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EAN : 9782743662608
400 pages
Payot et Rivages (13/03/2024)
3.92/5   58 notes
Résumé :
Confronté à une vague de suicides dans des affaires de cyber harcèlement, le commissaire Sébastien Mille s’intéresse de près aux manœuvres des masculinistes qui se réunissent sur des forums où ils déversent leur haine des femmes. À Paris, les musiciens de Significant Youth sont agressés lors d’un concert par une poignée d’incels, ces célibataires involontaires qui détestent les valeurs humanistes et féministes défendues par le groupe.
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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C'est un roman sur l'amour, ou plutôt sur le manque d'amour, et sur les ravages que ça provoque. C'est un roman sur la haine en ligne, très disert, très précis, avec des séquences violentes très réussies, des revirements surprenants et inattendus, des personnages très fouillés, pleins de contradictions, écartelés entre la vie qu'ils veulent mener, qu'ils disent mener, et celle qu'ils mènent en réalité. C'est un roman sur le mensonge aussi, celui qu'autorisent les écrans, les réseaux, les fausses identités, mais aussi celui qui protège de la réalité, et celui qui permet d'éviter la prison quand on a des meurtres sur la conscience. C'est enfin un roman sur le bruit et le silence, le bruit que font les sourds et le silence qu'on peut retrouver même quand on a des acouphènes permanents qui vrillent le cerveau.
Nous sommes en 2025, petit décalage temporel avec notre époque qui permet de se dégager de l'actualité politique et de présenter quelques innovations technologiques comme allant de soi, mais le roman aurait pu tout aussi bien se passer aujourd'hui. On est emportés en 2025 et, c'est la première surprise, dans le milieu méconnu (de moi, en tout cas) des incels, les célibataires involontaires, radicalisés par la frustration, contaminés par les idées d'extrême-droite, masculinistes et misogynes, violents en ligne et parfois dans la vie réelle, jaloux des beaux mecs et enragés par les jolies filles qu'ils ne baiseront jamais, certains que le féminisme est la cause de leur mal-être, et peut-être bien aussi tous ces bronzés qui leur piquent des femmes. Benjamin Fogel en fait un tableau effrayant (...)
A l'opposé, il nous présente des hommes féministes, des musiciens aux idées généreuses, des groupes qui veulent avancer résolument vers l'égalité des femmes et des hommes, des femmes qui se sentent en confiance (...)
Là où ça devient vraiment passionnant, c'est lorsque la plongée dans ces milieux progressistes montre que la misère sexuelle est bien partagée, que le sentiment d'échec est là même si on fait des concerts bondés, que ce n'est pas parce qu'on est beau et friqué que la vie est belle, que ces néo babas-cools ne sont pas si cools que ça, pas si féministes non plus, tandis que du côté des fachos nostalgiques d'une époque fantasmée où les femmes étaient soumises aux hommes, des éclairs d'humanité et de lucidité nous surprennent.
Benjamin Fogel nous entraîne sur une piste inattendue, loin des stéréotypes sur lequel le roman s'est engagé et on est pris par les personnages, leur duplicité, on comprend leur volonté de s'en sortir malgré tout, de changer la vie et tout d'abord leur vie à eux, leur volonté de mentir pour y arriver, de se cacher toujours pour faire croire que tout va bien, de se persuader qu'un crime parfait n'est pas un crime, de croire qu'on peut arriver à vivre heureux.
Le silence selon Manon est un livre étonnant, très prenant, qui pose des questions sur la vérité, la transparence, les libertés, le monde qui change, les frustrations, avec une tension qui va en grandissant, des personnages qui vous accompagnent longtemps après la fermeture du livre.
Un roman à lire, bien sûr.

