Dans la chaleur moite de la Nouvelle-Orléans, Blanche, un personnage excentrique mais perdu, se rend chez sa soeur et son beau-frère avec qui l'entente ne sera pas au rendez-vous, leur relation se developpant entre haine et violence, sentiments qu'accompagne une musique de fond en accord, sans cesse présente.
Je ressors de cette lecture complètement chamboulée. N'ayant jamais vu le film (ce que je compte changer rapidement), j'avoue que ce n'est pas du tout le type d'histoire ou de sujet auquel je m'attendais. La frivolité et l'excentricité de Blanche qui agace dans un premier temps fini par être remplacé par de la pitié, et la brutalité de Stanley laisse par moments entrevoir une vraie tendresse et surtout un grand amour pour sa femme. Entre les deux, Stella, déchirée par l'amour qu'elle leur porte.
Je confirme le sentiment de malaise qui nous envahi à la fin de la pièce, on ne sait plus trop quoi ressentir pour chacun d'entre eux, c'est dur et malsain, pour les personnages et pour nous lecteurs.
L'écriture a aussi certainement joué un grand role car une fois ouvert, je n'ai pas pu le lacher. Je n'ai pas été dérangée par les descriptions qui je trouve permettaient de parfaitement s'imaginer la scène, le cadre, les sons voire les odeurs, je les ai trouvées particulièrement immersives.
Je pense que je tiens là un autre coup de coeur pour cette année 2019, encore une fois pour un livre que je n'imaginais pas voir atteindre de si hautes marches dans mon coeur de lectrice.
Club de lecture pioche dans ma pal
Challenge USA
Challenge multi-defis 2019
Challenge theatre 2018-2019
Commenter  J’apprécie         190
Quelle peste cette Blanche Dubois! C'est une nana de la pire espèce, transmettant son malheur à tout le monde qu'elle rencontre. Pourtant, celle dont l'avenir paraissait prometteur, une famille aisée, un bon métier (enseignante), un mari,... a vu tout à coup sa vie s'écrouler comme un château de cartes.
Tout n'est pas de sa faute, certes, mais quand même, Blanche a une fâcheuse tendance à la jalousie et à la manipulation. Et à force de mentir, elle finit par se trouver dos au mur.
Et c'est là qu'on la trouve, au début de la pièce, arrivant comme un volcan chez Stanley Kowalsky, l'ami de sa soeur Stella à la Nouvelle Orléans.
Et quelle surprise ce fut pour Blanche d'arriver dans cet appartement glauque, elle qui avait l'habitude de lieux plus fastueux. Et que d'inquiétude de voir sa soeur, enceinte, vivre avec pareil type, tout juste débarqué en Amérique, violent et vulgaire à souhait.
Dans cette vie où Stella a trouvé un relatif équilibre, grâce à son amour immodéré pour Stanley, Blanche va arriver ici comme dans un jeu de quilles.
Cette pièce de théâtre, bien connue pour son interprétation au cinéma, n'est pas toujours aisée à lire (au vu des nombreuses didascalies) , mais elle apporte sa quantité d'émotions.
Commenter  J’apprécie         190
Challenge Petits Plaisirs 2014/2015
Challenge Variétés 2015
Catégorie : Un livre qui a gagné le prix Pulitzer (1955)
"Une chatte sur un toit brûlant" est une pièce de Tennessee Williams de 1954 en trois actes qui a remporté le Prix Pulitzer en 1955. Au cœur du delta du Mississippi, dans une riche plantation de coton, la famille Pollitt se rassemble autour du patriarche mourant pour son dernier anniversaire. Une longue et chaude soirée où les tensions vont éclater sous le poids des non-dits.
Un chef de famille qui use de sa toute puissance pour diriger le clan d'une main de fer, qui est lucide quant aux personnalités qui l'entourent et qui adore son dernier fils. Celui-ci, ancien sportif de haut niveau, brisé depuis la mort de son meilleur ami, n'assume pas son homosexualité . Sa sublime femme, surnommée la Chatte, souffre de l'inattention et du manque d'affection de son mari. L'ainé de la famille, Gooper, s'échine avec sa femme Mae à donner l'image d'une famille exemplaire voire modèle et n'hésite devant aucun stratagème pour s'assurer la meilleure place sur le testament. Bref, une famille aux problèmes multiples proche du point de rupture alors que le patriarche est sur le point de disparaître, rongé qu'il est par un cancer dont il n'a aucune idée.
