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3,7

sur 1084 notes
Le dernier roman de Rebecca LighieriIl est des hommes qui se perdront toujours ») étant l'un de mes plus gros coups de coeur de 2020, je me suis donc vite attaqué à celui-ci paru en 2018.

Tout débute en compagnie d'une famille bourgeoise, les Chastaing. Les parents et les trois enfants, Thadée, Zachée et Ysé, filent le bonheur parfait jusqu'au jour où l'aîné, sorte d'apollon au physique avantageux et aux études brillantes, se fait attaquer par un requin en faisant du surf à la Réunion. Là, c'est toute la perfection qui entoure cette petite famille qui va voler en éclats !

Passant d'un membre de la famille à l'autre au fil des chapitres, Rebecca Lighieri (pseudo utilisé par la romancière Emmanuelle Bayamack-Tam) dévoile progressivement les failles et les secrets de chacun. En scrutant les profondeurs les plus sombres de cette famille et en faisant tomber les masques tout en développant avec brio la psychologie des personnages, ce roman, qui invite à suivre la descente aux enfers d'une famille dont les deux garçons sont fans de surf, s'avère de nouveau d'une belle noirceur.

Pourtant, le titre et la couverture baignent immédiatement le lecteur dans une ambiance estivale. Et c'est vrai qu'au début l'océan est bleu et la plage paradisiaque, mais au fil des pages, l'eau devient de plus en plus trouble et la vague que l'on se prend au final est d'une violence rare…

Me voilà donc fan de cette auteure donc je conseille vivement le dernier roman : « Il est des hommes qui se perdront toujours » !
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Je pense ne pas avoir été et ne toujours pas être dans cette équipe. Celle de ces gars qui font tourner les têtes de celles et ceux qui les frôlent. Accident dans le continuum espace-temps, anomalie qui perturbe l'écoulement du flux tellement leur présence est irréfutable. Comme l'éléphant de Vialatte. Toujours stupéfiant à observer, comme l'arrivée d'un félin dans un documentaire animalier

Thadée (qui signifie "courageux", "donné par dieu", "nourri à la mamelle" oui, oui, ça fait beaucoup pour un si petit prénom, c'est du 3 en 1) et Zachée (voulant dire "pur et innocent"), eux, sont deux jeunes hommes à qui la vie semble avoir souri démesurément. Peut-être un peu trop, glissant vers le rictus inquiétant, la balafre hideuse.

La beauté, ce luxe naturel. Cette noblesse sans titre qui surgit au milieu des êtres sans que l'on ne sache vraiment pourquoi ni comment, ils l'ont. On les observe donc, jouir de cette facilité qu'elle peut donner dans certaines circonstances comme un lubrifiant social très élaboré. Coupe-file qui fait gagner du temps et épargne les efforts inutiles.

Ces deux frères glissent donc dans la vie comme une goutte d'eau sur un tissu hydrophobe : avec aisance et sans accrocs. Dieux bouclés, ils font la fierté de leurs parents et par dessus tout de Mylène, leur mère. On peut dire qu'elle frôle le gâtisme tant elle les admire, les bade, leur pardonne tout.

Même l'inexcusable.

Un évènement violent va venir briser cet équilibre familial et labourer les chairs, taillader le quotidien, faire saigner les apparences en logeant ses morceaux acérés dans la graisse d'un bonheur bien plus fragile que l'on ne pouvait le penser.

Cette péripétie arrive très tôt dans le roman, page 14.

Tonnerre éclatant dans un ciel paisible, tout le train-train va dérailler bien gentiment. L'aquarelle va inexorablement baver dans un Rorschach perturbant où tout le monde verra ses démons se matérialiser dans une mêlée humide.

Rebecca Lighieri, l'alias d'Emmanuelle Bayamack-Tam, excelle dans la peinture de l'adolescence et de la violence : ses tensions, ses fêlures et surtout le passage à l'acte qui couve en son sein et dont elle s'est faite une spécialité. Potion bouillonnante sous le couvercle des métamorphoses physiques, marmite frémissante. C'est un moment de vérité où le précipité des passions et des émotions peut se révéler hautement instable. On comprend que cela intéresse autant un écrivain.