François Muratet dans Double Marge (Extrait)

Lien : https://doublemarge.com/le-s..
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J'avais découvert la plume de Benjamin Fogel, en 2019, lors de la parution de son précédent roman « La transparence selon Irina ». Ce livre avait déjà pour thème les dérives d'Internet et des nouvelles technologies. Une fois encore, par son dernier livre « le silence selon Manon », il tente de mettre en garde ses lecteurs contre les effets néfastes du monde virtuel. En fait, ce second bouquin est en quelque sorte le préquel du précédent.

Alors que nous étions précédemment en 2058, nous sommes ici plus près de chez nous puisqu'on fait un bond de 4 ans pour ce roman qui – à la fois – s'apparente à un roman noir mais aussi d'anticipation. Toujours en lien avec Internet, on plonge ici dans le cyber-harcèlement, dans ses formes les plus violentes. Il est aisé de faire un parallèle avec notre quotidien puisque, chaque semaine, les médias font état de suicides de jeunes filles mais aussi de jeunes hommes, souvent poussés à ce geste extrême par des trolls se cachant lâchement derrière leurs écrans.

En plus de ce thème, ce livre traite également de l'opposition entre les incels, des célibataires involontaires qui se complaisent à déverser leur haine de la Femme et les partisans du groupe de musique des Significant Youth, défenseurs féministes de l'écologie. Se livrant une lutte sans merci, dont la violence monte crescendo, le combat fera de nombreux dégâts.

Alors que j'avais déjà beaucoup aimé « La transparence selon Irina », j'ai encore plus apprécié celui-ci. J'ai trouvé que l'écriture est encore mieux travaillée, l'intrigue finement ciselée et que cela donne un extrêmement bon livre à la fois cohérent mais encore plus effrayant de réalisme. L'absence de longueurs improductives fait qu'on est directement plongé dans le propos traité avec beaucoup de subtilités et d'adresse.

Chaque chapitre est énoncé par la voix d'un des personnages principaux et ils alternent ainsi avec des similitudes mais aussi des différences de perceptions intéressantes selon les protagonistes. Traitant de thèmes très actuels comme le féminisme, l'écologisme, les attentats venant de tous les extrémistes, cela pousse indubitablement à la réflexion.

Ce qui fait la force de ce roman est qu'on se rend vite compte que la réalité n'est jamais très loin de la fiction. L'introduction de l'auteur y indique d'ailleurs le vrai du faux. Une fois refermé, tout ce dont vous aurez envie, sera de vous couper des réseaux sociaux, des médias, d'Internet, bref de toutes technologies et d'aller vous abriter au fin fond de l'Alaska où aucun réseau ne passe.

A vite le prochain romain de Benjamin Fogel!
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Et nous faisons connaissance avec les Incels (Involuntary celibates), cette communauté d'individus masculins esseulés incapables de trouver des partenaires amoureux malgré leur désir de vivre en couple.
Les ultra Incels déferlent sur les réseaux sociaux en cyber-harcelant des féministes qu'ils jugent responsables de leurs échecs.

Le bruit et le silence sont les constituants de ce roman noir. La musique, d'abord, l'auteur sachant faire vivre les émotions des concerts.
Les acouphènes de Simon ensuite, qui l'envahissent ne lui laissant pas de répit pour vivre.
Les bruissements des réseaux sociaux haineux…
En contrepoint, Manon qui s'échappe de son silence de sourde avec la langue des signes.

Benjamin Fogel nous embarque sans manichéisme dans ce roman original qui brasse ces thèmes, sans parti pris.

