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EAN : 978B0859L2XZ1
253 pages
Stock (27/05/2020)
3.69/5   8 notes
Résumé :
Une femme et un homme, nés au mitan du XXe siècle au Chili.
Elle, Carmen, fille de la bourgeoisie, vit à Santiago ; lui, Teo, a grandi dans les mines de salpêtre au nord du pays. Tout les oppose. Mais voilà que le Chili gronde. Les mouvements révolutionnaires des années soixante secouent les corps et les consciences.
Après l'élection d'Allende et la ferveur de l'Unité populaire, viendra le coup d'État du 11 septembre 1973, et avec lui, la violence de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique


La famille de Téo est originaire de l'Atacama, où l'on travaillait à extraire le salpêtre destiné à fertiliser les campagnes du monde entier mais qui tuaient ceux les travailleurs, jusqu'au jour où une explosion fait de terribles dégâts. La famille quitte alors la région pour la ville.

« En cette année 1959, des centaines de familles partaient en errance, coeurs étreints par l'angoisse du lendemain. »

Toute sa vie, Téo gardera dans le coeur ces Indiens Ayramas, vivant sur les hauts plateaux des Andes et cherchera à cultiver leur culture, leurs coutumes. Son père est un loser, alcoolique et violent, c'est la mère Atina qui fait tourner la maison. du fait de leur pauvreté, Téo se fera maltraiter à l'école.

Carmen Castillo vient d'un milieu bourgeois ; elle a un caractère affirmé comme ses parents Fernando et Monica, car elle doit trouver sa place dans la famille. Son arrière-grand-père maternel était président du Sénat, et dirigeait un des principaux journaux politiques de l'époque, jusqu'à ce qu'un colonel prenne le pouvoir et le contraigne à l'exil.

Deux milieux complètement différents, donc, mais un engagement politique quasi identique. Carmen est proche de Beatriz Allende, fille aînée de Salvador Allende, admiratrice de Guevara et du régime castriste.

On va assister à la lutte de chacun pour que Salvador Allende arrive au pouvoir, certains plus violents que les autres adhèrent aux méthodes controversées du MIR le Mouvement de la Gauche Révolutionnaire.

Mais, pour la CIA et Nixon en tête, il est inenvisageable qu'un autre pays d'Amérique du Sud devienne « communiste », pour eux, le mot socialisme signifie communisme, oeil de Moscou etc… qu'à cela ne tienne, Nixon va dépenser des milliards de dollars pour finance la campagne de candidat de la droite dure, Eduardo Frei, allant jusqu'à envoyer des armes…

En effet Salvador Allende, contrairement aux sondages de la CIA a fini par être élu, dans la liesse populaire et tenter de redistribuer les richesses détenues par les familles catholiques : augmentation des salaires, nationalisations… Mais, l'inflation galopante se profile, les denrées alimentaires se font rares, le général qui était un peu trop « favorable » au président finit par démissionner et l'armée fait appel à « un général discret et obéissant » : Augusto Pinochet pensant qu'il était facilement manipulable (comme un certain KGB fit plus tard appel à Vladimir Poutine, le pensant suffisamment peu futé pour être manipulable !!!

On assiste à un soulèvement de l'armée, télécommandé par Nixon et ses sbires, Salvador Allende refusant de quitter le palais présidentiel va se suicider sur place enregistrant un message d'adieu très fort et émouvant, et la dictature de Pinochet se met en place avec ses arrestations, ses tortures, des milliers de personnes vont ainsi « disparaître », on va jusqu'à les jeter du haut d'un avion en haute mer (technique très appréciée et largement utilisée par Salazar au Portugal)

Ce roman retrace l'histoire du Chili durant la brève présidence de Salvador Allende et les années de la dictature. Teo va être arrêté et torturé mais tiendra bon, les arrestations et les disparitions parmi leurs proches vont se multiplier et Carmen sera contrainte à l'exil. Mais les plus convaincus ne renonceront jamais à résister, avec des commandos formés à Cuba par exemple comme ce fut le cas pour Teo.

A travers l'histoire de ces deux familles, on a l'histoire de la résistance à la dictature et la douleur de l'exil. Carmen se persuade qu'elle amoureuse d'Andrés Pascal Allende, et confond l'amour avec l'admiration pour son militantisme ; elle finit par l'épouser tout en sachant qu'elle s'enferme dans une autre cage, car le statut des femmes n'est pas terrible…

« Révolutionnaire ou non, la domination masculine était bel et bien une réalité. Elle admirait Andrés qui l'avait initiée à nombre de découvertes, à la militance active. Depuis qu'elle s'était plongée dans l'aventure du Mir, elle aspirait à plus encore d'intensité, plus d'espace pour s'épanouir… »

Comme Carmen, Teo rejoindra le Mir, en quête de ce qu'il appelle une communauté, une autre famille en somme.

J'ai beaucoup aimé ce roman historique, surtout pour tout le rappel du contexte politique du Chili, mais les héros sont très intéressants (ce qui n'est pas toujours couru d'avance, car il y a souvent un décalage entre l'Histoire et la petite histoire et là je trouve que les auteurs s'en sortent très bien.

