Les échanges d'une extrême diplomatie entre
Freud et Ferenczi couvrent, sur cette période de 1908-1914, des événements qui furent déterminants pour la constitution de la psychanalyse.
Ferenczi s'y impliqua avec une grande ferveur, soutenant les travaux de
Freud et acceptant d'infléchir aux siens la direction qui semblait à
Freud la plus favorable. L'enthousiasme de Ferenczi pour les recherches en parapsychologie ne connaîtra qu'une très brève période d'expansion, vite tempérée par la prudence de
Freud qui craignait que sa psychanalyse ne soit associée à des manigances de bonne femme. Nous le découvrons par ailleurs, cédant facilement à la jalousie que lui inspirent ses comparses dès lors qu'ils investissent d'un peu trop près le sillage du maître. Revenant à sa juste place à chaque fois que
Freud le lui rappelle, Ferenczi ne se gêne cependant pas pour régler son affaire à Jung lors du conflit intellectuel qui l'écarta de
Freud à propos de l'orientation de la psychanalyse. Cette différence peut s'énoncer assez simplement en indiquant que Jung cherchait à faire de la psychanalyse une initiation, c'est-à-dire une discipline qui permettrait la conquête de l'attribut imaginaire de la toute-puissance, alors que la psychanalyse, comme le dira
Lacan à son tour, est une anti-initiation. Avant d'en arriver là, Ferenczi le premier a procédé à un démontage en règle de la psychologie analytique de Jung.
Les années 1908-1914 sont aussi marquées chez Ferenczi par son dilemme amoureux qui le partage entre Madame G. et sa fille Elma ; chez
Freud par son travail sur
Totem et tabou ; et chez eux deux, ainsi que chez Jung, par leur voyage aux Etats-Unis au cours duquel ils inoculeront aux américains la « peste » de la psychanalyse, à laquelle les américains trouvèrent d'ailleurs bien vite un remède définitif en s'injectant de l'ego analyse.