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Houla, c'est du lourd ... Enfin, non, je devrais dire : je suis impressionnée. Je ne connaissais pas du tout Benjamin Fogel et je vais m'empresser de me lancer dans la lecture de son précédent opus, car j'ai beaucoup apprécié celui-ci.
Nous sommes dans des années futures, mais pas très loin en 2025. Un attentat est commis dans le cadre d'un concert du groupe mené par Yvan (de Christo) Langalter, son leader entouré des jumelles Mei et Xiu Cixin, bassistes, Gaspard, le batteur et son ami Yoav Radur. Autour du groupe, Kahina, la compagne scientifique d'Yvan, qui travaille au Laboratoire Neuroscience Paris Seine, Simon de Christo, le frère d'Yvan, codeur et sa compagne, Iris Velba, belle jeune femme qui a arrêté de travailler après un burn-out et une jeune femme sourde, Manon Parvel, qui refuse l'implant cochléaire et utilise la langue des signes (Iris et Manon sont amies depuis longtemps) . Il y aura deux morts et d'autres vont suivre dans le sillage du groupe.
Significant Youth me semble se rapprocher du mouvement punk, et défend des valeurs dites féministes, écologiques, sociétales (entre autres concernant internet et les réseaux). Mais il ne faut pas toujours se fier aux apparences dans un sens comme dans l'autre : du problème de mettre les gens dans des cases ...
Il y avait déjà eu une première échauffourée avec un groupe de "masculiniste" (par opposition aux féministes) lors d'un autre concert, qui avait abouti aux acouphènes de Simon, qui vont lui pourrir la vie, lui qui suit avec vénération de son grand frère. Cette échauffourée va aussi confirmer le souhait d'éloignement de Kahina d'univers qu'elle trouve trop extrêmes.
Sébastien Mille est un policier de 50 ans, un peu spécial. Il dirige une section : le Service central de documentation criminelle (SCDC), division phare du Service central de renseignement criminel (SCRC). Cette section est spécialisé dans le harcèlement, les réseaux sociaux. Il va donc suivre attentivement l'évolution des musiciens, mais aussi de leur entourage, ainsi que celui de leurs opposants, tout en étant limité par la loi qui garanti l'anonymat sur internet.
Je suis restée scotchée par la lecture de ce roman. Il nous rappelle qu'internet est un lieu dangereux, où l'on rencontre plus de crétins que dans la vie réelle (normal, c'est un réseau mondial). Il est toujours surprenant que l'ouverture à l'information a juste produit plus d'imbéciles, plus dangereux car ils s'agglomèrent plus facilement sur le web, la toile qui porte bien son nom : elle est immatérielle, mais elle capture bien des proies que l'araignée dévore. La mise en place de "codes" moraux et éthiques mondiaux est-elle la solution ? Ne va-t-on pas évoluer vers un univers totalitaire encore plus que maintenant ? Je n'ai pas tout compris des termes et univers décrits dans ce roman. J'ai été affolée de voir à quelle vitesse, la bêtise peut se répandre. Tant de haine, tant de colère qui se déverse par internet, un internet avec plusieurs couches, comme dans la vie. Rester prudent, ne pas s'exposer, être à distance : voila ce qui me correspond. J'ai plus d'une fois noté l'absence de réflexion, la bêtise et la violence des ces machines à vide que sont les réseaux (que je fréquente peu). Comme après la lecture de ce roman, il me reste toujours l'impression d'un grand vide, d'un vide qui s'agrandit avec les années entre les oreilles des gens : utiliser son cerveau pour apprendre et comprendre, respecter l'autre me semblent disparaître à vitesse grand V. Internet permet de grossir des événements et une immédiateté qui empêche la réflexion. J'aime les livres : je sais pourquoi encore plus maintenant. Un roman à lire et un auteur nouveau à suivre : chic !
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Manon à la source de la transparence

Benjamin Fogel a lancé avec « La transparence selon Irina » un triptyque dont voici le deuxième opus : « le silence selon Manon ». le premier roman abordait, dans le cadre d'une dystopie anticipative, les problèmes soulevés par l'anonymisation des profils des réseaux sociaux.

Ce sujet reste important, pour ne pas dire essentiel, en ce qu'il continue à offrir une sorte d'impunité pour celles et ceux qui en usent et en abusent. Mais il est comme chapeauté par la question du genre, dans son sens le plus large possible. le récit oppose deux camps : d'un côté les neo straight edge, qui rajoute tout un pan féministe à la mouvance straight edge historique, et de l'autre les incels, ces « involuntary celibate » ou « célibataires involontaires », résolument misogynes.

