Après l'excellent "
Fukushima, Récit d'un désastre" (2013, paru depuis en Folio),
Notre ami l'atome comporte trois textes correspondant aux films réalisés par
Kenichi Watanabe et coproduits avec ARTE France en 2013, 2015 et 2020 : le monde après Fukushima, Terres nucléaires, une histoire du plutonium et
Notre ami l'atome.
"Le plutonium tient son nom de Pluton, le dieu des Enfers dans la mythologie occidentale. C'était un dieu peu aimé, qui ne se laissait jamais apitoyer par les prières des hommes. On le représentait muni d'un trousseau de clés noires, pour signifier que son royaume était si bien gardé que nul jamais ne pourrait en sortir". le plutonium, matière la plus toxique jamais fabriquée sur terre (il n'existe pas à l'état natif) a une demi vie de 24110 années ! Il défie l'imagination et la mémoire humaine. Or il en a 61 tonnes rien qu'à l'usine de retraitement de la Hague en Cotentin ! Les trois sites maudits du nucléaire sont Hanford aux Etats-Unis, La Hague en France, et Rokkasho au nord de la principale île du Japon. Choisis parce qu'ils étaient peu peuplés, surtout de paysans pauvres, on leur a vendu le développement économique : mais le nucléaire, c'est 30 ou 50 ans de prospérité pour des siècles de contamination et de déchets. Autre caractéristique du nucléaire, c'est que ses victimes et ses morts se compteront sur les siècles à venir. La catastrophe quand elle advient est perpétuelle. Hanford, Bikini, Tchernobyl, Fukushima..., les victimes des essais et des catastrophes sont impossibles à compter, les générations à venir sont et seront impactées. Issu de la bombe, le nucléaire civil est opaque, antidémocratique, il fragmente les familles (ceux qui y travaillent et ceux qui s'y opposent) ; l'atome est sacrificiel, les personnes irradiées sont stigmatisées, isolées, éternellement déplacées, l'indemnisation des dommages subis, souvent niés dans le cas des essais nucléaires comme à Bikini (USA) ou aux Antilles (France) se heurte à la bureaucratie et au négationnisme des politiques. Les populations n'ont pas été mises à l'abri, ni les militaires peu gradés présents sur la zone, pas plus que les ouvrières de la luminescence du radium (les Radium girls employées par l'industrie horlogère dans les années 20) alors que les ingénieurs des mêmes usines, eux, se protégeaient ! Que dire des "liquidateurs" de Tchernobyl, soldats volontaires envoyés au massacre avec des masques de cuir et des tabliers lestés de plomb ! Les sacs noirs remplis de déchets radioactifs, les millions de tonnes d'eau de refroidissement des réacteurs endommagés de Fukushima nous montrent l'image tangible de la poubellification du monde. le livre est un réquisitoire contre la folie du nucléaire. Comment avons-nous laissé faire ? Par quel cynisme les politique nous l'ont-ils imposé ? Ils parient désormais sur l'évacuation du problème, faire "comme si Fukushima n'avait jamais eu lieu". Les JO de Tokyo de 2021 avaient ce propos, celui de faire table rase. le gouvernement nippon actuel propose d'ailleurs de baisser les normes des niveaux d'exposition aux radiations et de vider dans la mer les millions de tonnes d'eau contaminée.