Une pièce forte qui nous emporte dans ce tourment familial à travers de nombreuses oppositions comme l'amour/la haine, la vie/la mort, le désir/le rejet, etc. Très vite on s'attache au couple Brick/Margaret contrairement à celui de Gooper/Mae particulièrement antipathique, de même on apprécie la figure du "Père" tout-puissant et on s'étonne de sa tolérance surprenante pour les années 1950. Personne n'est épargné, les souffrances sont multiples et ne trouvent pas réellement d'apaisement. La soirée est bien trop courte pour que la catharsis opère mais déjà les premiers abcès se percent. Pour autant, les blessures sont bien trop vives et profondes, touchent de trop près la sensibilité de l'âme pour qu'un retour en arrière soit possible, il ne reste plus alors que la fuite de la réalité par l'absence, l'alcool et les illusions.
Un très bon moment avec cette toute première version de la pièce, celle entièrement revendiquée par Tennessee Williams. Une pièce qui jusque dans sa création, sa rédaction et son adaptation a été source de conflits, de souffrances, de sentiment de trahison et d'amertume mais qui reste un chef d'œuvre incontournable du théâtre américain.
Commenter  J’apprécie         180
Parce que j'allais voir une représentation théâtrale de "La Chatte..." j'ai, heureusement, relu le texte et découvert par la même occasion "La descente d'Orphée".
Quel texte et quelle pensée, quelle sauvagerie dans la rage et l'appétit, l'angoisse, le désespoir de vivre.
La représentation théâtrale, a été de mon point de vue, une adaptation hors sujet : la première partie, traitée façon théâtre de boulevard (en voilà une conception originale !) et la seconde, dans un ton grinçant.
Supprimés tout ce qui nous ramène à l'absence d'intimité : pas de lieu où échapper au regard, aux oreilles des autres, sauf en devenant un professionnel de la dissimulation. Cette chambre conjugale, joue un rôle principal : c'est un vrai hall de gare. Chacun y déboule quand bon lui semble, sans crier gare, et quand la porte est close, des oreilles épient à la porte, aux murs, les conversations téléphoniques, les cris des enfants., des domestiques envahissent la pièce. La rage d'épier, sous le prextexte de prendre soin de l'autre, de le comprendre, ou de défendre les siens est toujours le moteur de toute action. Et ce plaisir, de coincer l'autre dans une case ! Il faut avoir la rage de vivre et de s'en sortir pour faire table rase des préjugés et conquérir une liberté. De quoi étouffer dans cette maison de verre et de papier où tout se voit, où tout s'entend. Et quand Brick parle de la cage de verre de son métier de chroniqueur sportif ne parle-t-il pas du cadre de sa vie ? Lui aussi est devenu un "regardeur" d'autres qui vivent en pleine possession de leurs moyens physiques et intellectuels. Un regardeur regardé et étiqueté comme ces insectes mis sous verre.
Est-il homosexuel ? "Grande" question ! Qu'est-ce qui l'a cassé ? La mort de son ami d'enfance et, surtout, la prise de conscience qu'il n'aura plus jamais ni la force, ni l'insouciance de sa jeunesse ? Cette femme qu'il a aimé et qui exige de lui qu'il se comporte en adulte ? Ce père qui doit affronter la venue de sa propre mort, cesser de dissimuler sa haine pour sa femme, l'ainé de ses fils, assumer sa préférence pour ce fils alcoolique au charme nonchalant, qui essaie de le fuir, lui, le père, qui a gagné sa toute puissance. Ou bien réalise-t-il qu'il n'a rien fait de sa vie et qu'il préfère se réfugier dans une sérenité d'oubli. Pauvre Brick. Il se retrouve rejeté, abandonné par la mort de son ami, coincé entre cette épouse trop séduisante et ce père carnassier. Faut dire qu'ils se ressemblent le Grand Père et Margareth en grands prédateurs dans la hyénitude de cette famille. Violent et âpre, sans pitiè.