Les premiers sont représentés sur la scène musicale par le groupe Significant Youth. En pleine lumière, ils sont agressés par des incels qui quittent l'ombre des réseaux pour intervenir dans la vie réelle, sans toutefois dévoiler leurs identités. L'activisme et l'intransigeance de chaque partie provoque l'escalade des violences, au origines autant internes qu'externes à chaque groupe.

Benjamin Fogel est un fin, et peu optimiste, observateur du monde, des réseaux, des hommes et de leurs dérives. Et il ne prend pas parti. Si on se doute bien vers qui s'orientent ses opinions, Benjamin Fogel se montre par contre très critique d'une part envers les méthodes et le jusqu'au-boutisme des neo straight edge aussi bien que des incels et d'autre part à l'encontre des contrastes souvent flagrants entre d'un côté les attitudes et les discours de façade, en public, et de l'autre les actes perpétrés en privés. L'auteur ne prend aucune pincette avec ses personnages et les met dans des situations où ils sont forcés de se confronter à leurs propres contradictions.

Et finalement, les armes des uns et des autres restent somme toutes les mêmes, peu importe les idées défendues. « le geste est caractéristique d'une époque confuse, propre à l'inversion des valeurs, où les propagateurs de haine dénaturent les propos de leurs adversaires pour les présenter comme fascistes. Car si tout est fascisme, alors plus rien ne l'est, et les salauds ne sont plus tant que ça des salauds ».

Et pourtant on retrouve quand même des mecs bien (à tout le moins pas trop mal, pas totalement perdus) mais un peu (beaucoup) paumés psychologiquement chez les soi-disant salauds et des salauds du côté des soi-disant chevaliers blancs de la cause féministe, censément altruistes, ouverts, cleans… Tout n'est pas aussi pourri qu'il y paraît au royaume des incels et tout n'est pas aussi rose qu'il devrait être chez les neo straight edge.

Je ne vais pas rentrer dans le détail des profils psychologiques des différents protagonistes, ce serait vous gâcher une grande partie de la découverte de ceux-ci qui fait une grande partie du « charme » de cette lecture. Benjamin Fogel se concentre sur quelques personnages dont il alterne les points de vue ou récits : Simon et Yvan, les deux frères à l'origine du groupe, Iris et Kahina, leurs copines, Tristan, un incel au rôle central, Sébastien Miller, l'enquêteur qui gravite autour des incels pour tenter de les coincer, Manon, aveugle qui va venir clore l'histoire…

Dans ce roman, Benjamin Fogel décrit des personnages centrés sur leurs pulsions et sur leurs envies. On en a tous. Ce qui différencie les gens face à ses pulsions, c'est la raison et l'empathie dont la présence chez certains empêche le passage à l'acte et dont le manque favorise l'acte d'assouvissement pour soi au détriment des autres. La toxicité des êtres humains, ici les hommes, n'a pas de frontière, ni physique, ni idéologique…

Dernier petit point, à mon sens essentiel mais cela relève de l'intuition, tous les chapitres sont rédigés à la troisième personne du singulier à une exception près : ceux qui consistent dans le point de vue de Simon. Cela fait en quelque sorte de ce roman, de ces chapitres à tout le moins, une confession de Simon alors que son caractère, plutôt secret et égocentrique, n'en fait pas une personne a priori tournée vers l'expression d'un regret ou capable d'une forme de contrition. Mais cette expression à la première personne du singulier colle avec son égocentrisme… Et après tout, ce passage au « je » pour Simon n'est pas non plus incohérent dans la mesure où s'il y a histoire, s'il y a matière à roman, c'est un peu par les actes de ce personnage qu'ils prennent tournure. le « je » est aussi un moyen pour l'auteur de s'impliquer dans le roman, pour ne pas paraître n'être que le témoin qu'il est mais un auteur qui s'investit dans les réflexions proposées. Et ce faisant, il embarque le lecteur avec lui.

