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Critiques de Marguerite Yourcenar (811)
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Mémoires d'Hadrien

La publication en 1951 des Mémoires d’Hadrien fut pour Marguerite Yourcenar (1903-1987) le couronnement d’un travail qui s’était étendu sur plus de vingt-cinq années. Cette romancière et poétesse française, première femme élue à l’Académie française, s’était intéressée très tôt au personnage d’Hadrien, qui régna sur l’Empire romain entre les années 117 et 138.



Sa curiosité pour un empereur qu’on qualifierait de nos jours d’humaniste et de globe-trotter tourna à la fascination lorsqu’elle prit la mesure d’une phrase de Flaubert : « Les dieux n'étant plus et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été ». Pour Marguerite Yourcenar, Hadrien fut typiquement cet homme seul, libre encore de tout dogme et délivré de la crainte que le ciel ne lui tombe sur la tête.



Tout en menant un travail érudit et exhaustif de documentation nécessitant de lire couramment le latin et le grec ancien, Marguerite Yourcenar s’est longtemps interrogée sur la forme qu’elle donnerait à ce qui s’apparente à un roman historique. Elle a choisi de laisser s’exprimer Hadrien. L’ouvrage n’est toutefois ni une autobiographie ni un journal. Il se présente comme une très longue lettre (trois cents pages) écrite par l’empereur quelque temps avant sa mort, qu’il sentait venir, et destinée à ceux qui seront appelés un jour à la tête de l’Empire. L’écrivaine historienne s’est alors effacée, identifiée au personnage, insérée dans l’époque, afin de voir, d’entendre, et de penser comme si elle était Hadrien.



Hadrien revient sur ses années de formation, ses premières responsabilités, son ascension vers le pouvoir dans le sillage de Trajan, un empereur guerrier et conquérant, qui le désigna comme son successeur sur son lit de mort. D’esprit tolérant, ouvert aux idées extérieures, Hadrien mit un terme à la politique expansionniste de son prédécesseur, se déplaçant aux quatre coins de l’Empire afin d’en pacifier les territoires, d’y développer l’économie et d’agréger les cultures des peuples à la civilisation romaine. A la fin de son règne, il échoua cependant en Judée, où les zélotes, réfractaires à toute remise en cause de leurs pratiques, le contraignirent à une guerre impitoyable et funeste.



Sage, clairvoyant, conscient de ses responsabilités, il a travaillé au progrès de l’humanité et des sociétés, a modernisé les lois, tout en restant lucide et stratège sur les obstacles et les menaces, n’hésitant pas à frapper fort si nécessaire. Lettré, poète, amateur d’art, captivé par l’histoire grecque et l’antiquité égyptienne, il fit construire des cités modernes, des temples, des bibliothèques et la fameuse Villa Hadrienne, à Tivoli, non loin de Rome. « Je me rendais responsable de la beauté du monde, je voulais que les villes fussent splendides », écrit-il.



Dans sa vie privée, Hadrien fut un amoureux passionné. Des femmes, et surtout de jeunes garçons en quantité, un usage politiquement correct à l’époque. Parmi ces éphèbes, son favori, Antinoüs, que sa mort mystérieuse par noyade dans le Nil éleva au rang de divinité.



Sous la plume prêtée à Hadrien par Marguerite Yourcenar, la syntaxe est parfaite. Le langage est simple, fluide, en dépit de nombreux noms propres – personnages, lieux – et de mots inusuels désignant des objets ou des pratiques du IIe siècle. Hadrien raconte au passé simple son parcours d’empereur. C’est une longue, très longue narration, développée sur un ton si uniforme que la lecture en devient par moment monotone. Mémoires d’Hadrien n’en reste pas moins un prodige de virtuosité littéraire et un éclairage passionnant sur l’apogée de l’Empire romain.



A la fin de sa vie, Hadrien, malade, se montre désabusé, fataliste, tout en restant globalement optimiste. « Le désordre triomphera, mais de temps en temps, l’ordre aussi… Les mots de liberté, d’humanité et de justice retrouveront çà et là le sens que nous avions tenté de lui donner ». Une vision éclairée, des propos qui sonneraient juste aujourd’hui. De quoi à la fois espérer et désespérer de l’espèce humaine.


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Mémoires d'Hadrien

J'ai longtemps été intimidée par Marguerite Yourcenar, que je croyais à tort barbante et compliquée...

Toutes mes excuses, je viens de finir les mémoires d'Hadrien et je suis subjuguée par la finesse, l'intelligence, la rigueur et la densité de ce récit.

Je suis d'autant plus admirative, que Mme Yourcenar à reussi à me rendre passionnants une époque et un homme qui jusque là m'évoquaient juste vaguement mes leçons d'histoire au collège. Et je recommande à tous de lire ce livre dense et exigeant, qui retrace la vie de l'empereur Hadrien, vous ne le regretterez pas !

Le carnet de notes qui suit est également à lire, et très intéressant. concernant l'évolution de l'élaboration de ce roman, qui aura tout de même, au final, duré plus de 25 ans!
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Alexis ou le traité du vain combat - Le coup ..

Ses mots sont des flèches qui jamais ne manquent leur cible. Sous sa plume, d'une grande précision, se dessine un véritable atlas des sentiments. Sans jamais verser dans le sentimentalisme.



Le coup de grâce, pris en étau entre le front bolchevik et celui de la baltique, renoue avec les thèmes chers à Yourcenar. de même que dans le vain combat que perd le jeune Alexis au coeur de la capitale austro-hongroise corsetée de la belle époque, Il y est question d'amour non partagé, d'amitiés particulières et de tragique.



