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Michel Lévy (Autre)
EAN : 9791092109351
240 pages
Infimes Editions (12/01/2021)
4.77/5   11 notes
Résumé :
Pour certains le monde apparaît lisse, immuable, tout semble à sa place. Comment se fait-il alors que parfois une bifurcation inattendue, un sentiment d´étrangeté fasse se dérober le sol sous vos pieds ? Il suffit qu´une fraction de l´univers échappe aux lois habituelles pour qu´un être ordinaire se découvre autre, meilleur ou pire. Les sentiers qui nous conduisent ne sont pas tracés pour toujours. Une infime singularité dans notre destin nous fait entrevoir d´autre... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Il devient rare aujourd'hui de pouvoir se passionner sur un livre vraiment émouvant et littéraire. Beaucoup de parutions ne sont que du ‘'contenu'' a la mode, autofiction douteuses, ou relatant une histoire bizarre ou frappante qui engendre la polémique et fera leur succès. Mais la vraie littérature, avec une écriture, un sens, une beauté artistique sont exclus du champ de l'attention limitée d'aujourd'hui, hachée par les Sms et les écrans consultés machinalement.

De quoi s'agit-il ici ? La première nouvelle au titre étrange, « Tous les jours au matin, baigne ton visage », éclaire les suivantes. le thème est l'être humain, les rapports qu'il entretient avec lui-même et ses semblables ; il est exposé sous forme d'une métaphore. L'histoire de cet Aaron peut être lue au premier degré, mais aussi comme une parabole de notre nature composite : animale, matérielle, mais aussi esprit et aspiration à ce que l'homme peut devenir de meilleur. Ainsi, sa maladie n'en est pas une, il souffre comme nous tous de devoir composer tant bien que mal avec son être même, son enveloppe de chair inconfortable. La légende du Golem - cette poignée de glaise qui ne devient homme que grâce à quelques mots de sagesse, à l'esprit, est une image de nos vies. Ainsi, le rappel du rabbin, en conclusion, lui servira de viatique : toujours s'efforcer de dépasser son origine animale, en s'efforçant de devenir meilleur, pleinement et consciemment humain.

Les autres textes, lus sous ce éclairage, prennent du relief et révèlent plus complètement leur sens possible. Ce policier tourmenté par l'idée de la justice et de la loi, ce bûcheron simple qui se consacre aveuglément (obscurément) au travail, ce vieil homme qui s'efforce de comprendre l'origine de son malheur et le trouve en lui-même, ce géographe rencontrant un peuple qui ne vit que de l'instant présent, tous partagent tant bien que mal ce destin « du genre humain » qui est le nôtre … le huitième récit, « Partout où ils sont réunis », se réfère à un texte étrange de J-L Borgès : le Congrès. Les deux nouvelles sont en harmonie : celui de Lévy évoque trois êtres désemparés mais rapprochés pour différentes raisons dont une leur est commune (la perte brutale d'un proche), et qui cherchent fiévreusement à reconstituer l'aspiration millénaire de toute l'espèce humaine : comment construire une société fraternelle, juste et pouvant répondre aux aspirations de tous.
Un très beau livre.
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Si j'étais jeune, je dirais sans doute : "Vraiment cool..."
Si j'étais un critique, je dirais peut-être : "Les thèmes de ces récits, aussi bien que les notations psychologiques, et les construisent un univers hors du commun et cependant familier, ou les sentiers de la vie se croisent et se défont - troublant..."
Si j'étais très pressé, je dirais : "Très bon !"
Mais comme simple lecteur, je dois être plus précis. Ce livre est un mélange réussi d'histoires très concrètes, très réelles, mais décalées et intrigantes... Il contient aussi des idées très neuves et fraîches, des personnages qu'on sent proche de soi, et des passages - comment dire ? - lumineux, qu'on n'oublie pas.
Enfin, j'ajoute que ces nouvelles valent largement un bon roman, surtout si on se sent un peu intimidé par un "vrai" gros livre de 300 pages pour une seule histoire. Ce que je peux comprendre. La langue française est aussi très bien utilisée et maîtrisée, et ça, j'ai constaté que cela devient rare, il faut la défendre. Un bravo.
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Un livre très fort, et qui ne ressemble à aucun autre, des histoires très intrigantes d'une grande imagination. le discours amoureux, il y en a, le mystère aussi, et l'émotion, mais tout cela raconté d'une façon inhabituelle, parfois ça m'a vraiment donné des frissons !... Pourquoi cet homme souffre-t-il d'une maladie qui n'existe pas... ? (l'explication est terrible), peut-on vivre une histoire d'amour avec une personne dont on ignore l'âge, même si c'est un amour platonique, Un policier peut-il faire face par tous les moyens aux criminels sans subir le poids et les conséquences de ses actes...?...Pourrait-il y exister une Assemblée du Monde qui créerait une société enfin juste et belle...? Un savant rencontre un peuple qui s'est délivré du passé, et qui ne craint pas l'avenir, et ces hommes et femmes vivent heureux... Neuf nouvelles, étonnantes, j'ai prêté ce bouquin à une amie qui lisait par-dessus mon épaule...(n'est-ce pas Natasha ?). Un magnifique moment de lecture.
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Une jeune juge qui boit trop, un quadragénaire amoureux d'une très jeune fille, un géographe qui rencontre un peuple totalement inconnu, un bûcheron face aux mystères de la vie, un homme qui soupçonne qu'il n'en est pas un, un vieillard à la recherche de son passé... que d'étranges personnages dans un monde pourtant bien campé dans une réalité solide...mais qui vous trompe souvent.
Merveilleuse expérience, c'est un de ces livres rares, inclassables.
La dernière des neuf nouvelles est un "scherzo", un impromptu pour lequel l'auteur s'est interdit d'utiliser la lettre "e", un tour de force réussi, et très drôle.
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Bravo. Il y a dans ce recueil du Maupassant, du Poe, du Borgès, du Flaubert... je l'ai trouvé très prenant. Maturité d'écriture, profondeur des idées et sentiments... Dommage, cet auteur n'a écrit que deux ou trois ouvrages ("La carte et le territoire", notamment... bien avant Houellebecq !).

