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Pierre Plateau (Éditeur scientifique)Dominique Tiry (Préfacier, etc.)
EAN : 9782912222183
256 pages
Claire Paulhan (14/01/2003)
3.88/5   17 notes
Résumé :

" À force d'exigence et de retombements, de projets et de défaites froides comme l'averse qui donne la fièvre dont on crève à vingt ans, je n'attends plus rien que moi-même, ma belle petite âme que parachève et paraffine chaque jour la vie parisienne et son fouet à neuf queues. Je suis un jouet entre les mains, les lèvres des foules, où mon nom, ma petite identité qui aspirait au lyrisme est bala... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Née dans une famille d'artistes, adolescente précoce et rebelle, elle est amoureuse de Paul Fort à 14 ans, à 15 elle entretient une correspondance soutenue avec Apollinaire qui éditera son premier recueil.

Et débute ce journal de 1918 à 1929, "Le journal monstre".
Publié seulement en 2003 !
Une destinée digne d'un trésor bien caché et enfin retrouvé que ce Journal !

Elle meurt à 34 ans de la tuberculose.
Juste avant, se sentant perdue, elle le confie à son amie Ludmila Bloch-Savitzky, et tombe dans l'oubli.

Soixante-dix ans plus tard, la petite fille de Ludmila est dans sa maison de campagne. À la suite d'un violent orage et d'une infiltration, elle monte dans le grenier et redescend avec une petite mallette en cuir qu'elle n'avait jamais vue. Elle y découvre des lettres d'Apollinaire, de Reverdy, de Cocteau, ainsi que, et surtout, le journal intime de Mireille, dont l'éditrice Claire Paulhan saisit immédiatement l'éclatante valeur littéraire.

Ce journal débuté à 13 ans contient autant de poèmes en prose, d'auto-analyse, de témoignages insolents, de pamphlets, de billets, d'humeur-du-jour...

En 1918, à la fin de la guerre, l'enfant prodige se retrouve seule : presque tous ses amis, et Apollinaire le premier, sont morts. Elle s'étourdit, elle s'enlise.

Elle consomme aussi bien l'opium que les femmes, car elle est "invertie", mot qu'à l'adolescence sa famille lui jette à la figure comme une gifle, signe de son anormalité et de son "vice" (selon l'expression consacrée de l'époque).

Ses amours lesbiennes sont fébriles, toxiques : "Je suis plus orageuse que l'orage, plus sensuelle qu'un chat lunaire, plus méchante et brûlante que Satan." (1920) affirme-t-elle.

Désespérance désespérée, ces 5 tomes sont d'une lucidité extraordinaire sur une époque pas si révolue que cela...









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Elle parle de l'attente d'autre chose, d'une autre vie, de son ennui, mais aussi de l'ivresse du monde, de la ville, de la vie qu'elle mène. Elle parle de ses amours violentes, douloureuses. Elle parle de son amour pour les drogues : dans ce tome, ce n'est qu'évoqué, mais elle décrira par la suite sa descente aux enfers avec une lucidité incroyable.

L'écriture est magnifique. Totalement irréfléchie. Mais elle raconte sa vie avec un lyrisme, une poésie incroyable, notamment lorsqu'elle parle des femmes. Elle est envoûtante, totalement à son image, je pense, elle qui ensorcelait les femmes qu'elle croisait.

Ensuite, l'auteure elle-même est captivante. Elle est passionnée, fantasque et sensuelle. Fragile en même temps. Elle a vécu comme une étoile filante. Elle a préféré aimer plutôt que travailler. Elle a un regard impitoyable sur le monde et sur elle-même : elle est totalement consciente de ses défauts. Se décrit sans concession. Elle écrit comme elle vit.

Elle traverse les années folles, décrit la vie qu'elle mène, mais reste toujours actuelle. Ce qu'elle dit dans son journal est parlant, cent ans après.

