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Yolène Dilas-Rocherieux (Autre)
EAN : 9782363583437
168 pages
Editions Vendémiaire (28/05/2020)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Rien n’est à personne : la formule pourrait résumer la doctrine communiste, fondamentalement hostile à la propriété privée, au nom d’une égalité radicale. Mais quelle est la véritable origine de ce programme révolutionnaire ? S’agit-il d’une invention utopiste du XIXe siècle, en réaction au sentiment de dépossession des classes ouvrières ? Ou d’une forme d’organisation naturelle des sociétés primitives avant le sacre de l’individu et du progrès ? La question est d’i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Quand le mur de Berlin est tombé, je n'avais que 2 ans. Autant dire que le communisme ne m'évoque rien de personnel : j'ai vaguement conscience de sociétés totalitaires, de pénuries chroniques, et surtout d'une idéologie qui a définitivement perdu la partie. Ou plutôt qui avait, car le besoin de trouver des alternatives au libéralisme se faisant sentir, les tentatives de ressortir le communisme du placard en le dépoussiérant se voient ça et là. C'est donc le bon moment pour moi de me poser enfin la question : le communisme, au fond, c'est quoi ?

Et j'ai eu la surprise de découvrir que la réponse n'était pas si simple que ça. Pourtant, l'existence de textes comme « Das Kapital » et de figures quasi-mythologiques (Lénine, Che Guevara, …) me laissait présager le contraire, surtout que les convaincus ont généralement un argumentaire bien rôdé. Il semblerait pourtant que chacun y aille de son petit « Personne n'a vraiment compris Marx (sauf moi) » qui débouche sur une grande diversité d'opinions.

À travers différents chapitres, on passe donc en revue les différentes courants et leurs prises de position : les origines du communisme (puisque la première chose que fait chaque doctrine, c'est prétendre qu'elle a toujours existé et que ce n'est que très récemment que les choses ont changé), les buts à atteindre pour former une société parfaite et les moyens qu'on peut s'autoriser pour y parvenir, et enfin comment envisager le futur du communisme, entre adversaire tout désigné du capitalisme et le très lourd passé à porter et à digérer.

L'essai était parfois dense pour moi : avant ce livre, je voyais le communisme comme un bloc plutôt homogène, et je me suis parfois perdu entre les différentes variantes, et quel personnage supportait quelle thèse. Toutefois, il me semble que c'est une excellente introduction pour défricher le terrain, et partir d'une base neutre plutôt que de découvrir le sujet à travers les yeux de militants.
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Yolène Dilas-Rocherieux, qui a enseigné la sociologie à Nanterre, s'est intéressée à l'utopie, peut-être à cause d'une origine ouvrière, aspirant à un autre monde. Son entrée tardive à l'Université et sa confrontation aux militants révolutionnaires des années 70, très éloignés de la condition prolétarienne qu'ils idéalisaient, lui ont donné le goût, devenue professeur, d'approfondir l'histoire des penseurs de la reconstruction sociale, en confrontant socialisme utopique et socialisme autoproclamé scientifique autour du mot et du concept du "communisme".
La recherche sur le mot, dont l'origine remonte au XIe siècle en France, se réfère plutôt à la notion de "commun", c'est à dire à un ensemble de droits d'usage sur les biens communaux. Ce n'est que plus tard, avec Restif de la Bretonne que le mot renvoie à un mode de vie où tout est mis en commun, comme l'avait imaginé déjà Platon, puis Thomas More, avec son livre manifeste. A la fin du XVIIIe siècle, Babeuf et Buonarotti précisent le concept, qui fera fortune avec Engels, Marx et ses épigones.
L'auteur se demande si, aujourd'hui, le "communisme", dont l'incarnation partisane a périclité, ne peut pas se retrouver dans la dénonciation de l'enrichissement individuel, créateur des inégalités, et dans la redécouverte du vieux concept des "communs".
Sous le patronage du Code de la nature de Morelly, le lecteur est invité à revisiter les auteurs ayant construit le communisme primitif : Montaigne, instruit par l'expérience de Villegagnon et Jean de Lery, Locke, Rousseau, Diderot, à la recherche de l'état de nature idéalisé avec le mythe du bon sauvage, qui suscitera en même temps la fascination, la compassion et le rejet.
Le voyage se poursuit vers des rivages moins riants. Au XIXe siècle le sauvage est marqué par la race. Gobineau, Gustave le Bon et le très curieux Vacher de Lapouge défrichent un chemin glissant, qui s'avèrera funeste et fatal.
L'idée communiste est traquée dans des mouvement divers et moins connus, mais forts instructifs : Diggers -menés par Gerrard Winstanley, et Levellers, plus libéraux, s'élèvent contre les enclosures de sinistre mémoire en Angleterre. Tandis que, dans les États allemands, Thomas Münzer avait mené l'insurrection des paysans jusqu'à leur massacre. Les Lollards avec Nicolas Hereford inventent un communisme exhumé des Évangiles, selon le modèle si séduisant des réductions du Paraguay.
Les expériences, toutes aussi infructueuses, se multiplient dans l'Amérique du XIXe siècle avec Owen, et les Icaries de Cabet. Plus politiques sont les théories de Gracchus Babeuf, avec son Manifeste des plébéiens -1795- et son Manifeste des Égaux -1796-, écrit avec Sylvain Maréchal.
A la question prégnante "Que faire" du russe Nikolaï Tchernytchevski en 1863, reprise par un Lénine admiratif en 1902, les penseurs vont se diviser entre les tenants de Marx, qui s'inspire de Moses Hess dans son "Manifeste du parti communiste" de 1848 et les tenants du populaire Proudhon, plus proche des "communs" dans sa "Philosophie de la misère" de 1846.

