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EAN : 9782847345650
494 pages
Tallandier (19/03/2009)
4.15/5   20 notes
Résumé :

Toujours redoutées, souvent dénoncées et parfois brillées, les sorcières hantent l'imaginaire occidental. Elles sont de tous les âges. Les Grecs avaient les leurs et nos sociétés contemporaines continuent d'en cultiver l'image. Mais que sait-on vraiment des sorcières et de leurs charmes ? Quelles fonctions leur ont été attribuées ? Et surtout, quelles représentations a-t-on projetées su... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Je viens de clouer une patte de lapin sur ma porte, avant d'écrire ce commentaire, pour me préserver de tous sortilèges.
On ne sait jamais !..
*

Elles ont toujours fasciné autant qu'elles ont effrayé.
Elles ont charmé et elles ont jeté des sorts aussi.
Elles ont été poursuivies, chassées, accusées, condamnées, emprisonnées, torturées et brulées.
Mais les sorcières auxquelles on attribuait des pouvoirs surnaturels, auxquelles on leur accordait la faculté d'opérer des maléfices à l'aide du diable, font partie de l'inconscient collectif et survivront des siècles encore.
*

La professeure Colette Arnould, n'est pas historienne, mais elle a fait un énorme travail de recherches et j'en suis admiratif. Elle s'est documentée et a consulté des livres sérieux et de référence comme « Histoire de l'Inquisition au Moyen-âge » d'Henry Charles Lea, un pavé de 1458 pages.
*

L'auteure, nous brosse un portrait très fouillé sur ce que furent ces étranges créatures surnaturelles depuis l'Antiquité à nos jours.
La sorcière était ignorée à l'époque des dieux de l'Olympe, Médée entre autres, évoquait plus la fureur sanguinaire d'une femme jalouse qu'une magicienne.
Cependant en Grèce comme à Rome, ce sont les Dieux qui déjà dirigeaient l'univers. Des Dieux bienfaisants, mais aussi des Dieux maléfiques.
De la religion, à la superstition et à la magie, il n'y avait qu'un pas.
*

Mais c'est à l'arrivée des grandes religions monothéistes et à celle du Christianisme en Occident, que les magiciennes de l'Antiquité glissèrent inévitablement à la sorcière des temps modernes.
Une sorcellerie occidentale qui prit une multitude de visages au cours des siècles.
L'Ancien Testament qui fut mis en place, révélait alors la lutte entre Dieu et le diable. Une lutte dont le diable devait sortir vaincu avec tous ceux qui avaient conclu un pacte avec lui.
*

Dans les civilisations très anciennes, la femme était souvent vénérée et adulée. Mais elle était aussi un être énigmatique, comme la femme l'est dans son corps même, secret, caché. L'homme la craignait autant qu'il la convoitait. Pour lui, elle devenait parfois une source d'angoisse.
Olivia Gazalé dans « le mythe de la virilité » écrivait que l'homme ignorant était fasciné par cet être sans pénis, fasciné par son sexe comme une bouche mystérieuse d'où jaillissait la vie.
Mais où l'homme avait peur en y entrant, de se perdre, de se faire dévorer son appendice, de se faire engloutir, de se faire castrer et donc de perdre sa toute sa virilité.
*

Ce sont les Ecritures saintes ou pas, qui ont fait précipiter la femme dans d'éternels tourments et souffrances. Ces Textes dits « sacrés », ces Evangiles, tous écrits par la main des hommes, qui avaient gardé une méfiance ancestrale envers le féminin et qui étaient alors incapables de penser que la femme était son égale.