Après ma lecture d"Il est des hommes qui se perdront toujours", je note qu'elle persiste dans cette direction suivant la trajectoire de personnages dans leur jeune vingtaine qui viennent à peine de s'extirper de la lessiveuse automatique qu'est cette période mais qui en gardent les stigmates.

L'adolescence n'est pas cette frontière absolue que tout le monde franchit uniformément, complètement et au même moment. Il y a des adolescents attardés, des adultes trop verts et des primeurs poussés trop vite (je pense ici à Ysé la benjamine de la famille)

Thadée et Zachée se lancent donc dans la vie, boucliers, casques et lances à la main. Héros d'une Iliade sans remparts de pierre mais où les murailles sont faites d'eau. Car oui, ces deux frères vivent, mangent et dorment surf, ce qui les mènera des plages du pays Basque à celles de la Réunion puis du Portugal.

Avertissement, vous allez devoir un peu vous plonger dans le lexique de ce sport car beaucoup de termes sont utilisés dans le récit et ils ne peuvent pas tous être compris uniquement par le contexte. En ce qui me concerne, j'adore découvrir de nouveaux mots, donc ça ne m'a pas du tout gêné.

Rebecca Lighieri a, de son propre aveu, mangé des heures de vidéos de surf et lu beaucoup de magazines pour s'acclimater à ce vocabulaire et l'incorporer à sa recette. Elle s'est également inspirée de faits-divers réels et notamment de l'histoire d'Éric Dargent dit "le surfeur d'argent".

Par d'assez courts chapitres, chaque personnage majeur de l'histoire va prendre la parole, livrant sa vérité et écornant un peu plus à chaque fois la belle photo de famille. En un cercle excentrique, de la famille nucléaire aux personnes extérieures. Exception faite de la petite soeur, Ysé (déesse) la cadette, dont la prise de parole vient terminer le récit.

Cette entorse s'explique selon moi par le caractère assez atypique de cette jeune fille et sa position dans cette famille : excentrique. Très justement.

Encore une fois, j'ai vraiment détesté certains personnages/narrateurs comme cela avait déjà été le cas dans ma précédente lecture de RL. Je m'en accommode et cela devient un attendu presque. Je pressens ce moment où je vais être percuté dans mes valeurs et ça commence à me plaire. Je gaine, mains derrière la tête, dans la perspective du crochet bas. Et je dois dire que je n'ai pas été déçu, encore une fois.

RL révèle peut-être chez moi un fond masochiste que j'avais découvert lors de ma première et dernière lecture de Guillaume Musso. Mais elle appuie dessus de tout son poids et...j'aime bien ça on dirait...quand c'est bien fait. (pizza aux anchois, table 3 pour Guillaume. T'as capté...)

De l'aveu de Rebecca Lighieri, ce roman est une autopsie de la pulsion : comment des jeunes gens parviennent à gérer cette force noire qui nous travaille tous et toutes, et comment d'autres y échouent lamentablement ou ne luttent même pas, pour certains d'entre eux.

Et je pense que c'est cette ombre portée que l'on traque partout sous la surface de ce récit, que l'on sent. Cette menace qui peut à tout moment surgir et briser les os, les vies, les vernis. Elle fait voir sa masse obscure puis disparaît comme elle est venue, laissant un goût de sang dans la bouche.

Le vrai risque c'est celui-là et c'est pour cela que l'évènenement qui arrive au début du roman n'est qu'un leurre ou une mèche à étincelles qui détourne l'attention. Les explosifs sont ici d'un tout autre ordre.

C'est bien trouvé de la part de RL de brouiller ainsi les pistes et de nous faire prendre l'ombre pour la proie.

Le surf vient mettre tout cela en exergue, par contraste : activité de plein air, de soleil, de communion avec les éléments, il véhicule une image très saine, pleine d'équilibre qui tranche tout à fait avec la noirceur qui se dégage de certains personnages et qui vient ternir l'image idyllique. (C'est RL qui le dit hein...je reprends juste)

On retrouve un sous-texte biblique également avec les prénoms de ces deux garçons et la référence explicite à un épisode vétérotestamentaire très connu. L'auteur semble ainsi jouer au dieu vengeur et courroucé qui exige un sacrifice sanglant et qui sème un chaos dramatique d'une main leste.