J'ai suivi de près la période « Pinochet » au Chili, comme celle de toutes les dictatures qui se sont succédé en Amérique du Sud d'ailleurs : comment ne pas se souvenir de tous ces dictateurs dans leurs habits de lumière trônant aux obsèques de Paul VI par exemple !) et Pinochet ne sera jamais jugé de son vivant, malgré des initiatives courageuses, conduisant à son arrestation en Grande-Bretagne en 1998. Comment oublier que ce vieillard diminué en fauteuil roulant, a envoyé promener le fauteuil dès qu'il a posé le pied sur le sol chilien à sa descente d'avion, bras d'honneur au monde entier ! il ne sera jamais inquiété et s'éteindra en 2006 ! avec un détail croustillant : pas si à l'aise que cela, le vieillard soi-disant amnésique, il a demandé à être incinéré pour être sûr que sa tombe ne soit pas profanée !

Certains des protagonistes m'ont un peu dérangée par leurs méthodes ultra-violentes, et leur militantisme forcené sans concession leur jusqu'au-boutisme mais on voit Teo évoluer, prendre ses distances avec eux, il est capable d'entendre les idées des autres sans les rejeter de manière systématique comme il le faisait au début.

L'écriture est belle, très rythmée, on ne s'ennuie pas une seconde et la couverture est très bien choisie!

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock Arpège qui m'ont permis de découvrir ce livre passionnant ainsi que les deux auteurs et d'apprécier la qualité de leur travail.

#CarmenetTeo #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Voilà l'itinéraire de Carmen et Teo, deux Chiliens de la génération d'après guerre. Ils vivront l'accession au pouvoir de l'Unité populaire d'Allende qu'ils soutiendront, ses difficultés, le putsch de Pinochet, l'horrible répression qui s'en suivit, la torture, l'exil militant en Europe et, bien des années plus tard l'impossible retour au pays.
Ce livre est écrit avec sympathie pour ces deux héros et ce qu'ils représentent.
Factuel et prosaïque il n'apprendra rien, ou pas grand chose à ceux qui connaissent déjà cette histoire tragique. Mais il se lit avec un réel plaisir, et je le conseillerais volontiers à celui ou celle qui voudrait s'informer sur le Chili de cette époque, et ce d'autant plus que les personnages sont réels.
Cependant, au fur et à mesure que je tournais les pages je n'ai pu m'empêcher de penser à ce qu'avait fait sur ce même thème Luis Sepúlveda : il y avait chez lui un vrai souffle, une poésie, un engagement et une profonde empathie pour ses camarades de combat et pour son peuple que je ne retrouve pas ici. Il est vrai qu'il avait vécu ces événements dans sa chair.
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Bonsoir à toi qui passe par là. Aujourd'hui, j'ai lu "Carmen et Téo" d'Olivier Duhamel et Delphine Grouès paru aux éditions Stock et je dois t'avouer que je sors complètement bouleversée de cette lecture. Il s'agit d'une histoire vraie qui nous emmène au Chili, à la rencontre de Carmen et Téo, l'une issue de la classe bourgeoise et l'autre d'une famille plus modeste. Rien ne les prédestinaient à se rencontrer et pourtant, c'est via le MIR et leur militantisme que leurs destins vont se croiser. Les auteurs nous plongent dans le récit d'une croisade pour les idéaux d'un pays, livrée par une jeunesse qui risque sa vie pour améliorer celle des autres, porteuse de l'espoir d'une égalité future entre les humains. On suit leur bonheur à l'élection d'Allende, on ressent cette victoire si particulière, si belle et forte avec eux puis on ressent le coup de couteau dans le coeur quand leurs idéaux sont bafoués à l'arrivée de Pinochet au pouvoir. On ressent le malaise de la dictature, l'air vicié, la peur, l'horreur des camps de concentration, des victimes torturées et le dégoût envers la justice quand ce dictateur meurt sans avoir été jugé. J'ai ressenti une admiration pour ces êtres à qui on a tout enlevé et qui gardent la force de rester debouts et dignes, qui avancent malgré l'exil puis se reconstruisent dans un monde où leurs regards ne seront jamais plus innocents mais où ils continuent leur combat de la plus belle des façons, l'art... Un roman d'une profonde humanité, un cri de liberté écrit avec une plume sensible sans plonger dans le pathos, d'une justesse qui touche en plein coeur. Les auteurs nous livrent un ouvrage d'une grande puissance de transmission symbolique pour ne pas oublier, pour continuer à lutter afin que les droits de l'homme soient respectés dans le monde.
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Roman historique écrit à quatre mains, Carmen et Teo s'inspire de personnages réels dont les vies sont évoquées à partir d'une partition mêlant les faits à l'imagination de ses auteurs.