Tout aussi violent et cruel "La descente d'Orphée". Là encore, c'est une société qui s'épie, qui dépéce celles et ceux qui ne leur ressemblent pas. C'est une société qui vit comme dans un fortin interdisant son accès, aux "pièces-rapportées", celle épousée-achetée à laquelle son moribond de mari ne laissera aucune chance de lui survivre pour faire autre chose de SON bien, celle qui se réfugie dans la peinture, artiste dont le talent est reconnu, mais qui préfére s'aveugler de ses visions pour mieux transcender la réalité de la cruauté de son shérif de mari, celui qui seulement armé d'une guitare s'est arrété au mauvais endroit, et puis l'"erreur de la nature", celle qui vraiment n'a rien de commun avec cette famille, cette communauté. C'est surement elle, l'oiseau sans pattes, "il ne peut pas se poser et il passe toute sa vie à planer dans le ciel", et si elle réussit à ouvrir tout grand ses ailes, à devenir "couleur de ciel", alors elle échapera à ses congénères, ces oiseaux de proie qui ne l'attraperont jamais parcequ'ils ne la verront "même pas, au sommet du ciel, près du soleil."
Au fond, cette mauvaise mise en scéne m'a permis de redécouvrir un fabuleux écrivain.
Commenter  J’apprécie         180
Un de mes auteurs préférés. Une de mes pièces préférées aussi. « La Chatte sur un toit brûlant » de Tennessee Williams. Immortalisée par Élisabeth Taylor et Paul Newman.
États-Unis, une famille, deux couples viennent rendre visite au grand-père malade. Il y a Maggie et Brick, couple qui bat méchamment de l’aile à cause de la mort de Skipper, meilleur ami de Brick ; une mort que ce dernier met sur le dos de sa femme. Une Maggie frustrée parce que son mari refuse par conséquent d’accomplir son devoir conjugal.
Et il y a Gooper, le frère de Brick, et son épouse qui, comme Maggie, veulent faire main basse sur l’héritage du grand-père mourant. Mais Gooper aura des efforts à faire, Brick étant le préféré des deux frères aux yeux du patriarche.
La famille va s’entredéchirer, Brick sombrer de plus en plus dans l’alcool, son couple atteindre un point de non-retour, malgré les tentatives de Maggie pour raviver la flamme.
Une histoire de famille, d’héritage, d’autodestruction, de déchéance conjugale, de luxure, de fuite face à un quotidien disloqué par trop déprimant. C’est un registre dans lequel Tennessee Williams est particulièrement brillant, avec sa façon géniale d’écrire son intrigue à tiroirs de façon à suivre les différentes relations. On ment, on charme, on désire, on hait, Les personnages sont fouillés et attachants, même quand ils ont mauvais caractère. Tennessee Williams les a dessinés avec épaisseur. Un classique juste incontournable.
Commenter  J’apprécie         170
La pendule… La pendule de Tennessee Williams. ! .. « Va te faire foutre, pendule, espèce de petit simulacre nickelé, à une patte, de mon cœur, et allez vous faire foutre, vous aussi, points de suspension, terribles points qui trahissez ma répugnance à me considérer comme quitte ou à estimer la phrase parfaitement achevée. La pendule complète chaque phrase d'un tic-tac ; ses battements sont brefs, nettement marqués, et ils se poursuivent obstinément jusqu'à que la pendule s'arrête de contrefaire le cœur parce qu'elle est au plus bas. » Le temps que l'on crée, et cette pendule qui va, …. Ce n'est pas l'histoire….Plutôt quelques grandes pages . Une époque, un village. Greenwich Village. Spirales Blue-Jay. Moïse allume sa dernière cartouche . Lance, n'est plus. L’entrepôt est désert. La fièvre glisse sous la glace. Et pourtant rien n'arrêtera jamais « le temps d'après minuit ». Un jardin livre , un terrain drague, un radeau ivre, une vague de jazz..Semelles de nuit sur la poudre des visages. Déclaration d'amours de Tennessee Williams au Village. La pendule qui va et cette plume qui bat.. Cygne de Baudelaire, …. « Je pense aux matelots oubliés dans une île, Aux captifs, aux vaincus !... à bien d'autres encor ! »…Un texte magnifique au rythme surprenant. Une toile maîtresse.