J'ai beaucoup aimé ce livre qui a refermé ses mâchoires sur moi sans ménagement, tirant sur mon frêle temps libre et l'emportant par gros morceaux sanguinolents. le terme happé est tout à fait à propos. Je me suis vu en grappiller des phrases, grattant quelques lignes, fébrilement, avant de partir au boulot le matin. Je ne sais qui du livre ou du lecteur ne voulait plus lâcher sa prise...

Seule la fin et son changement de ton assez inattendu ne m'ont pas paru nécessaires. Une touche de fantastique qui nuit au reste. Certains critiques ont parlé de Stephen King...le clown présent dans l'histoire n'est pas suffisant pour évoquer "le roi" selon moi. Restons sérieux.

Cela reste un bon livre dont je me souviendrais mais pas pour ces raisons et cette référence indue.

Rebecca Lighieri a une plume énergique, brutale, qui va à l'essence, quitte à jouer avec elle sans concession et frôler l'incendie. Ça commence à me plaire et me taraude agréablement la boîte à certitudes. C'est déjà bien suffisant.

Je suis toujours étonné par sa rudesse envers ses personnages dans ses interviews. Ainsi de Zachée qu'elle ne trouve pas intéressant et qui de toute façon n'a aucun mérite...Ouch. Coup de tête, balayette.

A nouveau, je m'étonne devant certains mots d'argots que je n'ai jamais entendu. Mais je prends de l'âge, je ne suis pas infaillible et je sais que selon notre situation géographique, il y a des mots qui ne franchissent pas certaines régions.

Enfin bon, si quelqu'un a déjà entendu le terme "star-star" auparavant, je veux bien qu'il me le dise dans les commentaires...ça me fout un coup de vieux...un peu comme la crème anti-cernes que j'ai reçu à mon anniversaire.

Dernier verre avant la route, j'ai apprécié cette "buanderie" que l'on retrouve dans cette maison et où beaucoup de choses se passent. Lieu mal défini. En sous-sol, souvent, chtonien, mais où l'eau, la vapeur ont aussi leurs places. Espace de stockage, de repli, caverne primordiale. On peut y fumer en soumsoum alors qu'on a officiellement arrêté à la mort de tonton André. Il y a 4 ans. Surtout, on peut y écouter les bruits primordiaux de la maison. Son pouls. J'aurais adoré avoir une buanderie. Bref, je vous laisse découvrir ce que l'on y fait chez les Chastaing.

Bonne lecture.


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Sous le pseudo de Rebecca Lighieri, Emmanuelle Bayamack-Tam nous offre encore une fois un roman surprenant. J'avais beaucoup aimé «Arcadie». Je n'ai pas été déçue par celui-ci, dans ma PAL depuis longtemps.

Nous sommes à Biarritz, au coeur d'une famille aisée. Mylène et Jérôme ont trois enfants. Les deux aînés ont la vingtaine, ils sont beaux, intelligents, excellents surfers et adulés par leur mère. Thadée, le fils chéri, est suivi de près par Zachée. La plus petite, Ysée, a 10 ans. Introvertie et solitaire, elle est surdouée et très lucide.

Thadée a pris une année sabbatique pour surfer à la Réunion. Zachée et sa copine, Cindy, l'ont rejoint au surf camp. Quand Thadée se fait mutiler la jambe par une attaque de requin, c'est toute la famille qui en est bouleversée.

Ce roman choral nous fait rentrer dans la tête de chacun des membres de cette famille. On passe de la lumière à l'ombre, très rapidement. Sous des airs de perfection, chacun a ses perversions, ses jalousies, sa lâcheté et cette famille est plus que dysfonctionnelle.

J'ai vraiment accroché à ce livre, même s'il est malsain et dérangeant. Je l'ai lu très rapidement. L'adoration sans borne de Mylène pour ses garçons et sa suffisance bourgeoise sont au début pénibles mais l'on passe d'un personnage à l'autre et l'on comprend mieux.

Chacun raconte sa version des faits et l'autrice avance petit à petit ses pions et resserre son intrigue.

La dernière partie est différente, le fameux «Stephen King à la française» promis sur le bandeau. Même si c'est vu à hauteur d'enfant via le point de vue d'Ysée, j'ai trouvé ces éléments fantastiques un peu tirés par les cheveux...

