Il était une fois une petite fille de onze ans qui s'appelait Miquette et qui vivait bien heureusement avec sa très jolie et gentille maman dans une petite maison, un peu à l'écart. Elles...
– ... ?
Non ! Comme ça arrive souvent (surtout dans les histoires de Gudule, alias Anne Duguêl, ou l'inverse)...le papa avait fichu le camps, il y a fort longtemps...
Donc, elles passaient des journées agréables entre filles en compagnie du chien Titus et avec la grand-tante de Miquette qui leur rendait (un peu trop) régulièrement visite. Tante Madeleine était une vieille bique croulante de 80 balais qui croyait encore pouvoir séduire des hommes ayant la moitié de son âge. Elle tombait amoureuse de Tu-Ahn, un acupuncteur vietnamien qui savait accomplir des miracles avec ses aiguillons. Mais à partir du jour où ce piqueur de maux était invité chez Miquette et sa maman...leur vie partait en ridements et lambeaux...
C'est Miquette qui raconte son histoire à la première personne. Miquette, aussi bien emmurée dans son mutisme et son univers intérieur que dans l'institution où elle a atterri après un violent traumatisme.
Le psi Quiquequoi essaie bien de faire revenir Miquette dans le monde des sentiments refoulés exprimés, mais la petite fille ne se confie qu'à son copain Gogol (un garçon trisomique) et à ses araignées qu'elle élève dans le but de pouvoir revenir dans le "Avant...".
Dans un langage et un style délibérément enfantin, on suit, captivé par cette longue nouvelle aux éclats fantastiques et à l'ambiance glauque, Miquette dans la descente de l'enfer du paraître et de la convoitise.
On prend cette gamine, certes un peu naïve pour son âge, en pitié, d'autant qu'on se demande jusqu'à la finale lugubre si le récit que nous narre la fillette reflète bien la réalité ?
Ne dit-on pas qu'on peut aussi les trouver au plafond...les araignées ?
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Première sacrée immersion pour moi dans l'univers de Gudule (Anne Duguël), avec cette nouvelle qui m'a embarquée dès les premières pages et dont je n'ai fait qu'une bouchée !
Impossible de la lacher avant la dernière page tournée...
Avec son regard, ses émotions d'enfant, Miquette nous raconte son histoire.
Celle qui l'a conduite dans une institution.
Enfermée dans un certain mutisme, le psy Quiquequoi veut la faire parler, mais elle ne s'adresse qu'à son ami Gogol et élève des araignées.
Un récit absolument terrible ! Teinté d'un humour très grinçant et de fantastique.
Cet étrange mélange de glauque et de langage enfantin est assez malsain. Il nous fait à la fois sourire et plonger dans un évident malaise...Déconcertant et envoûtant...
Sa maman, sa grande-tante Madeleine, son chien Titus, et l'arrivée de ce curieux acupuncteur asiatique Tu-Ahn.
Son élevage d'araignées aussi !
Miquette nous dit tout ! Petite fille, si attachante et mystérieuse à la fois...
Je me suis sentie spectatrice, à la place de Miquette, en fait, tellement la narration est imagée.
Véritablement subjuguée !
Une plume que j'ai vraiment apprécié, donc.
Bien évidemment je ne vais pas m'arrêter là et je lirai les autres nouvelles du recueil Le club des petites filles mortes, dans un futur très très proche.
Bisous à la personne qui me l'a recommandé ;-)
Je vous le conseille à mon tour !
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《Miquette fixe sa montre. La trotteuse tourne clopin-clopant. Le compte à rebours est commencé. Encore dix secondes, (...), cinq, quatre, trois, deux, une... Top !"
"C'est comme s'il y avait un écran dans ma tête, avec un film projeté dessus.
L'héroïne est très jeune. C'est une petite fille appelée Miquette, avec des boucles brunes comme sa mère (mais plus courtes), plutôt petite pour ses onze ans, maigrichonne et muette. Mais attention, cette Miquette-là, ce n'est pas moi. Moi, je suis juste la spectatrice, assise sur son fauteuil dans la grande salle obscure. Et je ne quitte pas l'écran des yeux.》
Mon résumé :
Miquette est effectivement une fillette de onze ans, "devenue" mutique suite à de terribles événements. Elle vit à présent dans une institution et ne communique plus qu'avec Gogol, un enfant trisomique; son seul ami.
Malheureusement, c'est une bien triste histoire qui lui est arrivée...
Triste, mais surtout, que personne ne voudra jamais croire...
"Ici, ils prétendent que je suis "aphasique", ça veut dire "muette" en langage de docteurs.
Quels idiots ! J'ai jamais été muette, moi ! (...) Même qu'à l'école, la maîtresse me trouvait trop bavarde. Et je chantais aussi.
C'est seulement après que j'ai décidé de me taire.
Après."
Car avant tout ça, Miquette était simplement une petite fille joyeuse et pleine de vie à l'instar des enfants de son âge, et qui adorait par-dessus tout sa maman. Elles vivaient ensemble avec Titus, le chien de la famille.
