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EAN : 9781090566003
Editions du Mauconduit (19/01/2012)
4.24/5   53 notes
Résumé :
1960, entre Sèvres et Boulogne-Billancourt, des lycéens, majoritairement anticolonialistes, se forment à la politique à travers ce qu’on appelle alors « les événements d’Algérie ». Les auteurs sont allés à la rencontre de multiples voix
— catholiques, PSU, communistes, gaullistes, pour ou contre l’Algérie française — afin de montrer comment
la guerre d’Algérie — avec ses règlements de compte, ses tortures et ses ratonnades exécutées en plein Pa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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J'avais découvert ce livre choc il y a quelques années ; je viens de le relire et en ressors toujours aussi ébranlée.

Elaboré à partir de documents historiques et de nombreux témoignages, ce récit graphique poignant, réalisé en noir et blanc, par Désirée et Alain Frapier revient sur une des périodes les plus troubles de notre histoire : celle de la Guerre d'Algérie. Les auteurs nous en rappellent brièvement le contexte, les éléments marquants du conflit, les atermoiements du gouvernement en place, l'importance du Parti Communiste de l'époque et cette guerre qui n'en finit pas, faisant toujours plus de victimes de part et d'autre. Ils insistent sur le climat angoissant qui règne à Paris en particulier et sur la jeunesse idéaliste et militante, avide de liberté, de paix et de justice.

C'était le 8 février 1962 - voilà 60 ans - après une série de plastiquages sanglants perpétrés par l'O.A.S., une manifestation pacifiste est organisée. Malgré l'interdiction des milliers de Parisiens défilent pour la paix en Algérie et pour protester contre le fascisme et la violence de l'O.A.S. Des ordres de répression et de maintien de l'ordre sont donnés par le préfet Papon, la police charge brutalement et va piéger sauvagement des manifestants qui tentaient de se réfugier dans la station de métro Charonne. le bilan est lourd : 9 morts et 250 blessés.

Cet événement tragique est relaté à la première personne du singulier, d'après le témoignage d'une amie de Désirée Frapier, Maryse Doueck-Tripier, lycéenne de 17 ans à l'époque, et rescapée de la station Charonne où elle a cru mourir et dont elle a subi des séquelles. C'est poignant, bouleversant et parfaitement véridique.

Le plus scandaleux est que la presse de l'époque et la censure ont minimisé ce drame et communiqué leurs versions des faits ; puis les accords d'Evian ont été signés et le gouvernement français a préféré oublier la guerre d'Algérie et dissimuler ses horreurs (les combats, la répression, la torture…). Ce n'est que depuis plusieurs décennies que la parole se libère et qu'un effort de mémoire est fait. Il était temps !
Combien d'années se sont écoulées avant d'évoquer le drame de Charonne ? Pour ma part, ce n'est qu'en 1977, au cinéma, en regardant le film de Diane Kurys, Diabolo Menthe, que j'en ai pris connaissance. Une des jeunes élèves, Pascale, dans un monologue passionné provoque l'émotion en racontant cet événement. Auparavant c'était l'oubli complet ou le mensonge par omission. Il en fut de même pour la manifestation pacifiste des travailleurs algériens, le 17 octobre 1961 ; ils protestaient contre le couvre-feu qui leur était imposé par le préfet Papon. La répression ultra violente provoqua le massacre de dizaines (peut-être de centaines) d'Algériens qui furent jetés dans la Seine.

Comme l'écrit Benjamin Stora dans sa préface, les deux événements historiques, longtemps étouffés, sont intimement liés et doivent le demeurer "définitivement comme signe de fraternité entre l'immigration ouvrière algérienne et les militants en France qui ont refusé la guerre livrée en Algérie".
Un oubli impossible.
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Maryse Douek-Tripier en a "marre d'être une rescapée", elle a gardé le silence sur le moment le plus douloureux de sa vie. Elle se confie à Désirée Frappier sur le massacre à la station de métro Charonne, le 8 février 1962.

La première bande dessinée des éditions Mauconduit est un document historique qui revient sur cet épisode tragique et peu connu.

Un véritable travail d'historien de Désirée Frappier, qui a mené une enquête auprès de plusieurs personnes, présentes et témoins au moment du drame. Depuis la préface de Benjamin Stora : "Le respect des faits historiquies et de l'émotion est un exercice toujours délicat", écrit-il "Mais tout cela est mis en scène finement, avec une sobriété bienvenue, un sens aigu des situations et ce goût du détail qui installe une atmosphère", jusqu'au témoignage de l'héroïne.

