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EAN : 9782842424145
120 pages
Éd. Circé (04/11/2016)
4/5   8 notes
Résumé :
Si la poésie amoureuse, comme le relevait Nadejda Mandelstam, tient une place quantitativement modeste dans l’héritage du poète, on ne saurait la qualifier de « périphérique » pour autant que ces quelques poèmes marquent des jalons essentiels de son parcours. Préparant, lors de son exil à Voronej, une émission radio sur la jeunesse de Goethe, Ossip Mandelstam notait que les femmes aimées avaient été pour le poète allemand « les passerelles solides par lesquelles il... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
C'est Soljenytsine qui remonte cette anecdote qu'au Goulag, il n'était pas rare qu'un décès fût déclaré des jours après pour profiter des parts de repas du mort. Chalamov aussi remonta cette pratique obscène observée au Goulag, mais cette fois le mort c'était Ossip Mandelstam le poète ..

Qui oserait dire que les ennuis, Ossip Mandelstam les chercha quand il écrivit en 1933 son poème Epigramme pour Staline dans lequel il ne mâcha pas ses mots à l'égard du tyran. Il convient de souligner ici le courage et l'audace inouis dont fit preuve alors le poète : défier ainsi Staline dans ses heures les plus sombres !

Staline n'aura pas connaissance de cette apostrophe qui lui était clairement destinée (de 16 vers précisons-le). Mais les vaches étaient bien gardées ..

En effet, un an plus tard, le poète est condamné à la relégation, il sauvera donc sa peau. Sa santé est précaire : il choisit comme lieu de relégation Voronej. Sa femme Nanejda est autorisée à l'accompagner : elle témoignera.
Il écrit les Carnets de Voronej.

L'année 1938.
"En février, bref et dernier voyage à Léningrad. Début mars, l'Union des écrivains lui offre un séjour à la maison de repos des syndicats, près de Tchérousti dans la région de Moscou. le 16 mars, lettre de Vladimir Stavski, dirigeant de l'union des écrivains, à Iéjov, qui doit servir de prétexte à la seconde arrestation de Mandelstam. Celle-ci a lieu à l'aube du 2 mai. le 2 août, condamnation à cinq ans de travaux forcés pour activités contre-révolutionnaires. le 7 septembre, départ de Mandelstam dans un convoi de prisonniers. le 12 octobre, arrivée au camp de transit près de Vladivostok. Après le 20 octobre, dernière lettre de Mandelstam adressée à son frère Alexandre et Nadejda ("Santé très faible. Epuisement extrême.. On ne m'a pas accepté pour la Kolyma. Peut-être passerai l'hiver ici.. Nadinka chérie, je ne sais pas si tu es encore en vie, ma colombe.."). le 26 décembre, le poète est envoyé à l'infirmerie du camp. le 27 décembre 1938, à 12H30, mort d'Ossip Mandelstam. Début janvier 1939, son corps est jeté dans une fosse commune près du camp".

Il n'existe qu'un chemin :
Celui de ta main légère ;
Comment trouver autrement
Le pays qui m'est si cher ?

Pour qui je vogue sans heurt
Vers mon rivage là-bas,
Porte ta main vers mes lèvres
Et ne la retire pas.

Les doigts minces sont tremblants
Et le corps frêle s'anime -
Mon esquif glisse au dessus
Des eaux, de leur calme abîme.

On ne peut pas oublier Staline -même si à tout jamais on voudrait sincèrement l'oublier au fond du trou où il s'est mis, le chasser de nos mémoires - , autant de fois que ne peuvent l'oublier ses millions de victimes. Oui on aimerait sincèrement pouvoir l'oublier. En tout cas, il n'y a pas de condition faite au poète pour qu'on n'oublie jamais ses bons mots. 4 09 2022. PG

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Les éditions Circé ont entrepris de développer une collection intitulée Les poésies d'amour. Neuf recueils y sont ainsi mis à l'honneur, et les auteurs russes ne sont pas en reste puisque l'on en dénombre déjà quatre dans cette collection : Alexandre Pouchkine, Anna Akhmatova, Marina Tsvetaëva, et Ossip Mandelstam sur lequel je vais m'étendre un peu ici.

Ce recueil – comme les autres de la collection certainement – est une compilation des poésies amoureuses de l'auteur choisies, traduites et commentées par Henri Abril.
La préface et la quatrième de couverture soulignent que la thématique de l'amour n'était pas particulièrement le domaine de prédilection d'Ossip Mandelstam, les poèmes amoureux sont donc proportionnellement peu nombreux par rapport à l'ensemble de l'oeuvre du poète.
Le traducteur en a pourtant sélectionnés pas moins de 46 rédigés entre 1908 et 1937 et les présentent ici dans leurs versions russe et française, avis aux amateurs bilingues !

Outre une première approche des écrits d'Ossip Mandelstam, cette compilation me permet de saisir l'importante évolution du poète aux cours des décennies.
Les poèmes de la période qui court de 1908 à 1917 s'adressent à des femmes décrites par fragments, elles apparaissent douces, fragiles, idéales voire divines et généralement inaccessibles, pudiquement érotiques parfois. Les femmes sont une allégorie de la Russie ou issues de la mythologie : Hélène, Phèdre, Cassandre…

Les poèmes qui suivent directement la révolution russe, de 1917 à 1920 me sont plus difficiles à saisir. La mort y est beaucoup plus présente, ainsi que la jalousie, l'inceste, la perte. On y parle moins d'amour et moins directement de femmes.

