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EAN : 9782200350406
184 pages
Armand Colin (13/06/2007)
2.62/5   4 notes
Résumé :
S'ennuyer, quel bonheur ! Halte à l'activisme forcené des mercredis, pitié pour les pauvres parents qui courent, leur progéniture sous le bras, de l'entraînement de foot au cours de danse, de la piscine aux leçons de rattrapage ! Assez de culture obligée, et jamais digérée, assez de loisirs à thème, vive les vacances désœuvrées ! Laissez-nous bâiller un peu ! Sans expérience de l'ennui, pas d'individu sain. A force d'éviter l'ennui contre vents et marées, sommes-nou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Au début, il est un double.
"[...] il existe deux formes d'ennui : le normal, celui que j'affirme souhaitable pour ne pas dire indispensable à tout individu et donc à toute création, qu'elle soit politique, artistique ou scientifique, et l'ennui pathologique, symptôme douloureux d'un grand nombre de maladies psychiatriques. [...] Je plaide pour le premier et, durant mon existence de psychiatre, j'ai combattu le second." (p. 13)

Ou alors : au début, il est la Bible, avec son histoire d'Abel, le "glandeur" qui s'embêtait ferme, occis par l'activiste cultivateur Caïn. L'on peut voir dans les deux frères les deux stades successifs du développement de l'individu - de l'enfance à l'âge adulte - (p. 26) ; ou alors la querelle entre les deux écoles psychothérapeutiques cis- et transatlantiques : le cognitivo-comportementaliste Caïn versus le psychanalyste méditatif Abel (p. 178).

Ou encore : au début, il est une filiation étymologique, apparue au XIIe s., non sans relation avec les croisades et liée à l'amour courtois. Entre le terme d'acédie (j'adore) et celui d'ennui - "être pour soi-même un objet de haine" (p. 53).

Ou en outre : au début, il est une fratrie comprenant aussi la paresse, l'oisiveté, la mélancolie - "véritable engouement De La Renaissance" (p. 35) qui se décline en mélancolie catholique d'Albrecht Dürer (Melencolia I) versus mélancolie protestante de Lucas Cranach (qui en a peint quatre).

Ou plutôt : au début, en zoologie, il semblait ne pas y avoir d'ennui chez l'animal, mais ensuite Konrad Lorentz parla de l'"arousal", "le besoin impérieux et quasi automatique d'effectuer des actions, parfois des mouvements particuliers" (p. 71) qui, si contrarié, notamment par la captivité, provoque des stéréotypies parfois auto-mutilantes (balancement de la tête et du corps, léchage ou grattage jusqu'à la perte du poil ou le saignement, etc. - presque comme certains autistes) surtout chez les animaux les plus sociaux. Irons-nous jusqu'à faire le parallèle avec le peu de créativité (sauf rares exceptions) qu'engendre l'ennui de l'homme contraint (reclus) dans ses institutions totales - prisons, écoles, casernes, etc. - ? voire pousserons-nous notre audace jusqu'à nous demander : "L'homme moderne, à la fois sociable et confiné, s'ennuierait-il pour les mêmes raisons ?" (p. 78)

Ou bientôt : en glissant progressivement vers la physiologie et la pathologie de l'ennui, il est dans le différentiel de la température corporelle entre jour et nuit une explication de la plus grande fragilité et prédisposition féminine que masculine à l'ennui (mais aussi de la plus efficace production socio-culturelle d'antidotes de la part des dames) ; l'on trouvera aussi une explication de la symptomatologie saisonnière de l'ennui grâce à "Lucy et ses copines, s'[étant] redressées pour gambader il y a quelques millions d'années sous les cieux [...]" d'Afrique équatoriale et tropicale. (p. 114)

Ou enfin, après avoir compris que le bâillement est un antidote et non un emblème de l'ennui, après une psychologie (banale et par trop quantitative), puis une psychanalyse, puis une clinique le mettant en relation avec la dépression, mais réfutant son analogie avec les TOC, les anxiétés, les psychoses hallucinatoires, les schizophrénies, les toxicomanies, l'anorexie et la maladie d'Alzheimer (p. 147) - ouuf ! ça me rassure ! - l'on comprend, avec Heidegger, Jankélévitch et la poétique masochiste d'Émile Cioran - que l'ennui n'est qu'une question de perception du Temps. Un temps qui devient morcelé, fragmenté, séquentiel, gluant, interminable...

Et dans tout cela, l'apologie de l'ennui alors ? Oh, j'allais presque l'oublier... Et pourtant elle était là, dès le début : elle est le double, ennemi de l'hyperactivisme, critique du "monde contemporain abruti par le pain (des allocations) et des jeux (de la télévision)" (p. 182) ; condition nécessaire de la création pour les romantiques, elle est "l'attitude de Baudelaire, qui tout au long de son oeuvre a fait de l'ennui [...] son principal fonds de commerce [...]" (p. 161)...
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Un livre à contre-courant de l'idéologie dominante promouvant productivisme et hyperactivité et lui opposant un modèle tourné vers une vie plus méditative valorisant la vie intérieure, voilà la promesse non tenue par cet ouvrage.

Tout d'abord sur la forme. L'auteur passe du coq à l'âne, des affirmations aussi personnelles que péremptoires venant parsemer ici et là ses tentatives de démonstration (souvent pourtant intéressantes). On s'attend plus à trouver cela dans un blog que dans un essai.