Mais ça reste un très bon roman noir, à suspens, envoûtant, très sensuel et plein de contrastes. Je l'ai lu avec beaucoup de plaisir et j'ai aimé retrouver le style de Bayamack-Tam.

Je recommande cette lecture inclassable.

Tu l'as lu ? Il t'a plu ? As-tu déjà lu des romans de cette autrice ?
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Ce qu'il y a de magnifique avec la lecture, c'est que l'on peut, d'un livre l'autre, changer du tout au tout, d'époque, de continent et bien sûr, de sujet. Aujourd'hui, je quitte donc l'Ouganda pour la Réunion, on ne dit jamais cela dans la vraie vie.

Ici nous faisons connaissance avec Myléne (heu, Mi pour les proches), la cinquantaine flamboyante, fière et proprette épouse d'un pharmacien biarrot et mère de trois enfants dont deux sublimes  garçons,  Thadée et Zachée (si, si, je vous jure), les aînés, autour des vingt ans, fans absolus et accomplis de surf ce qui en rajoute à leurs physiques d'apollons.

Seulement le plus âgé, Thadée donc (faut s'y faire, t'as des idées, parfois), s'est autorisé une année sabbatique pour s'adonner à sa passion sur les côtes réunionnaises ou la malchance (pour une fois) l'a mis en présence d'un requin-bouledogue qui a eu l'outrecuidance de s'octroyer un morceau de sa jambe droite (Ce ne sont pas des façons tout de même !) dont il devra être amputé (Il va marcher beaucoup moins bien, forcément !)

Accourue dès que possible à Saint-Denis, Myléne (heu, Mi, pardon) fond sur le lit d'hôpital de son grand blessé, persuadée à l'avance de l'incompétence crasse des médecins locaux qu'elle qualifierait volontiers d'indigènes. Elle y retrouve également son second fils, Zachée (faut s'y faire aussi, sachez que je n'ai rien inventé), présent sur zone lors de l'accident pour avoir rejoint son frère pour quelques jours de vacances en compagnie de sa petite-amie, Cyndie, peu appréciée de l'exigeante mère de famille (normal, avec un prénom si commun !)

Mission à accomplir (si vous l'acceptez) : ramener le chérubin urbain en métropole pour une garantie sur facture de reconstruction haut de gamme.

Bon, quitte à être à La Réunion, elle accepte quand même de faire un peu de tourisme (rentabilisons le billet, c'est pas donné quand même) et valide la proposition de Jérémie, un guide qu'elle exècre, de partir pour une méga randonnée de découverte ilienne (aussi crédible que moi en danseuse classique).
Han, mais que cette île est sublime (on ne le savait pas, dis donc) !

Pendant ce temps, au bercail et donc loin du marigot, jouant de sa manivelle à tire-larigot, l'apothicaire biarrot s'en tire à bon compte dans la buanderie sur programme essorage (elle se prénomme Maud, le bon compte qu'il tire) et n'est pas sans goûter la solitude par la situation offerte (comme sa maîtresse, par ailleurs).

Mais, bon, même les bonnes choses ont une fin et de nouveau la famille est réunie quand quittée est La Réunion.

 Commencent alors la convalescence dans 'Le' centre spécialisé qui va bien pour le jeune homme très perturbé (on le serait à moins) enclin aux idées suicidaires (pas marteau, il garde une dent contre le requin).

Mais, ce jeune homme si bien comme il faut sous tous rapports est-il aussi sain que son apparence semble l'indiquer ? Cette enfance qu'il a vécue auréolé d'une réputation de demi-dieu a-t-elle fait de lui un homme équilibré ou un mouton à cinq pattes ?

Wait and see, ou plutôt wait and sea, sex and sun, on est chez les surfeurs, que diable !

Comme chaque chapitre donne la parole à un des divers intervenants (dans la famille Chastaing, je veux, la mère, le père…) il arrive que ce soit le cadet qui fasse part de ses soucis, avec plus de distance que ses parents ou son frère qu'il avoue cependant déifier lui aussi. Seulement, une propension à s'appesantir (lourdement) sur les termes techniques du surf rendent son propos un peu indigeste et permet à l'autrice de nous envoyer un petit clin d'oeil en coin du genre « z'avez vu comme j'ai bien bossé mon sujet", affichant un beau syndrome de ‘première de la classe' au passage.
Dommage, c'est pourtant le plus intéressant des personnages, jouissant d'une fine intelligence et doté d'un très mature recul sur la vie pour un jeune homme de son âge.