Jusqu'en 1925, Ossip Mandelstam n'écrit plus et les écrits datant de 1925 à 1937 sont très différents de ceux des premières années, plus concrets, l'auteur ne poursuit plus d'idéaux chimériques. Les femmes y sont plus vivantes, les descriptions plus précises et plus sensuelles, les beautés plus sincères et les déceptions plus amères, la douleur plus intime. Je suis nettement plus sensible à ces derniers écrits quoique le recueil regorgent de nombreuses perles à toutes les époques.
Lien : https://synchroniciteetseren..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il n'existe qu'un chemin :
Celui de ta main légère;
Comment trouver autrement
Le pays qui m'est si cher ?

Pour que je vogue sans heurt
Vers mon rivage là-bas,
Porte ta main vers mes lèvres
Et ne la retire pas.

Les doigts minces sont tremblants
Et le corps frêle s'anime -
Mon esquif glisse au-dessus
Des eaux, de leur calme abîme.

1909
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Pour réjouir ton cœur voici dans mes paumes
Un peu de soleil et un peu de miel,
Selon la loi des abeilles de Perséphone.

Nul ne peut détacher la barque à la dérive,
Nul n’entend l’ombre bottée de fourrure,
Nul ne peut vaincre la peur au bois de la vie.

Il ne nous reste plus que des baisers
Aussi velus que les minces abeilles
Qui meurent, à peine enfuies de leur ruche.

Dans les fourrés de la nuit elles bruissent,
La forêt du Taygète est leur patrie,
Leur pâture le temps, la mélisse et la menthe…

Prends pour réjouir ton cœur mon offrande sauvage,
Ce simple collier sec d’abeilles mortes
Qui ont su changer le miel en soleil !

1920
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Ta joyeuse tendresse…


Ta joyeuse tendresse
M’a troublé et surpris.
À quoi bon les discours,
Leur tristesse,
Quand les yeux comme des bougies
Brûlent en plein jour ?

Au beau milieu du jour …
Et une larme reste
– Souvenir de la rencontre –
Suspendue au loin ;
Et les épaules qui tombent
Sont relevés par la tendresse.
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Franchement je te le dis…


Franchement je te le dis,
O mon ange :
Chimère et cherry brandy,
Rien ne change !

Là où les Grecs ne rencontrent
Que beauté,
En trous noirs pour moi la honte
Seule bée.

Sur l’onde ils kidnappaient celle
Dite Hélène,
Moi je n’ai qu’écume et sel
Sur les lèvres.

Sur mes lèvres un seul baume :
Le néant ;
La misère ouvre ses paumes,
Me narguant.

Oh, vraiment, suis-je marri ?
Bagatelles !
Bois ton vin, ange Mary,
Tes cocktails !

Franchement je te le dis,
O mon ange :
Chimère et cherry brandy,
Rien ne change.
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Que m’est la musique…


Que m’est la musique
Des tendres louanges,
Des vagues d’amour
Qui en chants s’effrangent,

Puisque tes deux mains
M’appellent là-bas,
D’où viennent les sons,
D’où viennent les vagues,

Et le lin du soir
Est un corps transi
Dans le halo blanc
Où ton cœur frémit ?
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Videos de Ossip Mandelstam (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ossip Mandelstam
Prose et poésie d'Ossip Mandelstam (France Culture / Répliques). Photographie : Ossip Mandelstam, vers la fin de sa vie. © Mandelstam Centre, Moscou. Production : Alain Finkielkraut. Réalisation : Didier Lagarde. Avec la collaboration de Anne-Catherine Lochard. Diffusion sur France Culture le 19 mai 2018. Ossip Emilievitch Mandelstam (en russe : О́сип Эми́льевич Мандельшта́м), né le 3 janvier 1891 (15 janvier 1891 dans le calendrier grégorien) à Varsovie et mort le 27 décembre 1938 à Vladivostok, est un poète et essayiste russe. Il est l'un des principaux représentants de l'acméisme, dans la période dite de l'âge d'argent que la poésie russe connaît peu avant la révolution d'Octobre. Il écrit en 1933 une “Épigramme contre Staline”, qui lui vaut arrestation, exil, et finalement mort durant sa déportation vers la Kolyma. Évocation de la vie et de l'œuvre d'Ossip Mandestam dont Le Bruit du Temps publie une nouvelle traduction. « Le Bruit du Temps est une maison d'édition qui redonne confiance dans la vie intellectuelle. Après notamment l'immense poème épique de Robert Browning, “L'anneau et le livre”, et les “Œuvres complètes” d'Isaac Babel, voici que paraissent en deux volumes somptueux la prose et la poésie d'Ossip Mandelstam : “Œuvres poétiques” et “Œuvres en prose”. Je ne pouvais laisser passer une occasion si belle. J'ai donc invité celui qui a entrepris la retraduction de tous ces textes : Jean-Claude Schneider et l'historienne d'art Véronique Schiltz, qui a aussi traduit le poète Joseph Brodsky. Avant d'entrer avec eux dans l’œuvre fascinante et difficile, je voudrais demander à ces deux grands lecteurs ce qu'il faut savoir de la vie de l'homme dont nous venons d'entendre la voix. » Alain Finkielkraut
Invités :
Véronique Schiltz, archéologue et historienne de l'art française, orientaliste et helléniste
Jean-Claude Schneider, poète, essayiste et traducteur
Sources : France Culture et Wikipédia
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