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sur 3136 notes
Sur son lit d'hôpital, Samuel demande à son ami, son frère, de mener à bien le projet de sa vie : monter Antigone au Liban. Il a déjà trouvé les acteurs, le lieu et il espère insufflé toute la force et à la foi à Georges. Il veut "voler deux heures à la guerre, en prélevant un coeur dans chaque camp"... Georges accorde cette dernière volonté à son ami, sans trop réfléchir, sans trop imaginer. Mais il y laissera bien plus que ce qu'il croit...
C'est grâce à la ferveur et à l'enthousiasme de Galounette, que je remercie ici chaleureusement, que j'ai ouvert de roman. J'avais lu de multiples critiques élogieuses mais n'avais jamais pris le temps d'ouvrir ses pages. Heureusement que je l'ai fait !!! Quel roman... Histoire actuelle, douloureuse et tellement invraisemblable. Malgré les mots justes, on a peine à croire que ce quotidien frappe à nos portes, pas très loin...
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1982, Georges est à Beyrouth, alors que la guerre civile fait rage dans ce pays longtemps considéré comme un modèle de cohabitation entre les communautés religieuses. Il a promis à Samuel agonisant, son ami juif, de monter Antigone avec des comédiens multiconfessionnels, pour réunir, le temps d'une représentation, ceux que la guerre oppose.

Et c'est ce qu'il va faire au péril de sa vie, au milieu des combats entre palestiniens et phalangistes chrétiens maronites. Il va trouver ceux qui acceptent de se mélanger, d'oublier pour un moment leurs griefs, de jouer Antigone, pour le bienfait sur les spectateurs de la catharsis de la tragédie, libératrice de leurs passions et de leurs craintes.

A travers Georges, son double littéraire, Sorj Chalandon raconte son expérience de reporter pendant la guerre au Liban, la violence des combats, le traumatisme indélébile des massacres de Sabra et Chatila, la difficulté à reprendre une vie normale, qu'il retrouvera malgré tout à la différence de son héros. le récit d'une histoire puissante qui met abstraitement la création artistique comme rempart à la violence, un mur invisible tel le quatrième mur imaginé par les comédiens pour oublier les spectateurs.

