J'ai adoré ce livre qui m'a appris le mot elficologie car le conteur Pierre Dubois est l'inventeur de l'elficologie !!!
Tout a commencé par une image de
troll trouvée sur la page correspondante du Wiktionnaire. Mon enfant cherchait l'orthographe exacte du mot. J'ai découvert le peintre-enchanteur
John Bauer. Puis, nous sommes tombés sur une vidéo réunissant plusieurs tableaux de cet illustrateur du début du 20ème siècle. Et encore une belle surprise : la vidéo était accompagnée d'une merveilleuse musique symphonique qui faisait un peu peur. J'ai découvert donc un compositeur contemporain : Jonas Valfridsson. Et dire qu'un bambin de sept ans peut faire ces recherches pratiquement tout seul, au hasard de Google !
En regardant encore sur
John Bauer j'ai appris l'existence du livre de Pierre Dubois que j'ai commandé aussitôt.
Qu'étaient des
trolls pour moi ? Dans mon enfance, on m'avait donné à travailler au piano la Marche des
trolls composée par Grieg, morceau célèbre. J'ai fait d'autres pièces de Grieg inspirées de la nature norvégienne et toujours délicieuses… C'était tout jusqu'au jour où je découvre dans une boutique, avec une très belle devanture « Il était une fois », des figurines de
trolls quasi-incassables fait main avec des matériaux naturels ! Depuis, ces têtes hirsutes décorent ma maison et font partie de beaucoup de jeux…
Pierre Dubois nous parle des
trolls norvégiens, suédois, brutaux, harmonieux, enleveurs, amoureux, sauvages, apprivoisés, primordiaux, contemporains, géants ou nains. Il catalogue des
trolls de l'eau et de la terre, des mâles et des femmes-
trolls,
trollesses (Huldres, Gygers). Préparez-vous à une pluie de nouveaux mots ! La Huldre est extrêmement belle contrairement à Gyger, une femme-
troll affreuse, une horrible ogresse.
Les parties « théoriques », puisqu'il s'agit bien d'une science, elficologie !, alternent avec des contes parmi lesquels j'ai préféré « La femme changée en
troll » et « le Näck ».
Le texte de Pierre Dubois, pétri d'ombre et de lumière comme les
Trolls eux-mêmes, c'est une prose si poétique que mon fils a déclaré qu'il n'a JAMAIS entendu quelque chose d'aussi beau. Tant pis pour mon « Carnaval des majuscules » que je lui ai dédié !
Je lui lisais Pierre Dubois avec une voix envoûtante, pas comme un robot fatigué, parce que le texte me plaisait à moi ! Pierre Dubois raconte si bien que ses histoires, je le sens, demeureront dans mon esprit. Pour ma part, elles ont entièrement raison !
Pierre Dubois affirme que ces histoires sont vraies ! « C'est là où l'on croit et cohabite encore avec des
Trolls, les elfes et les fées que l'on respire le mieux, que la nature est encore vécue telle qu'elle est, vivante et peuplées de ses esprits », dit-il. le regard du
Troll « tue l'homme mauvais ou illumine celui qui le recherche ». Ceux qui ne voient le
Troll que sous un aspect répugnant « sont ceux que la nature effraie et rebute, ceux qui aspirent à une nature aseptisée, domestiquée et sans âme, sans ortie ni chardon, sans toile d'araignée ni
Trolls indomptés ».
Les peintres de la nature, les conteurs ou plutôt les glaneurs de contes populaires, sont des témoins éblouis par des apparitions. Pierre Dubois rassemble des visions des peintres qui ont exploré le monde des
trolls depuis la fin du 19 siècle. Les illustrateurs essentiels sont
Theodor Kittelsen,
John Bauer !!!, Hasse Bredenberg (notre contemporain, né en 1957, dont images rassurantes et chaleureuses ressemblent aux anciennes cartes postales de Noël, et les scènes de la vie quotidienne des
trolls ressemblent à des scènes paysannes) et
Elsa Beskow (1874-1953) dont le style est, pour moi, trop enfantin, trop simplet, trop docile.
En regardant des images de
trolls de l'eau je n'ai pas pu m'empêcher de penser au célèbre Cri, une oeuvre expressionniste de l'artiste peintre norvégien
Edvard Munch ! Est-ce parce qu'il est Norvégien, ou c'est la bouche béante du
Troll ?
Les cheveux longs dorés chez la Huldre cachent le creux dans son dos et une queue de vache ! Mais la tignasse mêlée à la barbe chez les
trolls peints par
John Bauer est encore plus longue ! C'est comme un énorme manteau de fourrure, comme un yack ! Chez
Theodor Kittelsen les
trolls sont totalement différents, ils sont plus sauvages, plus rêches, plus effrayants. Alors feriez-vous l'amour avec un
troll ou une Huldre ? En tout cas, dans les contes de Pierre Dubois tout est possible !
Si cela vous arrive souvent de regarder une énorme pierre dans une forêt, ou un rocher, ou un menhir, et voir autre chose, un personnage, un animal, alors le livre de Pierre Dubois vous régalera. L'imagination s'évade brusquement. Et un nain apparaît, dans un énorme nuage de barbe, ou encore quelqu'un d'autre ! Et vous devenez vous aussi un témoin ébloui, comme
John Bauer ou
Theodor Kittelsen ! Dans nos forêts ça pullule de créatures fantastiques.
Mais je n'aime le fantastique que s'il rime avec poésie, beauté, douceur, art. Je me passe très bien de cruauté. Les contes où le
troll est présenté comme un ogre hideux sont trop cruels à mon goût. L'homme est si inhumain envers le
troll cruel !
Dans le texte de Pierre Dubois, on rencontre beaucoup de mots rares et j'ai dû plusieurs fois consulter le dictionnaire ! C'est souvent le cas pour les contes. Et j'y ai trouvé une redondance enchanteresse également propre aux contes. Je pensais : qu'on ne termine jamais ce livre, ce livre-baluchon, qu'il y ait toujours quelques pages devant nous !
D'après un proverbe japonais que @santorin a récemment cité sur babelio, il ne faut pas croire tout ce qu'on lit. Pauvre de moi, la lecture m'est contre-indiquée car je crois tout ce que je lis !
Vivent les
trolls ! Et les Huldres !