La femme sera donc Eve, « la tentatrice », celle qui fit perdre à Adam le jardin d'Eden. Elle sera le vice, la séduction, la perfidie. Elle sera considérée comme le maillon faible chez les humains, celle qui se laisse trop facilement corrompre par le diable.
Il fallait donc que les hommes se protègent d'elle, de sa lubricité, de ses charmes, de ses attraits, de ses intrigues, de sa beauté souvent diabolique.
Il fallait la faire disparaitre de l'espace publique et surtout l'enfermer pour qu'elle ne nuise à aucun homme. Il fallait lui retirer tous pouvoirs qui pourraient mettre l'homme en danger.
Aujourd'hui encore, dans certains pays et au nom de Dieu, la femme doit rester soumise et silencieuse. Elle doit rester couverte, pour ne pas dévoiler sa peau ou ses formes impudiques qui pourraient séduire les hommes.
Aujourd'hui encore, dans certains pays, la femme est assignée à se cloitrer dans une cage d'étoffe.
*

C'est à partir du XIe siècle, qu'une image concrète du diable commence à se dessiner. Un diable qui sera le symbole du mal, mais aussi du traitre et du félon.
Les théologiens et certains philosophes de l'époque sont convaincus que Satan existe et qu'il prendra toutes formes sur terre.
Pire, Satan sera l'incube, ce démon qui pénétra dans le sommeil, les femmes pour les violer.
Il s'apparentera au dieu Pan de l'Antiquité grecque, avec ses pieds de bouc et son dard en érection.
Le Moyen Age le transformera en un diable nocturne qui copulera avec des femmes endormies et ou des sorcières pendant leurs sabbats.
*

L'Inquisition médiévale fut fondée par le pape Innocent III en 1199. le seul but de ce lugubre tribunal ecclésiastique était de lutter et réprimer par la violence, le délit « d'hérésie ».

« Les hérésies » étaient des mouvements contestataires qui remettaient en cause les dogmes et l'emprise dictatoriale du clergé catholique.
Les dissidents religieux les plus connus furent les Cathares et les Vaudois.
La répression contre ces hommes, ces femmes et ces enfants fut d'une cruauté totale. Les premiers bûchers furent élevés.
*

En 1484, le pape Innocent VIII reconnait l'existence de la sorcellerie et donne tous les pouvoirs aux inquisiteurs pour pourchasser, arrêter et condamner les sorciers et les sorcières.
En 1486, les inquisiteurs Henri Institoris et Jacques Sprenger publièrent le terrible « Malleus Maleficarum - Marteau des sorcières », un Manuel de procédure que les juges devaient suivre à la lettre dans toutes les affaires de sorcellerie.
Cet ouvrage qui fut réédité des dizaines de fois jusqu'à la fin du XVII siècle, attisait entre autres, la peur du mal incarné dans la femme accusée de sorcellerie.
Une sorcellerie qui fut décrite comme une nouvelle secte commettant l'hérésie suprême, celle de l'adoration du démon.


Par la suite, c'est par une bulle pontificale de 1536, que le pape attribua à l'Inquisition d'autres taches toujours plus sanguinaires, concernant le luthéranisme, l'islam et encore la sorcellerie.
Même en ces temps de la Renaissance, il y avait des calamités, des épidémies et des catastrophes naturelles. Il fallait des boucs émissaires sur lesquels décharger l'agressivité. C'est ainsi que les juifs, les étrangers, les marginaux, les guérisseurs, les femmes de mauvaise vie furent soupçonnés de commerce avec le diable.
*

Et c'est donc en fin XVe siècle, que l'Eglise fit élever les plus grands bûchers dans toute l'Europe
Des bûchers qui flamberont pendant trois cents ans de folie persécutrice.

"Le Moyen Age a jeté l'anathème sur l'hérétique, il jettera l'opprobre sur la femme."écrit Colette Arnould.

La diabolisation destructrice des femmes pouvait alors commencer.
*

Mais qui étaient ces dites sorcières ?