Si l'on constate que jamais l'utopie ne disparait vraiment des tablettes communistes, sa version moderne est plutôt à chercher dans le vieux concept remis au goût du jour de la notion de "commun". Non pas les "communs" d'avant les enclosures (utilisation des terres vaines, bois de chauffe, pâturages, sources, glanage, chasse...), mais les "communs" revisités aujourd'hui avec leur double caractère d'inaliénabilité et d'inappropriabilité des éléments nécessaires à la vie : air, eau, espaces naturels, forêts, mer et rivages. le concept peut même s'adjoindre celui de "care", avec l'accès gratuit à la santé, à l'éducation, au travail. Ces notions sont théorisées par Elinor Ostrom. Elles doivent être distinguées des micro-pratiques locales (éco-fermes, monnaies locales, Amap, compost, engagements auprès des "sans"...), comme des théories globalisante de la collapsologie et de la survie, oscillant entre des vues aussi différentes que celle d'Alain de Benoist à celles de Michel Onfray , passant de l'anarchisme au néoconservatisme.
Dans un monde qui se caractérise par la quasi disparition des partis qui portent le nom, sinon l'étendard, du communisme, se développe un éco-socialisme dont les variations sont multiples et divergentes (Negri et Hardt, contre Laval et Dardot)
Le "commun" au singulier, loin des "communs" précapitalistes apparait comme un "faire ensemble", une co-activité ou une co-décision, dans une structure plutôt fédérale, sans extinction totale de la propriété, mais en lutte contre le droit d'abuser.
L'idée de la mise en commun, à la source du communisme est plutôt à chercher alors dans les expériences des micro sociétés utopiques, qui expérimentent, plutôt qu'elles ne théorisent, au risque des mêmes déconvenues.
Cet ouvrage, rédigé par une sociologue, intéressera tout autant les étudiants en droit et sciences politique, où la matière "'histoire des idées politiques" a été savamment illustrée par les pères fondateurs Jean-Jacques Chevallier et Jean Touchard. En moins de 200 pages, Yolène Dilas-Rocherieux donne une vision claire, synthétique et actualisée de son sujet. Elle suscite aussi l'envie de lire les auteurs, ce qui est la meilleure chose à faire, pour l'étudiant comme pour le citoyen éclairé : ils découvriront que rien ne vaut le contact avec l'auteur et son oeuvre !
Lien : https://diacritiques.blogspo..
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Livre reçu par Masse Critique
Ceci est un livre d'histoire. Il revient aux origines du communisme dans le sens étymologique (mise en commun des ressources, des moyens de production, des biens, éventuellement des femmes et des enfants selon les époques). On voit la différence profonde (irréconciliable ?) entre communisme et socialisme.
Le mythe du bon sauvage, les peuples dits primitifs, les utopies, les communautés religieuses, ... et les moyens d'y revenir (révolution ? terreur ? quelles règles instaurer ?). L'expérience soviétique, les différents entre Trotsky et Lénine. Marx était-il vraiment communiste ?
Ce travail est très documenté et on voit bien l'expertise de l'autrice. Cependant c'est accessible et vulgarisé, donc peut-être que cela ne va pas assez loin pour quelqu'un qui connaît déjà bien le sujet, mais en ce qui me concerne je le trouve intéressant et adapté à mon niveau moyen de culture générale en philosophie politique donc j'en suis très content.

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[...] (voir blog)

Au final, le communisme possède une histoire, mais son avenir ne semble être qu'une grande utopie pourtant. Certes, le retour aux sources (tribalisme par ex.) pour échapper à la modernité, lui donne une continuité, mais je vois mal comment ils pourraient s'y prendre pour convertir une planète entière ! (Et bonjour la merde.)
Toutefois, en guise de conclusion l'auteure imagine bien une façon de s'y prendre ou d'imaginer la chose : l'archaïsme, la société de compassion sans raison, un retour au source lorsque l'on imaginait que le commun était la règle, bref ce n'est pas les idées qui manquent. le passé est riche.

En résumé, Yolène Dilas-Rocherieux qui a abordé cette question pour comprendre un milieu ouvrier qu'elle connaissait mais que les discours bien rodés faussaient, nous donne une belle synthèse de la philosophie communiste. Cependant vu la densité du matériel, une relecture s'impose pour moi. le jour où j'aurai le temps.
Lien : http://encreenpapier.canalbl..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Après la Seconde Guerre mondiale, le communisme s'est trouvé d'autres lieux pour nourrir ses utopies, entre autres la Chine de Mao ou la Cuba de Fidel Castro, tous porteurs d'une contradiction majeure : d'un côté, la volonté de mettre en place une économie productiviste soutenue par la promesse d'une société d'abondance où les biens seront illimités – aspect hérité du socialisme –; de l'autre, l'obligation, pour la survie du principe communiste, de placer les travailleurs dans l'impossibilité de s'approprier en propre les richesses.
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Si les grands principes du judéo-christianisme et de la philosophie platonicienne se retrouvent dans nombres d’utopies reconnues comme communistes par les communistes – entre autres celles de Thomas More, de Tommaso Campanella, du curé Meslier, de l’abbé Mably et du philosophe Morelly –, ils ont aussi marqué l’action partisane de Gracchus Babeuf, d’Etienne Cabet ou de Wilhelm Weitling, lesquelles ont fusionné dans une même souffrance et la même demande le pauvre et l’ouvrier.

pp. 55-56
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De fait, partout où le communisme s'est imposé, la coercition, la violence ou la terreur ont été l'outil privilégié pour mettre en place un projet élaboré le plus souvent par une minorité.
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