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EAN : 9782845901377
142 pages
Arfuyen (17/09/2009)
4.42/5   6 notes
Résumé :
Keats annonce la désincarnation moderne. Mais en sauvant la beauté au prix de sa vie même, en incarnant alors le «poétique», il est à la fois un objet, un animal, un vase, une fleur : son identité se déduit de son absence à lui-même.

La poésie redevient chemin vers la vérité, union - non plus lien, religion, mais union du mot et de la chose, de la vie rêvée et de l'innocence en construction.

Keats propose un contre-modèle, qui ouvre à l... >Voir plus
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Ode à Psyché
     
Ô Déesse ! Écoute ces airs privés d’harmonie
Arrachés par un souvenir cher, ô douce violence,
Et pardonne-moi si je chante tes secrets
Au creux même de ton oreille de tendre nacre :
J’ai dû rêver, aujourd’hui ou peut-être ai-je vu
Psyché ailée, de mes yeux bien ouverts ?
J’avançais sans penser, dans une forêt
Où soudain, défaillant de surprise
Je vis deux êtres de beauté endormis côte à côte
Dans l’herbe épaisse, sous un toit de branches
Murmurantes et de fleurs frissonnantes, à l’endroit où
Coulait, à peine visible, un ruisseau :
     
Parmi les fleurs muettes, aux froides racines, aux regards
Parfumés, bleues, blanc argenté ou bouton-de-pourpre
Ils gisaient, le souffle calme, sur l’herbe foulée ;
Leur bras enlacés - et aussi leurs ailes ;
Leurs lèvres ne se joignaient pas - même pour l’adieu
Comme disjointes par la douce main du Sommeil
Et prêtes à augmenter le nombre des baisers déjà offerts
À l’aube, en leur aurore amoureuse :
Je reconnus le garçon ailé ;
Mais qui étais-tu, ô heureuse colombe ?
Psyché elle-même !
     
Ô dernière-née et la plus belle vision
De toute la hiérarchie fanée de l’Olympe !
Plus belle que l’astre diamantin de Phoebé
Et que Vesper, ver luisant amoureux des étoiles ;
Plus belle que toutes même si tu n’as nul temple
Ni d’autel caché sous les fleurs ;
Ni de choeurs de vierges, délicieux gémissement
Au coeur de la nuit ;
Ni de voix, ni de luth, ni de flûte, ni d’encens
Qui monterait, épais, de l’encensoir balancé,
Ni sanctuaire, ni bois sacré, ni un oracle, ni la ferveur
D’un prophète aux lèvres pâles de rêve.
     
Ô toi, la plus lumineuse! trop tardive pour les cultes antiques,
Trop tardive pour la lyre innocente
En ces temps où, dans les forêts hantées, les rameaux
Étaient sacrés, comme l’air, l’eau et le feu ;
Oui, en ces jours pourtant si éloignés
De ces cultes bienheureux, tes ailes battaient,
Brillantes parmi les dieux éteints de l’Olympe
Je te vois, je te chante, suivant l’élan de mes yeux.
Alors laisse-moi être ton chantre et ta plainte
Au coeur de la nuit ;
Ta voix, ton luth, ta flûte, ton encens
Qui monterait, épais, de l’encensoir balancé ;
Ton sanctuaire, ton bois sacré, ton oracle, la ferveur
D’un prophète aux lèvres pâles de rêve.
     
Oui, je serai ton prêtre, oui, je t’élèverai un temple
En quelque région inconnue de mon esprit,
Où mes pensées, rameaux sacrés, ô douce peine,
Chanteront dans le vent, comme ferait un arbre :
Loin, très loin alentour, ces arbres aux sombres fûtaies
Orneront les montagnes étagées aux abrupts sommets ;
Et là, parmi les zéphyrs, les ruisseaux, les oiseaux, les abeilles,
les Dryades, bercées dans un lit de mousse, s’endormiront ;
Et, dans ce calme sans bornes,
Je serai comme couvert d’un sanctuaire de roses
En guirlandes, nées de mon cerveau fertile,
De bourgeons, de clochettes et d’étoiles sans nom,
De tout ce que l’Imagination, ce jardinier, inventa
De fleurs jamais semblables :
Et là, tu trouveras tous les délices
Que la pensée ombreuse peut conquérir,
Une torche complice, une fenêtre ouverte sur la nuit
Pour laisser l’Amour brûlant entrer !
     