Le premier récit, « Tous les jours au matin, baigne ton visage », éclaire les suivants. le thème est l'être humain, ses rapports avec lui-même et ses semblables. L'histoire d'Aaron peut être lue au premier degré, mais aussi comme une parabole de notre propre nature : animale mais aussi spirituelle et aspiration à ce que nous avons de meilleur. Ainsi, sa maladie n'en est pas une, il souffre de devoir composer tant bien que mal avec son être même, son enveloppe de chair. La légende du Golem - cette poignée de glaise qui devient homme grâce à quelques mots de sagesse, est une image de nos vies. La lettre du rabbin, en conclusion, lui servira de viatique : il doit s'efforcer de dépasser son origine animale, de devenir meilleur, pleinement humain. Les autres textes, lus sous ce éclairage, prennent du relief et révèlent tout leur sens. Ce policier tourmenté par l'idée de la justice, ce bûcheron qui se consacre obscurément au travail, ce vieil homme qui cherche l'origine de son malheur et le trouve en lui-même, ce géographe rencontrant un peuple qui ne vit que de l'instant présent... tous partagent tant bien que mal ce destin « du genre humain » qui est le nôtre.
J'ai trouvé ces personnages tellement touchants.

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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
En rêvassant dans mes moments de solitude, je passais en revue les différents indices possibles et les preuves que je n’avais pas. Florence avait une allure de toute jeune fille, des seins très menus, un corps pas encore entièrement formé. Mais le style de ses vêtements, exceptionnellement ennuyeux, aurait convenu à une femme âgée ayant renoncé à toute recherche d’élégance. Dans les lieux de divertissements où j’allais parfois la retrouver, bars et restaurants, guinguettes, le contraste était fascinant lorsque j’observais les autres jeunes filles en blue-jeans tâchés d’encre de couleur comme c’était alors la mode, en minijupes de jersey fendues, ou en blouses légères de teintes vives, qui faisaient un décor bariolé autour de sa silhouette décente, droite et mince.
Essayait-elle de se vieillir ? Rien pourtant dans son attitude ni dans ses propos, ne le laissait supposer. Elle m’affirmait qu’elle avait choisi son propre style, sans tenir compte du goût de l’époque ; que ces ensembles raides, ces coupes sans complaisance lui semblaient seyantes. L’image que l’on pouvait avoir d’elle était composite. Avec son allure de dame de compagnie d’un autre siècle, elle aimait s’amuser, danser, se griser d’alcool ou jouer à des jeux d’argent. Elle portait des talons hauts, ce qui était alors rare pour une adolescente. Sa voix était encore presque celle d’une petite fille, lorsqu’elle répondait au téléphone ; j’avais souvent l’impression déconcertante qu’une hypothétique sœur cadette âgée d’une dizaine d’années, avait décroché. Bien des femmes gardent un timbre enfantin même à l’âge adulte, ce qui m’a toujours séduit, même si je juge moi-même ce penchant d’une trivialité affligeante – mais je suis ainsi fait. Ces contrastes légèrement irritants pour mon esprit ordonné et anxieux étaient sans doute au fond un des parfums les plus entêtants et agréables de sa personne.
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Je suis rentrée au petit matin. Des débris crissaient sous mes semelles. Je me suis réfugiée au bar du coin de ma rue, qui ne ferme jamais et n’a pas d’enseigne ; on repère l’endroit aux ivrognes devant l’entrée qui brandissent leur verre comme sauf-conduit vers le bout de leur tunnel. Sans envie de boire, je me suis assise dans la salle mal éclairée par un néon solitaire. La patronne a posé une tasse de café devant moi, habituée à l’abstinence stricte que j’affiche en public. Le haut-parleur crachotait. Un trio barbu et chevelu discutait à voix basse au comptoir, ricanant et jetant des regards en biais. Un couple de vieilles gens, attablées devant une bouteille de bière, se taisait. Que faisaient-ils tous là, alors que le jour n’était pas encore levé ? Au bout d’un instant, les yeux accoutumés à l’obscurité, je compris ce que lorgnaient les hommes accoudés au bar : dans un coin était assise une fille que je reconnus à sa jupe invraisemblablement remontée sur ses cuisses, la jeune admiratrice du percussionniste. Elle était seule, et détourna la tête, semblant éviter mon regard, ou peut-être tous les regards.
Je ressentis, brusque et inopportune, cette démangeaison perdue de vue depuis longtemps, un appétit d’étreintes, qui pour le moment s’alimentait au spectacle de cette gamine, mais aurait pu se satisfaire de la première venue. En colère contre moi-même, je quittai le lieu pour rentrer chez moi.
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Depuis l'enfance, nous rassemblons fiévreusement sans le savoir les branches d'un feu qui nous réchauffera le moment venu face à la disparition de nos aînés...