Avant d'énumérer qui elles étaient, Colette Arnould tente d'expliquer le pourquoi « La sorcière ».
L'auteure écrit ceci :
- « Qu'il ne suffit pas de dire qu'une certaine image de la femme au Moyen Age, associée au diable, au péché et à la sexualité a trouvé tout naturellement une concrétisation dans la sorcière.
Il faut aussi chercher ailleurs et prendre en considération en ensemble d'éléments imbriqués les uns aux autres, faisant intervenir une dimension psychologique, sociologique et culturelle dans lesquelles le rôle de l'inconscient n'est pas non plus négligeable. »

Lesdites « sorcières » étaient généralement de pauvres femmes et des jeunes filles qu'on accusait à tort d'avoir fait des pactes avec le diable, de s'être offerte charnellement avec lui et d'avoir participer à des orgies rituelles, des messes noires et des sabbats.
On y trouvait les guérisseuses qui connaissaient les vertus des plantes et qui avaient un certains savoir qui dérangeait. On y comptait des faiseuses d'anges, des prostituées.
Etaient dénoncées et accusées souvent de simples femmes que certaines personnes jalousaient. Une belle-mère qui reprochait à sa bru d'avoir fait un adultère ou un homme qui avait été humilié par une femme qu'il convoitait.
La sorcière pouvait être aussi une femme simple d'esprit, car à cette époque où Freud et Jung n'étaient pas encore nés, les malades mentaux étaient tous considérés comme des possédés du diable.
*

Jeanne d'Arc fut accusée de sorcellerie, d'hérésie, d'apostat et subissant 70 chefs d'accusation et fut condamnée aussi comme devineresse.
Elle fut surtout celle qui transgresse, qui usurpe le rôle de l'homme et qui dérangeait.

La dernière sorcière brûlée sera Anna Gödlin, exécutée en Suisse en juin 1782.
*

L'inquisition fut pour moi une organisation criminelle, des plus honteuses que l'Eglise Catholique ait créé. Des prélats se sont acharné avec toute leur folie et leur névrose, sur des milliers d'innocents et d'innocentes.
La torture et les assassinats furent d'une barbarie et d'une violence inouïe.

Des hommes d'église hideux, possédés eux même par le diable, alors qu'ils le cherchaient chez les autres.

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Ce livre retrace l'histoire de la sorcellerie de l'antiquité au siècle des Lumières.

Si la pratique de la magie existait déjà dans l'antiquité, c'est à partir du Moyen-Age que Satan prend une place de plus en plus importante. Les sorcières sont indissociables du diable puisqu'elles pactisent avec lui afin d'obtenir ses faveurs. Apogée du diable et donc de l'hérésie, tout devient suspect et démoniaque : les épidémies, les maladies, la sexualité...

Certaines communautés vont être particulièrement visées et seront qualifiées d'hérétiques. C'est le cas des cathares, des vaudois et bien sûr, des juifs. Ces derniers sont réputés pour leur pratique de la magie. L'Etat et l'Eglise instaurent peu à peu des peines qui ont pour but de piller leurs fortunes et en profitent pour s'enrichir au passage.

La répression va s'élargir et l'Inquisition va apparaître comme un moyen de punir les hérétiques et notamment les pratiquants de la sorcellerie. le Manuel d'Eymerich (1376) et le Malleus Maleficarum (1486) seront le fondement de cette pensée, appuyée par une bulle du Pape Innocent VIII qui met en garde contre la sorcellerie.

S'il existe des sorciers, les femmes seront les premières concernées par l'Inquisition. Elles sont considérées comme des êtres vils par nature, après tout, Eve en est la preuve. Leur sexualité, leur mentalité, leur emprise sur les hommes, elles deviennent maléfiques par essence. Les sorcières seraient à l'origine du déclenchement de tempêtes, confectionnent des filtres magiques, utilisent des pierres magiques, participent à des orgies mais elles sont aussi responsables de cas de possession. Elles sont le Mal.
D'ailleurs, le Sabbat prend une place place importante. Lors de cette fête, où les sorcières se rendent en volant sur des balais, on y rencontre le diable lors de banquets et d'orgies. Tout cela est très documenté puisque les sorcières finissent toujours par avouer leurs méfaits... grâce à la pratique de la torture. Une fois accusé d'acte de sorcellerie, il est difficile voire impossible de s'en sortir.