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Première lecture de cet auteur et déjà une énorme claque ! Magnifique roman que ce Quatrième mur, je n'ai pas d'autres adjectifs pour le décrire. Tout est dit n'est-ce pas ? C'est un roman qui raconte le pire et l'indicible sans jamais tomber dans le piège du sordide, du trash. C'est un roman qui dépeint la perte des illusions sans sombrer dans le pathos. C'est un roman qui célèbre l'amitié et l'amour sans jamais tomber dans la mièvrerie. Tout sonne juste, chaque mot, chaque phrase, s'accordent pour décrire - avec tellement de poésie - cette histoire sensible, touchante, dure, sans concession et pourtant symbole d'espoir.
Georges est un soixante-huitard idéaliste, pourfendeur d'inégalités, porte-parole des opprimés. Lié par une profonde et sincère amitié à Samuel, son ami Juif grec (longtemps opposant politique au régime autoritaire des Colonels), il lui fait la promesse sur son lit d'hôpital de continuer son projet, son rêve : monter la pièce Antigone de Jean Anouilh au Liban, rassemblant le temps d'une soirée des acteurs Chrétiens, Musulmans Chiites comme Sunnite et Druzes, toutes ces ethnies se déchirant depuis des années au coeur d'une guerre civile qui détruit le Liban. Pour l'amour d'un ami, Georges accepte de poursuivre cette chimère : l'art comme élément transcendant, capable de se placer au-dessus des rivalités et de l'horreur pour unir les peuples ; l'art au service de la paix. Sorj Chalandon nous brosse le portrait touchant de ces femmes et de ces hommes broyés par l'implacable machinerie de la guerre, livrés au désespoir et qui pourtant eux-aussi l'espace d'un court instant aspirent à la paix. Il nous offre surtout le personnage de Georges, cet homme dont les illusions se sont estompées avec le temps et qui va se trouver confronté au pire. Sorj Chalandon a longtemps été grand reporter de guerre : son personnage est-il en quelque sorte son double ? le quatrième mur est-il une catharsis lui permettant d'exorciser ses démons ? C'est ce que l'on peut penser en lisant ces lignes. A travers ce roman est également évoquée la lourde question du retour à la vie normale après avoir vu et vécu l'horreur, parfois incapables de lutter malgré tout l'amour que nous portent nos proches.
Roman de l'amitié, de l'amour, de la guerre et néanmoins message universel de paix qui nous est livré, le quatrième mur est un livre nécessaire qu'il vous faut lire.
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On m'avait souvent conseillé le livre, mais personne ne m'a dit l'horreur, la douleur et l'extrême violence qui le traverse! Naïvement, je m'attendais à un roman qui se lit vite et pleins de bons sentiments. Pourtant j'avais déjà lu Sorj Chalandon, j'aurais dû me méfier, me protéger avant cette lecture si mal préparée, dans laquelle je me suis jetée avec insouciance, sans même y réfléchir à deux fois.
Et voilà: l'impression qu'il m'en reste maintenant, de cette lecture, c'est d'avoir été, comme le narrateur, soufflée par les explosions, le coeur encore tout fragile, bouleversé, chamboulé, blessé à vie.
Non, je dois revenir sur ces sentiments qui ne sont pas honnête: on ne peut pas ainsi comparer une émotion ressentie du fin fond de son canapé à la tragédie qui se déroule dans un pays en guerre et ici, Chalandon nous en décrit toutes les horreurs dans leur anarchie avec une puissance insoutenable. le Liban, pays meurtri, ravagé comme tous ces pays du Moyen-Orient dont les différents peuples s'affrontent. L'Histoire se répète, encore et encore.
L'analogie que Chalandon fait avec le théâtre (le principe du quatrième mur qui isole les acteurs du public) et la pièce de Jean Anouilh d'Antigone me semble vertigineuse. j'ai relu la pièce en parallèle (je l'ai encore une fois redécouverte et trouvée magnifique), entrant dans la double dimension du roman, mais je pense qu'il me faudra encore plusieurs jours pour saisir toutes les subtilités de ces analogies.
Il faut maintenant que je refasse surface dans un pays en paix, sans jamais oublier ce qui se passe chez nos voisins.
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KO, cette lecture m'a mise KO. J'ai mis ma vie entre parenthèse le temps de lire cette folie, ce rêve de monter Antigone sur cette terre en guerre, ce Liban en feu. Heureusement que le texte est court, je ne sais pas si j'aurais pu en supporter plus. J'ai été happée par l'aventure humaine, par la folie des peuples, par l'écriture simple et juste.
Pas besoin d'en dire plus, c'est de l'ordre de l'émotion, et là elle est encore trop présente.
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Le Quatrième mur fait partie de ces livres qui vous marquent pour une décennie sinon plus : la violence de l'histoire et sa justesse vous laissent une plaie à vif.

Le Quatrième mur parle de théâtre. Cette expression de “quatrième mur” fait d'ailleurs référence au monde théâtral puisqu'elle renvoie à la séparation entre la scène des acteurs et la salle des spectateurs.

Sans avoir la prétention d'arrêter la guerre, Samuel souhaite que l'art puisse réunir les hommes au-delà de leur appartenance religieuse. Mourant, il confie cette mission à son meilleur ami, Georges, qui part alors au Liban dans les années 1980 où la guerre fait rage, afin de monter une troupe de toutes les confessions pour jouer l'Antigone d'Anouilh. Pourquoi Anouilh plutôt que Sophocle ? Anouilh a réécrit la pièce du dramaturge grec en 1944, à une époque où la Seconde Guerre Mondiale dure interminablement. L'histoire d'Antigone est de fait abordée avec la vision de la guerre moderne et la violence des hommes. Sans doute que dans le message que Samuel souhaite faire passer, l'absurdité de la guerre qui se retrouve davantage chez Anouilh que chez Sophocle tient lieu d'explication.

