Pourquoi, lorsqu'on parle de Québec, est-on toujours porté à dire "la bonne vieille ville"?
Cela n'est certainement pas dû à ses traditions guerrières et chevaleresques, ni à l'aspect grandiose de son site presque sans rival au monde, pas plus qu'à la physionomie quelque peu rébarbative que lui prêtent sa menaçante citadelle et sa longue ceinture de canons accroupis comme des dogues.
Cela n'est pas dû non plus à ses ruelles étroites et tortueuses, où les trottoirs ont l'air de se tasser le long des murailles pour laisser passer les piétons sur la chaussée.
Non; ce titre de "bonne vieille ville", qui réveille on ne sait quelle idée de bonhomie familière et douce, Québec le doit principalement aux mœurs patriarcales, pour ne pas dire à l'allure un peu surannée de sa population.
Nulle part ailleurs ne rencontre-t-on, si nombreux et si caractérisés, ces respectables citadins aux habitudes régulières comme un mécanisme de jaquemart, flottant dans ces longues redingotes aux basques pendantes, si fort en vogue il y a quarante ans, bons bourgeois cravatés à la polonaise, qu'on dirait descendus tout d'une pièce de ces moulures de bronzes dont Plamondon encadrant ses toiles vigoureuses, et Théophile Hamel ses portraits aux fins coups de pinceau.
Louis-Honoré Fréchette – Novembre