Dans
Saudade, l'auteur nous parle du destin de plusieurs personnages que tout oppose. Certains sont riches, et descendants de nobles (et d'explorateurs) portugais. Tandis que d'autres sont pauvres, bagnards, prostituées, voleurs, guérisseuses et voyantes et descendants d'esclaves. L'action du roman se situe dans la seconde moitié du XIXème siècle, période où le monde est agité par les mouvements abolitionnistes. le Brésil, comme les autres "grandes" puissances, n'est pas prêt à affranchir les esclaves, main-d'oeuvre si bon marché qui cultive la canne à sucre et le café - matières première qui permettent à ce jeune pays de s'imposer sur les marchés.
Et c'est dans ce contexte - qui amène son lot d'injustices et de misères - qu'évoluent les personnages hauts en couleur de
Jean-Paul Delfino.
L'écriture est assez inégale. D'abord hésitante, pour finir sur un rythme très haletant à la fin de l'ouvrage. L'auteur est un grand amoureux du Brésil, ça se sent. Un peu trop parfois, car les longues descriptions à la
Zola ne sont pas toujours pertinentes et prennent vite des airs de digressions qui ralentissent le récit et perdent le lecteur. Il m'a fallu un certain temps aussi pour comprendre que les personnages sont tous secondaires dans l'intrigue. Ils ne sont qu'un prétexte pour parler du Brésil. Et tout y passe : les quartiers mal famés, la nourriture, la danse, la musique, la prison, le système judiciaire corrompu, la cour impériale loin des soucis de son peuple, les fazendeiros obnubilés par leurs plantations et leurs privilèges, la hiérarchie des "noirs", les métis, …
Bref, on sent l'envie brûlante de rendre hommage à ce pays et ses "trois sangs" que les médias réduisent volontiers au Carnaval de Rio et autres ambiances festives. Et malgré l'aspect un peu "fouilli" et fourre-tout dans certains passages, j'ai beaucoup aimé lire ce roman à la fois roman historique et saga familiale. Les attitudes ultra paternalistes ( qui utilisent de façon hypocrite la religion pour justifier leurs actes) des blancs et l'attitude entre résignation, nostalgie et envie d'un avenir meilleur des noirs est décrit à merveille.
Ce huitième volet de la saga de
Jean-Paul Delfino met en scène de façon très vivante l'aspect fascinant de l'histoire brésilienne. J'ai hâte de découvrir les autres tomes.
Je remercie donc Babelio et les éditions le Passage pour leur confiance et cette découverte.