Mais,  rappel, le propos de ce roman à suspens est de nous faire frémir (parfois bouillir) à la lecture d'un drame ou plutôt d'une tragédie familiale (faites brailler les Walkyries).
Donc, la morsure du requin ne sera qu'un amuse bouche à la carte de ce joyeux festin gastronomique où les masques vont tomber les uns après les autres (comme les mouches après un pshit pshit de raid) pour nous révéler les véritables cerveaux qui se cachent sous ces crânes personnages pour certains cependant  écervelés.

Sauront-ils nous séduire ou nous dégoûter, nous attendrir ou nous rebuter, nous plaire ou nous faire horreur, nous hanter ou nous laisser indifférents ?

Si la trame générale de l'intrigue et le profil des intervenants ont su me plaire, je suis quand même resté les yeux dans la vague, d'autant que le tout nous est quand même servi sous la méga-louchée de chantilly fouettée indigeste d'un style ou le grotesque se dispute avec le ridicule et le caricatural sans oublier quelques vulgarités pas piquées des hannetons pour affiner la présentation.
Pour exemple,  la dernière partie hallucinante et hallucinée racontée par la jeune soeur de 13 ans, Ysé (il faut s'y faire je vous dit) qui clôture le roman par une scène qui flirte avec le Grand-Guignol dans un langage et un vocabulaire qui ne correspondent pas du tout à son âge. Bon, on a quand même échappé au jerrican d'hémoglobine, c'est déjà ça !

Quant au titre, ‘les garçons de l'été' pour mémoire, il manque singulièrement d'originalité et d'à-propos, la scène declencheuse se passe juste avant Noël.

Lecture totalement dispensable à mon humble avis.
 
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Rebecca Lighieri est le pseudonyme d'Emmanuelle Bayamack-Tam, qui nous propose avec Les Garçons de l'Été un roman choral d'une rare intensité.

Le titre et la couverture me promettaient une ambiance « sea sex and sun ». Certes le roman est très bien documenté sur la pratique du surf, ses codes, la fraternité mâtinée de rivalité qui réunit les surfers, le vocabulaire d'initiés pour parler vagues, figures, technique. Certes la mer, le sexe et le soleil sont au rendez-vous, mais aussi l'orgueil, la jalousie, le mensonge, les faux-semblants, la dissimulation, la malveillance, la haine, la vengeance implacable. Vous l'aurez compris, j'ai été surprise, mais pas du tout déçue !

Les Chastaing ont « tout pour être heureux » : une jolie maison, un quotidien confortable et bien huilé, une vie de couple épanouie (incluant une maîtresse régulière pour Monsieur), trois magnifiques enfants aux prénoms recherchés. Ysé, la benjamine, solitaire mais d'une maturité déconcertante, a des passe-temps peu communs. Ses aînés, Thadée et Zachée, sont deux demi-dieux solaires, athlétiques, magnétiques, adulés par tous.
Est-ce ce « trop » de perfection qui attire sur cette famille « bien sous tous rapports » les foudres d'un Dieu vengeur et jaloux décidé à leur faire payer leurs péchés d'orgueil et de fierté ?

Passionnés de surf, les deux frères partent chercher la vague à la Réunion, mais « tout part en vrille » le jour où Thadée se fait arracher la jambe par un requin.
Au fil des pages le bonheur insolent se délite, les eaux calmes et limpides se muent en un raz de marée qui renverse le bel équilibre familial. Les masques tombent, un à un, et la vérité se dévoile page après page, entraînant les Chastaing dans une lente et inexorable descente aux enfers.

Ce roman est UNE MERVEILLE, ce roman est GENIAL. Il est dérangeant, inquiétant, effrayant, passionnant, envoûtant. Un « page-turner » qui, telle une vague puissante nous emporte, le souffle court, jusqu'à la dernière page.