Le pouvoir de séduction de Mireille est toujours intact, même cent ans plus tard.
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Ce livre est le premier tome du journal de Mireille Havet, jeune poétesse déjà célébrée à quinze ans par Apollinaire. La jeune femme écrit ici son quotidien fait de rendez-vous avec des "gens du monde", elle parle surtout de ses conquêtes féminines et de son désespoir amoureux.
J'ai apprécié le fait d'entendre une voix de jeune femme de cette époque post première guerre mondiale, ce qui est rare; et de voir un peu ce milieu bourgeois bohème où l'on croise Colette et Cocteau. L'écriture est parfois poétique avec de belles formules et images. En revanche, le style fait parfois trop dans le pathétique et ne paraît alors pas toujours naturel comme si ce journal était déjà destiné à être lu, on ressent aussi beaucoup l'influence du Rimbaud d'une saison en enfer. Par ailleurs, le fait que la narratrice parle presque exclusivement de ses amours lesbiens ne m'a pas touchée et mis plutôt mal à l'aise. de fait, je ne me suis pas vraiment attaché à l'autrice qui ne semble pas faire grand chose à part rechercher une vie mondaine. Malgré tout, il reste une ambiance et je lirai peut-être la suite.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Dimanche 26 janvier 1919
[...]
Depuis vendredi où j'ai souffert de la voir avec ce Maigret insupportable, je ne pense qu' à elle, m'obstinant au charme têtu et délicat de son visage, à ses yeux couleur de crépuscule, à ses longs cils soyeux qui caressent une joue enfantine, à son petit nez aux narines palpitantes, et à la bouche enfin, ravissante, entrouverte sur un sourire couleur de perle qu'elle offre à tous, la tête renversée, avec un battement de cil voluptueux, une irrévérence de petite fille coquette qui fend le coeur, car elle est si menue, si petite, avec des chevilles si fragiles que l'on a tout le temps peur qu'elle n'ait de la peine ou du mal. On voudrait la protéger, l'aimer, la défendre. Cependant, dès qu'elle abandonne son exquise politesse et sa puérilité, dès qu'elle parle de choses qu'elle croit plus sérieuses, c'est elle qui domine au contraire et qui combat. Sa voix très agréable et douce se durcit d'autorité, d'indifférence. On sent qu'elle pense : "je peux commander, dire ce que je veux, je suis riche et n'ai besoin de personne, car mon notaire me défend."
La façon également dont elle donne sa main à baiser prouve toute son assurance, son égoïsme, sa vanité. Il y a de la dureté en elle, toute une armure sous de la soie, une armure camouflée d'enfantillage, car elle redevient si petite par instants, si petite qu'on a envie simplement de l'embrasser et de l'appeler ma petite fille chérie.
Ne pas oublier cependant qu'elle a un intérieur de démon, rouge, or et noir, de tout petits divans durs à sa taille où elle s'étend comme une petite reine, trop douce pour ne pas être infernale et s'abandonner à toutes les voluptés, et qu'il faut se méfier d'elle, de sa grâce trop mièvre, de son changeant sourire, de son autorité suppliante et de sa douceur tyrannique.[...]
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Vraiment, je n'ai aucune liberté dès que les êtres m'attirent, aucune patience et je me consume dans l'attente, rêvant de miraculeuses concordances, de réalisations si rapides qu'elles ne seraient guère possibles, et quand l'aventure tombe enfin, comme un oiseau tué, dans ma gibecière, je suis déjà lasse, l'ayant vécue en rêve mieux qu'elle ne sera jamais !
Les femmes que j'ai le plus aimées, je ne les ai pas connues !