Le personnage principal et narrateur instruit le lecteur d'une période révolue et les efforts d'objectivation du lecteur doivent être constants. Dans sa Préface, Yourcenar prévient qu'il appartient au lecteur de reconstituer, de mettre en doute, de traquer les indices au-delà de l'intermédiation du narrateur, de ses omissions qui sont des vérités et de ses aveux qui sont des mensonges.



Le style, classique, est économe, janséniste même, selon le mot de Bernard Pivot. Pas la moindre surabondance dans la syntaxe de celle qui écrit Alexis, son premier roman paru en 1928, à moins de trente ans. Les penchants, les pulsions et les pudeurs, leurs imbrications inexprimables, leurs ombres et lumières, leurs versants et leurs élans sont disséqués à coeur ouvert par cette chirurgienne des âmes avec froideur et justesse.



« Au lieu de parler d'amour, nous parlions sur l'amour ». C'est ce qui fait à la fois son magnétisme, son alchimie ou à l'inverse, le manque de chaleur, le propos définitif et le sérieux vertigineux de sa plume que peuvent ressentir certains lecteurs. Cependant, une lecture attentive révèlera, tissées dans la dentelle du style, quelques pointes d'ironie.



En outre, il faut bien reconnaître que les personnages de ces deux romans ne sont pas des plus lumineux. Eric, officier allemand et balte, prisonnier de sa roideur, ne se veut pas capable d'émoi pour Sophie et tous deux finissent par s'infliger des souffrances aux accents kunderiennes ; quant au frêle Alexis, je me le figure livide, les yeux gris et les lèvres à peine rosées, ses veines bleues coulant en filigrane sous sa peau si fine (la première de couverture folio poche, une peinture d'Egon Schiele, lui offre un visage).



Si pour Eric l'histoire s'écrit désormais au passé, pour Alexis le jeu reste ouvert, et l'auteur de souligner, en songeant à une suite pour la longue lettre du vaincu, que la vie est beaucoup plus souple qu'on ne le pense lorsqu'on a vingt-quatre ans.



Mais il y a toujours chez ces personnages la volonté, dans une certaine mesure et jusqu'à un certain point, de faire preuve d'honnêteté dans leur introspection ; c'est cette petite musique de Yourcenar qui fait vibrer une à une les cordes de nos émotions.

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Nouvelles orientales

La Veuve Aphrodissia est la septième nouvelle de ce recueil en contenant une dizaine. Marguerite Yourcenar s’est inspirée de fables, de contes ou de faits divers orientaux pour les retranscrire avec son propre style.



Le texte s’ouvre sur la mort de Kostis le rouge, un hors-la-loi ayant tué le pope d’un village de Grèce. Si les habitants se réjouissent de cette mort, la femme du Pope, elle, en est affectée – douloureusement affectée. Car Aphrodissia aimait en secret Kostis. Elle est obligée cependant de paraître respectable en mémoire de son époux. Et c’est bien là tout son dilemme. Car, finalement, elle est doublement veuve : administrativement (le Pope) et amoureusement (Kostis). La révolte de cette femme est accentuée par ce deuil qui n’en finit pas. En Grèce, comme dans l’Antiquité, les pleureuses doivent venir se lamenter devant le corps du défunt. Mais ici, il lui faut attendre trois jours et trois nuits, que l’on ramène le mort, avant d’entamer ce long travail sur soi. Et ce qui est fabuleux avec l’écriture de Yourcenar, c’est que l’on ne comprend pas de suite. Ce n’est que lorsque la veuve veut offrir à manger à ses « vengeurs » que l’on commence à apercevoir son ressenti : « (…) comme elle n’avait pu assaisonner de poison les tranches de pain et de fromage qu’elle leur avait présentées, il lui avait fallu se contenter d’y cracher à la dérobée, en souhaitant que la lune d’automne se lève sur leurs tombes. »



Certes, le sujet de l’amour adultère n’est pas nouveau. Mais l’auteur le transcende ici par la magie de son écriture. On entend presque le coeur de cette femme qui hurle. Le Pope ne lui avait donné qu’une image sociétale. Elle n’était rien aux yeux de ceux qu’elle appelle « les paysans », avec tout le mépris qu’elle insuffle dans ces termes. Avec Kostis, elle était Femme. Et lorsqu’elle aperçoit sur le bras de cet être aimé que son prénom y est gravé, elle ne se maîtrise plus.



Yourcenar reconstitue ici une tragédie avec ce climat propre aux dérèglements passionnels. Aphrodissia est digne de Phèdre et d’Antigone. Elle laisse s’exprimer l’amour et l’exaspération. Cela ira jusqu’à la folie. Un texte magnifique à lire absolument !
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Mémoires d'Hadrien

"Un pied dans l'érudition, l'autre dans la magie, ou plus exactement, et sans métaphore, dans cette magie sympathique qui consiste à se transporter en pensée à l'intérieur de quelqu'un." C'est ainsi que dans ses notes Marguerite Yourcenar qualifie l'exercice qui l'a conduite à mettre sur pied cette magistrale œuvre philosophico-historique relatant la vie de l'empereur Hadrien. Dès les premières pages on perçoit l'incroyable densité d'une telle œuvre. Elle a consacré Marguerite Yourcenar dans son statut d'écrivain de renommée mondiale. A la seule lecture de cet ouvrage, on ne peut que convenir de la somme de savoir mise en œuvre dans chaque page, du perfectionnisme appliqué à chaque phrase, pour parvenir à cette métamorphose de l'auteure en son personnage.



