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EAN : 9782081249769
508 pages
Flammarion (22/10/2015)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Grand seigneur polonais, Jean Potocki (1761-1815) est surtout connu pour avoir Voyages écrit, à la fin de sa vie, un roman devenu, mythique, le Manuscrit trouvé à Saragosse. On sait moins que cet original à l’érudition vertigineuse, passionné de sciences et d’histoire, et diplomate à ses heures, a passé sa vie à arpenter le monde pour en rapporter des récits : le présent volume invite à découvrir son oeuvre immense d’écrivain voyageur. Rédigés d’une plume allègre, e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le grand seigneur polonais Jean Potocki est surtout connu pour son roman français "Le manuscrit trouvé à Saragosse", publié par Garnier Flammarion dans ses deux versions successives. Mais Potocki était moins un romancier qu'un voyageur, un diplomate, un naturaliste et un historien, qui parcourut à la fin du XVIII°s un Orient que ses amis philosophes ne connaissaient que par les livres, et en 1797 une partie de l'Asie Centrale, pour le compte de son roi, puis du tsar russe Alexandre I. La première moitié de ce volume est occupée par les voyages en Turquie et au Maroc, où se mêlent des exercices de style orientaliste, et le récit de choses vues qui placent l'auteur très au-dessus des autres écrivains voyageurs du temps. Ses récits sont bien supérieurs à ceux de Chardin en Perse (fin XVII°s) comme à l'Itinéraire de Paris à Jérusalem de Chateaubriand, en 1810 : Potocki sait voir, tandis que trop souvent, Chateaubriand cite ses lectures et Chardin énumère les hôtelleries et juge de l'état des routes.
La seconde moitié du recueil est occupée en grande partie par le "Voyage à Astrakan et sur la ligne du Caucase", terres moins littéraires, moins investies de références classiques, où les choses vues l'emportent sur l'érudition. Pourtant, Potocki vérifie tout dans son Hérodote et son Strabon, et examine toutes les plantes comme la faune. Il a des pages magnifiques qui ne sauvent pas l'ensemble d'une certaine monotonie. Pour finir, on trouvera le sobre récit de la grande déception de sa vie, l'ambassade russe en Chine qui aurait été si fascinante, pour lui comme pour nous, sans la sottise de l'ambassadeur qui fit tout annuler à la frontière des deux empires. Le recueil est beau mais d'un intérêt inégal.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Voyage de Kizlar à Mozdok (Asie Centrale), 1797.
"[Que l'homme irréprochable ...] s'apprête à faire route à travers les Syrtes bouillonnantes ou le Caucase inhospitalier, ou les lieux que lèche l'Hydaspe célébré par la fable" (Horace, Odes I, 22 [en latin dans le texte]).
Aujourd'hui huit novembre, j'ai aperçu pour la première fois les sommets du Caucase inhospitalier et les vers d'Horace m'ont rappelé avec amour-propre que j'avais autrefois parcouru les Syrtes brûlantes. Dix-neuf ans se sont écoulés depuis mon premier voyage d'Afrique. Ce temps est loin de moi, mais les mêmes motifs me guident et me soutiennent. Les gens passionnés pour l'étude sont tous un peu comme le géomètre syracusain qu'un soldat de Metellus a pu tuer et non distraire. Je bénis même l'heureuse abstraction qui me donne des plaisirs isolés et paisibles au milieu de l'affreux chaos où notre siècle est plongé. Que de choses depuis dix-neuf ans ! Des empires renversés, des royaumes séparés, d'autres rejoints, d'autres balançant encore. On croit voir les rochers des Symplégades qui, s'entre-heurtant avec un bruit épouvantable, écrasaient les oiseaux attirés dans leur tourbillon. Heureux de n'être pas un de ces écrasés, je vais passer mon hiver bien tranquillement au pied de ce mont fameux, antique berceau des origines que je recherche, plus heureux si j'y pouvais ignorer les choses du monde actuel, mais aujourd'hui l'antre le plus sauvage n'est point à l'abri des nouvelles du temps. Et les bruits de gazettes font une fois la semaine retentir les échos du Caucase, aussi bien que ceux des Alpes et des Pyrénées.

