AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Hélène Melo (Traducteur)
EAN : 9782743655785
160 pages
Payot et Rivages (02/03/2022)
3.77/5   28 notes
Résumé :
Après avoir essuyé plusieurs échecs sur son terrain de recherche, un anthropologue désenchanté se lance une fois de trop au cœur de « l’enfer vert » amazonien, dans le vague espoir d’enfin recueillir le récit du mystérieux mythe de l’attrapeur d’oiseaux, qui l’obsède. Quadra célibataire et mélancolique, c’est presque à contrecœur qu’il retourne auprès de sa famille amérindienne adoptive, où rien ne se passe comme prévu. De faux pas en impairs, il va faire l’expérien... >Voir plus
Que lire après L'attrapeur d'oiseauxVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 28 notes
5
4 avis
4
4 avis
3
0 avis
2
1 avis
1
0 avis
Le besoin de déviations vers d'autres mondes possibles, qu'il a en commun avec les gens de là-bas, en amont du fleuve de l'Amazonie, du narrateur, un anthropologue brésilien, est à l'origine d'une quête perpétuellement titillée, celle du dernier mythe amazonien de L'Attrapeur d'oiseaux. Une quête qui le poussera à s'enfoncer dans la jungle pour chercher son récit complet auprès du chaman d'une tribu . Un voyage en pirogue long et difficile, dans des conditions limites,  dans cette zone de non-droit aux confins de l'Amazonie dans un monde totalement étranger à la nôtre, à la poursuite d'une illusion.

Les mythes sont nombreux dans cette partie du globe, où la nature domine l'homme . Comme ce fleuve qui coulait dans les deux sens,mais victime d'un malfaiteur des temps mythiques qui voulu le garder pour lui seul l'avala mais dû le recracher parce que….il ne coule plus que dans un seul sens. L'auteur Pedro Cesarino , antropologue lui-même, dont le coeur de ses recherches se porte sur le chamanisme et les grands textes oraux qu'il traduit, ainsi que sur la cosmologie et la mythologie du peuple Marubo, bascule dans un autre plan de l'existence qu'il nous relate brièvement mais explicitement dans ce texte de 133 pages . En Amazonie, non seulement le temps s'écoule d'une façon différente de notre temps domestiqué, réglé pour le flux du capitalisme  mais la nature aussi a un rapport différent avec les peuples indigènes. Ne pouvant la maîtriser, ces derniers ont établi une relation de médiation diplomatique avec la forêt, la société des animaux et les collectivités spirituelles qui leur sont associées et ont réussi à trouver un autre équilibre , sûrement plus équitable que celui de nos mondes civilisés arrogants qui sont en voie de sa destruction.

Un texte intéressant où l'ironie est assez présente. Un homme est un homme, anthropologue ou pas, les petits détails de reluque sur les seins nus des femmes de ses hôtes m'ont fait sourire. L'humour y est aussi présent avec ces mondes si différents des nôtres qui pourtant ont envie de profiter des avancées de la technique pour faciliter leurs vies dans la mesure qui leur convient. Ils lui réclament une fusée du genre Challenger ou Discovery, vu dans une revue laissé par l'anthropologue, “C'est bien pour aller en ville, en pirogue c'est plus possible ….” L'incompréhension qui s'en suit entre la tribu et l'anthropologue est mordante 😁…..

