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3,26

sur 212 notes
Marivaudage dans les camps de la mort ! Vaudeville chez les salauds !
Ce pourrait être abject, c'est lumineux.
Aborder l'holocauste du point de vue des tortionnaires, d'autres l'ont fait, à commencer par Robert Merle avec l'excellent "La Mort est mon métier". Mais Martin Amis va plus loin. Les salauds ont leurs petites misères, leurs affres, leurs doutes et leurs passions. Leur drôlerie aussi. Ils sont pour certains séduisants voire attachants. Et c'est sans doute-là que Martin Amis dérange le plus mais marque aussi le plus de points. En restituant l'humanité des bourreaux au travers de ce récit qui commence comme une romance au KZ, improbable et déplacée, "la Zone d'intérêt" ne fait que davantage saillir la monstruosité du crime.
Le tour de force d'Amis est là et aussi dans sa façon de nous donner à voir comment l'horreur finit insidieusement par affecter ses partisans et ses ouvriers. Même eux ne restent pas indemnes devant l'énormité de l'horreur.
Amis s'est énormément documenté pour ce roman qui fourmille d'anecdotes, des anecdotes qui en disent très long sur la tératologie hitlérienne. On y apprend beaucoup.
Il nous montre aussi comment certaines consciences, pas toutes, s'éveillent et se rachètent.
Magistral.
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Alors que le film de Jonathan Glazer envahit les écrans, autant se plonger dans le livre pour s'imprégner de l'ambiance. Curieux livre qu'est cette Zone d'intérêt : livre historique, soap-opéra, thriller, horreur, les genres se mélangent pour un résultat inattendu. Martin Amis place quatre personnages principaux au coeur de son intrigue. Ces personnages évoluent (presque) dans le même cercle : un officier SS, le commandant d'un camp d'extermination, son épouse, et un esclave juif qui nettoie les douches à gaz. Quand deux officiers discutent du rendement à faire pour tuer des juifs, des grandes fêtes se mettent en place pour célébrer les résultats des morts. Quand le commandant est malheureux en amour/sexe, il se tape une autre femme et peu importe si elle tombe enceinte. Quand un camion emportant des cadavres s'échoue devant l'arrivée du train, ça fait tâche. Comment mentir aux nouveaux arrivants que tout va bien se passer puisque des corps viennent d'atterrir à leurs pieds? Tout n'est que détail. Un roman fort, dérangeant, qui laisse un goût amer en bouche. Et l'odeur. Oui cette odeur de corps qui imprègne les narines, les vêtements. Comment s'en débarrasser et comment vivre avec?
Martin Amis met le doigt dans des situations, des détails gênants, qui font mal et qui nous confrontent à une réalité bien réelle. le livre fourmille d'anecdotes bien écrites, qui font frémir. Mais il accumule aussi de nombreux paragraphes incompréhensibles, avec une traduction parfois illogique. Ecrit en anglais, avec des passages en allemand, le texte est traduit en français. Une volonté de ne pas être un bon français est volontaire selon quel personnage s'exprime. Mais on perd le fil entre les fonctions des officiers SS, des termes qui glissent sur nous et font qu'on ne suit plus qui est qui. Et surtout qui veut du mal à qui et pourquoi. Car, il y a des guerres internes entre SS, une volonté de détruire l'autre (pourquoi se limiter aux juifs quand on peut faire du mal à un commandant SS?).
Le film a cette force de se consacrer qu'à une seule famille et ne pas s'éparpiller avec plusieurs personnages annexes. Mais les deux se complètent avec cette volonté de donner le premier rôle à des anti-héros, des hommes détestables par leurs actions, forcés ou non.
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[Lu en 2016]
M'intéressant particulièrement aux ouvrages romancés ou aux témoignages concernant la seconde guerre mondiale. Je ne pouvais donc pas passer à côté.

Martin Amis voulait faire quelque chose d'original et de nouveau sur le sujet ? Pari réussi, et haut la main.

J'ai été déconcertée par l'attachement qu'on a pour certains personnages alors que tous sont du côté "bourreau". Pas d'humour bien sûr ici, tout est à deviner. Et c'est tant mieux car un livre humoristique sur un sujet pareil serait fort mal venu selon moi.

Je me suis surprise donc à vouloir connaître la vie de ses personnages. le style est magistral : on oublierait presque, je dis bien presque, que les 3 personnages masculins ont un rôle dans la mort de milliers de personnes. Amis a réussi a faire passer leur vie personnelle avant leur "travail" et de reléguer justement cette abomination de l'histoire et ces actions de meurtriers à un "travail".