Trente-deux chapitres introduits chacun par un titre incisif se suivront selon une trame chronologique fidèle en tout point aux événements marquants ayant chamboulé leurs trajectoires. de 1945 à la mort de Pinochet en 2006, Olivier Duhamel et Delphine Grouès dérouleront un tapis rouge vermillon pour la grande et la petite histoire en veillant bien à ne pas enfouir la seconde dans les méandres de la première.

1945. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, dans une clinique confortable de Santiago, Carmen naît au sein d'une famille bourgeoise. Sa mère, Mónica lui donne vie la dans les meilleures conditions, au son du violoncelle de Bach. Cinq ans plus tard, au coeur du désert de l'Atacama situé à plus de deux mille kilomètres au nord de la capitale, Teo voit le jour dans une famille d'ouvriers. Sa mère, Atina, accouche seule dans la poussière de la mine toute proche. Une explosion vient d'avoir lieu. A peine le temps de nourrir son nouveau-né qu'elle doit porter son aide pour soigner les rescapés de la déflagration.

Les chemins qui les mèneront à l'âge adulte se déroulent dans des univers parallèles : venant de milieux si différents, quelles sont les chances pour que leurs routes se croisent ?

Pour les deux protagonistes, l'élection de Salvador Allende en 1970 représentait une immense victoire, débouchant sur l'espoir de voir la société chilienne se transformer. Mais cette présidence, comme on le sait, fut des plus courtes. Suite au risque de contagion du communisme et de la gauche dans le reste du continent sud-américain, le putsch militaire ou golpe devait rétablir l'ordre d'une façon des plus brutales. Par l'interdiction des partis politiques, l'internement des opposants au régime dans des camps ou encore l'imposition d'un néolibéralisme pur et dur.

Au fil de la lecture, qui nous propulse dans une autre époque pour revenir petit à petit à des temps plus récents, le cours du monde semble s'être arrêté. Une porte s'ouvre : le travail de mémoire s'enrichit d'un nouveau témoignage précieux.

Roman historique, sorte de biographie romancée, sa découverte est l'occasion de rencontrer deux personnages poignants qui ne laisseront pas indifférents et qui, à leur tour, resteront gravés dans notre mémoire.


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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
L’insouciance des premières années de Teo sur sa terre natale s’était brisée. Sa terre du Nord… la nostalgie de la nature et du désert l’envahissait. Est-ce qu’un jour il parviendrait à retrouver ses grands espaces, la liberté, le lien avec la lune, les étoiles et le soleil, comme le grand-père aymara le lui avait appris ? Et le silence ? Combien il aspirait à retrouver quelques secondes de silence. Voulant échapper au vacarme, Teo s’isolait comme un oiseau blessé.
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Teo s’épanouissait. Il s’épanouissait enfin. La fin de son adolescence portait le sceau de l’engagement. Il avait trouvé un sens à l’exil que la compagnie du salpêtre avait imposé à sa famille. Rejoindre le Mir, c’était s’insérer dans une communauté. Une communauté d’intention et aussi de protection. Trouver une place, posséder une identité.
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La solidarité avec le Chili meurtri dépassait les rangs de la gauche. Bernard Stasi, membre du parti centriste de Jacques Duhamel, ministre de l'Outre-mer depuis cinq mois, publia dans Le Monde un article titré « Un coup d’État qui doit être condamné ». Pompidou enragea : de quel droit ? Cinq mois plus tard, lors d'un remaniement du gouvernement, il ne fut pas reconduit. Alain Peyrefitte avait justifié implicitement le coup d’État en traitant Allende d' « apprenti sorcier ». Il fut promu ministre des Affaires culturelles et de l'Environnement.
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Les présidents se succédaient, Pinochet, lui, demeurait commandant en chef des armées. Les exilés rentraient au pays, et nombre d'entre eux choisissaient quelques mois, quelques années plus tard de repartir vers les terres qui les avaient protégés. Le temps et les espaces avaient été brisés. L'exil ne s'arrêtait pas, ce qu'ils avaient perdu ne pourrait être retrouvé. Ils ne reconnaissaient plus la nation de leurs souvenirs, ils y avaient perdu leur place. Considérés soit comme des privilégiés qui avaient pu vivre loin de l'oppression dans le confort du Vieux Continent, soit comme des communistes, des terroristes qui revenaient sévir au Chili, il leur était difficile de reconstruire une vie sur ces fondations marécageuses. Leurs enfants se sentaient étrangers, parlaient un chilien vieux de vingt ans déconnecté du langage de leur génération, découvraient un pays diamétralement opposé de l'image qui leur avait été dépeinte depuis leur plus jeune âge. Chacun cherchait le terrain où poser ses valises et sa mémoire comme il pouvait.
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L'intégralité de l'interview sur la plateforme france·tv http://bit.ly/2Z5Zu8G « Des gens qui sont aujourd'hui accusés ou convaincus de violences sexuelles m'ont barré la route, c'est le cas d'Olivier Duhamel et Gérald Darmanin » raconte Sandrine Rousseau, qui s'est vue écartée d'un poste à responsabilités à Sciences Po Lille.
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