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Incroyable comme ce livre est angoissant ! Si le début s'attarde à montrer une belle petite famille bourgeoise bien-pensante, très vite on devine ses travers, et quand elle est frappée par un premier malheur (le fils aîné a la jambe bousillée par un requin en faisant du surf), le vernis se craquelle. Plusieurs points de vue alternent et montrent la lente plongée aux enfers de cette famille, menée vers le bas par cet aîné machiavélique…

Ce roman est hyper angoissant, surtout la fin, le dernier tiers m'a presque donné des cauchemars ! Très réaliste, très cruel, très bien écrit, vraiment un excellent thriller psychologique et littéraire !
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Les garçons de l'été
Un roman terrifiant qui, dès les premières pages, instaure un climat anxiogène. La famille Chastaing - Jérôme et Mylène, les parents, Tadhée, Zachée et Ysé les enfants (beaucoup de simplicité dans le choix des prénoms !) – est une jolie famille biarrote, incarnation de la bourgeoisie. Les enfants sont d'une beauté solaire, ils poursuivent de brillantes études, font du sport – bref, la perfection !
L'aîné, Thadée, a pris une année sabbatique afin de se livrer à son activité favorite, le surf, et est parti s'installer à La Réunion. A quelques jours du retour, il se fait happer une jambe par un requin. Et il n'y a d'autre choix que de l'amputer.
Cet horrible accident est ce qui va mettre à jour le dysfonctionnement familial, la pathologie relationnelle, voire même la psychopathologie de certains. Les chapitres laissent la parole aux protagonistes, qui se font narrateur chacun à leur tour et l'on découvre au fil des pages l'ampleur de des dégâts ou comment des parents génèrent la toute-puissance, instaurent un environnement toxique qui a des répercussions sur la construction psychique de leurs enfants. On peut décerner à Mylène la palme de la dangerosité maternelle ! Au milieu de tous ces personnages inquiétants, Zachée et son amoureuse Cindy offrent l'image d'un couple sain, à la relation fusionnelle, absolue qui partagent des valeurs et les mettent en oeuvre – lorsque leur voix se fait entendre, on respire davantage, l'atmosphère s'assainit et on surfe avec eux sur les vagues de leur passion (amoureuse et sportive).
La dernière partie du roman donne carrément la chair de poule, je comprends pourquoi certains ont comparé l'auteur à Stephen King. La lecture achevée au milieu de la nuit, je n'en menais pas large …
Un roman très bien écrit, au genre indéfinissable, à la construction maîtrisée qu'on quitte presque avec soulagement tant il prend à la gorge – ni reposant, ni distrayant mais très réussi !
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Il m'a fallu du temps pour digérer cette lecture et pouvoir en donner mon avis. Plus de dix jours après l'avoir terminée, je ne suis toujours pas en capacité de dire si je l'ai aimée ou pas.

Contrairement à ce que présume son titre et sa couverture estivale, ce roman est loin, très loin même, de nous emmener vers une histoire d'amitié ou d'amour de vacances comme le chantaient si bien en leur temps C.Jerôme ou David et Jonathan. Si vous pensez lire une romance de plage, vous ne pouvez pas être plus à côté de la plaque. Car ce roman est d'une noirceur indéfinissable; il n'y a aucune lueur à l'horizon, quand vous pensez avoir touché le fond, vous n'y êtes pas encore.

Cette lecture raconte la descente aux enfers d'une famille pourtant si parfaite, en apparence. Les parents sont aisés et font partie de la bonne société biarrote; les enfants, au nombre de trois, sont beaux, brillants et font la fierté de leurs parents. Les deux aînés, passionnés de surf, s'envolent pour un spot à La Réunion; le drame arrive, le beau Thadée, le merveilleux Thadée se fait bouffer la jambe par un requin-bouledogue et se retrouve, à 20 ans, unijambiste. On imagine bien comment il doit se sentir et aussi combien les rêves et espoirs que ses parents avaient placés en lui tombent à l'eau. Pourtant, très vite, le lecteur ne pourra plus se trouver en empathie avec lui car ce jeune et brillant Thadée cache bien des zones d'ombre et son malheureux accident ne fera finalement qu'accélérer l'éclatement de cette si "jolie" famille.

