Louis Cozan, né à Ouessant en 1947 fut gardien de phares en mer d'Iroise de 1968 jusqu'en 1983. Son témoignage «
Un feu sur la mer » fut d'abord édité en 2010 puis réédité en 2019 dans une version augmentée.
Dans ce très beau livre de souvenirs, il raconte avec beaucoup de détails et de vérité sa vie quotidienne de « veilleur » de phares, celle des autres gardiens mais aussi celle des pêcheurs ou sauveteurs dotés d'un savoir-faire unique.
Louis Cozan nous fait partager les manoeuvres complexes et dangereuses pour rejoindre les phares, la maintenance et la gestion rigoureuse de l'optique dans la lanterne et son feu vital. On ressent le froid, l'humidité de cette vie rude mais aussi toute la chaleur fraternelle des « gens de mer » et des marins des phares et balises.
Il décrit des hommes humbles et courageux, qui nous inspire beaucoup de respect et dont la profession est aujourd'hui disparue. Des hommes qui, du haut de leur vigie, permettent à des marins de tous horizons de naviguer dans une des mers les plus dangereuses au monde.
Isolés au milieu de cette « beauté inquiétante » des vagues et des tempêtes, leur lien avec l'extérieur, leur famille et les autres gardiens, repose sur un poste émetteur qui régulièrement égraine sa « gamme marine » en faisant le point sur le dernier bulletin météorologique du ciel et celui des âmes de cette vie « embarquée ».
Au delà de sa passion pour ce métier si particulier, l'auteur démontre également, à travers ce livre, son attachement aux phares eux-mêmes, à leur architecte et à la lueur qu'ils produisent au coeur de la nuit. Il décrit le mythique
Ar-Men, au large de l'île de Sein et son premier feu en 1881 après 14 années d'efforts insensés de construction. Il évoque l'élégance du phare de la Jument ou encore l'imposante stature de Kéréon, son « château de tempête » dont « les savoir-faire et la qualité des matériaux mis en oeuvre dans la réalisation n'ont jamais été égalés ailleurs ».
Il revient, enfin, sur l'histoire de sa famille, son grand-père également gardien de phare, son père... Il rend hommage aux marins anonymes, à ses amis et à l'un de ses écrivains préférés,
Henri Quéffelec, auteur en 1956 du roman
Un feu s'allume sur la mer qui lui inspira le titre de son propre témoignage.
Sûre de la valeur d'archives de ces mémoires, j'ai également beaucoup apprécié leur puissance évocatrice. Connaissant la mer d'Iroise, ses côtes et ses phares, ce témoignage m'a touchée. Il contribue à la valorisation de ce fabuleux patrimoine. Sur les 15 phares que compte la mer d'Iroise (8 en mer et 7 à terre), 6 sont depuis 2017 définitivement classés au patrimoine historique : La Jument, au sud-ouest d'Ouessant ; Nividic, à l'extrémité de la pointe de Pern à Ouessant; Four, dans le chenal du Four au large de Porspoder ; Pierres noires, dans l'archipel de Molène ; Armen, dans la chaussée de Sein et Kéréon, dans le Fromveur.