On vit aux côtés de Maryse au fil de pages, d'autres sujets sont abordées, comme l'exode des juifs égyptiens au moment de la guerre israélo-arabe, l'attente des papiers en France..., même le quotidien des lycéens français des années 60 est évoqué.

Une leçon d'histoire sur chaque planche dessinée sans que l'on ne s'en rende compte.

charonne2Une très belle reconstitution de l'époque et des événements qui ont conduit aux 9 morts du métro Charonne.dans-ombre-charonne-magnifique-eclairage-sur-fevrier-1962_4_6388881

Férue d'histoire, je dois dire que cette BD m'a beaucoup apporté ! Elle a contribué à m'éclairer sur la guerre d'Algérie, la réaction en France de la population et des politiques... La France presque coupée en deux, les associations, les débats à l'école, dans les cafés...

Quand j'entendais parler de Charonne, cela faisait juste référence à un évènement de l'histoire de France, puisque ce que je l'avais appris lors de mes cours...

D'autres dates ont été évoquées lors du procès de Papon fin des années 90, notamment son implication lors de la manifestations des travailleurs algériens du 17 octobre 1961 contre le couvre-feu qu'il avait imposé en tant que préfet.

Mais je ne savais pas (honte à moi) que le 8 février 1962, des gens étaient morts écrasés dans les escaliers du métro. Que les policiers avaient jeté sur eux les grilles en fonte qui bordent les arbres.

Pourtant je connais bien cet endroit, cette station... sans savoir ... ces escaliers .... le 8 février 1962...

Une BD qui décrit, comme si on y était, l'appel à la dispersion de la manifestation dans le calme, la charge de la police, la furie, la panique, les corps piétinés et en panique qui cherchent à se réfugier dans la seule voie de secours qui s'offre à eux : la bouche du métro Charonne...

Une manifestation sauvagement réprimée, qui fut un vrai choque à l'époque, ce qui a amené à s'interroger sur les pratiques de maintien de l'ordre en France...

Une reconstitution historique très précise et documentée de manière sérieuse, sans être pesante.

Une belle initiative de devoir de mémoire dans le domaine de la BD.
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En 1962, Maryse a 17 ans. L'ambiance en France est alors très tendue. Après 8 ans de guerre, l'indépendance de l'Algérie devient inéluctable et les « événements d'Algérie » attisent les discussions entre les lycéens qui se forment alors à la politique. Imprégnée d'idéalisme, la jeunesse de l'époque est souvent anticolonialiste, influencée par les écrits de Jean-Paul Sartre ou d'Aimé Césaire. Surtout, les jeunes gens sont révoltés par les attentats perpétrés par l'OAS. C'est donc tout naturellement que Maryse et ses amis décident de participer à une manifestation visant à dénoncer les exactions de l'OAS et la guerre d'Algérie. Ce 8 février 1962, malgré l'interdiction du préfet de l'époque Maurice Papon, la foule est nombreuse et diverse : lycéens, membres du parti Communiste, syndicats…Tous se rassemblent pour manifester pacifiquement. Mais on ordonne aux policiers de charger la foule et la répression est terrible.

Ce roman graphique, que j'ai trouvé pour ma part remarquable, nous fait revivre un pan de l'histoire de France que beaucoup aimerait effacer. La guerre d'Algérie, vécue de l'intérieur par le peuple français, appartient à notre histoire. Car si la guerre d'Algérie en Algérie a été atroce, la guerre d'Algérie en France a elle aussi été terrible. Des épisodes très sombres jalonnent cette période : les massacres d'Algériens perpétrés par la police française le 17 octobre 1961 lors d'une manifestation, les ratonnades en plein Paris, les pendaisons dans le bois de Boulogne, les sévices et passages à tabac quotidiens, … Tout cela a bien existé en France et n'est pas si éloigné de nous. Dans « Dans l'ombre de Charonne », nous revivons un de ces drames, celui de la station de métro Charonne durant lequel neuf personnes ont trouvé la mort. On découvre, horrifié, comment la violence policière s'est déchainée sur les manifestants. le préfet de police en place, le sinistre Maurice Papon, n'hésite pas à recourir à d'anciens miliciens pour «repousser » la foule. On ne s'étonne plus alors des méthodes employées… Les dessins, les organigrammes, les textes et les montages de documents, les photos, tout est habilement agencé pour faire de ce roman graphique un vrai récit documentaire, sans évincer pour autant les émotions. Les détails sont nombreux et l'atmosphère des années 60 (que je n'ai pas connue !) est palpable : tout y est, la seconde guerre mondiale encore très présente, les années lycée réservées à une élite, les rendez-vous au café, l'OAS et ses attentats, les discussions et les tensions entre lycéens…

