Comme on nous parle

J'ai reçu cet ouvrage dans le cadre de l'opération masse critique. Je dois avouer que je l'avais coché parmi d'autres sur la simple base du résumé sans aller consulter la fiche de l'auteur. Si j'avais vu qu'il s'agissait d'un économiste, je ne l'aurais probablement pas fait.

Je m'attendais donc à un livre plus basé sur la linguistique que sur l'économie. Pourtant la fusion des deux est plutôt bien faite et je l'ai trouvé accessible et pertinent, notemment sur les questions sociales, le rapport au travail et la question européenne, ainsi que sur la mise en place d'une langue du pouvoir et de son application.

Le constat est clairvoyant, on y trouvera difficilement à redire. Pour ce qui est des théories qui l'accompagnent cela dépendra forcément de la sensibilité du lecteur. L'auteur y prêche évidemment pour sa paroisse. Pour ma part je ne peux m'empêcher de noter que si ses propositions sont socialement bien plus convenables et respectueuses des individus que le système actuel, le fait de ne jamais sortir du cadre capitaliste consumériste jette un voile sur la grande oubliée de ce texte et qui pourtant est le socle nécessaire à toute idée d'un éventuel bien-être (ou tout simplement être) : la préservation de la nature et de la biodiversité. Et à ce sujet il y aurait de quoi parler de novlangue, de paradoxes du discours dominant et de vacuité des propos.

Je pensais lire un ouvrage de sémantique, alors qu'il s'agit d'un ouvrage d'économie. le livre est un peu technique. Il traite de sujets tels que les politiques budgétaires et monétaires européennes. Il comporte des allusions à des événements passés sans les expliquer, ce qui exige d'avoir une bonne connaissance de base du sujet. Sans être spécialiste, je pense avoir quelques notions en économie et pourtant j'ai eu du mal à lire ce livre. Les propos sont clairs, mais les démonstrations le sont moins.
Le livre a été écrit en mai 2020 dans le contexte de la crise du coronavirus pour analyser celle-ci et les réponses proposées par l'Union européenne. Il est donc à la fois d'actualité et un peu dépassé par l'évolution récente des événements.
Habitué à une littérature dans la ligne éditoriale de l'éditeur Les liens qui libèrent (c'est-à-dire bien à gauche), je ne me suis pas retrouvé sur l'introduction sur la pensée unique en économie dans les médias, mais le constat sur le verrouillage dans le monde universitaire et en matière de politique économique est tout à fait vrai.
D'une manière générale, le livre est intéressant, sans être révolutionnaire. Il dénonce très justement la situation dans laquelle se trouve l'Union européenne et propose en conclusion une voie pour en sortir. le dernier chapitre fustigeant la logique binaire à l'oeuvre en politique et dans la société est particulièrement pertinent.

A l'heure où les médias sont omniprésents il est important de, correctement, analyser les discours. "Média" c'est tout, c'est le journal télé, orienté de tel ou tel côté politique suivant la chaîne, c'est votre voisin, c'est telle ou telle personnalité, culturelle, politique, qui s'exprime sur tel ou tel fait.

De nos jours la linguistique est partout, et surtout, malheureusement, elle est aussi utilisée politiquement. Certaines "analyses" linguistiques sont orientées, là encore pour dévoyer, pointer, corriger alors que le propre de l'analyse linguistique est juste d'expliquer, de montrer le fonctionnement du discours et son impact. Merci "Quotidien" et ses "grands spécialistes en linguistique" qui, au final, ne font que salir une discipline vitale en lui collant une fonction politique.

Mais je m'égare ! Cet ouvrage de Fitoussi montre bien le fonctionnement du monde médiatique, du monde politique, les ficelles employées ça et là pour influencer les gens. Et prendre conscience de ces ficelles est un enjeu crucial à une époque où la pensée est, sûrement, le dernier bastion de liberté qu'il nous reste.

En trois mots : Économie. Langage. Manipulation.
Avis : Percutant !

Un essai éclairant, et sans langue de bois, sur l'économie et la linguistique dans notre politiquement correct actuel !

✒️ Lors de la Masse critique non-fiction de Babelio, j'ai été attiré par la référence à 1984 du titre de cet ouvrage, et par conséquent, par son anticonformisme supposé. J'ai donc coché, désireuse de pallier la désinformation médiatique, et par passion pour la linguistique. Lorsque j'ai reçu l'ouvrage, je me suis immédiatement plongée dedans, et j'ai été déroutée : je ne m'attendais pas à tant de considérations économiques. Ma lecture a donc été chamboulée par mon inexpertise en ce domaine et je dois bien avouer qu'il est certain que des nuances m'ont échappé... Pourtant, je ne suis pas déçue !

✒️ J'ai particulièrement aimé le ton de l'auteur à la fois sarcastique, analytique et transparent sur le constat amer de notre société. de nombreuses questions économiques sont décortiquées, mais aussi sociales et sanitaires : travail, chômage, covid, Europe, finance, concurrence, industrialisation... le tout sur fond de langue : de la suppression de "mots pour le dire" au détournement de formes langagières jusqu'à l'implicite impact de la parole et de la non-parole. Bien sûr, l'adhésion aux propos est proprement subjective comme toute théorie à contre-courant, mais elle a le mérite de se vouloir argumentée, pédagogue et englobante. Une belle ode à la réflexion sur notre monde, et notre possibilité de la formuler voire de la penser, que certains qualifieront aisément de complotiste par peur de l'introspection citoyenne et étatique. Pour ma part, sceptique dans l'âme, cet essai m'a conduit à me questionner et a donc répondu à mon désir premier en cochant cette case !

✒️ En bref, cette lecture est percutante et enrichissante. Elle permet de raviver l'esprit critique dans une époque où il est aussi dangereusement nécessaire que muselé.
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Très intéressant, mais des connaissances économiques m'auraient aidé à comprendre toutes les nuances apportées par l'auteur... Je le recommande tout de même pour sa pertinence par rapport à l'actualité présente (2019-2021). L'auteur reste clair et pertinent malgré quelques éléments moins nuancés.