Astrid Shriqui Garain
Commenter  J’apprécie         160
Ecrite à la fin des années 60, cette pièce reprend des thèmes déjà traités dans "La ménagerie de verre" ou dans "Soudain, l'été dernier". Le drame familial, le poids de la mère, l'identité sexuelle, la mort, etc...
La pièce est courte et sans doute, faudrait-il la voir jouée.
La revue "L'avant-scène théâtre propose le texte de cette pièce de T.Williams dans son numéro d'aout 2011 suite à la représentation donnée au théâtre Edouard VII avec Johnny Halliday dans le rôle de Chicken et ce, malgré les indications de l'auteur qui précise "C'est un homme jeune -dans les trente-trente-cinq ans".
Commenter  J’apprécie         150
Brick en veut à son épouse Margaret : pour lui, elle est responsable de la mort de Skipper, son meilleur ami. Mais la jeune femme refuse cette accusation et veut retrouver l'amour de son mari. « On est plus solitaire avec un homme qu'on aime et qui ne vous aime pas que si l'on vit toute seule. » (p. 99) Elle veut aussi faire barrage à son beau-frère et à son épouse qui, avec leur tripotée de marmots, voudraient faire main basse sur la fortune du Grand-Père. Le vieil homme est persuadé d'avoir échappé au cancer, mais regrette de ne pas avoir mieux profité de la vie.
Attention, soirée explosive ! Venez assister au bal des hypocrites, des indiscrets, des aigris, des jaloux, des rancuniers, des avides et des tristes ! Les portes claquent, les mots blessent et personne ne se gêne pour annoncer tout haut ce qu'il attend vraiment. Au moment de la répartition finale, reste à savoir qui obtiendra quoi.
On est ici très loin de la comédie de boulevard à la française. Ici, c'est plutôt drame antique dans la chaleur étouffante du Sud américain. Ce n'est pas de tout repos, ni pour les nerfs ni pour les oreilles. Âmes sensibles, pensez à prendre un éventail et un tonique !
De Tennessee Willimas, j'avais déjà vu et lu et adoré Un tramway nommé désir. Si les romances mièvres vous laissent froid, jetez un oeil du côté de cet auteur sulfureux !
Commenter  J’apprécie         150
Ce livre ancien et précieux est un très beau cadeau que m'a fait mon mari. J'y tiens particulièrement parce qu'il s'agit d'une adaptation par Jean Cocteau de l'excellente pièce de Tennessee Williams "Un tramway nommé Désir" avec une belle couverture illustrée d'une lithographie bicolore de Jean Cocteau. On trouve également dans cet exemplaire de 1949, quatre lithographies pleine page de Cocteau en noir et blanc, qui accompagnent le texte.
Cocteau a repris la traduction de Paule de Beaumont mais il a procédé à quelques changements de vocabulaire peut-être pour américaniser le texte puisque Stanley va au bowling plutôt que d'aller jouer aux boules et ils boivent du Coca cola plutôt que du soda.
Bref, rien de bien différent par rapport au texte d'origine que j'aime beaucoup et que je ne me lasse pas de relire.
Au Vieux Carré, le quartier français de la Nouvelle-Orléans, Blanche Dubois débarque chez sa soeur Stella et son beau-frère Stanley Kowalski avec ses fourrures, ses rêves, son désir… déchirée entre sa libido et son idéal de pureté. Elle a pris « Un tramway nommé désir », comme un écho, pour s'installer dans leur petit appartement modeste où ces personnages bruts, torturés et complexes, vont s'affronter en huis clos dans une ambiance chaude et pesante.
Avant d'être adaptée au cinéma par Elia Kazan, cette pièce de théâtre culte a été jouée pour la première fois en 1947 à New-York et Londres et l'adaptation française de Cocteau a été créée à Paris au Théâtre Edouard VII en 1949 avec dans les rôles titre Yves Vincent et Arletty.
Je suis très fière d'avoir ce livre précieux dans ma bibliothèque.
Challenge Coeur d'artichaut 2022
Challenge XXème siècle 2022
Challenge Multi-défis 2022
Challenge ABC 2021-2022
Commenter  J’apprécie         140
Moiteur de la Nouvelle Orléans, intrigue et confrontation... Un grand classique de Tennessee Williams et du théâtre américain.
Commenter  J’apprécie         140
Lecture proposée dans le cadre scolaire, j’ai lu cette pièce dans sa langue d’origine, à savoir l’anglais.