Ou encore :

Benjamin demanda :
Et le Golem, il est mort ou il existe encore ?
— C’est une légende, mais vivace, il y a des gens qui y
croient toujours. Il y aurait eu plusieurs golems, car d’après
une très vieille tradition secrète, on peut les fabriquer à
partir de glaise, qui doit être pétrie en forme d’homme
ou de femme.
— Et après il devient vraiment vivant ?
— On affirme en effet que certaines paroles inscrites sur son front, des mots d’une grande puissance morale, lui donnent son âme et sa force. C’est peut-être le plus beau récit légendaire : il nous rappelle que l’homme est tout ensemble matière et esprit réunis. En principe le Golem est immortel, ajouta Aaron malicieusement. Donc s’il a existé, il existe toujours...
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Quelque chose avait changé avec Luisen, non pas dans nos rapports, qui demeuraient conformes à l’habitude, mais dans ma façon de la considérer. J’écoutais plus attentivement le ton de sa voix, je l’observais. Cette manière de boiter légèrement, que j’avais cessé de remarquer quelques mois après notre rencontre,
m’apparaissait de nouveau, comme une particularité attachante. Son déhanchement, son corps qui se mouvait en un faux équilibre, suscitait de plus en plus souvent chez moi un trouble curieux, comme une très légère irritation diffuse mêlée de plaisir, un peu comparable
à ce que l’on ressent devant une eau fraîche lorsqu’on est assoiffé.
Par ailleurs, à travers son comportement presque exaspéré de ces derniers jours, face à des affaires que nous n’arrivions pas à faire avancer, surtout celle de Lewis, je croyais lire une détresse cachée ou une forme de désespoir. Je redoutais d’avoir raison, et m’efforçais
de ne pas lui laisser voir ma propre lassitude et ma désillusion.
En tout cas sa manière d’être suscitait en moi une sollicitude que je ne savais pas comment exprimer, et une sympathie plus profonde qu’auparavant.
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Dans la rue qui longeait les remparts, ils étaient revenus : lui, en blouson de cuir, promenant son regard alentour, non pas comme s’il craignait quelque chose mais avec un air de ruse et de contentement. Elle, en robe courte trop fine pour le froid qu’il faisait, le corps aussi raide qu’un mannequin, avançait une jambe après l’autre sur le parapet surplombant l’à-pic des fortifications par vingt mètres de vide à sa droite.
À première vue, on aurait pu penser que cette femme
avait de l’audace ou un brin d’inconscience, car les pierres n’étaient pas larges, à peine deux fois son pied. À moins d’entendre ce que l’homme marmonnait, on ne pouvait pas deviner la vérité. Moi, j’ai fini par la connaître.
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Video de Michel Lévy (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Michel Lévy
*RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE* : Alfred de Vigny, _Journal d'un poëte,_ recueilli et publié par Louis Ratisbonne, Paris, Michel Lévy frères, 1867, 310 p.
#AlfredDeVigny #JournalDUnPoëte #LittératureFrançaise #XIXeSiècle
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