L'exercice qui consiste à se glisser dans la peau d'un illustre héros de l'antiquité romaine pour lui faire évoquer ses mémoires est une prouesse aux multiples aspects. Tout d'abord parce que l'éloignement dans les tréfonds de l'histoire est comme chacun sait l'assurance de la raréfaction de la ressource documentaire fiable. Il suffit d'examiner l'ampleur des sources bibliographiques mises en œuvre, répertoriées en fin d'ouvrage, pour se rendre compte de l'exploit de pareille entreprise. Sans parler du socle d'érudition propre à l'auteure elle-même, indispensable pour aborder plus largement le contexte.



S'agissant par ailleurs d'une transposition de forme de pensée, comment imaginer et ne pas trahir, ou le moins possible, celle d'une époque aussi lointaine dans l'histoire, lorsqu'on l'évoque avec le recul et l'acquis culturel cumulé de plusieurs siècles ? Rappelons nous aussi qu'une femme se met à la place d'un homme avec tout ce que cela comporte de compréhension du rapport à l'autre sexe. Sans oublier, s'agissant d'un héros qui fut homme politique du plus haut rang, la notion de prédilection au pouvoir que comporte un tel statut, pour une personne qui elle ne joue jamais que du pouvoir de sa plume.



Il est question enfin dans cette "magie sympathique" de mettre en œuvre une subjectivité à plusieurs visages. Quel degré d'honnêteté placer en effet dans les propos d'un personnage politique qui évoque sa propre histoire ? Quel degré de lucidité et de sincérité attribuer à un homme qui, se sachant condamné à brève échéance, voudra convaincre le dauphin qu'il s'est choisi de poursuivre son œuvre ? Quelle sensibilité lui coller à la peau quand les penchants souffrent des contraintes du statut, de contradictions et atermoiements personnels. Il y a là un subtil dosage que seule une formidable culture historique, comportant la domination des langues anciennes, peut autoriser.



C'est le premier ouvrage de Marguerite Yourcenar que je lis. Je l'avoue. Je reste médusé par l'érudition de cette grande dame de la littérature française et m'incline avec la plus grande humilité devant cette montagne de connaissances.

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Nouvelles orientales

En aparté, en attendant de finir ma lecture en cours. De son pseudonyme Marguerite Yourcenar et ce recueil "Nouvelles Orientales", cette grande dame qu'elle était de la littérature et en tant que écrivain et académicienne qui plus est, j'ai pu découvrir ce recueil il y a très longtemps quand j'étais au lycée.

C'était une lecture imposé par nôtre prof de français et je dois dire que sur tous les livres que l'on a eu à lire en seconde, c'est le seul que j'avais grandement apprécié.



Oui bon, parce que à l'époque tout ce qui m'intéressais c'était le sport et fumer hasch avec mes potes.

J'en ai foiré ma scolarité... mais bon, faut bien que jeunesse se fasse (même avec des regrets).



Je ne me souviens plus trop des nouvelles du recueil car cela remonte à ma classe de seconde et que c'est plus très frais dans ma mémoire. Ça doit dater de 2000 ou 2001.



Mais je sais tout du moins que cela avait été un grand moment de lecture avec des analyses et des débats hauts en couleurs en classe.



J'ai toujours ce livre chez mes parents, à l'occasion je le relirais et si besoin je reviendrais sur ce billet.
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L'Oeuvre au noir

L’œuvre au noir ! que ce titre m’a interpellée !

Bien sûr, ce terme fait référence à l’alchimie et selon la 4ème de couverture, ce roman conte l’histoire d’un …alchimiste !



L’alchimie : mélange de soi-disant science et de mysticisme pour arriver à la pierre philosophale capable de transformer n’importe quel métal en or, ou, pour le dire moins trivialement, prolonger la vie humaine en guérissant tous les maux de l’humanité pour prolonger la vie. Et Zénon est un médecin, à la pointe du progrès et des innovations. Mais c'est aussi un penseur, un philosophe, auteur dont les oeuvres sont bonnes pour le bûcher.

Si elle « colle » à Zénon ce qualificatif d’alchimiste, n’est-ce pas plutôt pour mieux le vêtir d’invisibilité auprès de ses concitoyens ? L’ alchimiste analyse les métaux, recherche des solutions (tant en terme de liquide que de résolution de problèmes) c’est un scientifique mais c’est aussi et surtout un mystique , un religieux. Et en ces temps mieux valait ne pas être athée : c’est l’empoignade entre catholiques, réformés, musulmans ; un soupçon et le bûcher flambe.



Le temps de Zénon est celui du 16ème siècle et quel siècle ! Celui de la Renaissance : le Moyen Age se termine et l’époque classique sera son futur. Siècle des Grandes Découvertes , de la Réforme et des guerres de religion. Tout bouge et tout évolue dans la violence, le sang et la foi. Et si c’était cette époque le fondement de notre civilisation ?



Zénon n’est pas un croyant. Il est un homme libre de la plus belle espèce. Il est intemporel. C’est un homme de science qui assumera tous ses choix.



