Aymard de la Verrerie et Renaud Dupain sont les Roselmack et les Aliagas façon 1830.
Interview imaginaire de letizia
Bonaparte dont la question clin-d'oeil aurait pu être : racontez nous les « mille jours » qui ont marqué votre vie... Un genre de « 7 à 8 » mâtiné de « 50 minutes inside » écrit et documenté par
Patrick de Carolis.
Bien qu'un élan de modernité souffle sur cet entretien, on est loin de la verve romanesque de "
la Dame du Palatin". Sous les pavés de la révolution, les plages sont un peu longuettes, la moitié du livre est consacrée aux méandres des soulèvements et des émeutes et aux années avant 1800.
Durant cette longue période, Letizia proclame son attachement à la Corse, sa lutte avec Paoli pour l'autonomie et la reconnaissance de l'île (déjà).
Letizia raconte sa vie avec Carlo son mari, qui mourra jeune la laissant esseulée et pauvre. Elle en profite pour recadrer son auditoire sur la paternité de Nabulio. «Marboeuf n'a toujours été qu'un ami et Carlo mon mari est le père de mes enfants. » Ce qui cloue le bec de certains historiens !
Letizia se livre en direct de sa retraite romaine. Elle a 80 ans. Napoléon est indéniablement l'axe central de ce récit mais il est traité comme un élément de la fratrie
Bonaparte. Letizia est avant tout une mère, centre de cette famille qui distillera son amour avec la même force à chacun de ses 8 enfants. Cette maman au caractère rêche, infatigable luttera sans relâche pour que le clan conserve un restant de cohésion.
Frétillant de tremper leur plume dans l'encrier des souvenirs de Letizia, nous sommes d'emblée confrontés à la nonchalance de Joseph l'aîné, aux déboires de Julien au caractère et aux idées bien trempés. C'est d'ailleurs à cause de la discorde entre Julien et Napoléon que Letizia n'assistera pas au sacre de son Empereur de fils. Louis, lui, « restera » souvent derrière son célèbre frérot. Jérôme, encore petit, demeurera dans les jupes de sa mère.
Pour Napoléon, ses frères et soeurs étaient des pions sur l'échiquier de son pouvoir.
Passé 1er Consul, il s'agissait de conforter sa position pour qu'il puisse échanger d'égal à égal avec les familles régnantes européennes. Pour y arriver l'épée ne suffisait pas, il lui fallait la naissance, d'où sa volonté d'user de ses frères et soeurs pour contracter des unions de haut vol.
J'ai apprécié cet éclairage diffusé par cette mère véritable colonne vertébrale sentimentale des
Bonaparte, le petit bout de la lorgnette des amours des uns et de l'ascension politique et militaire des autres avec leurs réussites et leurs déboires.
De l'apogée en 1804 où Napoléon distribue les couronnes et les royaumes à la chute 10 ans plus tard, le fossé des trahisons et des rancoeurs s'est creusé. La fratrie explosera provocant l'indignation et le courroux de Letizia. Les beaux-fils et les belles-filles seront sans pitié, elle ne reverra jamais son petit fils, le duc de Reichstadt, fils de Marie-Louise et de Napoléon emprisonné chez son propre grand-père, l'empereur d'Autriche.
« Mon fils a abdiqué, l'empire s'est effondré mais moi, sa mère, inlassablement je le soutiendrai. »
Je conseille la lecture de ces « mémoires » pour le côté intime des
Bonaparte relaté avec ferveur par cette femme à la volonté sans faille. « Il me reste l'honneur de mon nom, et la légende de mon fils.» de la part de la mère de toutes les douleurs vous en verrez de toutes les couleurs.