Je suis donc déconcertée par cet ouvrage mais totalement fascinée par la "magie" de l'auteur. A lire !
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Je savais que ce livre avait partagé la critique lors de sa sortie, comme « les bienveillantes » en son heure que j'avais dévoré et beaucoup aimé. et bien je viens d'achever la lecture de ce livre qui m'a plu, beaucoup même, qui porte un regard par moments décalé mais en même temps pas uniquement sur l'horreur des camps. les différents narrateurs qui trament ce roman lui donnent une force évocatrice immense. On a pu comparer aux Bienveillantes bien sûr ... et pourtant le traitement n'est en rien semblable et la comparaison peu aidante... le héros principal, évolutif, pose un regard crédible et critique, effrayant, ne trouvant à la fin plus de sens à ce non sens qui a dépassé l'entendement
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Est-il encore nécessaire de présenter Martin Amis, l'écrivain britannique lui-même fils d'écrivain, qui compte aujourd'hui parmi les auteurs de la couronne les plus réputés ? La plume grinçante et satirique d'Amis nous revient en France chez Calmann-Lévy à l'occasion de la rentrée littéraire (Antoine Gallimard, son éditeur historique, ayant refusé d'en acquérir les droits), dans une comédie détonnante se déroulant pendant la Shoah orchestrée par les nazis lors de la seconde guerre mondiale, époque dans laquelle l'auteur s'était déjà aventuré en 1991 dans La flèche du temps où il racontait dans un procédé de narration original la vie d'un médecin nazi.

Alors peut-on rire de tout, en littérature ? Réponse en lisant La Zone d'intérêt

L'histoire se lit comme une pièce de théâtre, un vaudeville de camp de concentration réunissant Paul Doll, commandant du camp de concentration, alcoolique et obsédé, Hannah son épouse, belle et rebelle, et Angelus Thomsen, un officier de liaison SS qu'on nous dit maniéré, mais qui tombe éperduement amoureux de la femme du commandant.

Autour d'eux ? La mort, évidemment. L'abominable machine de destruction nazie tourne à plein régime, les trains se succèdent, les cadavres deviennent une problématique sanitaire : l'odeur des charniers rend l'air irrespirable et contamine l'eau. Pour les prisonniers encore en vie, c'est le travail forcé pour les industriels allemand, l'ultime effort de guerre, jusqu'à ce que leur cadavre rejoigne les nombreux autres qui attendent d'être réduits en cendre.

Au loin, les échos du front Russe, qui ne trompent personne sur le déclin de ce Troisième Reich qui devait durer mille ans, et qui n'en tiendra même pas dix. Dans cette ambiance cernée de tristesse, cette machine de mort, Thomsen courtisera Hannah sous les yeux fous de jalousie de Doll, lui-même pas très fidèle, et bien décidé à se débarasser de son épouse trop libertine…

Martin Amis signe avec La Zone d'intérêt un roman brillant, une comédie amère, cynique, dont l'effroi historique sert de décors irréaliste à une histoire aussi louffoque que ridicule, mais qu'on dévore avec un étrange plaisir, celui de découvrir un peu d'amour et de légèreté dans cette époque de destruction. Un très bon roman, à lire avec beaucoup de recul !
Lien : https://www.hql.fr/la-zone-d..
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Un livre à la limite du supportable… J'avoue avoir eu beaucoup de mal à le lire et aucune envie de le lâcher. Je sais, cela semble totalement contradictoire et ce roman est une contradiction à lui seul.

Comment décrire cet ovni ? Nous sommes dans un vaudeville, mais un vaudeville au beau milieu d'un camps de concentration…Comment mêler la farce à l'horreur ? Comment écrire l'indescriptible ?

Nous sommes donc dans un camps de concentration. Les voix s'alternent, tour à tour le chef du camps, personnage imbu de lui-même, totalement mégalo, obsédé par le rendement, par sa femme. Puis celle d'un officier SS, séducteur et totalement déconnecté de la réalité du camps, celle du chef d'un Sonderkommando, ses hommes récupérant les corps dans les chambres à gaz…

Les voix s'alternent, les mots allemands également… J'avoue que tous ces mots allemands rendent le récit d'autant plus compliqué à lire et à comprendre… Et l'alternance continue : nous passons tour à tour de petits sujets totalement insignifiant comme : est-ce que untel réussira à coucher avec une-telle à l'horreur la plus profonde comme par exemple le tri des déportés…

Le ton du roman est aussi déstabilisant : de l'humour, du burlesque, de l'absurde… un ton totalement décalé par rapport au sujet. C'est glaçant, c'est troublant, c'est horrible et pourtant, c'est un très bon roman qui me restera longtemps en tête… A lire, ne serait-ce que pour se faire une idée.
Lien : https://moietmoi.wordpress.c..
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Alors,... certes, il y a du grotesque dans ce livre, mais du grotesque qui ne m'a pas fait sourire du tout ; car les "caricatures" n'en sont pas hélas, et les personnages ne jouent pas dans un vaudeville, ils vivent! ils vivent nuits et brouillards!