J'avais déjà beaucoup aimé « La transparence selon Irina » mais « le silence selon Manon » est encore plus bluffant, à mon sens, plus efficace dans le sens où le thème de ce deuxième roman est, comment dire, moins « technique » que dans le premier. On y rentre plus rapidement, c'est un atout indéniable. Pour autant, il n'est pas moins fort, moins passionnant. Au contraire ! Si le troisième suit la même tendance, vivement la suite.

Et si « le silence » se déroule chronologiquement avant « La transparence », paru lui en premier, il permet de faire le lien entre les deux récits : l'un, le deuxième paru, débouchant sur la création du système développé dans l'autre, le premier paru. Je vous concède qu'il est un peu tordu le Benjamin Fogel. Mais il est brillant et mène parfaitement sa barque. Qui plus est, l'histoire propose aussi un petit côté polar pur jus en plus de l'aspect roman noir sociétal.

Lien : https://garoupe.wordpress.co..
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critiques presse (2)
FocusLeVif
26 mai 2021
Dans le glaçant et engagé Le Silence selon Manon, Benjamin Fogel imagine un futur qui n'est pas pour demain mais pour aujourd'hui.
Lire la critique sur le site : FocusLeVif
LeMonde
03 mai 2021
L’écrivain entrecroise des histoires de vengeance mitonnée à petit feu, de couples qui se délitent et de crimes presque parfaits.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Installés en terrasse au Pas de loup, un bistrot au pied du métro Filles du Calvaire où ils dînent une fois par semaine, ils commandent un verre de vin. Il y a six ans, sa femme l’a quitté, et Holly est partie vivre avec elle. Depuis, Sébastien Mille chérit ces moments avec sa fille. Holly a 21 ans. Après sa maîtrise de droit, elle envisage de préparer le concours pour devenir commissaire à la Police judiciaire. Sébastien voudrait l’en dissuader, mais il n’a jamais su ce qui était bon pour lui, alors comment pourrait-il savoir ce qui est bon pour elle. Toute sa vie, il a privilégié les actions concrètes, le travail de fond, sans chercher à gravir les échelons qui l’éloigneraient des enquêtes, de l’accumulation des témoignages, des données, qui permettent d’identifier les risques et de les prévenir. Pourtant, il n’a cessé de prendre des galons et des responsabilités. On lui proposait de plus gros périmètres, de plus grosses équipes, et il disait oui. Bras droit de Pierre Chambon, directeur du Service central de documentation criminelle, il est pressenti pour être son successeur. Quand on lui proposera le poste, il y verra une mauvaise nouvelle, avant d’accepter les dents serrées, mais le sourire aux lèvres, remerciant qui de droit pour leur confiance.
À la fin du repas, sa fille lui dit qu’elle doit rejoindre des amis à République. Elle l’embrasse sur le front et il la regarde s’éloigner, un brin nostalgique du temps qui passe, mais fier de ce qu’elle est devenue. Il craint toujours que son travail se répercute sur Holly, que des extrémistes s’en prennent à elle pour le faire chanter ou se venger. Même si elle a quitté les réseaux sociaux, il lui demande de rester prudente.
Il fait signe au serveur de lui apporter un nouveau verre, prend son téléphone, vérifie ses mails, ouvre un message d’Octave Malot, un flic droit et honnête, avec qui il s’est lié d’amitié lors du démantèlement d’une cellule terroriste islamiste à Argenteuil, dans le Val-d’Oise, en 2016 : « Nous avons reçu un mémo de Mickaël Arnaud, écrit-il, indiquant qu’il fallait te prévenir si nous avions affaire à des incels. Une dénommée Iris Velba sort de mon bureau. Elle vient de déposer une plainte contre X pour une tentative de viol, où seraient impliqués la sphère ultra incels et ce Tristan Largile qui fait parler de lui dans la presse. J’ai informé le procureur de la République, une enquête préliminaire a été ouverte. Si tu le souhaites, tu peux interroger les protagonistes impliqués. »