*

Si j'étais plus hardie, si je ne craignais le froid qui vous couche contre les talus comme des bêtes galeuses, si je ne craignais d'être malade dans les lits d'auberges sales où le soir tombe comme une prison de plus, si j'avais la force de tout risquer pour voir, je pourrais sans doute m'en aller à travers nos banlieues vers plus de ciel, plus de coups de vent, plus de silence.
Mais après… après il faudra revenir, vieilli, usé, courbaturé d'espace, refaire connaissance avec les amis, avec la ville, avec la foule, et retrouver la même ignorance, la même vanité, la même méchanceté, et mourir comme un chien dans la suprême indifférence du monde, où une lampe allumée sur le travail du soir, où la confiance d'un coeur en quête d'amour ne peuvent rien qu'alimenter la terrible ironie humaine.

*

On aime le mieux dans le silence.

*

La vie ne manque que les faibles, ceux qui pleurent et s'offensent de ses tours, de ses niches, de ses calembours. Mais les autres ! Allons donc, s'ils ne trouvent pas la fortune, ils trouvent du moins la corde raide, l'équilibre, le beau danger qui fortifie les âmes, qui met dans le regard plus d'orgueil et d'égoïsme… et dans le coeur plus de pauvreté, car l'amour n'est guère possible pour les trop pauvres, pour les trop fiers, pour les trop seuls. Le succès, sans doute, la sympathie, mais pas l'amour, jamais l'amour, car ce curieux chasseur n'aime que les fortunes, l'échange des sacs et des corps, l'achat et la revente, le tripotage, et moi je n'aime, hélas, que les sentiments purs, le romantisme sans tatouage, la jeunesse qui ne se paie pas.

*

J'ai peut-être acquis depuis une certaine expérience, car le jeu de mon amie m'étonne moins ce soir, et mes doigts souples répondent à la caresse des siens. Nous nous tenons mal et j'en ai conscience, mais la salle est si noire, l'orchestre si bête, le film si mauvais, et nous sommes si jeunes, que je me sens le droit de scandaliser l'univers.

*

Mon Dieu, on est un enfant, on vous élève avec soin et tendresse, on vous évite toutes les maladies avec angoisse, on vous protège contre le froid et la faim, et puis, une fois livre, une fois grand, on vous laisse en face de la vie afin que l'on jouisse de ses paysages, de sa beauté, et alors, traître, soudain, l'amour vient et met à bas vingt années d'apprentissage, défigurant votre âme et votre jeunesse mieux qu'aucune fièvre ne l'aurait fait !

*

Ne faut-il pas cruellement expier ses erreurs ? Mais du moins, je saurai que ce que je perds n'est pas grave, et j'emporterai dans ma solitude un mépris plus profond du monde, des femmes et de la bêtise humaine ! Car nous sommes faits pour la solitude, et je n'aime au fond que mon travail !
Les autres ! Tous ne sont pour moi que des pantins, qui illustrent l'admirable cadre de la ville ou des champs.
Je suis là pour écrire ! Ne l'oublions pas !

*

Les rêves m'emparent, je te l'ai dit. Au réveil, il faut vivre.

*

Donc, à quoi bon se dérober au mal, s'illusionner, ne pas se remémorer, et s'étourdir ! Autant briser son coeur le plus vite possible. Peut-être un coeur brisé vaut-il deux coeurs qui aiment ! Peut-être un coeur brisé connaît-il la compassion ?
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Nous sommes impénétrables les uns aux autres par le fait même que nous ne nous intéressons profondément qu'à nous seuls et que nous ne cherchons dans l'amour que l'intérêt, l'étonnement, l'admiration d'un autre, un spectateur intime dans les yeux duquel nous nous imaginons reconnaître nos défauts et nos goûts.
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Personne hélas ne pense à m'aimer, et je suis si malade, si hantée de tendresse, que j'arrive à redouter le moindre geste amical, de crainte de m'y perdre et d'y laisser tomber mon âme et ma fierté.
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Par amour de l'aventure, de l'ombre qui masque et de l'équivoque, j'ai préféré le mardi-gras où l'on pleure sous son masque, à tous les jours, et me voilà grimée pour la vie en pantin que rien ne casse, en fantoche de bois. Horreur !
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