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EAN : 9782878583175
192 pages
Viviane Hamy (15/09/2016)
3.43/5   22 notes
Résumé :
Aaronson n’a pas toujours été mort. Il fut un temps où Aaronson était même, sans exagérer, un être vivant. De vingt-sept à trente ans, Aaronson tournait – tel un insecte obsessionnel – autour d’un rond-point. Tous les matins, on pouvait voir un homme, entre sept heures et sept heures et demie, faire le tour du principal rond-point de la ville, vers lequel convergeait 60 % de la circulation.

C’est ainsi que Gonçalo M. Tavares nous invite à suivre les ... >Voir plus
Que lire après Matteo a perdu son emploiVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Voilà un ouvrage vraiment original, ludique, étonnant qui déstabilise nos bonnes vieilles habitudes de lecteur et interroge nos comportements. Il est l'oeuvre de Gonçalo M. Tavares, un écrivain portugais contemporain formidable qu'il me tardait de découvrir.
Le livre est construit comme une course de relais circulaire. Chaque chapitre nous parle d'un personnage. Celui-ci fait la rencontre d'un autre protagoniste qui devient le personnage principal du chapitre suivant. Aaronson, un fondu de jogging tourne quotidiennement autour d'un rond-point dans le même sens giratoire. Mais un matin il décide soudain de prendre le rond-point à contre-sens. Il se fait écraser par Ashley qui rencontrera Bauman dans le second chapitre et ainsi de suite jusqu'à l'apparition de Matteo que nous attendons tous, celui qui a perdu son emploi.
Les personnages sont classés dans l'ordre alphabétique et portent des patronymes juifs. Certains meurent, d'autre pas. Les personnages apparaissent et réapparaissent au fil des chapitres car ils sont connectés entre eux par des liens infimes. Chaque chapitre est précédé d'une photographie noir et blanc vintage représentant un mannequin de grand magasin (voir couverture). Ils ont des occupations extravagantes, des obsessions, des tics. On y trouve par exemple un type qui s'est fait tatouer dans le dos le tableau de Mendeleïev en braille, un autre collectionne les cafards ; un autre qui récupère les ordures, les lave avant de les replacer dans le circuit sur les rayons du supermarché. Je vous laisse le plaisir de découvrir ces vingt-six individus barrés en proie à la logique du hasard. Souvent, comme chez Italo Calvino, Gonçalo Tavares part d'une situation totalement absurde et la fait suivre de péripéties enchaînées par une logique implacable jusqu'à une chute inattendue. Et Matteo dans tout ça ? Eh bien Matteo est conduit à accepter un travail croquignolet qui aura des répercussions tout à fait étonnantes…

J'ai adoré ce livre étrange. le seul bémol c'est la postface explicative de l'auteur qui donne quelques clés mais embrouille aussi le lecteur.
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Même si je voulais vous dévoiler l'histoire, j'en serais incapable. « Matteo a perdu son emploi » fait partie de ces romans inclassables qui sont difficiles à étiqueter. le contenu comme le contenant sont particulièrement atypiques.

Dans ce petit roman, les évènements sont racontés à l'aide de très courts chapitres. Ils sont au nombre de 26. Chacun d'entre eux concerne un personnage différent et son quotidien. Ils n'ont en apparence aucun lien évident les uns avec les autres mais seulement un détail, un instant ou un objet qui va les relier avec le chapitre suivant. Ainsi les aventures se succèdent donc tous azimuts, sans queue ni tête.
Les histoires elles-mêmes sont toutes d'une grande originalité. le destin des protagonistes est souvent plein de surprises. Toutes les péripéties dérivent vers le loufoque ou l'absurde. L'auteur part d'un point de départ pour nous emmener là où on n'aurait jamais pensé aller. Chaque scénette fait son petit effet en mettant notre cerveau à contribution et en l'obligeant à déconnecter.

