L'Angleterre rurale des années 90 sert de toile de fond au roman d'
Angela Huth,
Amour et désolation. L'amour est représenté par George et Lily dont on suit la relation qui semble tout d'abord improbable. La désolation, quant à elle, est incarnée par les scandales sanitaires, au premier rang desquels la « maladie de la vache folle ». Une époque noire pour l'agriculture anglaise que l'auteure a le mérite de dépeindre avec beaucoup d'acuité.
George est un jeune avocat destiné à reprendre le cabinet co-dirigé par son père ; mais sa vraie passion reste l'agriculture. Il décide donc de revendre l'étude et de s'investir dans la ferme familiale, dominée par l'élevage de moutons et de vaches laitières. S'il avait déjà rencontré Lily pendant ses études, le souvenir qu'il en a s'est vite effacé ; il en est de même pour la jeune femme qui se décide pourtant un beau jour de lui rendre visite pour quelques jours. Ils décident de s'installer tous les deux sur l'exploitation isolée, dont les plus proches voisins sont Prodge et Nell, un frère et une soeur amis d'enfance de George.
Prodge finit de construire une bergerie de ses propres mains, George, même s'il est tout d'abord éreinté par le travail physique, a réellement trouvé sa voie ; il est épaulé par Lily, qui s'occupe de la maison, du jardin, mais aussi des voisins plus âgés. L'horizon s'obscurcit sur le plan personnel (je vous laisse découvrir pourquoi) mais aussi professionnel avec le spectre de la maladie de la vache folle. N'oublions pas l'embargo qui frappa la viande britannique à partir de 1996, qui fit drastiquement baisser le prix de la viande bovine. Toute la souffrance des éleveurs, qui va jusqu'au suicide, est évoquée avec justesse.
Au-delà du calvaire subi par les éleveurs, ce sont les difficultés du monde rural en général qui transparaissent : les difficultés économiques bien sûr, la désertification, la remise en cause des traditions (chasse au renard), la charge administrative croissante, la fermeture des abattoirs, ou encore l'absence de soutien du gouvernement. Les griefs envers Bruxelles sont nombreux, et l'on ne peut s'empêcher de faire le lien avec cette Angleterre rurale qui votera pour le Brexit environ 20 ans plus tard. On sent que l'auteure s'est bien documentée, notamment quand elle évoque que le plaisir d'observer les bêtes se transforma peu à peu en l'anxiété de voir apparaître l'ESB (Encéphalite Spongiforme Bovine).
Vous le sentez sûrement, c'est au final avant tout l'arrière-plan de la crise de la vache folle qui constitue l'intérêt du roman ; combiné à des personnages attachants, même si leur histoire aurait pu être davantage creusée, cela m'a permis de passer quelques heures de lecture bien agréables.
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