous éprouverez des remords, si vous ne faites aucun choix, vous vous transformerez en une existence à quinze pour cent»



«Tout prend moins de temps, notre savoir progresse, nous avons marché sur la Lune (...) mais tout ça ne suffit pas à rendre l'humanité heureuse»



«Le passé nous nourrissait de sa présence permanente, il nous aidait à garder l'équilibre dans un monde en perpétuel mouvement»



«Mais faut-il se risquer à rêver si jamais nos rêves ne se réalisent ?»



«Celui qui est en quête de lui-même a le pouvoir de voyager entre les univers»



«Parce que le temps passe, il ne s'arrête jamais.»



Etc, etc, etc, etc... !!!



Le meilleur livre étranger de l'année 2022 ? «Le voyage de Paulo Coelho à Disney-Islande» ??!



Mais où sont les lecteurs qui penseraient (à peu près) les mêmes choses que moi à propos de cette lecture? Les critiques ? Rien, nada, personne, ni sur ce site, ni ailleurs: fumée et fumée et fumée... !

Je me sens terriblement seul...



On ne peut, après tout ça, à moitié sonné et sidéré, qu'adhérer au vieux Pavel Vilikovsky, quand ce dernier constatait avec pessimisme que «les livres ne sont plus aujourd'hui que des passe-temps comme les mots croisés, les jeux de carte et les broderies avec patron. Et quand auront disparu les derniers joueurs de cartes et les dernières brodeuses, les élèves feront des excursions scolaires pour admirer les livres dans les musées».



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D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds

Je suis totalement séduite par la plume de j.k.stefanson que je découvre. Non seulement la poésie y est reine mais plus encore, Stefanson parvient à traduire avec une justesse percutante les sentiments,le ressenti de tout ce qui constitue notre vie d'humain. Parfois, j'ai relu lentement, intérieurement certaines phrases, troublée par l'écho qu'elles procuraient en moi. La vie,l'Amour,la mort, virevoltent ensemble,dans un tourbillon qui procure,bonheur, nostalgie,tristesse sans transition. Ce tourbillon semble n'obeir à aucune logique . C'est d'ailleurs ce tourbillon intemporel qui m'a perdue. Car si je suis indéniablement amoureuse de cette plume, j'avoue ne pas avoir été capable de m'adapter à la construction singulière de ce roman. J'ai été désorientée et n'ai pas pu trouver mon fil conducteur. Trois générations sont convoquées à travers un personnage principal qui est le trait d'union entre tous les autres et "aujourd'hui" et " jadis". C'est Ari. Après avoir brisé en une fraction de seconde son bonheur en quittant la femme de sa vie, il quitte également le Danemark pour retrouver son Islande natale et à travers elle les souvenirs qui le constituent. Un peu comme avec un kaléidoscope,j'ai repéré les mosaïques les plus importantes,je me suis émerveillée, mais je n'ai pas réussi à remettre de l'ordre, à relier clairement tous les morceaux ! C'est donc ma seule incompétence qui explique les 3 étoile et demie et non pas 5 belles étoiles. Je retrouverai cet auteur dans d'autres romans car je ne peux pas m'avouer vaincue face à une écriture d'une telle beauté !
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