C'est une expérience plutôt déstabilisante au début mais qui devient entraînante lorsqu'on se laisse porter par la folie du texte. Il faut laisser sa logique et sa raison de côté si on veut profiter de ce moment de lecture hors du commun. L'écriture de Gonçalo M.Tavares est très agréable et parfaitement adaptée à l'ouvrage. Seule la postface (conséquente par rapport à la petite taille du livre) m'est restée un peu en travers de la gorge tant je l'ai trouvée ennuyeuse, pompeuse et surtout sans intérêt. Je vous conseille donc de ne pas lire ces notes explicatives et de garder la magie de ce roman, qui se suffit à lui-même.

Moi qui suis en général assez réticent aux aventures livresques excentriques, je me suis délecté de cette grande farce. Je réitèrerai donc avec une autre oeuvre de cet auteur quand je chercherai à sortir de mon quotidien cartésien !
Lien : https://leslivresdek79.wordp..
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Si vous avez envie de découvrir un OVNI littéraire (un Objet Valorisant de Nouvelles Idées), alors ce roman est fait pour vous. Il est construit à la manière d'oeuvres oulipiennes, sur des contraintes qui structurent le récit. Les regrettés Jacques Roubaud et Georges Perec se seraient sans doute réjouis de constater comment les chapitres se succèdent ici à la manière d'un jeu de dominos, la première pièce entraînant la suivante et ainsi de suite. Cette logique s'accompagne d'une seconde contrainte, alphabétique cette fois. le premier personnage s'appelle Aaronson, le second Ashley, le troisième Baumann… Après A vient B, puis C, jusqu'à ce fameux Matteo qui avait perdu son emploi et cherchait à s'occuper, à remettre de l'ordre dans sa vie. Ce faisant, il nous livre la clé ultime de cette fantaisie qui aurait jusqu'alors pu nous paraître marquée par l'absurde : pour comprendre le monde, il faut le structurer, faire des listes, des tableaux, construire des logiques, des règles, des lois et se rendre compte que les enfreindre peut dérègler toute la machine.
C'est ce qui arrive à Aaronson qui a choisi de tourner autour du rond-point principal de la ville, obsessionnellement. Jusqu'au jour où il décide de changer de sens. Initiative qui lui sera fatale, car M. Ashley le percute alors à pleine vitesse.
Ashley qui est parti livrer un paquet à M. Baumann au deuxième étage du 217 de la rue où il se trouve. Sauf que le destinataire n'habite pas là et que dans cette rue toutes les habitations portent le numéro 217.
M. Baumann aurait sans doute apprécié le paquet qui lui était destiné, car il aurait pu réutiliser son contenu comme il le faisait avec ce qu'il trouvait dans les ordures, objets qu'il reconditionne pour leur donner une seconde vie en les remettant sur les rayonnages des magasins. Une activité qui intrigue M. Boiman au point que ce dernier choisit de lui filer le train, jusqu'à ce qu'il soit arrêté par M. Camer qui lui propose de remplir un questionnaire dans lequel il est aussi question d'un certain Cohen. Arrêtons-la la galerie de personnages, même si certains mériteraient aussi de figurer dans cette chronique tant leurs tics, leurs obsessions, leurs comportements sont étonnants. Mais vous découvrirez par vous-même la puissance d'une batterie de 20 kilos sur la libido de l'un ou le pouvoir du mot NON quand il est multiplié à l'infini (voir extrait ci-dessous).
Revenons un instant sur le projet de l'auteur qui est bien loin d'être trivial. On peut certes lire ce roman comme un jeu, à l'image de cette succession de portraits de Ken et Barbie, qui s'accumulent au fil des pages, formant une sorte de reflet de l'accumulation des personnages. Cette seule lecture cache toutefois une vérité beaucoup plus tragique : derrière le souci légitime d'ordonner le monde pour nous le rendre compréhensible se cachent aussi des effets pervers, voire une volonté d'asseoir pouvoir et domination. Si tous les personnages portent des patronymes juifs, ce ne pas un hasard. Si l'on choisit d'exterminer les gens avec système, alors l'ordre alphabétique devient lui aussi une question de vie et de mort.
On savait depuis Umberto Eco qu'il fallait se méfier des professeurs d'épistémologie. Gonçalo M. Tavares nous en apporte ici une nouvelle brillante démonstration !