     
(Traduit par Alain Suied)
     
***
     
Ode to Psyche
     
O Goddess! hear these tuneless numbers, wrung
By sweet enforcement and remembrance dear,
And pardon that thy secrets should be sung
Even into thine own soft-conched ear:
Surely I dreamt to-day, or did I see
The winged Psyche with awaken'd eyes?
I wander'd in a forest thoughtlessly,
And, on the sudden, fainting with surprise,
Saw two fair creatures, couched side by side
In deepest grass, beneath the whisp'ring roof
Of leaves and trembled blossoms, where there ran
A brooklet, scarce espied:
     
Mid hush'd, cool-rooted flowers, fragrant-eyed,
Blue, silver-white, and budded Tyrian,
They lay calm-breathing, on the bedded grass;
Their arms embraced, and their pinions too;
Their lips touch'd not, but had not bade adieu,
As if disjoined by soft-handed slumber,
And ready still past kisses to outnumber
At tender eye-dawn of aurorean love:
The winged boy I knew;
But who wast thou, O happy, happy dove?
His Psyche true ?
     
O latest born and loveliest vision far
Of all Olympus' faded hierarchy!
Fairer than Phoebe's sapphire-region'd star,
Or Vesper, amorous glow-worm of the sky;
Fairer than these, though temple thou hast none,
Nor altar heap'd with flowers;
Nor virgin-choir to make delicious moan
Upon the midnight hours;
No voice, no lute, no pipe, no incense sweet
From chain-swung censer teeming;
No shrine, no grove, no oracle, no heat
Of pale-mouth'd prophet dreaming.
     
O brightest! though too late for antique vows,
Too, too late for the fond believing lyre,
When holy were the haunted forest boughs,
Holy the air, the water, and the fire;
Yet even in these days so far retir'd
From happy pieties, thy lucent fans,
Fluttering among the faint Olympians,
I see, and sing, by my own eyes inspir'd.
So let me be thy choir, and make a moan
Upon the midnight hours;
Thy voice, thy lute, thy pipe, thy incense sweet
From swinged censer teeming;
Thy shrine, thy grove, thy oracle, thy heat
Of pale-mouth'd prophet dreaming.
     
Yes, I will be thy priest, and build a fane
In some untrodden region of my mind,
Where branched thoughts, new grown with pleasant pain,
Instead of pines shall murmur in the wind:
Far, far around shall those dark-cluster'd trees
Fledge the wild-ridged mountains steep by steep;
And there by zephyrs, streams, and birds, and bees,
The moss-lain Dryads shall be lull'd to sleep;
And in the midst of this wide quietness
A rosy sanctuary will I dress
With the wreath'd trellis of a working brain,
With buds, and bells, and stars without a name,
With all the gardener Fancy e'er could feign,
Who breeding flowers, will never breed the same:
And there shall be for thee all soft delight
That shadowy thought can win,
A bright torch, and a casement ope at night,
To let the warm Love in!
     
     
(pp. 42-47)
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Vidéo de John Keats
John KEATS – Une Vie, une Œuvre : L’ardeur (France Culture, 2004) Émission "Une Vie, une Œuvre », par Francesca Isidori, diffusée le 23 mai 1991 sur France Culture. Invités : Robert Davreu, poète, traducteur de la Poésie et de la Correspondance de Keats ; Christian La Cassagnère, professeur de littérature anglaise (Université Lumière Lyon 2), qui a dirigé l'ouvrage collectif : Keats ou le sortilège des mots (Presses Universitaires de Lyon) ; Marc Porée, éxégète et traducteur des Poèmes et poésies de Keats aux éditions Gallimard ; Robert Ellrodt, traducteur et exégète de Keats.
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