Pourtant au centre de la guerre, l'histoire nous mène aussi au coeur du partage. Elle mêle ce que l'humanité peut avoir de plus beau par le sacrifice de soi, mais également de plus cruel par le sacrifice égoïste et barbare de l'autre pour soi.

Certaines scènes sont d'une violence rare et sont racontées sans politiquement correct. Peut-être une façon pour Sorj Chalandon de nous mettre face au fait accompli de la guerre et nous montrer son atrocité sans filtre.

Il faut avoir le coeur bien accroché !

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je ferai un bref résumé: On fait la connaissance de Georges, étudiant gauchiste, soixante-huitard convaincu qui est de tous les combats, recevant et distribuant des coups lors d'échanges musclés avec la police.
En 1974, alors qu'il est étudiant à Jussieu, il fait la connaissance de Samuel venu donner une conférence sur la dictature des colonels en Grèce, pays d'où il s'est exilé. Ils deviennent amis et vont défendre des causes communes.
Les années passent. Entre les manifs, Georges fait du théâtre, du théâtre militant, essaie de monter des pièces, et déjà une discussion s'engage entre les deux amis car Sam voudrait monter Antigone, la pièce d'Anouilh dans un pays en guerre mais Sam est atteint d'un cancer et charge Georges de monter la pièce....

ce que j'en pense :

C'est un très beau roman, et j'ai eu beaucoup de plaisir et de souffrance en le lisant. L'histoire est originale : faire jouer Antigone, la pièce d'Anouilh, dans une ville en guerre et distribuer les rôles à chacun des protagonistes du conflit pour obtenir un trêve de quelques heures, chacun oubliant que l'autre est son ennemi.
L'auteur fait la comparaison avec la création de la pièce pendant la deuxième guerre mondiale où un acteur a été fusillé car résistant alors qu'un autre était un collabo. La pièce s'est jouée dans la même atmosphère, comme une résistance à la guerre aussi.
Le chemin est difficile pour aller chercher les acteurs et les convaincre. Georges le fait sous les balles. Mais ils arrivent à se rencontrer et à parler, à se toucher.
L'auteur nous parle simplement et avec pudeur du bombardement de Beyrouth par l'armée israélienne, des bombes au phosphore, des cadavres d'enfants brûlé en partie par le phosphore et que les Israéliens ont piégés avec des grenades dégoupillées pour faire encore plus de morts, il nous décrit les massacres de Chabra et Chatila. Bien sûr on a tous entendu parler de ces massacres, mais c'était abstrait, là on lit toute l'horreur de cette guerre, on la voit, ce n'est plus un concept, c'est la réalité.
Il nous dit les viols et les tortures, sans forcer le trait, jamais, une description neutre qui ne prend pas partie.
Georges est un homme brisé quand il revient et victime d'un syndrome de stress post traumatique très bien décrit par l'auteur avec les montées de violence brutales (comment sa fille peut-elle faire un drame car sa boule de glace est tombée alors que là-bas des enfants sont affamés, torturés. Comment peut-on survivre à l'horreur quand on a failli perdre la vue et la vie ? Comment l'entourage pourrait-il comprendre, il ne peut même pas imaginer ce que Georges a enduré.
On retient enfin l'histoire d'une belle amitié entre deux hommes qui se sont rencontrés en militant pour des causes auxquelles ils croyaient, certes mais qui semblent aujourd'hui des petites guerres par rapport à la vraie.
Tous les personnages sont attachants, Aurore la femme de Georges, et Louise la petite fille qui babille tout le temps alors que son père aimerait qu'elle se taise, mais qui apporte un peu de douceur dans le livre.
C'est le premier roman de Sorj Chalandon que je lis, et je suis encore fois sous le choc comme pendant la lecture de Kindezimmer de Valentine Goby.
C'est donc un nouveau coup de coeur. J'ai attendu pour lire les livres de la rentrée littéraire 2013 car je voulais choisir mes livres, aller vers ceux qui me parlaient le plus par le thème, l'auteur ou le titre…