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Un homme court tous les matins autour d'un rond point. Jusqu'au jour, où, en courant dans le sens inverse à celui de la circulation, il se fait renverser et tuer par une voiture. Nous suivons ensuite l'homme qui l'a renversé, qui livre des colis, sauf que qu'il rencontre un soucis avec
celui à livrer à un certain Baumann : tous les immeubles dans sa rue portent le numéro 217...Nous passons d'un personnage à un autre, avec un mince fil conducteur qui relie à chaque fois les personnages les uns aux autres. Les personnages se suivent dans l'ordre alphabétique, et la plupart d'entre eux ont des noms à consonance juive.

Les récits auxquels donnent lieu les différents personnages se caractérisent par un certain absurde, en plus des deux premiers déjà cités, nous suivons par exemple Diamond, un homme qui s'obstine à enseigner jusqu'à la fin de l'année scolaire dans une école progressivement envahie par les ordures, Helsel qui essaie de rassembler la plus grande quantité possible de cafards dans un entrepôt etc.

Une sorte de logique de classification, de calcul, semble être un point commun entre les récits. Une logique et une classification comme viciées à la base, utilisées à des fins absurdes. Tous les personnages touchent d'une certaine façon à la folie. Est-ce que la rationalité et la mise en nombres et formules de la réalité qui pousse à cette folie, ou la folie est-elle une sorte de résistance à la rationalité devenue absurde par sa prétention de tout mettre en formules ou en chiffres ?

L'auteur donne des clés dans une postface. Qui est peut être la partie la plus ardue à lire, et au final la plus obscure. Le(s) sens du livre peuvent être déchiffrés de façons multiples et jamais complètement claires.