Tennessee Williams nous fait ici le portrait d’une petite communauté de basse extraction vivant dans un quartier de la Nouvelle Orléans, près d’une rue nommé « A Streetcar Named Desire ». Dans un appartement mitoyen vivent Eunice et Steve, ainsi que Stanley et Stella. Cette dernière a la particularité d’être issue d’une riche famille du Mississipi dont les origines remontent aux Huguenots français. Stanley Kowalski est lui de parents immigrés polonais, et tout dans ses manières transpire le manque de culture et de tenue qu’il compense par une agressivité et un comportement bestial sans pareil. Malgré tout, Stanley et Stella vivent heureux, jusqu’à l’arrivée de Blanche Dubois, sœur de Stella et parfait modèle de la Southern Belle.
Obsédée par son âge et son apparence, sujette à des crises d’hystérie, Blanche apporte une mauvaise nouvelle : la perte de la plantation de Belle Rive, héritage familial désormais disparu. S’indignant devant les conditions modestes de vie de sa sœur, elle mettra un certain temps à s’apercevoir des liens qui unissent Stella et Stanley : basés sur l’amour brut et l’attirance physique, leur relation est passionnée et pleine de désir.
Dans cet environnement et se sentant vieillir, Blanche cherche par tous les moyens à trouver un homme qui veuille d’elle pour se poser enfin et oublier son passé chaotique et son premier mariage fini tragiquement.
A travers onze pièces prenant pour la plupart place dans l’appartement des Kowalski, Tennessee Williams nous montre une femme totalement désespérée par ses premiers échecs, qui tente de respecter l’étiquette de la parfaite femme du Sud, plongée au milieu d’un océan de désir qui la terrifie puisque c’est ce même sentiment qui l’a brisée. Entre passions et sentiments bestiaux, cette pièce est véritablement prenante, profonde et complexe ; le triangle Stella-Stanley-Blanche explosif, qui mène sans déviation possible au dénouement final, attendu et cruel, mêlant à leurs paroxysmes désir et dédain, sexualité et violence.
Je noterai également pour les cinéphiles que le film tiré de la pièce est excellent et vaut vraiment le détour.
Commenter  J’apprécie         140
J'ai encore un vague souvenir du film d'Elia Kazan (1951), et surtout de la prestation extraordinaire du jeune Marlon Brando. Aujourd'hui je suis tombé sur le texte de la pièce de théâtre éponyme. Tennessee Williams a créé trois personnages très forts, difficiles à oublier: Stanley, un "mâle" sensuel et sans aucun raffinement; son épouse Stella, qui a cet homme dans la peau; et surtout Blanche, une femme exaltée, instable, énigmatique. Elle trouble l'équilibre du couple, en débarquant inopinément chez sa soeur. Cherchant un homme à épouser, elle se révèle mythomane et veut cacher ses secrets.
L'auteur insiste sur l'ambiance tropicale de la Nouvelle-Orléans et sur les habitudes de gens simples (les jeux de cartes, l'alcoolisme, la promiscuité). Il évoque le déclassement social et les relations de pouvoir (notamment de l'homme sur la femme). Souvent, on n'est pas loin de la cruauté mentale. le lecteur et (a fortiori) le spectateur ressentent nécessairement un malaise, voulu par l'auteur. Tennessee Williams mène l'action de main de maître. D'ailleurs, il donne des indications extrêmement précises sur la mise en scène de la pièce.
Commenter  J’apprécie         120
"La nuit de l'iguane" : encore une merveilleuse pièce de Tennessee Williams. Quel talent avait ce type là ! Je n'en reviens pas.
... le talent de planter à chaque fois un décor d'une quotidienneté à vous donner le bourdon (ici une auberge misérable située dans trou de la côte mexicaine) où échouent des personnages au bout du rouleau, enlisés jusqu'au cou dans leurs problèmes matériels et existentiels.
L'aubergiste vient de perdre son mari et tient seule un hôtel bar restaurant, aidée de deux jeunes mexicains qu'elle esclavagise à ses risques et périls (ils sont asservis, mais on craint tout du long qu'ils ne relèvent la tête) ; Surviennent un pasteur défroqué, dépressif et porté sur les mineures, un autobus coincé dans la chaleur, une famille de vacanciers nazis (on est en 1940), une adolescente en pleine crise d'identité sexuelle, une vieille lesbienne peu accommodante, une artiste désargentée conduisant son grand-père poète, malade et centenaire dans un périple insensé...