Sébastien Mille le rappelle dans la foulée. Il a suivi l’accroissement des tensions entre les neo straight edge et les ultra incels. Octave Malot lui fournit les pièces du puzzle qui lui manquent. L’histoire de la croix gammée peinte sur la porte du couple ne surprend pas Mille. Le geste est caractéristique d’une époque confuse, propice à l’inversion des valeurs, où les propagateurs de haine dénaturent les propos de leurs adversaires pour les présenter comme fascistes. Car si tout est fascisme, alors plus rien ne l’est, et les salauds ne sont plus tant que ça des salauds.
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Au bout de quelques titres, Mei aperçoit aux premiers rangs une demi-douzaine d’hommes qui commencent à pogoter, à pousser violemment les autres membres du public, braillant par-dessus la musique. Elle s’arrête de jouer, fait un signe à Yvan qui appelle au calme. L’un des types lui hurle en retour : « Ta gueule, sale nazi. » Elle comprend qu’il s’agit d’ultra incels infiltrés. Mei pose la basse à ses pieds, saute dans la fosse, s’approche du connard en question et lui envoie un puissant coup de genou dans les couilles. À peine s’écroule-t-il, replié en position fœtale, qu’un de ses collègues agrippe Mei et la jette à son tour à terre. Elle se réceptionne comme elle peut, prend appui sur ses cuisses pour rebondir, décroche son porte-monnaie autodéfense, une poche en tissu lestée du poids des pièces de monnaie, qui une fois dépliée devient une arme de 32 cm, à l’image d’une pierre dans une chaussette – parfaitement légal, Mei le trimballe avec elle pour se défendre en cas d’agression -, et frappe le premier assaillant venu, tandis que Gaspard et Yvan se jettent dans l’arène, tentent de maîtriser les types, se retrouvent à se battre, donnent des directs, encaissent des mandales. Des neo straight edge viennent leur prêter main forte, il fait sombre, on ne sait plus qui tape qui, les vigiles sont débordés, la police ne tarde pas à débarquer. Les trois quarts de Significant Youth se retrouvent en garde à vue.
Mei se sent fautive. Yvan et Gaspard ne lui en veulent pas. Elle aurait dû garder son calme, craint les répercussions pour le groupe, que leurs concerts soient réputés dangereux, que le public déserte. Les ultra incels auraient réussi leur coup. Mais comment regretter son geste, le groupe revendiquant le goût pour l’action, la prise de position, le fait de ne jamais s’écraser devant les néfastes, les funestes, les réfractaires aux changements, les partisans du « on ne peut plus rien dire » et du « c’était mieux avant », les racistes, les homophobes, les climatosceptiques et surtout les misogynes. Peu importe les conséquences, être neo straight edge, c’est se foutre de son confort, de sa carrière, de sa richesse, s’engager pour un monde meilleur en tenant tête à tous les opposants. Ne plus faire de compromis. Accumuler de l’énergie via la musique et la déverser à la gueule des salauds.
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[INCIPIT]
"L'attentat de l'Absolute Club est une attaque terroriste masculiniste perpétrée en France le 13 juin 2005 dans la salle parisienne du même nom, lors d'un concert du groupe de rock Significant Youth, réputé pour ses prises de position féministes."
(Absolute Club et Significant Youth sont soulignés par l'auteur dans le texte)
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Après avoir raccroché avec son frère, Yvan traîne sur son fil d'actualité. Tout ce qu'il lit génère des affects négatifs. Au bout de 10 minutes, il suffoque déjà, ne comprends pas comment des gens peuvent encore traîner sur les réseaux, en supporter la toxicité.
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Entre la justice et le bien commun, mon cœur balance.
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Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2505120/benjamin-fogel-le-silence-selon-manon
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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