Son papa lui, était un "irresponsable" d'après ce que disait sa mère, et c'est pour cela que ses parents étaient séparés.
Dans la vie de Miquette et Maud, sa maman, il y a tante Madeleine (en réalité la grand'tante). Une dame d'un certain âge dirons-nous, et que la petite fille n'aime pas beaucoup (celle-ci étant beaucoup trop présente dans leur vie à son goût), et qu'elle finira par détester totalement, autant qu'une fillette peut détester un adulte...
"L'âge de tante Madeleine, c'était son sujet de conversation préféré. Elle adorait se plaindre."
...Voire plus ;
"C'est là que j'ai croisé deux types qui descendaient. Ils portaient une civière avec un sac plastique dans lequel une forme était allongée.
Tante Madeleine !
J'ai trouvé que ça lui allait bien, un sac-poubelle, comme cercueil."
Et dans la vie de Madeleine, il y a Tu-Ahn. Un jeune acupuncteur d'origine asiatique et qui prétend faire des miracles avec ses aiguilles. Madeleine en tombera folle amoureuse, malgré l'énorme différence d'âge entre eux. ...Mais cela devrait pouvoir s'arranger.
"Les miracles, ça arrive."
"C'est alors que cette vérité horrible m'a sauté aux yeux : TANTE MADELEINE AVAIT L'AIR PLUS JEUNE QUE MAMAN."
En bref :
"Je me suis sauvée sur la pointe des pieds. j'avais le coeur lourd, mais lourd !
Une enclume."
Nous sommes bien ici dans un roman de Gudule (alias Anne Duguël, et de son vrai nom Anne Liger-Belair), et comme elle se plaît à le dire elle-même : "C'est de ma propre enfance dont je me débarrasse". L'auteure a publié nombre de romans où elle en tue des gens ! Des vilains pas beaux, des pères Noël, et bien sûr, beaucoup de petite filles !
- Je recommande d'ailleurs "Le Club des petites filles mortes" ; premier volume de l'intégrale de ses romans fantastiques, dans lequel j'avais pour la première fois découvert l'histoire de Miquette, il y a déjà fort longtemps déjà. J'ai pris énormément de plaisir à la relire récemment alors que je l'avais presque oublié. -
Et donc, on peut se douter que l'histoire de cette fillette aux araignées ne s'arrête pas à mon humble résumé. Ceux qui connaissent Gudule savent, ou se doutent, que la vie de Miquette va rapidement tourner au cauchemar.
C'est un terrible drame, une tragédie, qui va prendre à l'enfant ce qu'elle a de plus cher au monde.
Mais il y a pire, c'est les circonstances dans lesquelles cette horrible farce va avoir lieue...
"- Mais les gens vont croire que c'est toi, la morte !
- Et alors ? On s'en fiche de ce que croient les gens. L'important, c'est ce qu'on croit, nous !"
Je ne peux me résoudre, ce malgré une réelle envie, à vous en dire d'avantage. Parce que c'est l'histoire de Miquette après tout, et que c'est tellement mieux quand c'est elle qui raconte. Avec ses mots à elle, sa logique de gamine de onze ans, et un franc-parler détonnant, qui fait pourtant sourire, en dépit de l'horreur qu'elle décrit à travers ses rêves, mais surtout ses cauchemars...
"La perspective de se réveiller permet de supporter les pires cauchemars.
Or, là, j'avais une certitude horrible : le cauchemar, c'était devenu ma vie."
Ma note : 5/5, obligé !
J'ai adoré cette nouvelle qui se lit agréablement, tissée de mots et de rêves d'enfants, mais néanmoins terribles, et qui font mouche.
Ceci dit, si je devais me prononcer pour un coup de coeur, ce serait alors les yeux fermés pour le recueil "Le Club des petites filles mortes" dans son entièreté, dont je parle plus haut.
Ce que j'en pense :
"...mon cerveau fonctionnait tellement vite que j'avais du mal à le suivre."
Jusqu'à quel point peut-on croire cet enfant, enfermée dans le mutisme total et la solitude (enfin presque, car il y a son meilleur ami Gogol et son élevage d'araignées aussi. Mais également sa Barbie, qu'elle chérit plus que tout au monde - même si ce n'est pas vraiment pour la poupée elle-même) depuis ces terribles événements.
"Quel crétin ! Si je ne quitte jamais ma Barbie, ce n'est pas parce que je l'aime mais à cause de ce qu'il y a dedans.
Si on me prenait ça, ce serait vraiment la fin des fins !"
Ces éventements, on les découvre au fil de l'histoire car si Miquette est muette, elle ne discute pas moins dans sa tête, avec le lecteur.
L'idée de cauchemar est plus que récurrente et l'on est alors en droit de se demander si toute cette histoire n'est pas tout bêtement née de son esprit naïf et torturé par la mort de sa maman - ce qui serait humain. Oui mais la gosse semble tout, sauf naïve...
"Les pires cauchemars sont ceux qui se passent dans la réalité."
