Contrairement à d'autres sagas familiales, on ne se lasse pas de lire La Chronique des Pasquier. le quatrième titre, La Nuit de la
Saint-Jean, en est l'illustration., car plus abouti que les précédents.
En quoi ?
Dans les récits précédents un chapitre se détachait régulièrement du lot : une altercation burlesque entre le père et le propriétaire, une initiation aux dangers de la sexualité par un père gêné d'aborder ce sujet avec son fils… Cette fois il en est au moins deux. Ainsi du chapitre I où Joseph emmène son frère Laurent chez un politicien et lui donne une leçon de savoir-faire pour obtenir un marché qui rapportera gros : tout n'y est que flatterie, mensonge et comédie. de même au chapitre XV où règnent grâce aérienne et enchantement nocturne, au point de rappeler, sur un mode mineur, Roméo et Juliette ou encore le songe d'une nuit d'été. Des chapitres inoubliables.
Et que dire de la technique utilisée ? On avait déjà eu un chapitre dialogué comme au théâtre et ailleurs un échange épistolaire. Cette fois, Duhamel va plus loin. Echo sonore et nocturne de l'unanimisme, on lit tout un chapitre où l'on passe d'un personnage à l'autre : tous discutent ou s'adonnent à leurs pensées, si bien que tout un monde se livre à nous, sans qu'il y ait rupture ou dystonie car tout s'enchaîne harmonieusement. Plus que d'habileté ou de talent, il faut parler ici de grand art où le génie transcende la technique.
Un de ces rares livres qu'on n'est pas près d'oublier.