Après avoir lu -
D'acier -, le premier roman à succès de
Silvia Avallone, je m'étais promis de revenir un jour vers son oeuvre, mais pas tout de suite, pas trop tôt... "Acciaio" m'avait, disons-le, marqué, et je voulais laisser du temps au temps.
Il y a trois jours, j'ai commencé -
Marina Bellezza -, le second roman de cette auteure... et j'ai été immédiatement happé par cette strega (c'est très respectueux et admiratif ) qu'est la Avallone.
Dans cette deuxième oeuvre S.A nous transporte dans le Piémont et plus particulièrement dans la petite ville provinciale de Biella (42 000 habitants), laquelle ville l'a vu naître, et qu'elle connaît et aime d'un amour "inconditionnel".
Ce chef-lieu et tous les villages, hameaux qui l'entourent ont subi l'exode de leur population vers les villes, pourvoyeuses d'emplois et de "rêves", et peu à peu s'enfoncent dans une mort lente aux couleurs de l'oubli.
Pour les uns, c'est une terre en friche. Pour les autres, c'est un Far-West à reconquérir et à rebâtir.
C'est dans ce décor et dans ce contexte que nous faisons la connaissance de Marina et de Andrea, deux jeunes vingténaires qui symbolisent ces deux visions de leur époque
Nous sommes en 2012, au coeur de cette crise où les repères ont été délaissés ou troqués contre de nouvelles illusions aux contours flous et aux lendemains très hypothétiques.
C'est d'un côté l'Italie Berlusconienne du paraître, du fric facile (pas pour tous !), des soirées champagne et bimbos à gogo, l'Italie de la globalisation, du capitalisme fou, des réseaux sociaux, des émissions de télé réalité pour lesquelles une partie de la jeunesse est prête à vendre son âme et tout le reste pour le fameux "quart d'heure de célébrité" cher à
Andy Warhol.
Et de l'autre côté, c'est l'Italie de ceux qui ont compris depuis un moment déjà que les lumières de la ville n'étaient qu'un leurre pour les jeunes papillons qui n'y trouvaient rien d'autre qu'un prétexte à s'y brûler les ailes et que leur salut résidait dans un monde à réinventer... quitte à revenir à leurs racines : la terre, les animaux, la nature. Bref, à l'authentique et au vrai, lesquels s'opposent aux mirages urbains qui, à leur tour, ont commencé leur déclin.
Andrea et Marina sont au coeur de cette histoire contemporaine où pendant que l'on rebat les cartes, on se demande à quel jeu nouveau elles vont pouvoir servir.
Mais Andrea et Marina, c'est aussi une grande histoire d'amour ( j'aurais dû écrire cela avec des majuscules...), l'Amour avec un grand A, l'amour unique, d'une vie... deux amants tragiques, deux amants magnifiques, deux amants maudits et inoubliables.
Deux jeunes blessés par leur enfance, par
L Histoire... deux jeunes qui ont une revanche à prendre sur la vie, mais en empruntant des chemins différents...
Le souffle romanesque que
Silvia Avallone insuffle à cette histoire, sa vision très générationnelle de notre monde et de notre époque, sa lucidité, son punch, son talent impressionnants ne peuvent que séduire le lecteur... qu'il appartienne à la génération de l'auteure ou à la mienne n'a aucune importance.
L'histoire est prenante, touchante, grave souvent, légère parfois, mais le premier mot ne peut que vous obliger à chercher votre salut (?) dans le dernier.
Cette boucle qui s'ouvre sur un cerf qui traverse imprudemment la route pour se refermer sur un cerf qui s'enfuit, mu par des instincts qui le dominent sans qu'ils les comprennent, cette boucle... je vous conseille vivement de la découvrir à travers un peu plus de 500 pages d'une lecture captivante.