Au final, l'auteure nous laisse décider de ce qu'il advient de sa petite héroïne. C'est sans doute là, pour moi, le point faible de cette nouvelle car j'aurais sans doute aimé qu'elle étoffe un peu plus de ci de là ce récit qui mérite que l'on s'y attarde sincèrement, à tout le moins en tant que lecteur.
Je préconise donc cette lecture à tous, excepté peut-être à ceux ou celles qui auraient la déprime facile. C'est bel et bien un triste conte que Gudule nous livre ici sous les traits de "La fille aux araignées".
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Cela fait un bon moment que j'ai plusieurs romans de l'auteur qui attendent dans ma liseuse, mais allez savoir pourquoi, je n'avais jamais pris le temps d'en lire un! Pourtant ce n'est pas l'envie qui me manquait car les couvertures sont sublimes et les synopsis sont très alléchants. Après avoir hésité entre plusieurs d'entre eux, j'ai opté pour celui-ci car l'idée d'une petite fille qui élevait des araignées m'intriguait vraiment.
Je dois admettre que j'ai été emportée dès les premières lignes car le style de l'auteur est impeccable: passionnant, accrocheur et imagé, il nous plonge immédiatement dans l'histoire qui nous est présentée, nous donnant envie d'en apprendre toujours plus. Quel régal! Vraiment je suis sous le charme tellement la qualité du récit est au rendez-vous.
Le lecteur s'attache vite à notre petite héroïne dont la vie est bien bouleversée et emprunte d'une certaine magie. Mais est-ce vraiment de la magie ou alors tout n'est-il qu'affabulations? Finalement a-t-elle sa place dans l'hôpital où elle a échoué? Peut-être bien... Il est bien compliqué de dénouer les fils de cette toile si impeccablement tissée... et c'est tout le bonheur de cette lecture.
En tous les cas, impossible de s'ennuyer ici car le récit nous amène constamment de nouveaux éléments, des révélations, de l'action, de quoi ne plus réussir à lâcher notre roman après l'avoir commencé. Je dois admettre que j'ai eu une toute petite pointe de déception (mais vraiment minime): j'aurais vraiment aimé que l'histoire soit encore plus sombre, plus ténébreuse, plus "angoissante". Je trouvais le contexte pleinement adéquat pour que le récit tourne en ce sens, mais l'auteur a choisi une autre voie tout aussi passionnante.
En bref, ce roman est une superbe découverte et je ne suis vraiment pas passée loin du coup de coeur! Je me réjouis de lire d'autres oeuvres de l'auteur car sa plume est envoûtante et que j'ai adoré ma plongée dans son univers.
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Les yeux de Titus [le chien], on dirait de grosses billes noires. D'habitude, ces billes-là sont pleines d'amour. Tellement, tellement que, quand on les regarde, ça vous fait chaud partout. Mais là, elles débordaient de peur. Une peur affreuse. Ses yeux criaient : « Au secours ».
Je n'ai jamais vu des yeux hurler aussi fort.
La terre, si on y réfléchit, ce n'est composé que de cadavres. Des milliards de millions de corps agglomérés. Une grosse boule de morts qui tourne dans l'univers. Ça, la maîtresse s'est bien gardée de nous le dire, au cours de géographie ! Ce qu'on apprend à l'école, finalement, ce n'est rien que des mensonges.
Quand on a sa main dans celle d'un ami, les pires moments deviennent une fête.
Recette pour rajeunir les grand-mères
Prenez trois belles araignées, engraissez-les pendant six mois avec des mouches bleues assaisonnées au gingembre (le gingembre est facultatif mais elles en raffolent)
Une fois les arachnides parvenues à maturation, percez-les avec une aiguille en or, une nuit de pleine lune, en récitant cette formule magique :
"Tigneligneligne foutchéou sétchouen patchouli hankéou pinguiépong winguéwong hahangho outchéoutsintsao
toutchéoutrintsao tsing paotsing foutchéou péifou et toc, un point c'est tout."
Ensuite, écrasez soigneusement les araignées dans un bol, ajoutez de l'huile d'olive, de l'ail et de la ciboulette, et faites-en une pâte compacte dont vous tartinerez le visage de votre grand-mère, pendant son sommeil.
Au réveil, vous aurez la surprise de la trouver rajeunie de vingt ans.
ATTENTION
Si vous désirez qu'elle redevienne petite fille, remplacez l'ail et la ciboulette par des chamallows et du sucre en poudre.
Titus, mon chien d'avant, faisait la même tête quand il apercevait le facteur, et un jour il lui a bouffé le fond de son pantalon. Cette fois-là, maman l'a enfermé dans la cave (Titus, pas le facteur) et je suis allée dormir avec lui sur le tas de charbon, pour le consoler. Je vous dit pas l'état de mon pyjama, après !
Si je vous dis que mon métier, c'est bibliothécaire, ça vous évoque quoi ? Des lunettes ? Un chignon ? Une personne qui adore fait "chuuuut !" ?
Et si l'on balayait les idées reçues ? Et si l'on partait à la découverte de bibliothécaires de fiction qui ont le pouvoir de changer une vie, pour le meilleur et pour le pire ? Venez, je vous emmène...