Le premier chapitre nous montre deux jeunes hommes, deux cousins à la croisée des chemins : si l’un fait le choix des armes et prend la grande route, pour rejoindre une armée et s’y fondre dans sa discipline, l’autre choisit les chemins de traverse et l’étude. Tout est dit, ou presque : Zénon sera un voyageur, un écumeur d’horizons uniquement mené par son intelligence, son esprit critique.



Marguerite Yourcenar nous raconte ce philosophe médecin depuis sa conception ; rencontre improbable d’un beau manipulateur formé à l’école florentine qui avait discuté machines de guerre avec un certain Léonard de Vinci, partagé l’amitié de Michel Ange et d’une riche et belle illettrée de Bruges. Quel héritage pour Zenon !



Elle le fait voyager depuis le cœur des Flandres jusqu’en Orient et en Suède. Pour Marguerite Yourcenar le voyage c’est la découverte d’autres façons de vivre, de penser, c’est donc oublier ses « pré-jugés ». Et c’est ce que fait Zenon. Si je devais imaginer une image, ce serait celle de l’épée. Pour quelle soit belle et efficace, il faut la fabriquer dans un beau métal, la forger à grands coups, la plonger dans l’eau glacée et le feu. Et quand, enfin elle est achevée, il ne lui reste plus qu’à affronter ce pour quoi elle a été réalisée : la mort. Et là, je ne suis pas d'accord avec cette fameuse quatrième de couverture : Zénon n'est pas broyé, il choisit SA mort.



Comment ne pas admirer ce livre ?

L’écriture est belle et si riche. Ce siècle, nous est dépeint dans toute sa fureur mais surtout dans toute son énergie et sa créativité. Plus dangereux mais aussi tellement plus exaltant que le 19ème siècle.

Un beau portrait de ce que pourrait être l’humanité traversant la vie en assumant pleinement ses choix.

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Mémoires d'Hadrien

En imaginant les Mémoires de l'empereur roman Hadrien, Marguerite Yourcenar nous fait cadeau d'un récit historique d'une vérité éblouissante.



Lorsque le souverain romain commence à apercevoir le profil de la mort, une étonnante lucidité le pousse à évoquer ses souvenirs et à faire une sorte de bilan de sa vie.

Avec un perçant regard introspectif, dans une lettre adressée à Marc Aurèle, son successeur, il passe en revue certaines étapes de sa vie avec des considérations d'une rare intelligence et d'une grande d'humanité.



Sa compréhension de son enfance, de ses passions et même de son règne dépassent parfois l'humain.

Les réflexions pleines de sagesse sur les excès et l'abstinence, les plaisirs simples presque sacrés comme manger un fruit mûr ou une bonne nuit de sommeil mais aussi les avantages d'un certain ascétisme sont chargées de grâce.

Il lapide les cyniques et les moralistes, la logique humaine n'a pas de règles, si ce n'est celles dictées par le secret et le sacré.



L'auteure délivre des pensées extraordinairement profondes sur la complexité des linéaments de la beauté, sur les plaisirs terrestres, la volupté et l'éblouissement de l'esprit.

Par moments on se demande si ses propos et ceux d'Hadrien en se mêlant ne sauraient former qu'un seul.



La romancière française fait usage de sa sensibilité lyrique face à la beauté du monde tout en associant la narration à la réflexion philosophique.

"La connaissance de soi passe par la connaissance de l'autre mais surtout par la connaissance de ce qui n'est pas nous".



Les Mémoires d'Hadrien c'est une lecture pleine d'étoiles sur les méditations d'un souverain qui scrute les tréfonds de l'âme et qui avait conscience de sa mission et de la portée de ses actions sur la collectivité.



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Le coup de grâce

Ce n’est pas le contexte historique et géographique (que j’ai eu beaucoup de mal à situer : 1919, guerre civile aux confins des Pays baltes et de la Russie) qui attire l’attention ici, mais la prodigieuse étude de caractère des personnages, surtout celle du narrateur Eric von Lhomond.



Quel personnage incroyable, froid, calculateur, insondable parfois, colérique, en parfaite harmonie avec la guerre qu’il essuie. Ne sachant véritablement plus distinguer les valeurs humaines, ni croire en l’homme ou en la femme.



C’est depuis le château délabré de Kratovicé, devenue forteresse assiégée, où il a passé ses vacances avec Conrad et sa soeur Sophie, que Lhomond est en garnison pour combattre les bolchéviques.

La guerre est longue, lassante. Les conditions climatiques difficiles. La faim, l’ennui règnent pesamment sur ce décor lugubre. Mais le combat le plus intense est celui qui oppose Sophie à Lhomond. Sophie est amoureuse, prête à se donner, capable des pires folies pour faire réagir son bel officier. Et celui-ci la dédaigne, la repousse, la méprise aussi...



Les trois héros de ce court roman sont jeunes, beaux et issus d’une vieille aristocratie ruinée. Les descriptions de Conrad et Sophie ne reflètent pas leur genre. Conrad est quelqu’un de doux et gracieux alors que sa soeur est plutôt volcanique et lourdaude. Du moins est-ce ainsi qu’Eric nous les dévoile. Ce qui laisse penser que celui-ci est bien plus attiré par le frère que par la soeur, mais sans jamais se l’avouer vraiment.

Eric von Lhomond, au-delà de ce cynisme voulu et cultivé, est d’une infinie lucidité sur lui-même et combat autant l’ennemi guerrier que l’amour qui pourrait le faire fléchir.



Ce récit prend le lecteur pour témoin de cette longue montée émotionnelle jusqu’au drame final, de ces ravages psychiques et physiques causés par la guerre. Un récit poignant qui laisse dans la mémoire une trace marquante bien après la fin de la lecture.

