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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Milan Kundera est — chose assez rare pour être signalée — aussi doué dans l'art du roman que dans l'art de l'essai. Et il nous convie, à travers ces Testaments trahis, à neuf réflexions sur la littérature et la pratique du romancier, mises en perspective, très souvent, avec la musique classique et les compositeurs.

(Notons au passage que ce recueil d'essais a reçu le prix du meilleur livre sur la musique en 1996 de la part de la Société des compositeurs américains. Notons encore que Milan Kundera — écrivain majeur s'il en est — n'a jamais reçu le Prix Nobel de littérature, tandis que d'autres, probablement moins majeur(e)s, en raison des souffles de l'air du temps, en reçoivent assez indûment, mais bon, c'est comme ça. Heureusement, je fais confiance au temps qui fera oublier ces récipiendaires indu(e)s de l'histoire littéraire, comme l'automne arrache inlassablement les feuilles devenues inutiles au tronc principal après leur jaunissement.)

Kundera nous emmène sur des chemins très divers, mais il examine en particulier l'humour, la dérision (celle de Rabelais ou de Cervantès) dans l'activité romanesque, qu'il distingue du soucis de réalisme (source d'incompréhension comme dans le cas des Versets sataniques de Salman Rushdie et qui a retrouvé tout récemment toute son actualité). de façon générale, il distingue deux grandes périodes dans l'histoire littéraire : l'avant 1800, encore très invraisemblable, et l'après, soucieux de réalisme. En ce qui concerne la littérature française, cela correspondrait à la fracture qui a lieu entre les Voltaire/Diderot et Balzac.

Il aborde aussi l'incompréhension de l'esthétique des auteurs, notamment par les biographes ou les critiques. Dans le domaine littéraire, c'est notamment le cas pour Franz Kafka. Toujours à propos de Kafka, il aborde le problème de la traduction, qu'il juge souvent infidèle à l'esprit, à l'esthétique poursuivis par l'auteur. Il évoque encore le cas des écrivains déracinés, comme lui, notamment au travers du cas de Witold Gombrowicz.

Il pousse également une réflexion très intéressante sur la difficulté à saisir réellement le présent et nous oriente vers le travail de nouvelliste d'Ernest Hemingway, notamment en ce qui concerne le dialogue (ce en quoi il s'oppose à Virginia Woolf à propos de la même nouvelle, Les Collines comme des éléphants blancs, dont on peut trouver une critique dans le recueil édité en collection Quarto des nouvelles d'Hemingway : à titre de curiosité, je vous invite à lire les différences de point de vue de ces deux grands lecteurs critiques de la littérature).

Enfin, dans plusieurs essais, il aborde la question de la réflexion philosophique, historique ou même carrément de l'essai inclus dans le roman, notamment au travers des cas de la Guerre et le Paix de Léon Tolstoï, de L'Homme sans qualités de Robert Musil ou encore Les Somnambules de Hermann Broch.

Bien entendu, ce ne sont que quelques uns des thèmes embrassés dans ce recueil et je n'ai pas parlé des très nombreuses réflexions qui concernent plus spécifiquement la musique et les musiciens (et qui amènent l'auteur à s'interroger sur l'art de la composition également en littérature, appliquée notamment à son Livre du rire et de l'oubli).

Donc, une mine de réflexions absolument captivantes, de mon point de vue, et que je recommande très volontiers à toutes celles et tous ceux qui aiment réfléchir sur la littérature en général. Selon moi toujours, Milan Kundera est à l'essai littéraire (abordable, original et captivant) ce que Stephen Jay Gould ou Jared Diamond sont à l'essai scientifique, ce qui n'est pas peu dire. Néanmoins, gardez à l'esprit que ce qui est exprimé ici n'est que mon avis, que peut-être mon testament trahira, c'est-à-dire, bien peu de chose.
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J'avais lu avec beaucoup de plaisir son premier recueil d'essais "L'art du roman" (ainsi que certains de ses romans) et il fallait s'attaquer à ce deuxième livre de la même veine.

Kundera s'est avéré l'un de mes auteurs préférés que je retrouve à chaque fois avec le même bonheur.

"Les testaments trahis" est un recueil de neuf essais sur l'art; la littérature (l'art du roman surtout) et la musique (c'est d'ailleurs l'un des meilleurs livres sur la musique).

Avant d'être un essayiste ou même un critique, Kundera se veut un lecteur et un praticien, et c'est justement cela qui fait de ce livre une oeuvre plaisante et intéressante.

Dans ce livre, on retrouve un autre Kafka épuré de tous les stéréotypes qui ont assombri cet auteur et qui le représentaient comme un être pur, un saint d'un côté et un être maussade et indifférent d'un autre. L'oeuvre de Kafka perd beaucoup à cause de la traduction défectueuse et des interprétations naïves et subjectives. On découvre pleins d'autres secrets concernant cet auteur comme son mystérieux testament trahi par Brod, son ami (qui m'a fait pensé à cette fable de la Fontaine dont la morale est : "Rien n'est si dangereux qu'un ignorant ami/Mieux vaudrait un sage ennemi.").

Après avoir lu son analyse du dialogue chez Hemingway, j'ai remis en question mon avis concernant son roman "Le soleil se lève aussi" que je n'avais pas beaucoup apprécié. Des dialogues que l'auteur américain veut vivants. Il est à parler ensuite d'Hemingway et de son biographe qui a mélangé la vie de l'auteur et ses écrits pour en tirer des interprétations étrangement fausses (un manque de respect aux idées de Proust dans son "Contre Sainte-Beuve").