Simplement pour montrer froidement le pire de l'humain dans la bêtise, la vanité, la cruauté, ce livre en est une démonstration monstrueuse, cauchemardesque, impitoyable. Ce livre est glaçant! La pseudo "histoire 'amour" passe un peu au second plan, au milieu de l'horreur, mais reste aussi très plausible dans un tel système aux valeurs perverties. les Monty python sont de très joyeux lurons à côté de Amis! Et lire la postface "ce qui s'est fait".
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Ce roman subversif raconte l'histoire de trois personnages dans un camp de concentration pendant la Seconde Guerre Mondiale. Deux de ces personnages sont allemands, l'un est le commandant du camp, l'autre, je n'ai pas vraiment compris qui il était, et le troisième est un prisonnier juif affecté aux chambres à gaz. Les trois personnages prennent la parole chacun à leur tour pour raconter leur quotidien, leur guerre, leur vie, leurs amours.

Le ressenti que j'en ai est que l'auteur a voulu provoquer, c'est certain, mais c'est franchement raté. Oui, son roman est choquant, provocant, mais il manque cruellement de construction, d'organisation, voire d'humour.
Je me suis sentie parfois complètement perdue dans les différentes intrigues, des personnages arrivent puis repartent sans que l'on comprenne de qui il s'agit et qu'est-ce qu'ils sont venus faire là.
Même avec les personnages principaux, je n'ai pas toujours compris qui ils étaient, de quel côté, prisonnier ou geôlier, "gentil" ou "méchant".
L'auteur s'est amusé (avec l'aide du traducteur, certainement) à laisser ici et là des mots en allemand. Au début on essaie de deviner, puis de guerre lasse, on laisse tomber. A quoi bon ? si l'auteur a décidé de nous embrouiller, il a parfaitement réussi.
J'ai persisté dans ma lecture jusqu'à la fin pour voir comment serait traitée la défaite allemande, et pour voir si, au final, tout ce qui était obscur allait trouver une explication. Eh bien non.
Dans les derniers chapitres expliquant ce qu'étaient devenus certains personnages récurrents, je me suis même surprise à découvrir des noms de personnages dont je n'avais aucun souvenir.

Certains aspects purement historiques sont assez bien traités, et cela peut être intéressant de les découvrir du côté allemand comme la défaite allemande, ou la gestion interne des camps de concentration.
Mais l'ensemble laisse vraiment un goût amer.
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Un livre qui, d'évidence, ne plaira pas à tout le monde et en laissera d'autres perplexes. Amis installe dans le décor d'un camp de concentration une espèce de pièce de théâtre qui oscille entre marivaudage et absurde. le camp est une entreprise et c'est sous ce jour qu'on voit son fonctionnement. Mais, derrière l'apparente indifférence, la dénonciation du nazisme est bien là, distillée mais forte
Lien : http://appuyezsurlatouchelec..
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L'esprit Charlie à Auschwitz

Martin Amis tente ici le "pourquoi", ça ne reste toutefois qu'un "comment" à travers 3 voix principales : le veule responsable du KZ ; le directeur de l'usine associée au camp, "neveu de", fat et néanmoins trop intelligent pour encore y croire ; et puis le chef des Sonderkommandos, dont la seule ambition au jour le jour est celle de ne pas mourir. Une chronique de l'intérieur avec ses jeux de pouvoir misérables.

Un livre qui a fait polémique puisque Gallimard y a vu une daube sans nuances et a refusé de le publier, tout comme l'éditeur historique de Martin Amis en Allemagne
Il m'a semblé que le trait était juste, mesuré, et on sait que c'est un sujet qui tient à coeur l'auteur.

L'esprit caustique aurait donc du mal à passer ? Il faut du pathos pour parler des kz ? Ou bien faudrait-il pour notre tranquillité d'esprit qu'il n'y ait que des très méchants facilement identifiables ? On voit bien aujourd'hui avec la problématique des migrants que le danger ne vient pas des méchants mais des veules, des peureux, des lâches...

Et je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle entre Hannah, la belle aryenne (sauf les yeux, hein !) et la Jasmine de Bagdad Cafe, elles viennent toutes deux de Rosenheim !

ps à lire la critique de Joyce Carol Oates dans le New Yorker
https://www.newyorker.com/magazine/2014/09/29/death-factory
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