Dire que j'ai trouvé cette lecture violente et oppressante serait un euphémisme. À aucun moment je n'ai eu de réel plaisir à la lecture de ce roman mais je n'ai pas su, non plus, le refermer pour ne plus jamais l'ouvrir. C'est glauque, malsain, on ne navigue jamais entre deux eaux, la destination est clairement l'enfer sur Terre. J'avoue que l'écriture est très réaliste mais pour autant je n'ai pas pu m'empêcher de me dire que l'auteur avait quand même bien grossi le trait ou alors qu'elle avait de sacrés comptes à régler, plutôt sur le divan d'un psychanalyste. Je rencontre beaucoup de difficultés à exprimer mon ressenti car il s'agit, justement, clairement d'un ressenti et je ne parviens pas à le traduire en mots. Je n'ai pas expressément compris où voulait nous emmener Rebecca Lighieri, je n'ai pas compris le sens de cet ouvrage, mais pourtant j'y suis allée, et jusqu'au bout qui plus est.

L'histoire, sans me laisser de marbre, ne m'a pas embarquée. L'écriture, par contre, oui, complètement.
On aime, on n'aime pas, mais je ne crois pas qu'on puisse rester indifférent.

Je ne saurais trop le recommander et vous invite à vous faire votre propre avis.


Challenge multi-défis 2020
Challenge mauvais genres 2020
Challenge plumes féminines 2020