Kundera nous décrit aussi cette musique de Stravinski singulière par sa composition complexe, de l'incompréhension de son ami (comme pour Kafka). On y découvre de très belles réflexions sur la musique.

Le livre a abordé aussi plusieurs sujets (l'intimité, l'extase, la traduction, l'humour, la ressemblance entre roman et musique...) les illustrant des oeuvres de beaucoup d'écrivains et musiciens (Rabelais, Tolstoï, Balzac, Musil, Mann, Bach, Janacek...).

Un livre que je conseille à tous les amateurs de roman et de musique.
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Cela faisait bien des années que cet essai prenait la poussière sur mes étagères. Lorsque j'ai décidé de passer le CAPES pour aller voir ce que l'on attendait des candidats, j'ai entrepris, non pas de réviser quoi que ce soit mais de relire quelques grands classiques et de lire "les oubliés" de ma bibliothèque. le jour où je suis allée devant le centre d'examens pour l'épreuve de la composition française, j'en étais à la page 103 dudit essai. En découvrant le sujet, quelle ne fut pas ma surprise! Il s'agissait d'un extrait des Testaments trahis dans lequel Kundera pose la question de la moralité, de l'immoralité et de l'amoralité du roman.
Les considérations et les analyses de Kundera sont particulièrement intéressantes et pertinentes. Il ne se limite pas à la question de la littérature mais il aborde également celle de la musique. Ainsi, Kafka, Rabelais ou encore Janáček jalonnent cet essai, étayant les propos de l'auteur.

J'aimais déjà le romancier, je suis conquise par l'essayiste.

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Dans cet essai, Milan Kundera nous apporte sa vision sur l'Art du Roman au regard de l'Histoire Littéraire et des Arts en général. Passant de l'introduction de l'humour dans le roman au parallèle entre la littérature et la musique, de la "sagesse du roman" à la censure dont ont fait l'objet les plus grands, Kundera étaye sa position en se référant à de nombreux auteurs : Rabelais, Kafka, Maïakowski, etc... .
Les "Testaments trahis", que j'entends à la fois comme l'incompréhension et la dévalorisation de certains auteurs (et autres artistes !), jusqu'à la violation de leur volonté en terme d'édition, certaines oeuvres s'étant vues transformées et dénuées de leur sens, de leur essence... (on comprend pourquoi au fil de cet essai...)
Un ouvrage très intéressant grâce auquel j'ai beaucoup appris et découvrirai certainement encore beaucoup... Plus qu'une simple analyse, Kundera donne envie d'aller écouter du Dostoïevski et de creuser la poésie Kafkaïenne, d'aller lire les romans de Brod et d'élargir les connaissances que l'on a de lui-même.

[N'étant pas spécialement cultivée en littérature classique, ma "critique" est plus un avis personnel qu'une critique construite et argumentée...]
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Excellent analyse des procédé litteraire, et mise en perspective efficace avec le monde de la musique classique.
Je ne suis pas d'un milieu habitué à la litterature, ni a la musique classique, mais Kundera , en expliquant la valeur et l'interêt des classiques a vraiment piquer ma curiosité. C'est un plaisir que de retrouver quel sont ses morceaux favoris et pourquoi il occupe une telle place dans son imaginaire.

Les reflexion sur Bach , stravinsky m'ont beaucoup interessé car au dela, du language de la musique, elle traite du language de la passion et de ses différents moyens d'expressions. Et je l'ai compris , et c'est avec enthousiasme que je me delecterai de tout ces opéras dès que j'en aurai l'occasion.


De même, les reflexion sur hemmingway et sa manière simple de décrire des moments sans emphases, ni théatre, mais simplement comme ils sont vécu ma profondément touché. Car lorsque je lis un livre, je ne me rappelle pas de tout les personnages, de tout les rouages de l'histoire, mais seulement de deux ou trois scène, quelque mécanisme mis en place par l'auteur pour mettre en avant tel ou tel aspect d'une personnalité. Et Kundera a merveilleusement compilé, comparé tout cela; c'est un concentré de l'essence de beaucoup d'oeuvre litteraire, en passant par sartre, hugo , Tolstoi , Kafka, et bien d'autre. Sans faire de name dropping inutlie ;je ressors vraiment satisfait de cette lecture, qui m'a permis de me faire un
programme des prochains romans auquelle je vais m'attaquer en ayant une idée de ce que je pourrait y trouver.

Je pense que si j'arrive a lire la moitié de tout ces ouvrages, je serai déjà arrivé plus loin que ce que je n'aurai pu un jour imaginer.
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Sans doute l'essai sur le roman qui me parle le plus ! Dense, passionnant, truffé de références et de fulgurances. Se lit en même temps que "L'Art du Roman" du même auteur.

Notes de lecture :
"Une fois ne compte pas : Nihilisme et sens dans L" de Jorn Boisen
http://www.detambel.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=283
https://books.google.fr/books?hl=fr&id=LX7JbduX8H8C

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5 étoiles pour cet essai de Milan Kundera. Kundera parle de l'art, beaucoup de musique ainsi que de littérature. J'ai énormément apprécié les nombreux passage d'analyse de Kafka, un auteur que j'apprécie particulièrement et que dont je venais de lire un roman juste avant la lecture de cet essai. Ici, Kundera creuse bien plus loin que les apparences, il s'enfonce au de la du superficiel pour étayer une réflexion précise et convaincante grâce à sa justesse.
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Autre livre essentiel.
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