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Le coup de grâce

Un court et magistral roman de Marguerite Yourcenar inspiré d’une histoire authentique.



En 1919, dans un pays Balte pris dans l’engrenage de la violence d’une guerre civile liée à la révolution russe, trois jeunes privilégiés vivent une histoire d’amour, une passion qui s’apparente à une tragédie. C’est Eric, un jeune officier, qui en raconte les conditions extérieures et tente d’expliquer, avec subjectivité parfois, les événements passés.



Un récit qui met en scène des êtres complexes dont les aspirations sentimentales n’entrent pas forcément en concordance, réunis face aux dangers, semblables dans leur intransigeance mais aux allégeances politiques différentes. Presqu’un détail qui mènera au drame final, un coup de grâce porté sans haine.

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Mishima ou La vision du vide

Je vous parlais hier d’une nouvelle de Mishima. Voici à présent l’essai de Marguerite Yourcenar sur cet auteur japonais.



« La vie humaine est brève, mais je voudrais vivre toujours. » (P150) Tels sont les derniers mots écrits de la main de Mishima avant de se donner la mort. Des mots aussi puissants que l’oeuvre de cet écrivain maudit. Yourcenar nous relate ici les aspects importants de la courte vie de l’auteur japonais et entreprend d’expliquer, à travers les us et coutumes du pays du soleil levant, les textes de celui qui restera célèbre pour son fameux Pavillon d’Or.



Cet essai est fort instructif et je ne regrette pas de l’avoir lu. Dans un premier temps, parce que je connaissais mal cet auteur et ses oeuvres, dans un second temps parce que cela m’a donné envie de pousser plus loin les recherches et de lire les romans de Mishima. Je ne peux m’empêcher de citer les paroles de sa mère, à l’annonce de son décès : « Ne le plaignez pas. Pour la première fois de sa vie, il a fait ce qu’il désirait faire. » (P158)
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Mémoires d'Hadrien

« Cette œuvre est à la fois roman, histoire et poésie. » nous prévient la quatrième page de couverture.

Une œuvre incroyable que Marguerite Yourcenar a longuement mûrie. Des premières ébauches furent réalisées entre 1924 et 1929 puis entièrement détruites. Elle reprendra le projet bien des années plus tard et publiera Mémoires d'Hadrien en 1951.

Et il n'en fallait pas moins pour parvenir à cette œuvre magistrale, exigeante fouillée et minutieuse. De la vie de l'empereur Hadrien, Marguerite Yourcenar s'emploie à établir la vérité historique tout en étant consciente de ses lacunes. Lacunes qu'elle ne cherchera pas forcément à combler par des idées romanesques. Elle précise dans son carnet de notes : «  Je me suis assez vite aperçue que j'écrivais la vie d'un grand homme. De là, plus de respect de la vérité, plus d'attention, et, de ma part plus de silence. »



On peut sans se fourvoyer assimiler cet ouvrage à la quintessence du roman historique. Marguerite Yourcenar est parvenue avec talent à entrer dans le monde intérieur d'un personnage historique en nous relatant avec une fluidité certaine ses pensées et souvenirs les plus intimes.



D'Hadrien, je ne connaissais pas grand chose et même quasiment rien. Comme tout le monde, j'ai bien sûr entendu parler du Mur d'Hadrien mais c'était tout.

Avec ce roman, j'ai fait la rencontre d'une figure exceptionnelle de la Rome antique . Homme de lettres, féru de poésie, éternel voyageur, influencé par les auteurs grecs, passionné et amoureux du bel Antinoüs, il fut aussi un homme d'Etat soucieux de la paix romaine et son règne permit de consolider et de structurer administrativement cet immense espace qu'il rendit prospère.

Il est aussi incroyable de voir, au travers de ces Mémoires, une conception résolument moderne et humaniste du monde qui l'entoure. Marguerite Yourcenar disait de lui : « En un sens, c'est un homme de la Renaissance. »



Roman historique ardu mais passionnant !





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Mémoires d'Hadrien

Ce qui commence comme une lettre à un jeune ami devient rapidement le récit d’une vie. L’empereur romain Hadrien, fils de Trajan, livre sous la plume de Marguerite Yourcenar ses mémoires et une certaine philosophie. Se dévoile un vieil homme malade au crépuscule de son existence. « Il est difficile de rester empereur en présence d’un médecin, et difficile aussi de garder sa qualité d’homme. » (p. 11) S’il est empereur, Hadrien n’en est pas moins humble et c’est sans aménité qu’il considère son existence : « quand je considère ma vie, je suis épouvanté de la trouver informe. » (p. 41)

Il revient sur sa jeunesse, ses études et ses années de soldat et de magistrat. On découvre alors chez l’homme un goût pour les plaisirs simples et un certain dénuement. Loin du faste qui illustra ses prédécesseurs, Hadrien se veut l’empereur de la simplicité et de la paix. « Je m’efforce que mon attitude soit aussi éloignée de la froide supériorité du philosophe que de l’arrogance du César. » (p. 64) Attaché à la Grèce et particulièrement à Athènes, il n’a de cesse d’introduire une élégante modestie dans toute chose. « La paix était mon but, mais point du tout mon idole : le mot même idéal me déplairait comme trop éloigné du réel. » (p. 144) Plutôt que de conquérir et de dévaster, Hadrien se veut bâtisseur : sous ses ordres s’érigent temples et villes, pour la grande gloire de l’empire romain.