... la mèche est allumée. Est-ce que ça va flamber ?
Je ne le dirai pas : Tennessee Williams est le vrai magicien de l'exploration de l'âme humaine en temps de crise. Il travaille à l'économie de moyens, ne pratique pas le spectaculaire, mais procède comme l'archéologue, par coups de pinceaux successifs pour dégager "le lait de la tendresse humaine" (façon de parler, parfois c'est du lait, parfois autre chose...)
Et l'on arrive à la fin de la pièce, encore avides de savoir comment tout ça va finir, quand survient l'avertissement habituel " That's all folks !".
Et chaque personnage poursuit sa route poussiéreuse, s'éloignant sans un signe de la main vers un avenir qui ne sera sans doute même pas imprévisible.
Le spectateur, un peu frustré, se demande à quoi il a assisté.
A rien d'autre qu'à la double transmutation de la vie en art et de l'Art en Vie : Vie pas même expliquée, juste exposée, là, présente comme elle ne l'est jamais pour ceux qui la vivent.
Commenter  J’apprécie         110
Première pièce à succès du grand Tennessee Williams, - La ménagerie de verre - est certainement dans son oeuvre théâtrale, la plus autobiographique. On y retrouve en effet tous les thèmes récurrents qui jalonnent son parcours d'écrivain : la relation fusionnelle avec sa soeur, puis le drame vécu par celle-ci. La relation traumatique au père, celle plus névrotique à la mère. L'homosexualité et la sensualité d'une manière plus générique. L'alcool. Le Sud. Et naturellement l'écriture. Ces thèmes ne sont pas une liste exhaustive de ce géant de la littérature, mais des composantes incontournables.
J'ai lu quelques critiques, et je ne trouve pas que cette pièce ait vieilli. Elle est intemporelle comme le sont toutes les grandes oeuvres d'art.
Elle se lit bien.
L'immersion est immédiate.
Les personnages sont forts et touchants.
Il est impossible de sortir de cette heure et demie passée en compagnie d'Amanda, de Laura, de Tom, de Jim... du père absent-présent dans son cadre et... de la licorne... sans être imprégné de la trace de leur passage dans notre coeur , du souvenir de leurs visages et de leurs voix... car une des grandes forces de cette oeuvre, c'est qu'en les lisant, vous les voyez et vous les entendez.
A lire et à relire !
Commenter  J’apprécie         110
"On a tous quelque chose en nous de Tennessee" et je dois avouer que moi jusqu'ici j'avais surtout du Johnny...
J'ai découvert dans ce recueil de nouvelles qui se passent dans le sud-est des États-Unis une écriture pleine de comparaisons et d'images, à la fois un peu floue et très détaillée ("l'été [est] concave et insatiable"), avec une belle justesse des sentiments, et des histoires qui sont un flirt entre réalisme et songe nonchalant né au creux d'un après-midi chaud où rien ne bouge.
Commenter  J’apprécie         110
[Notes de lecture en cours] J'ai appris très récemment que Tennessee Williams avait écrit des nouvelles. Pour moi, il était l'auteur de théâtre génial, qui n'avait pas son pareil pour les angoisses existentielles noyées dans l'alcool, le sexe et les comportements épileptiques.
Le recueil contient 25 nouvelles, des plus anciennes aux plus récentes, précédées d'une préface de Gore Vidal et d'un texte de l'auteur, que l'on pourrait décrire comme un portrait de famille au vitriol.
Le Vieil Homme dans son Fauteuil. Franchement, s'il n'était précisé que ce texte est une préface, sorte de confession de l"auteur, on pourrait le prendre pour une nouvelle, et de très belle facture. Le personnage du père et ses rapports avec son fils (Tennesse Williams, en l'occurrence) et sa belle-mère sont tour à tour décalés, empruntés, tendres... C'est sincère. C'est direct.
Introduction de Gore Vidal. Une fois n'est pas coutume, j'ai lu la préface et elle permet d'appréhender l'auteur et ses démons. Gore Vidal décode bien le style et les angoisses d'un écrivain majeur.
