Merci à Babelio et aux Éditions Palémon pour l'envoi de ce livre dans le cadre de l'opération Masse Critique Mauvais Genre d'Octobre 2021. le hasard veut que, en ce moment, je découvre la verve de divers avocats en exercice ou ayant quitté le barreau. C'est donc avec curiosité que je suis entrée dans cette histoire sans aucun préjugé.
Avant de lire un auteur que je ne connais pas, j'effectue quelques recherches sur sa bibliographie. "
Les silences du marais" s'inscrit dans une collection de romans policiers au personnage récurrent : le commissaire Nazer Baron. Comme dans beaucoup d'autres séries policières, j'imagine que la vie de ce limier doit évoluer au fil des tomes, mais je n'ai ressenti aucune gêne à le rencontrer sur cette enquête sans avoir suivi sa carrière.
Verser dans un shaker une jeune fille assassinée, un petit ami accusé, une exécution sommaire, une enquête non aboutie, un témoin envolé, avec quinze ans plus tard, un journaliste fouineur et un commissaire mutique, saupoudrer le tout d'une bonne grosse dose de haine silencieuse, voici les ingrédients qui composent ce polar. Que donne ce cocktail ?
Pas de descriptions atroces, ni de sang qui suinte des pages en éclaboussant le cerveau. Cette intrigue est "propre" dans le style
Agatha Christie ou
Simenon. le lecteur se laisse mener par le bout du nez dans le suivi de l'investigation journalistique dans la première moitié du roman, puis dans l'enquête policière qui suit sans qu'il se doute de l'aboutissement de ce cold case subitement remonté en surface. Curieusement, Nazer Baron n'intervient qu'à partir de la page 118, ce qui n'est pas habituel dans un polar. Honnêtement, si ce roman se lit sans déplaisir, je ne peux pas dire que j'ai été emportée ni que mes méninges aient été en surchauffe. Pourtant, je suis plutôt bon public.
Je crois que le rythme de l'ensemble m'a dérangée ; une lenteur nonchalante qui n'est pas sans rappeler certains téléfilms allemands des années 80. L'ambiance taiseuse enveloppant les protagonistes y est aussi pour beaucoup. La jeune Léna n'a pas dû s'amuser tous les jours au milieu d'une haine opposant deux familles sur plusieurs générations à la mode Roméo et Juliette ! Malgré cela, aucun des personnages n'a réussi à me harponner. Ni les jeunes gens dont la vie est passée au microscope, ni les adultes avec leurs blessures, leurs secrets et leur rancoeur, ni les enquêteurs, journalistes ou policiers. Bref, je suis restée détachée des événements, observatrice sans états d'âme et ça, je n'aime pas.
À plusieurs reprises, l'auteur décrit généreusement la terre qu'il aime. Même si les passages sont un tantinet longuets à mon goût, je pense que tout breton sera sensible à l'esquisse brossée de cette région pleine de charme ; même si un vaste marais hostile composé de tourbières malsaines surnommé La porte de l'Enfer et la silhouette menaçante d'une centrale nucléaire désaffectée n'invitent pas vraiment au tourisme littéraire.
En résumé, je termine cette lecture un peu dépitée avec un policier très bien écrit mais, classique et linéaire, sans rebondissements, me laissant un goût assez fade avec comme première réflexion dès la dernière page tournée :"Tout çà pour ça !" Cela dit, tous les goûts sont dans la nature et je suis heureuse d'avoir pu entr'apercevoir l'univers d'un auteur régional possédant un lectorat fidèle auquel je n'appartiens pas. Toutefois, il y a deux points qui m'ont enchantée même si ce ne sont que des adjuvants : la photo de couverture absolument sublime et la musique de John Lee Hooker. Une chance pour moi que le commissaire Baron et son "créateur" soient fan de blues !
Comme je n'aime pas rester sur une impression mitigée et qu'un seul opus me paraît un peu réducteur, personne ne peut être constamment au top de son art, j'envisage de lire une autre enquête de ce flic particulier afin de déterminer si je suis définitivement hermétique à ce style de roman policier ou si c'est seulement cette investigation qui ne m'a pas séduite. Quoiqu'il en soit, emballée ou déçue, c'est toujours un plaisir d'enrichir sa "bibliophagie". Les découvertes, quelles qu'elles soient, sont toujours enrichissantes.