Hadrien était aussi homme et soumis aux passions. Son bel amour est un jeune homme, presqu’un enfant. Antinoüs est grec et incarne l’idéal amoureux de l’empereur. « Je n’ai été maître absolu qu’une seule fois et que d’un seul être. » (p. 226) L’empereur se révèle alors sensuel et sensible. Sous ses mots, la simplicité exulte et le raffinement amoureux n’est jamais si précieux que quand il s’accompagne d’un éternel attachement.

Ses derniers mots sont courageux : « Tâchons d’entrer dans la mort les yeux ouverts. » (p. 423) Ils sont aussi prophétiques : sous la plume de Marguerite Yourcenar, l’homme restera vivant pour longtemps. Qu’il est bon d’écouter cet empereur et de suivre sa pensée sage. Tiré d’un oubli de pierre et de poussière, exhumé des manuels et des fresques, Hadrien resplendit une nouvelle fois. Et avec lui, c’est l’empire romain qui se relève un instant de ses ruines, c’est une civilisation qui redresse la tête face au temps et qui clame qu’elle n’est pas perdue.



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Mémoires d'Hadrien

Pour moi, quand on évoque Marguerite Yourcenar c’est avant tout la première femme élue à l’Académie Française. J’étais encore toute jeune en 1980, mais je me rappelle que mon instit (bah oui, avant on appelait les professeurs des écoles comme cela) nous en avait parlé. Plus grande, je me suis juré de lire un jour une de ses œuvres…Bon, là il est vrai que j’ai attendu quelques décennies avant de me lancer dans ces Mémoires d’Hadrien.

J’avais choisi ce titre car j’aime cette période de l’histoire et j’avais quelques petites connaissances sur cette époque et cet empereur.

Quelle belle plongée dans l’histoire et surtout dans la peau de l’empereur Hadrien ! Ce dernier, malade, sentant que ses jours sont comptés, envoie des lettres à Marc-Aurele, qui sera amené à devenir un jour empereur lui aussi.

Avec beaucoup de lucidité, Hadrien va revenir sur son passé et les actes importants de sa vie et de sa carrière d’empereur. Il sera aussi un visionnaire sur l’avenir de l’empire romain.

J’ai franchement adoré lire ce livre et j’ai vécu pendant un moment à la même époque que Hadrien. Je n’ai pu être qu’en admiration devant l’époustouflant travail de recherche de Marguerite Yourcenar. Car il faut en avoir fait des recherches pour arriver à restituer avec autant d’authenticité cette époque.

Retrouver l’histoire du fameux mur et aussi mes chers Sarmates m’a fait plaisir même si évidemment l’histoire ne se cantonne pas à ces épisodes du règne d’Hadrien.

J’ai découvert un empereur éclairé, plus préoccupé à faire la paix que la guerre contrairement à son prédécesseur Trajan. Je ne connaissais rien de son histoire familiale ni de sa passion pour Antinoüs.

C’est avec un style soutenu et élaboré, mais agréable à lire que Marguerite Yourcenar a raconté cette histoire à travers la bouche, ou plutôt les écrits d’Hadrien. C’est vrai que l’une ou l’autre fois j’ai dû relire une ou deux phrases car clairement ce livre se mérite.

Je ne sais pas si je lirais un jour L’œuvre au noir, car au vu des critiques, c’est un livre qui me semble assez difficile à lire, mais je n’hésiterais pas à conseiller la lecture de celui-ci.



Challenge ABC 2017/2018



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Anna, soror...

La notion de sociale de l’interdit et chrétienne de la faute sont balayés par la beauté des mots et des sentiments traduits grâce à l’érudition de l’auteure à seulement 22 ans. C’est bluffant.



C’est le roman d’amour d’Anna et Miguel comme celui de Thémar et Amnon dans l’ancien testament ou celui de Byblis et Caunus dans la mythologie grecque.

C’est l’extase et la souffrance d’une passion défendue.



C’est un roman historique où le royaume d’Espagne vers 1600 domine une partie de l’Europe avec le sud de l’Italie moderne : La Campanie, Naples, la Calabre et la Sicile ainsi que dans le nord : La Flandre espagnole.



C’est une tragédie où la passion est trop forte pour ne pas s’accomplir.

Miguel s’embarque sur une galère vers une mort annoncée comme un salut.

Anna sera mariée sans amour ni haine. « Il vit dans mon deuil »

Don Alvare, le père entre ascétisme et débauche ne pardonnera pas à sa fille la mort de son fils.



Les mots choisis avec soin ont à mes yeux une valeur si forte que je n’en mesure pas forcément la portée mais ils provoquent la sensation de me fondre tellement dans les personnages que j’en retire un plaisir quasi tactile. Leurs poids si lourds de sens pèsent sur le récit sans en obscurcir la compréhension.

C’est mon premier Yourcenar, j’évalue l’immensité de la culture de cette femme ainsi que son aptitude à transmettre l’ambiguïté des sentiments, l’intensité d’un deuil, la douleur de la culpabilité, l’austérité de la pénitence et la force à braver le proscrit. « C’est contre les falaises les plus abruptes que se lance le plus violemment la vague. »



Belle découverte, profonde et salutaire.