La Vengeance de Nitocris. Véritable preuve du génie de Williams (s'il n'en fallait qu'une), ce texte a été écrit à 16 ans... Les yeux fermés, on sait qu'il est pour Weird Tales. C'est inratable. Et on perçoit toute la distance qui existe entre le guerrier cimérien de R.E. Howard et la reine Nitocris de Williams. Un personnage est un héro pour ado, sans que cela soit péjoratif, et l'autre est (déjà) adulte. N'est pas un de mes textes préférés, mais on perçoit toute la capacité de Williams à dépeindre les passions.
Un Sac de Dame en Perles.En quelque sorte, l'arroseur arrosé... un SDF qui rapporte un sac à une riche bourgeoise qui s'en fout. On a toute la hargne, l'écriture acerbe de Williams au service d'un joyau de cynisme et d'humour noir. C'est grinçant et percutant.
"...Dans Tolstoï, je pense"
Une idylle dans le Mississippi
'J'entends le bruit de ses pas"
Vingt-sept camions pleins de coton
Sable
Dix minutes d'arrêt
"Je te donne une pomme"
En souvenir d'une aristocrate
La chambre noire
L'oriflamme
Parenthèse
Les cochenilles
Il y avait quelque chose en lui... Un bijou d'humour noir. La société bien-pensante est croquée en quelques pages. Une chute digne de ce nom. On retrouve l'atmosphère de ses meilleures pièces.
Un reclus et son hôte. Une nouvelle très dure, désespérée. Un grand cru.
Heureux 10 août. Un tête-à-tête très sombre, morbide et plein d'humanité. Williams soigne la chute.
La période années 70 est à mes yeux plus pauvre, moins novatrice et moins percutante. Les collaborations de Williams à Playboy ou à Esquire, deux magazines de charme, ou à Antaeus ne comptent pas parmi les meilleurs textes, et à mes yeux la raison est évidente. D'ailleurs, quand on regarde sur Wikipedia les entrées Esquire ou Antaeus, T. Williams n'est pas cité parmi les auteurs importants ayant collaboré à ces magazines. On ne s'étonnera pas de trouver pas mal de sexe (et explicite) dans les textes. Les nouvelles sont : L'inventaire à Fontana Bella, Miss Coynte de Greene, Sabbatha et la solitude, Une vie achevée, Das wasser is kalt, La mère au pian, Le poulet tueur et la folle honteuse. En ce qui me concerne, La mère au pian sort du lot. Plus rugueuse, plus humaine et sociale, mais elle n'atteint pas les oeuvres de jeunesse.
Commenter  J’apprécie         110
Ce livre contient deux pièces de Tennessee Williams, "Soudain l'été dernier" et "Le train de l'aube ne s'arrête plus ici".
J'aime tout dans ce théâtre. Plus que Shakespeare, plus que les classiques français. Pour moi, il y a Tennessee Williams et le Faust de Goethe... Ah ! et aussi Don Juan de Molière, et Mademoiselle Else d'Arthur Schnitzler. Mais ce n'est pas une pièce de théâtre. Ça pourrait.
Je suis tellement émerveillée par cette puissance de révélation de l'âme humaine et du tragique que je ne sais trop quoi en dire : silence respectueux.
Si quand même : il y a l'omniprésence de la mort, que chaque être ne rencontre qu'une fois et qui le hante pourtant.
Parfois quelqu'un vous aide à passer le seuil, parfois non. Mais il y a pire que la mort, et c'est l'absence en pleine vie, celle qui résulte d'une opération chirurgicale pratiquée directement dans le cerveau et qui vous ôte à vous-même.
C'est terrible, c'est la terrible condition humaine, et on ne sait même pas si on a été aimé une fois.
Lecture ravageante. Exponentielle. Qui vous conduit droit en enfer ou à l'acquiescement.
---
Mrs Goforth : Pas la moindre révélation ? Il n'avait pas la moindre révélation à faire ?
Chris : Si, cette nuit-là, c'était le silence, la signification du silence.
Mrs Goforth : le silence ? la signification du silence ? C'est-à-dire ?
Chris : L'acceptation.
---
J'en ai des frissons, comme en écoutant l'Ave Maria de Schubert interprété par une voix féminine ou une chanson des Doors.
Commenter  J’apprécie         100