Gonçalo M. Tavares livre à son habitude un objet complexe, terrifiant et ludique à la fois. Très plaisant et facile à lire (enfin jusqu'à la postface) mais en même temps hermétique et dérangeant, par ses implications possibles.
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Roman inclassable que ce Matteo a perdu son emploi.
Premier roman "portugais " pour moi. sans doute pas le plus caractéristique puisqu'il n'est jamais question u Portugal. de quoi s'agît il en fait ?
Une succession de scène imbriquant les personnages qui se succèdent dans l'ordre alphabétique. Entre le concret, le surnaturel et l'absurde , ces scènes de part leur rythme sont plaisantes à suivre et nous amène jusqu'à Matteo, qui en effet a perdu son travail. Mais il retrouve un (vous voilà rassurés) , bien dans le ton du roman.
C'est lors du "Débriefing" des scènes , sur trente pages , que cela se gâte un peu.L'auteur veut nous montrer la symbolique de son roman , tous les signes qu'il a glissé dans ses histoires et qui auraient pu nous échapper. beaucoup moins intéressant à mon goût.
Il n'en reste pas moins que ce court roman , de part sa singularité, mérite que l'on y jette un oeil.
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critiques presse (2)
Actualitte
09 novembre 2016
Un exercice rafraîchissant – et pourtant très puissant – qui laisse au lecteur toute latitude pour trouver ses propres réponses et poursuivre comme il veut le roman.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Telerama
16 septembre 2016
Ce roman est un stupéfiant jeu de piste, auquel se livrent non seulement les personnages, mais aussi la philosophie, la logique et l'absurde.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Kashine, le jeune garçon de seize ans, décida en effet de faire ceci : répandre le «non» partout où il passerait. Juste ce petit mot, sans le moindre commentaire : «non».
(…) Et par endroits ce «non» eut des effets concrets, parfois étranges et surprenants.
Certains furent très localisés. Par exemple, à cause d’un « non » sur un prospectus publicitaire, l’entreprise estima que cette opération promotionnelle n’était peut-être pas la plus appropriée. En raison de ce «non», ou de la digestion mentale de ce « non », l’entreprise ne voulut plus recourir aux services de ce publicitaire avec qui elle travaillait depuis des années.
Autre exemple : l’auteur qui, dans une librairie, par curiosité ouvrit un de ses livres et remarqua immédiatement un énorme « non » en rouge barrant une page, le conduisant à prendre conscience qu’il avait fait n’importe quoi, que son livre était mal écrit.
Autre exemple encore : le législateur qui fut informé qu’on avait écrit un « non » sur une page du code. Précisons que Kashine, comme toujours, avait écrit le « non » et reconnut qu’il était justifié : cette loi manquait de rigueur, de précision, de clarté, elle était en décalage avec l’évolution du monde. Le législateur décida de changer la loi. (p. 115-117)
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L'ami du Dr Helsel, Holzberg, était un architecte fasciné par le cercle, forme de première importance dans toutes les mythologies, et il avait conçu tout au long de sa carrière des dizaines de ronds-points. Cette fascination l'avait même conduit une fois à en pervertir le tracé et à faire un rond-point, si l'on peut dire, carré. Ce terre-plein carré dont les signaux routiers imposaient le contournement -terme inapproprié- n'était rien d'autre qu'une plaisanterie de l'architecte, un piège presque puéril, car, malgré une signalisation explicite (il fallait faire le tour de ce carré placé au milieu de la voie), les voitures percutaient fréquemment les arêtes du terre-plein, ce qui leur valait des pneus crevés, des pare-chocs arrachés, etc.
Après un certain temps, les automobilistes qui connaissaient cette menace géométrique contournaient le carré aussi loin possible de ses arêtes, décrivant ainsi une trajectoire circulaire autour d'un rond-point imaginaire. Cette circulation autour d'un rond-point- qui n'existait pas réellement- permettait aux conducteurs, selon Holzberg, de prendre la juste mesure de l'importance du cercle.
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C’était un professeur respecté; moqué également, bien sûr, mais respecté intellectuellement pour ses écrits, ses travaux – l’écriture était en effet son seul moyen d’affirmer une présence sans que son corps le plonge dans l’embarras, son corps indocile et incontrôlable. Du reste, si Cohen se consacrait de plus en plus à l’écriture, c’était à cause de cette incapacité structurelle de son corps. Quand il écrivait, il n’avait pas de tics ou, du moins, s’il en avait, c’était un de ces tics d’en haut, au niveau des sourcils – qui tressautaient plusieurs fois de suite. Mais sans spectateurs, sans témoins, ce tic n’était rien – et rien ne lui faisait honte. L’écriture était donc, pour Cohen, le lieu vers lequel fuir quand il voulait fuir, non pas les autres ni la ville, mais fuir son corps ou la conscience que son corps dysfonctionnait. Parfois, il plaisantait pour lui-même en se demandant si la copropaxie allait se manifester au moment où, dans ses textes de fiction, il décriait une femme – mais, évidemment, rien de tel ne se produisait. Il était protégé par l’écriture.
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L’idiotie commune : la personne pense être libre parce qu’elle peut répondre, parce qu’elle peut choisir. La grande différence, la voici : tu es obligé de choisir : oui, non – et c’est cette obligation qui te prive de la plus élémentaire liberté.
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Gottlieb fut retrouvé, arrêté, condamné à mort.
Greenberg, quant à lui, ne put assister à la mort de celui qui l’avait assassiné. Même si c’est la règle, cela n’en demeure pas moins une injustice.
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Videos de Gonçalo M. Tavares (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Gonçalo M. Tavares
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos - Interprète : Filipa Freitas
Dans le cadre de la saison France-Portugal et à l'occasion de la parution de Mythologies, la Maison de la Poésie accueille l'un des plus grands auteurs de littérature portugaise contemporaine, dont les nombreux ouvrages fonctionnent comme des explorations narratives et langagières. Ce recueil se compose de plusieurs récits allant de la fable au conte, qu'il soit pervers ou cruel. Mâtiné d'un humour noir caustique, il met à jour la mécanique d'un imaginaire délicieusement tourment, fascine par son incongruité et par ses résonances mythologiques et archaïsantes.
Avec le soutien de la Saison France-Portugal 2022.
À lire – Gonçalo M. Tavares, Mythologies, trad. du portugais par Dominique Nédellec, éd. Viviane Hamy, 2022 – Journal de la Peste, trad. du portugais par Élodie Dupau, Bouquins éd., 2022.
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