Ce livre qui ne se veut pas autobiographique est une réflexion profonde sur la relation entre le chercheur blanc ou brésilien et les Amérindiens, notamment leur conception différente de l'amitié et sur une relation qui se devrait plus respectueuse avec l'Amérindien, souvent considéré comme le sauvage. Il remet aussi en question le travail de l'anthropologue définit par l'homme blanc, « L'anthropologie n'est pas une explication de la pensée de l'autre, affirme Cesarino, il s'agit de penser dans une relation de frontière entre deux modes de connaissance distincts. Un moyen d'y parvenir est la traduction des textes oraux amazoniens. Parce que c'est exactement là qu'on trouve la différence radicale de la pensée. » Notre narrateur , qui insiste à connaître la totalité du mythe dont il est à la recherche finira par comprendre que tout lui échappe , «comme dans les tragédies grecques ». Au contraire de nos sociétés qui veulent tout comprendre , tout rationaliser, tout contrôler et remplis de personnages qui savent tout, ces peuples ont l'humilité d'accepter que l'homme fait partie d'un cosmos et d'une nature qu'il ne peut dominer et en violer le mystère le portera fatalement à un déséquilibre létal. Pourtant des paradoxes dans les petits détails font à nouveau sourire, ils dévorent les biscuits venus de la ville, ils aimeraient bien descendre en ville prendre une bière….. Un livre que je conseille absolument à qui s'intéresse au sujet et a envie un peu dépaysement 😊!
Commenter  J’apprécie          8214
À Vila Bittencourt, un court moment de Wifi. Je poste mon billet .
Je me suis perdu lorsque j'ai retrouvé l'Attrapeur d'oiseau.
Ce n'est pas rien d'organiser une expédition, de remonter un fleuve qui descend en même temps, d'aller à la rencontre des mythes fondateurs et des apocalypses. Je me suis perdu et donc retrouvé auprès de Baitogogo, mon grand frère indien Marubo. Là bas, le langage se dilue, le temps n'est plus le même, il disparaît inexorablement Qui va remplacer le Grand Chaman et sortir tout un peuple de sa mélancolie .Pour qu'il retrouve ce rapport à la nature que nous avons définitivement perdu, menacés par les catastrophes et l' individualisme absolu. Un grand merci à Pedro Cesarino pour ce voyage anthropologique inclassable et un peu terrifiant.
J'ai adoré toute cette histoire, Tragédie amazonienne d'où l'on revient avec de la fièvre, déboussolé mais un peu plus lucide.
On se dissout dans ce livre incroyable. Comme si on avait fait soi-même le voyage. Il sera temps de revenir du Brésil quand j'aurai retrouvé mes principes d'adaptation à la « civilisation ». En attendant, suivez le guide, suivez Cesarino ..
Commenter  J’apprécie          239
Qui est mieux placé pour dénoncer les limites de l'enquête anthropologique sur le terrain qu'un anthropologue ?
C'est ce que fait Pedro Cesarino dans son premier roman dont le titre l'Attrapeur d'oiseaux fait référence à un mythe des origines que le narrateur, anthropologue, rêve de transcrire.
Poursuivant ce graal depuis des années, soutenant l'existence de ce mythe devant ses collègues dubitatifs, notre anthropologue retourne une énième fois dans la tribu qui l'a adopté. Mais cette fois le coeur n'y est plus : la pluie, la fièvre et l'isolement le coupent peu à peu de ceux qui ont placé en lui sa confiance et le considèrent comme un fils et un frère. Seul le récit par bribes du mythe de l'attrapeur d'oiseaux par un membre de la tribu allié aux esprits le pousse à prolonger son séjour. La mort du chaman, protecteur de la tribu et garant de l'harmonie entre ses membres, plonge les membres de la communauté dans le désespoir et entraîne une suite de perturbations qui conduit chacun à révéler sa vraie nature.
L'auteur réussit le tour de force de nous plonger dans l'atmosphère pesante et étouffante de la jungle tout en nous conduisant par glissements successifs hors de notre rationalité. Embarqués avec le narrateur, nous perdons progressivement nos repères et nous le suivons au bout de ses questionnements, là où la logique n'a plus cours.

Dans ce récit s'inspirant de ses travaux, Pedro Cesarino questionne la légitimité de l'anthropologue dans sa démarche qui consiste à gagner la confiance des indigènes dans l'intention louable de recueillir mythes et récits avant leur disparition pour regagner la « civilisation » une fois ceux-ci obtenus. Au passage, il égratigne le travail des missionnaires évangéliques qui imposent leurs croyances sans chercher à comprendre celles des indigènes. Il évoque également les ravages de la modernité dans la description de la ville frontière d'où part le narrateur et où échouent nombre d'indigènes, privés de leur mode de vie traditionnel par l'accaparement des terres.
Commenter  J’apprécie          123
Au Brésil, pas loin de la frontière colobienne, un anthropologue arrive sur les territoires des indiens d'Amazonie pour se faire raconter la légende de l'attrapeurs d'oiseaux, un mythe qui le fascine et dont il ne sortira pas indemne.

Pedro Cesarino est l'un des plus brillants anthropologues de sa génération.