Contrairement aux idées reçues, l'apogée de la chasse aux sorcières ne se déroule pas au Moyen-Age mais entre 1601 et 1650. Il y a alors un véritable fanatisme de la part des inquisiteurs et des théologiens, les bûchers ne manquent pas de combustibles puisque tout le monde devient suspect. Il faut dire que la Réforme protestante au XVe siècle a contribué à ce que l'ambiance générale soit encore plus tendue : pour Luther le Pape et l'Antéchrist et l'inverse est vrai pour le Pape.

Finalement, grâce à une avancée des mentalités, la dénonciation des superstitions par des philosophes et l'avancée de la médecine (détection de maladies, de troubles du comportement...), les choses commencent à changer. La fin de la pratique de la torture, qui permettait d'obtenir facilement des aveux, sera aussi un facteur de la fin des procès en sorcellerie. Il faudra attendre XVIIIe siècle pour que les bûchers s'arrêtent.


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🧙‍♀️🔮 #WITCHES

Depuis la nuit de temps, elles intriguent, elles effraient, mais surtout, elles fascinent.
Cachées sous de grands chapeaux noirs, drapées dans des tenues aux couleurs toujours plus sombres, elles sont ancrées dans l'imaginaire collectif depuis des siècles.
La sorcière a connu bien des visages : de la vieille femme ridée et repoussante à celle dotée d'une beauté envoûtante, preuve de cette magie malsaine : chaque époque, chaque religion, chaque communauté véhicule, construit, et transmet sa propre conception de la sorcière.
Qu'elles soient adulées ou redoutées, guérisseuses ou messagères du diable, Colette Arnould s'est intéressée à tout ce qui avait construit ces mythes et légendes autour de nos fameuses sorcières.
Avec une précision et un travail de recherche minutieux, on est embarquée dans ces années d'hystérie et de paranoïa collective, de chasse aux femmes et de superstitions absurdes.

En dehors de la simple figure de la sorcière, on se rend vite compte que le sujet est bien plus vaste, touchant directement la place et le rôle des femmes au sein de la société et des différentes époques.
C'est un livre historique à la modernité confondante et troublante sur certains points.
Une lecture enrichissante, intelligente, et milles fois intéressante.
Finalement, les sorcières ne seraient-elles pas les premières féministes ?

À lire pour celles et ceux qui aiment comprendre d'où viennent nos légendes et superstitions.
À offrir à ta copine qui regardait Charmed, les yeux remplis de magie !
« Histoire de la sorcellerie » est écrit par Colette Arnould et publié aux éditions Texto.

Et vous les sorcières, ça vous inspire quoi ? 🧙‍♀️🔮
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Une étude intéressante et complexe. La première partie sur l'Antiquité était un peu corsée mais j'ai beaucoup apprécié la suite. L'analyse de l'apparition du diable puis de la sorcière. La place de la femme qui se dégrade après le moyen-âge, la peur pour dominer les foules. L'auteur a un bon esprit et l'écriture est agréable. Il y a beaucoup de références historiques et littéraires. Quelques exemples précis mais peu. On voyage à travers l'Europe également. On peut admirer l'idiotie, l'incohérence des hommes de foi et de tribunaux de l'époque. Vraiment vaste.
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Philosophe de profession, Colette Arnould fait ici oeuvre d'historienne en nous livrant une synthèse grand public de qualité ! Avec autant d'humour que de rigueur, elle nous fait traverser deux millénaires tourmentés par la fascinante question de la sorcellerie.
La citation des sources d'époque, en plus du recours à la bibliographie scientifique, nous offre un travail fouillé mais accessible à tous.
On regrette peut-être un passage un peu trop rapide sur la période contemporaine (XIXe-XXe siècles), pourtant tout aussi passionnante sur le sujet.
Chaude recommandation (avec ou sans bûchers) !
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Satan, sorcières et sorciers mèneront alors grand sabbat dans des œuvres littéraires où la sorcellerie fera figure de style.
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