J'ai lu
Dans l'oeil de Sobakine comme une ode aux fictions, une fiction sur les fictions, sur celles qu'on se raconte, sur celles et ceux qui les racontent, et comment elles se racontent.
Thomas, le personnage principal, se dévoue fanatiquement au visionnage du film Polya, chef d'oeuvre du génial réalisateur soviétique Alexeï Sobakine. La vision qu'il se fait du monde se construit de plus en plus autour de l'oeuvre et son créateur, et quand le récit du réel de Thomas se confronte à d'autres, les choses tournent au drame. L'auteur est de toute évidence fasciné par nos manières de nous raconter des histoires : les petits récits de vie quotidienne viennent se mêler aux visionnages d'un film aux tons dantesques et post-apocalyptiques, les raisonnements complotistes s'opposent à un sens commun aussi raisonnable qu'inacceptable, la quête personnelle du protagoniste converge avec un récit médiatique qui la dépasse, la vie du réalisateur Sobakine ne se distingue plus du mythe qu'on a construit autour de lui…
Dans l'oeil de Sobakine est un roman éminemment cinématographique et cinéphile, mais reste un roman avant tout. La langue synesthésique d'
Aurélien Bedos peint les images et crie les sons. le livre ne se contente pas de décrire la chose audiovisuelle, il l'invoque. C'est une oeuvre tantôt burlesque, tantôt grotesque, parfois tendre et parfois horrifique, toujours haletante, toujours prenante.
Un livre apocalyptique à recommander sans hésiter.