L'Attrapeur d'oiseaux est son premier roman et réussit le pari d'être à la fois plein d'humour, extrêmement sérieux et parfaitement documenté.
Très belle réflexion sur la culture, sur l'importance des mythes et des rites pour faire sens pour vivre et mourir en paix parmi les siens, et pour prolonger la légende en en devenant un des héros. Un conte philosophique et initiatique teinté de cruauté et de dérision, une lecture étonnante et éprouvante!

Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          210
Quarantenaire célibataire, doté d'un tempérament sombre et mélancolique, le narrateur est un chercheur brésilien qui étudie depuis des années une tribu indigène d'Amazonie. Il a appris leur langue, leurs coutumes et a créé des liens forts avec certains membres de la communauté. C'est son obsession pour l'histoire de l'attrapeur d'oiseaux, un mythe sur l'origine du monde, dont il n'a fait qu'entendre des bribes lors de ses précédents séjours, qui l'amène à repartir dans la forêt afin d'essayer d'en savoir davantage. le récit s'ouvre sur son départ pour une énième expédition, les préparatifs dans la dernière ville de frontière aux portes du « labyrinthe vert ». Il se poursuit sur le long périple en compagnie de sa famille indigène adoptive – Sebastião Baitogogo, sa femme et ses enfants –, son arrivée dans le village. S'ensuivent plusieurs scènes de vie quotidienne, entrecoupées de discussions avec le pajé Tarotaro qui habite dans un autre village ; l'anthropologue re-transcrit l'histoire à mesure que le chamane la lui raconte. La mort du présidente Antonio Apiboréu, beau-père de Baitogogo, bouleverse la communauté qui doit lui trouver un successeur.
S'apparentant à un journal intime d'un ethnologue en mission, le texte est une véritable plongée dans la vie des Indiens d'Amazonie, un univers sombre et fascinant. Il est question à la fois de leurs habitudes quotidiennes (chasse, repas, consommation de tabac, etc.), mais aussi de leurs mythes, superstitions et histoires cosmogoniques, ainsi que des rites religieux et funéraires qu'ils pratiquent scrupuleusement. La forêt amazonienne est au centre de ce roman dont le narrateur évoque à plusieurs reprises la chaleur épouvantable, les tempêtes, l'omniprésence du fleuve, de la faune et de la flore. Les personnages doivent souvent lutter contre la malaria et autres maladies tropicales provoquant fièvre et diarrhées. de manière générale, tout est marqué par une grande violence.

Raconté au présent à la première personne, le récit est structuré en huit chapitres. La narration est entrecoupée de quelques courts dialogues, ainsi que de la retranscription des mythes sur lesquels le narrateur interroge Tarotaro.
La description détaillée des scènes de la vie quotidienne et des rites (notamment funéraires) contraste avec l'omission de nombreuses informations. Ni les toponymes des villages, ni la présence de la forêt, ni la mention des pays frontaliers (Pérou, Colombie) ne nous permettent de définir avec précision le lieu et l'époque de l'action, pas plus que le nom de la tribu dans laquelle séjourne le narrateur. On ignore également le prénom de ce dernier, la ville où il habite, l'institution (« le Laboratoire ») pour laquelle il travaille, son métier (anthropologue, ethnologue ?). En effet, si le narrateur donne quelques détails très intimes sur ses intestins ou ses frustrations sexuelles, on sait peu de chose sur lui. Il omet également de mentionner le nom du « vieux Français » qui a étudié les mythes amérindiens, notamment au Brésil, et qu'il évoque à plusieurs reprises.
Le lecteur découvre un univers méconnu, ainsi qu'un champ lexical très spécifique autour des plantes, des habitudes, des aliments, etc. ; la répétition des occurrences permet au lecteur de com-prendre de quoi il en retourne. La mythologie et le chamanisme sont au centre de L'Attrapeur d'oiseaux. La figure du pajé revêt à cet égard une importance fondamentale. le texte évoque la vision du monde des indigènes, leur perception du temps et de l'espace radicalement différentes de la nôtre. Les rêves et cauchemars traversent le roman depuis celui du narrateur la nuit à l'hôtel la veille de son départ qu'à ceux de Pasho, le nain.
Certains passages sont drôles, voire grinçants, comme celui des missionnaires nord-américains effrayés par les rites funéraires des indigènes. Ou encore lorsque la communauté veut se procurer une fusée, aperçue sur un numéro du National Geographic laissé par le narrateur lors d'un précédent séjour.
Si on ne trouve pas de longueurs, on peut à certains moments constater un manque de rythme, sans doute une façon d'insister sur la torpeur amazonienne. Tout comme l'évocation répétitive de la fascination du narrateur pour le mythe de l'attrapeur d'oiseaux est une façon de montrer son caractère obsessif. Sans recourir aux ficelles classiques de la narration permettant de happer le lecteur, l'auteur est parvenu à créer un texte à la fois sobre, exigeant et intense. La tension est créée par la violence du décor, des histoires et anecdotes, ainsi que par le récit fragmenté du fameux mythe de l'attrapeur d'oiseaux que les membres de la communauté semblent résister à ra-conter à l'ethnologue. Celui-ci en comprendra les raisons trop tard – l'accélération de la fin est particulièrement réussie et laisse le lecteur dans un trouble profond.
Commenter  J’apprécie          20