« Ainsi, chacun lisait différemment ce livre de la création qu’on peut déchiffrer en deux sens, et dont les deux sens se valent, car personne ne sait encore si tout ne vit que pour mourir ou ne meurt que pour revivre. »

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Mishima ou La vision du vide

Mishima ou la Vision du vide (1981) n'est pas une biographie mais plutôt un essai critique sur la mort dans l'oeuvre de Mishima. le suicide rituel spectaculaire et fascinant de l'écrivain faisant partie intégrante de son oeuvre.

Apparemment la discrète Marguerite Yourcenar et le spectaculaire Yukio Mishima ne se ressemblent pas. Cependant nous comprenons vite que les deux écrivains appartiennent à cette catégorie d'êtres humains « qui guettent [la mort] dans chacun des signaux qu'elle leur fait à travers les sensations de leur corps ou les hasards du monde extérieur ». Marguerite Yourcenar guette donc dans l'oeuvre de Mishima les signaux mortifères, tout en sachant qu'ils ne révèleront aucune vérité. Confessions d'un masque n'est pas une autobiographie mais une recomposition romanesque d'épisodes épars de sa jeunesse. Mishima est un masque, un personnage « cette ombre ou ce reflet que parfois l'individu lui-même (c'est le cas pour Mishima) contribue à projeter par défense ou par bravade, mais en deçà et au-delà desquels l'homme réel a vécu et est mort dans ce secret impénétrable qui est celui de toute vie. » Elle évoque nombre d'épisodes de ses oeuvres où la mort souvent solaire et érotisée mise en scène joue un rôle majeur : outre plusieurs passages des Confessions d'un masque, l'incendie du Pavillon d'Or, la noyade dans la Mort en été, la cécité par aveuglement des flammes dans un des Cinq Nô modernes, la description du suicide d'Isao dans Chevaux échappés, etc. Elle décrit les livres mais aussi les photos sur lesquelles Mishima pose en martyr héroïque ( la célèbre reprise du martyre extatique de Saint Sébastien) et puis enfin le film Patriotisme (encore plus réussi que la nouvelle éponyme). Elle compare le seppuku rituel romanesque du film, idéal et parfait au seppuku réel, incongru et foireux. Marguerite Yourcenar s'étend aussi longuement sur la notion de transmigration du bouddhisme tantrique et là j'ai quelque peu décroché. Je relirai aussi ces passages quand j'aurai lu la tétralogie de la Mer de la fertilité. La fin de l'essai est particulièrement stupéfiante. Elle évoque le vide, celui du Nô et fait réapparaître le fantôme de Mishima écrivain et dramaturge dans l'image finale des deux têtes. « Deux épaves, roulées par la Rivière de l'Action, que l'immense vague a laissées pour un moment à sec sur le sable, puis qu'elle remporte. »



Je signale qu'on trouve en ligne la vidéo du passage de Marguerite Yourcenar à Apostrophes.

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Mémoires d'Hadrien

Yourcenar m'a offert un plaisir extrêmement rare, confus, contradictoire: vouloir atteindre rapidement la dernière page tellement le récit est divin et en même temps freiner l'élan pour savourer chaque phrase tel un bon vin jusqu'à la lie.



C'est entre les lignes que Yourcenar nous livre des moments de sa vie mais c'est d'une telle finesse. Orfèvrerie de la pensée, de l'imagination.



Qu'est-ce donc ?

Yourcenar se lance (depuis sa jeunesse... elle passera donc des décennies à se lancer...) dans l' écriture des mémoires de l'empereur Hadrien. Au seuil de la mort, elle l'imagine rédigeant une longue lettre testamentaire destinée au jeune Marc Aurèle. Il lui parle des arcanes du pouvoir, de sa jeunesse en Espagne, de ses campagnes guerrières, de ses amours, son Amour d' Antinous, de sa vie entre Terre et mer, de son échec politique en Israël....



Le livre est un savant mélange de genres et de registres... Épistolaire, auto fiction, roman, réflexion philosophique.... Un coup de génie.



C'est avec un immense plaisir que je relirai ce chef d'œuvre.



La cerise sur le festin littéraire est à trouver dans les notes de Yourcenar. Ici elle nous livre quelques détails sur la recette.



Évidemment ce livre a de l'Allure et répond à toutes les exigences (historiques, littéraires, narratives, linguistiques, syntaxiques et etc ...) pour entrer au Panthéon.



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Mémoires d'Hadrien

Cela faisait longtemps que je voulais découvrir l'auteure Marguerite Yourcenar et en particulier son «Mémoires d'Hadrien», chef-d'oeuvre publié en 1951. Il trainait dans ma PAL depuis quelques années déjà, mais je dois avouer que le mot «mémoires» dans le titre me faisait lourdement hésiter, la peur de m'ennuyer peut-être ou que cela soit un peu trop indigeste... C'est le challenge Livre Historique 2019 de BazaR qui m'y a décidé cependant, c'était l'occasion ou jamais, et comme j'ai bien fait !



Bluffée...

Je suis bluffée par ce roman.



Bluffée par l'écriture de Marguerite Yourcenar.

Si sa plume ne m'a pas paru facile, - il faut se donner du temps et être au calme pour l'apprécier - elle a en revanche le mérite de nous immerger totalement dans les paysages et palais contemplés, dans cette ambiance romaine à travers les pensées et réflexions de l'empereur Hadrien. C'est bien simple, j'avais réellement le sentiment que c'était Hadrien qui s'exprimait.