Maintenant sur le fond. le titre parlant de « s'ennuyer » pourrait paraître étrange pour un livre voulant faire l'apologie du temps libre (entendre : « non occupé ») mais il se voulait évidemment ironique et permettait d'interpeller ceux pour qui « inactivité » est effectivement synonyme d'ennui.

Malheureusement l'auteur pousse l'ironie un peu loin car tout au long de son ouvrage il dresse un tableau des différentes formes d'ennui que l'on retrouve dans l'histoire, la religion, la poésie, la philosophie...
Si l'auteur se présente lui-même comme un adepte de l'inactivité et donne quelques coups de dent à l'occasion contre l'activisme ambiant, l'ensemble de son livre donnerait plutôt raison à ceux qui fuient la passivité et se relève donc « contre-productif » (si j'ose dire!).

Au mieux, l'« ennui » est présenté comme un mal nécessaire à la créativité ou au génie. Une sorte d'ennui utile quoi...

Pourquoi l'auteur n'a-t-il pas au contraire parcouru le même chemin (religion, histoire, psychologie...) pour argumenter en faveur d'une vie plus méditative ?
Pour essayer de convertir ses lecteurs, il fallait expliquer les délices que l'on peut trouver à jouir de l'instant présent, du simple fait de se sentir exister sans chercher continuellement à se divertir (de soi).

Je le déplore d'autant plus que le sujet me paraît primordial dans la société actuelle totalement déséquilibré en faveur de la vie sociale / extérieure.
Du temps libre ? Vite comblons le ! Il faut sortir, faire du sport, se bouger, voir du monde... ou encore rester chez soi mais pour bricoler, cuisiner, jouer, recevoir, etc.
C'est qu'il y a toujours quelque chose d'amusant à faire dans l'immense parc de loisirs qu'est devenu notre planète !
« Buller » ? jouir du simple fait d'exister ? laisser son esprit vagabonder ? se retrouver en face à face avec soi-même ? Horreur! Infamie ! Quel gaspillage de temps ! Fuyons cette étrange idée ! … et en courant !
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
À l'évidence, la mondialisation qui submerge notre monde moderne est un modèle hyperactif, hyperfinancier, perpétuellement à la recherche de progrès. Elle est dominée par l'Amérique, donc sous le joug de la position protestante. C'est sans doute pour cette raison que la notion de loisir a remplacé celle de vacances (étymologiquement : « vide »). Le vocable « loisir » vient du verbe latin licere signifiant « permettre ». Littéralement, le loisir est ce qui est loisible, donc ce qui est permis. D'ailleurs, à l'armée comme à l'hôpital, quand on veut s'absenter, on sollicite une permission, la fameuse perm' bien connue des bidasses comme des malades.
De nos jours, si ne pas travailler est (à la rigueur) autorisé, voire recommandé, ne rien faire, vaquer, être en vacance est mal vu. La cessation de travail ne signifie plus farniente, mais présuppose que l'on s'adonne à une autre activité. Flemmarder au soleil n'est plus à la mode. Vive les séjours à thème, les voyages sportifs ou culturels, les clubs Méditerranée où le GM pris en charge de matin au soir court de compétitions sportives en animations soi-disant culturelles ! La loi sur les trente-cinq heures a d'ailleurs constitué un signal fort dans ce sens et il est reconnu que ce sont les magasins de bricolage et de sport (et, en conséquence directe, la petite chirurgie et les urgences) qui en ont le plus bénéficié sur le plan commercial.
Cesser de travailler signifie s'activer autrement.
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Le bonheur, c'est ce qu'il y a de bon dans mon espace intérieur, donc en moi. Je suis heureux au moment où je m'arrête pour penser que je suis heureux et que je réalise et assume ce que j'ai fait, ce que j'ai et surtout, qui je suis. C'est la conscience de moi-même qui fait mon bonheur. Le bonheur n'est pas dans le pré, mais il est tout près. Il n'est pas hédonique, mais épicurien. 
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Mourir pour se sentir exister et faire la nique à la mort en se montrant plus fort qu'elle, cette salope qui ne se plait qu'à nous prendre par surprise.
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Vidéo de Patrick Lemoine
Anxiété, insomnie, dépression, phobies, cauchemars, délire, TDAH, dyslexie, daltonisme… Ces symptômes si familiers nous perturbent tant ils sont pénibles, invalidants, douloureux. Et pourtant ils ont joué et jouent encore un rôle crucial dans le formidable succès de notre espèce. Quel lien entre insomnie et intelligence ? Quel est le rôle de la peur face au danger ? Comment le découragement permet-il la résilience et la tristesse antiagressive ? le délire est-il source d'harmonie sociale, et l'état limite un catalyseur d'audace ? le trouble bipolaire est-il à la base du génie ? Les phobies sont-elles des défenses ? Ce livre défriche toutes ces questions et démontre que nos symptômes sont des réponses normales, adaptatives et utiles… à condition de se manifester au bon moment et de façon appropriée. Et si la santé mentale consistait juste à être capable d'utiliser de manière variée et souple le symptôme adéquat face à chaque situation ?
Patrick Lemoine, avec sa longue expérience clinique, nous invite à un voyage optimiste, joyeux, détonnant, novateur au pays du stress, de l'angoisse, du chagrin et de tant d'autres troubles aussi fréquents qu'universels.
Patrick Lemoine est psychiatre, spécialiste du sommeil, docteur en neurosciences, professeur associé à l'Université de Pékin. Il a publié plus d'une quarantaine d'ouvrages à succès, parmi lesquels le Mystère du placebo, La santé psychique de ceux qui ont fait le monde, La Santé psychique des génies, Docteur, j'ai mal à mon sommeil…
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