En lisant ce livre, j'ai découvert un partie de notre histoire que je ne connaissais pas. J'ai également compris la référence à Charonne dans la chanson de Renaud « Hexagone » :
« Ils sont pas lourds, en février,
À se souvenir de Charonne,
Des matraqueurs assermentés
Qui fignolèrent leur besogne,
La France est un pays de flics,
À tous les coins d'rue y'en a 100,
Pour faire régner l'ordre public
Ils assassinent impunément. »

Avec ce livre, je me suis vue aux côtés des manifestants et j'ai tremblé avec eux. Une évocation et un témoignage saisissants que tous nos lycéens devraient lire.
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Je ne connaissais pas cet événement tragique du 8 février 1962 avec ce massacre de manifestants par la police parisienne. D'ailleurs, en prenant ce livre, je croyais lire une BD sur la manifestation du 17 octobre 1961 ; elle aussi une tragédie dont la police est là aussi la coupable meurtrière (le livre fait d'ailleurs beaucoup le lien entre les deux événements).
Dans cette BD, on retrouve le témoignage de Maryse Douek, militante du Parti communiste qui vivra cet événement en étant victime de cette fameuse bouche de métro où elle failli mourir étouffée. Cet ouvrage laisse aussi la parole à de nombreux autres témoignages qui montreront toute la violence de cet événement. Une violence policière inouïe et aussi une classe politique aux abonnés absents qui taira cette tuerie.
Le livre est extrêmement complet pour traiter de cet événement en montrant toute la complexité de l'époque avec en toile de fond la guerre d'Algérie, le racisme ambiant, les actes terroristes de l'OAS, l'opposition entre les pour et contre l'Algérie française, les colonialistes et les anti, la droite, les fascistes, les communistes, la police constituée des pires racistes, des anciens collabos… bref, une description très interessante de cette France du début des années 60 et qui se délite a cause de cette guerre d'Algérie interminable et terriblement clivante.
Ces témoignages sont passionnants mais surtout essentiels pour la mémoire de ces victimes dont les bourreaux n'ont jamais été inquiétés.
On a du mal à imaginé une époque si violente, que le pouvoir politique cautionnait aussi pour pouvoir se débarrasser de ce conflit algérien qui ne portait même pas le nom de « guerre ».
J'espère que ce livre pourra rétablir la vérité et mettre en lumière cet événement qui a vu des innocents tués par une violence policière cautionnée par la hiérarchie et par le pouvoir politique.
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Une bande dessinée historique qui retrace le début des années 60 à Paris qui vit la période troublée des dernières années de la guerre d'Algérie. Une lutte sans merci entre les pro indépendance et les anti, la montée de l'OAS, le traitement ignoble réservé aux algériens de Paris (la fameuse nuit où la police jeta des personnes vivantes manifestant pacifiquement dans la Seine...) jusqu'à cette tragique nuit du 8 février 62 à Charonne.
Un récit courageux et nécessaire sur ces événements qui ont longtemps été passés sous silence. Une réhabilitation des manifestants morts ou traumatisés par une certaine police de l'époque et leur "bidule" massacrant, ainsi qu'un parcours individuel intéressant. Le noir et blanc renforce la beauté du récit.
A mettre entre toutes les mains!
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critiques presse (1)
BoDoi
26 mars 2012
La ligne limpide et le noir et blanc au contraste doux d’Alain Frappier achèvent de donner son caractère hautement crédible à cette reconstitution minutieuse et passionnante.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Pendant de nombreuses années, la confusion était grande entre les massacres d'Algériens à Paris le 17 octobre 1961 et Charonne. Puis, par le combat inlassable mené par les enfants de l'immigration algérienne, la date du 17 octobre 61 a enfin acquis une grande visibilité. Il faut maintenant que ces deux dates, 17 octobre 61 et 8 février 62, soient définitivement liées comme signe de fraternité entre l'immigration ouvrière algérienne et les militants en France qui ont refusé la guerre livrée en Algérie.
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Pour nous, la colonisation, c’est la réponse à la question de Jean Seberg, dans le premier film de Godard, parce que nous avons beau chercher, nous ne trouvons pas d’autres mots pour la définir : dégueulasse.
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La guerre d'Algérie nous suit depuis l'école primaire, et plus ça va, plus elle est partout.
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Ne pas reconnaître ses crimes, c'est à dire ne pas reconnaître les victimes, n'est- ce pas au fond continuer de transmettre un message qui dit que la vie des uns ne vaut pas la vie des autres ?
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Comme dit l'autre : la République n'est pas toujours une bonne mère.
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