Voyage à Astrakan, p. 360.
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Voyages de Hafez en Arabie.
Hafez sortit du café en témoignant peu d'estime pour le parleur. Il fut suivi jusqu'à son "hann" [khan, hôtellerie des caravanes] par un habitant d'El-Catif qui lui dit :
"Seigneur étranger, j'ai été témoin de la conversation que vous avez eue dans le café et je crains qu'elle ne vous ait donné des idées fausses sur le gouvernement de notre ville. L'homme qui vous a parlé tâche de vous faire accroire qu'il peut faire faire au peuple ce qu'il veut, mais nous savons tous que son art consiste à savoir d'avance ce que le peuple veut, et alors d'avoir l'air de le lui persuader. Cependant cet air d'autorité a fait penser qu'il pourrait être dangereux et on le ménage, mais ceux qui travaillent gardent le silence, et c'est ainsi que dans nos jardins vous n'entendez ni l'araignée ni le ver à soie, tandis que vous êtes étourdi par les cigales et les hannetons."
p. 261
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Mais l'idée ne leur vint pas que je pouvais m'ennuyer, et eux-mêmes ne se seraient pas ennuyés à ma place, ou plutôt ce que nous appelons ennui n'est pas plus connu ici qu'il l'est dans le reste de l'Afrique, dans l'Asie et chez les indigènes de l'Amérique... Cependant Helvétius a regardé l'ennui comme un des principaux mobiles des actions des hommes, mais s'il était vrai que l'ennui ne fût point connu dans trois des quatre parties du monde, il s'ensuivrait nécessairement qu'Helvétius avait trop généralisé son système. Les philosophes de l'Antiquité voyageaient beaucoup et je ne puis pas m'empêcher de croire qu'ils faisaient bien. Ne semble-t-il pas, par exemple, que les philosophes français se sont montrés bien français lorsqu'ils ont assigné l'amour-propre comme cause unique et universelle de tout ce qui se fait dans le monde sans se douter seulement que ce sentiment n'était pas partout aussi exalté que chez eux ?

Tétouan, 14 juillet 1791, p.170.
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(Tétouan, 6 juillet 1791).
J'ai eu la visite d'un petit rabbin de Miquenez (Meknès) qui, ayant appris que je cherchais le livre de Rabbi Yehouda Levi el-khozari, m'apporta ce trésor (...) Je ne veux pas manquer d'ajouter qu'il m'a dit avoir dans sa bibliothèque beaucoup de livres imprimés en Pologne, et il m'a assuré que nuls rabbins dans le monde ne pouvaient être comparés aux nôtres pour la science, mais surtout pour l'agudeza (acuité) de leurs explications. Seulement il se plaignait de notre papier qu'il dit être très mauvais. Il était aussi mécontent de nos rabbins parce que lorsqu'ils trouvaient dans la Mishna ou la Guemara [Talmud] quelque terme obscur, ils en donnaient l'explication en allemand [yiddish] qui véritablement est pis que de l'hébreu pour les juifs de Miquenez.
p. 153
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Tétouan, Maroc, 4 juillet 1791.
(Le voyageur préfère se loger dans une maison du quartier juif).
A présent je suis établi dans un petit belvédère où ma vue s'étend à choix sur la plaine, sur les montagnes, sur la mer et sur toutes les terrasses qui communiquent les unes aux autres et font comme une seconde ville au-dessus de la première. Celles qui sont autour de la maison que j'occupe appartiennent toutes à des juifs, mais sur les terrasses plus éloignées, l'on distingue aisément des femmes musulmanes, reconnaissables à leurs draperies flottantes et semi-transparentes, objets sur lesquels il serait trop dangereux d'arrêter sa vue, car la mort ou la circoncision seraient les suites inévitables d'une entreprise téméraire.

(Note : il était interdit aux étrangers et aux non-musulmans de regarder les femmes marocaines sous peine de mort ou de conversion forcée à l'islam)

p. 134
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Video de Jean Potocki (2) Voir plusAjouter une vidéo

Jean Potocki : Manuscrit trouvé à Saragosse
Dans une pièce de la Cité internationale universitaire de Paris dans le 14ème arrondissement, Olivier BARROT présente le roman "Manuscrit trouvé à Saragosse" de l'aristocrate polonaisJean POTOCKI publié en 1804.
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