Bluffée par les éléments historiques qui y ont été introduits, que ce soit les nombreux personnages historiques (philosophes, écrivains, artistes, politiciens, généraux militaires...), les anciens noms de royaumes ou encore des évènements sociaux ou militaires. L'auteure a su magistralement mélanger L Histoire et son interprétation des pensées de l'empereur. Le carnet de notes, ajouté à la suite du roman, aide à mesurer le travail de recherche (et de lecture) colossal effectué par Mme Yourcenar pour accoucher un tel ouvrage.



«L'une des meilleures manières de recréer la pensée d'un homme : reconstituer sa bibliothèque.»



Hadrien est au crépuscule de sa vie. C'est l'heure pour lui de faire le bilan de son parcours, de ses objectifs atteints ou pas, mais d'apporter également ses réflexions plus générales sur l'homme et son avenir. Il s'adresse pour cela au jeune Marc-Aurèle qui deviendra plus tard empereur à son tour.



Le roman est découpé de manière chronologique, chaque partie développant les différentes étapes jalonnant son histoire :

-sa jeunesse et sa progression militaire et sénatoriale qui l'amèneront vers le pouvoir,

-son projet impérial avec ce qu'il souhaite mettre en place et laisser derrière lui (un empire en paix avec de nombreuses constructions),

-sa période heureuse avec Antinoüs, ses voyages à travers l'empire et sa passion pour la culture héllénique,

-l'après Antinoüs, marqué par le deuil bien sûr, mais aussi par un investissement total dans les réformes.

-ses dernières années dans sa villa de Tibur et le choix du successeur...



J'y apprends pour ma part beaucoup de choses sur cet homme qui s'était donné pour mission de pacifier l'empire pour y faciliter l'agriculture, le commerce, mais également développer la culture et l'instruction avec entre autre l'établissement de bibliothèques. Son règne est marqué par une volonté de réformer et de construire. Un de ses voeux les plus chers était de redonner à Athènes ses lettres de noblesse...

J'y ai également appris sa passion pour les femmes, mais aussi son affection pour le jeune bithynien Antinoüs, une rencontre qui marqua profondément sa vie (il sera son favori et amant) et qui le plongera dans une profonde affliction lors de la mort mystérieuse et brutale du jeune homme. Hadrien fondera en son honneur la cité de Antinoé, aujourd'hui disparue, au bord du Nil où il sera divinisé...



Au-delà du portrait de cet empereur, on mesure que c'est un roman extrêmement riche, qui nous laisse méditer sur l'évolution des hommes, sur l'avenir de notre civilisation, sur les conséquences des choix qui sont fait par ceux qui ont le pouvoir et leur responsabilité, sur le chemin emprunté jusqu'à ce jour par l'humanité et le questionnement sur celui à suivre...



Il y aurait bien d'autres choses à en dire encore, mais je crois que le mieux est de le lire soi-même...



Challenge Livre Historique 2019
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Mémoires d'Hadrien

Roman historique, retraçant la vie de l'empereur romain Hadrien, de sa jeunesse jusque sur son lit de mort.



Homme de dialogue et de paix, cultivé, sensible et sage , il essaiera de moderniser et d'unifier son empire, en améliorant les conditions de vie des esclaves et des femmes, en s'opposant aux inégalités , aux abus. Homme amoureux de la vie et de sa patrie, il voudra prolonger son œuvre, en prenant soin de bien choisir son successeur, lui faisant part de ses passions, de ses curiosités et de ses espoirs.



C'est un visionnaire qui a foi en l'humanité, la liberté et la justice, même s'il est conscient que le chemin pour atteindre ce monde meilleur est semé d'embûches et d'éternels recommencements. La tâche est rude et il faudra plusieurs générations de sages empereurs comme lui pour accomplir sa vision du monde futur.



Marguerite Yourcenar a imaginé les mémoires de ce grand empereur, elle a voulu «refaire du dedans ce que les archéologues du XIXe siècle ont fait du dehors».

C'est un voyage dans le temps, avec de multiples détails historiques et, même si l'écriture de marguerite Yourcenar est très belle , je m'y suis parfois égarée, l'ennui me gagnant par moment. J'ai cependant aimé cette rencontre avec Hadrien, sa soif de découverte et son désir de se connaitre, de pénétrer jusqu'au plus profond de son âme , de la conscience de soi.
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Conte bleu - Le premier soir - Maléfice

C'est un lecteur dans la mediatheque où je travaille qui me l'a conseillé et notamment "Le premier soir"

Je n'avais pas encore lu de roman de Marguerite Yourcenar.

Ce livre est constitué de trois nouvelles : "Conte bleu", "Le premier soir" et"Maléfice".

Je n'ai lu que "Le premier soir".

Un jeune couple en voyage de noces se rend en Suisse pour leur lune de miel. Cela peut ressembler à une romance mais pas du tout. La femme encore vierge, romantique à souhait, est calme et discrète. Mais ici, nous avons plus la pensée du mari qui imagine sa femme, alors qu'elle est belle, au vieillissement futur de son épouse et pense allègrement à son ancienne maîtresse. Bref c'est un gougeat !

Heureusement que c'est une nouvelle très bien écrite par le père de l'autrice et que celle-ci a remanié. L'intrigue est fine mais je ne me suis pas complètement plongée dans cette histoire. Ce que j'ai aimé en plus de l'écriture, c'est que cette nouvelle se passe principalement dans un train et j'adore les romans où les histoires se passent dans les trains. Ça donne un côté romantique ou mystérieux selon le récit.

C'est une critique en demi-teinte que je laisse sur Babelio.
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