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Une jolie petite famille parfaite... Mais un drame va faire voler en éclats tout ce qui semblait acquis. Un remake contemporain de l'histoire de Caïn et Abel !
Rebecca Lighieri - alias Emmanuelle Bayamack-Tam - est écrivain. Sous ce pseudonyme, elle est l'auteure de "Husbands" (2013) et "Les garçons de l'été" paru en 2016 aux éditions Gallimard, puis réédité chez Folio en 2018.
Ils sont beaux, ils sont jeunes, font des études brillantes et passent tout leur temps libre à surfer sur la côte landaise.
Mylène aime ses fils Thadée et Zachée -respectivement âgés de 21 et 20 ans - inconditionnellement. Sa fille, Ysé, seulement âgée de 12 ans est plus discrète et suscite moins l'admiration de sa maman.
p. 18 : " Non, je suis trop sévère avec moi-même, car d'une certaine façon, j'aime mieux Ysé que ses frères. Avec eux, je tremble, je frémis, je suis dans l'adoration, et ce n'est pas un service à rendre aux enfants que de les adorer."
C'est vrai, qu'elle et Jérôme, son mari pharmacien, n'ont jamais vraiment compris la décision de Thadée de partir à La Réunion pour une année sabbatique. Mais ils tempèrent, puisque leur fils adoré s'apprête à intégrer Centrale ou Polytechnique.
Zachée, le frère cadet, est alors parti le rejoindre pour quelques jours de surf avec sa petite amie Cindy. Mais cette insouciance juvénile va basculer dans l'enfer du drame.
L'appel de Zachée à ses parents ce jour-là, va bousculer, irrémédiablement, le destin de la famille Chastaing...
En effet, victime d'une attaque de requin-bouledogue lors d'une session de surf, Thadée a perdu sa jambe. D'abord en colère, il s'enferme rapidement dans une profonde dépression, dont la famille va assister, impuissante, à sa destruction.
p. 129 : " - Je ferai mieux d'attendre quoi ? Qu'est-ce que j'ai à espérer de la vie, maintenant? Tu vois, si tu veux vraiment m'aider, file-moi des médocs, que j'en finisse une fois pour toutes. Après tout, t'es pharmacien. "
Petit à petit, tout ce qui semblait si bien ficelé s'écroule au sein de cette famille. Même Jérôme, aux allures de mari et père modèle, réalise qu'il a peut-être un peu trop titillé le destin avec ses petits secrets et ses mensonges...
p. 138 : " Avec l'amputation de mon fils aîné, quelque chose s'est déglingué. Je me rends compte que mes petits remords, mon vague sentiment de culpabilité, finalement, ce n'est rien par rapport à ce que j'éprouve aujourd'hui. Même si ce qui arrive à Thadée n'a rien à voir avec les frasques et les turpitudes de son pères, je ne peux pas m'empêcher d'établir des liens. Comme si en trompant Mylène j'avais introduit un ferment de malheur dans la famille. Certes, le ferment a mis du temps, des années même, à répandre la putréfaction, mais désormais la putréfaction est là et je dois faire en sorte qu'elle ne gagne pas plus avant. "
Zachée a toujours vécu dans l'ombre de ce frère  parfait à qui tout semblait réussir, l'idôlatrant à excès. Mais depuis l'accident, il culpabilise de mener une vie normale.
p. 162 : " Alors voilà, d'une certaine façon, je suis jeune, bien sûr. Mais la vraie jeunesse, qui comporte forcément une part d'innocence ou d'inconscience heureuse, cette jeunesse-là m'a quitté pour toujours. Il se peut même qu'il est pris fin le jour où un requin a arraché la jambe de mon frère dans les eaux agitées de l'Océan Indien, en ce jour qui avait si bien commencé et qui devait si mal finir. "
Thadée devient mesquinement jaloux. Infirme, privé de surf, de sa popularité, de sa copine, il entretient une haine grandissante envers son frère cadet.
p. 62 : " Ce que j'ai gardé pour moi, mais qui me taraudait déjà, c'était ma colère et ma haine pour tous ceux qui m'entouraient et que le requin avait épargnés. Et encore, j'étais loin d'imaginer qu'on allait m'amputer. Depuis, mon sentiment d'injustice n'a fait que croître, et tous ceux qui vont et viennent dans ma chambre, tous ces gens qui me narguent sur leurs deux jambes, mériteraient vraiment que je leur crache à la gueule. "
Sa perversion et sa manipulation s'affinent et il réussit à lui seul à terroriser l'intégralité de la famille, qui y voit, naïvement, la colère d'un jeune garçon privé de l'existence heureuse à laquelle il semblait voué.
Thadée va fomenter un plan diabolique, en le maquillant d'accident, pour se débarrasser de son frère.
p. 246 : " - Cindy ? Ouais, salut. Euh... on a perdu Zach. "
Les parents, anéantis, sont littéralement dépassés par les événements tragiques qui ont touché tour à tour leurs fils. Mais malgré la douleur et le chagrin d'avoir perdu le grand amour de sa vie, Cindy va se révéler plus perspicace. Incrédule, elle va comprendre que Thadée est un psychopathe, pervers et destructif.
p. 270 : " Mais tout en ayant conscience que Thadée était un connard capable de tout, je n'ai jamais imaginé qu'il irait jusqu'à t'assassiner. J'ai sous-estimé sa jalousie et sa perversion. Je me suis toujours méfiée, mais pas suffisamment."
Ce roman est une bombe, " du Stephen King à la française " selon les mots d'Olivia de Lamberterie ! A la lecture de ce thriller psychologique, le temps s'est arrêté, totalement absorbée par le destin tragique de la famille Chastaing. Les chapitres se succèdent, prenant la voix de chacun des protagonistes, pénétrant ainsi leurs pensées, telle une sentinelle. Englouti par une construction narrative époustouflante,dont le style dramatique maintient le lecteur en haleine, l'auteure joue sans cesse entre les atmosphères de tensions extrêmes et les fausses insouciances.
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Une famille qui part en vrille, une charmante villa basque qui se transforme en asile de fous, et voilà les garçons de l'été qui nous offrent une impressionnante session de lecture !
Entre soleil et ténèbres, ce roman qui fait la part belle au surf a de quoi réjouir les amateurs mais le lecteur à qui les noms de Belharra et Nazaré ne disent strictement rien, risque de se noyer dans les nombreux termes techniques ( lineup, take -off, shore break, wipout etc.). Mais pas de panique, l'essentiel de ce roman se concentre sur un drame vieux comme le monde et que tout le monde connaît...
Cependant je trouve quand même dommage que l'auteure n'ait pas jugé utile d'ajouter en fin d'ouvrage un petit glossaire pour aider ceux qui n'y connaissent rien au surf et qui aimeraient peut-être comprendre de quoi il s'agit.
Un grand merci à lucia-lilas dont l'enthousiasme débordant et contagieux a poussé ma copine à se précipiter chez son libraire et me prêter ce livre sans l'avoir lu ! Je l'ai savouré en me gardant de toute précipitation, pour faire durer le frisson de plaisir...
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