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Le théâtre, remède à la barbarie ?
Antigone d'Anouilh. Monter cette pièce à Beyrouth, dans le fracas de la guerre. Que chaque protagoniste soit un des acteurs du conflit. C'est un défi, presque une plaisanterie, tant cela paraît surréaliste. Une histoire d'amitié puissante aussi. Mais cela suffira-t'il à briser le Quatrième Mur ?

14/01/2014
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TRAGEDIE.

Antigone est une tragédie, tout le monde meurt à la fin.
Antigone est une tragédie, mais reste de la fiction.
Sabra et Chatila est une tragédie, entre 460 et 3200 morts.
Sabra Chatila et la guerre civile du Liban étaient, sont, la dure réalité.

Sam, juif, a un rêve. Celui de monter Antigone à Beyrouth en 1982.
Mais pas de façon classique, non. Une Antigone de paix où chaque acteur sera une composante des factions en lice pendant la guerre civile du Liban.

Mais Sam se meurt. Il charge donc Georges, un ami, de monter cette pièce pour lui. Georges doit donc aller au Liban, rencontrer les acteurs choisis. Fais cohabiter tous ces gens pétris de rancoeurs indirectes les uns envers les autres. Quelque part, montrer que l'art rend la paix possible.

Le quatrième mur est celui que l'on construit mentalement entre la scène et le public. Si vous le traversez, vous pouvez passer de simple spectateur à acteur, et vice versa.

Georges est metteur en scène d'Antigone, mais aussi spectateur de la guerre. Il traversera le 4ème mur quand il retrouvera son Antigone martyre dans les ruines de Chatila. Meurtri au plus profond de lui, il n'en sera plus jamais pareil.

D'un objectif de paix, nous aboutissons à des actes de haine.

Sorj Chalandon, avec ce roman, pose la question de l'appartenance au groupe qu'il soit ethnique, religieux voire même étudiant. le groupe qui nous fait agir en meute et dissous les individualités et l'intelligence.
Qui peut faire passer l'homme moral à l'homme bourreau.

C'est à lire car la haine de l'autre et la guerre seront de tout temps d'actualité, je le crains.
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Pour ce que j'en ai déjà lu (trois livres), je commence à me faire ma petite opinion sur les écrits de Sorj Chalandon. Et ma petite petite opinion vous dit que c'est une belle écriture, avec des phrases qui nous imagent parfaitement les actions, les paysages, les personnages, c'est très agréable à lire.
Enfin, très agréable à lire... pas toujours ! le moins que l'on puisse dire, c'est que ces lectures ne se rangent pas dans la catégorie "feel good", et pour ce livre-ci, c'est même tout le contraire. Les scènes de guerre, de violence brute sont trop nombreuses, trop longues, à mon goût, cela me semble même un tantinet malsain. La dénonciation des atrocités de la guerre ne bascule-t-elle pas vers un voyeurisme pernicieux ?
Et de me souvenir... de ce photographe de guerre passé voir son ami sur notre lieu de travail. De son dernier reportage, il a montré quelques clichés... j'en ai vu un et n'ai pas voulu en voir plus. Je ne sais pas ce qui m’écœurait le plus, du cliché aperçu ou des trois hommes qui s'en délectaient. Oui, vu de l'extérieur, ils avaient l'air de s'en délecter, ou du moins, ils étaient bien fascinés.
Voilà, cette fois-ci, j'ai regardé tous les clichés jusqu'au bout et pour moi... c'était trop. Avec le théatre (dont je ne suis pas une grand fan) qui se glisse incongrûment dans la guerre, je n'ai pas aimé ce livre-ci.
Je relirai sûrement Sorj Chalandon, mais je sélectionnerai bien le sujet.
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