critiques presse (2)
LeMonde
18 juillet 2022
L’anthropologue brésilien prône une nouvelle relation avec les peuples autochtones d’Amazonie, impliquant une compréhension mutuelle. Sinon ? C’est ce qu’il met en scène dans un roman formidable, « L’Attrapeur d’oiseaux ».
Lire la critique sur le site : LeMonde
LesInrocks
05 mai 2022
L'auteur et anthropologue brésilien Pedro Cesarino invite à une plongée fascinante au cœur de l'enfer vert amazonien.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Après le sauna dans la file d’attente de la banque, je prends une moto-taxi pour me rendre de l’autre côté de la frontière acheter les doses de sérum antivenimeux, les médicaments contre le paludisme et les pastilles de chlore qui, allez savoir pourquoi, ne sont pas commercialisés de ce côté-ci. La vendeuse me regarde un peu étonnée, mais elle a l’habitude de ne pas poser de questions. Mieux vaut ne pas connaître les raisons qui poussent un gus à aller se fourrer dans la jungle.
Commenter  J’apprécie          320
Je constate que le temps a passé depuis les premières fois, quand ces épopées en amont du fleuve me fascinaient et me transformaient. Maintenant, à quoi bon tant d'efforts? ça n'a plus vraiment de sens et je n'ai plus l'âge de mettre à l'épreuve mes capacités à me dépasser. Mes limites ont déjà été franchies, elles sont devenues bien trop familières et se sont émoussées.
Commenter  J’apprécie          30
Moi qui ai étudié la formation du paludisme dans les livres du labo, serais-je en train de me convaincre que c'est une belle maladie? Rien pourtant ne compense ses ravages. Rien, pas même ces fascinants micro-organismes qui viennent se nourrir de mes globules rouges.
Commenter  J’apprécie          20
— Tarotaro, comment c'est, l'histoire de l'attrapeur d'oiseaux, vous pouvez me la raconter ? C'est pour le livre. Vous savez, le livre ?
— Non, je ne sais pas. C'est une histoire très malheureuse. C'est pas une histoire pour les humains.
— Mais tout le monde dit que c'est important et j'aimerais l'écouter en entier, je crois que c'est la seule que je n'ai pas entendue en entier.
— C'est une histoire sans fin, t'en connais pas tous les détails, t'en connais qu'une toute petite partie.
— Je sais bien c'est pour ça que j'aimerais l'écouter.
— C'est pas une histoire pour les humains, c'est une histoire difficile, , faut pas y toucher...
Commenter  J’apprécie          00
- Et l'autre jour sur le fleuve, l'épervier qui volait au-dessus de nous, c'était Atitanga?
-Non, celui-là, c'était un simple épervier, c'était celui d'Apiboréu, il surveillait si t'étais pas en train de fricoter avec les femmes.
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Pedro Cesarino (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pedro Cesarino
3 Questions à... Pedro Cesarino
autres livres classés : amazonieVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Lecteurs (80) Voir plus



Quiz Voir plus

Les classiques de la littérature sud-américaine

Quel est l'écrivain colombien associé au "réalisme magique"

Gabriel Garcia Marquez
Luis Sepulveda
Alvaro Mutis
Santiago Gamboa

10 questions
371 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature sud-américaine , latino-américain , amérique du sudCréer un quiz sur ce livre

{* *}