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EAN : 9782743606107
192 pages
Payot et Rivages (01/03/2000)
3.92/5   12 notes
Résumé :

Que vous rompiez avec votre maîtresse ou qu'elle vous quitte, que vous demandiez le divorce ou que votre femme se sépare de vous, que vous vous fâchiez avec un ami, qu'un objet qui vous est cher vous soit volé, que, goinfre, vous vous soumettiez à une règle diététique, que, mondain, vous entriez au monastère, que l'un de vos proches meure ou que ce soit vous qui vous apprêtiez à basculer dans la trapp... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
L'auteur, qui a consacré l'essentiel de sa vie à la séduction des jeunes filles, et l'essentiel de son oeuvre au récit de sa vie amoureuse, a été le plus souvent quitté, soit parce que les jeunes femmes étaient exaspérées de le découvrir aussi volage, soit parce qu'elles décidaient de poursuivre leur route après avoir découvert avec lui les premières joies de l'amour.
L'auteur, un grand écrivain boudé par le milieu littéraire en raison de ses obsessions et de sa vie tumultueuse, sait que quoi il parle en matière de rupture. Il livre ici un essai brillant, vif, documenté, intéressant, concret sur la rupture, l'art de la gérer. Il donne des clefs de compréhension de la psychologie féminine, avec un regard bien entendu très masculin. Les femmes rétorqueront que les hommes aussi ont la rupture facile. Personnellement, je crois à cette capacité particulière des femmes à faible table rase du passé amoureux pour mieux vivre un nouvel amour, avec une fraîcheur de renouvellement et d'innocence stupéfiante. Si vous voulez savoir pourquoi, selon Matzneff, lisez les citations.
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Je viens de finir le beau livre de Gabriel Matzneff (décidément, quelle plume!) intitulé de la rupture. L'élégance de la prose n'y dispute qu'à la clarté des idées, la profondeur des réflexions...

Lire la suite sur:
http://jonathanfrances.wordpress.com/2009/12/04/la-rupture-selon-matzneff/
Lien : http://jonathanfrances.wordp..
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
1. Que vous rompiez avec votre maîtresse ou qu’elle vous quitte ; que vous demandiez le divorce ou que votre femme se sépare de vous ; que vous vous fâchiez avec un ami ; qu’un objet auquel vous tenez comme la prunelle de vos yeux vous soit volé ; qu’athée vous rencontriez Dieu ; que, croyant, vous perdiez la fi ; que, riche, vous soyez soudain ruiné ; que, goinfre, vous vous soumettiez à une règle diététique ; que, mondain, vous entriez au monastère ; que, bien portant, vous basculiez dans la maladie ; que l’un de vos proches meure ou que ce soit vous qui descendiez dans le sombre Orcus, vous n’échapperez pas à l’épreuve de la rupture. Dans la vie, tout est rupture, depuis le cri primal du nouveau-né jusqu’à l’ultime soupir de l’agonisant ; depuis le premier biberon jusqu’à la dernière cigarette. Chacun de nous est destiné à fumer un jour sa dernière cigarette, et vous aussi, mon cher filleul. Soyez donc prêt.

2. Si vous êtes un amant passionné, tendre, fidèle, et que, ce nonobstant, votre maîtresse vous écrit une lettre de rupture, vous serez stupéfait, anéanti. Durant des mois, cherchant à comprendre l’incompréhensible, outré de douleur, vous ressentirez une horrible mutilation. Peut-être n’en guérirez-vous jamais.
Toutefois, la certitude de n’avoir rien à vous reprocher agira sur vos plaies comme un baume. Graduellement, les tourments nés de l’absence de votre jeune amoureuse feront place à l’écoeurement. L’écoeurement ! Voilà un mot bien dur, m’objecterez-vous. Pourtant, vous devrez vous convaincre de sa véracité, impérativement, si vous désirez mortifier le chagrin causé par l’abandon de votre infâme traîtresse.
Oui, c’est exactement cela. « Ecoeurement », « infâme traîtresse », mettez-vous ces mots mélodramatiques dans la tête, ayez-les à la bouche ou sous la plume en toutes occasions, que vous écriviez à celle qui vous a quitté ou parliez d’elle à vos amis.
Car vous devez écrire, et parler. Cela fait partie de la cure que je vous prescris. Lorsque vous avez des peines de cœur, laissez la pudeur au vestiaire, épanchez-vous, confiez-vous. La parole apaise, la confession libère. Ecrivez, clamez, publiez votre souffrance et votre indignation. Saoulez-vous de mots.
Vous êtes un tendre ? Un reste d’amour vous empêche de parler d’écoeurement et d’infamie à propos de l’ingrate ? Soit, mais en ce cas mettez l’accent sur l’imbécillité de sa conduite. Persuadez-vous que, très vite, elle va regretter asa décision de rompre, qu’elle en pleurera des larmes de sang. Je dis « persuadez-vous », car il est clair que c’est vous, et vous seul, que vous devez convaincre, que vos lettres à la scelerata puella et vos confidences à vos amis ne servent qu’à vous purger d’un poison, qu’à vous délivrer d’un trop-plein de douleur, et que toute cette gesticulation a pour unique but de vous aider à surmonter l’épreuve.
En effet, n’attendez de votre éloquence qu’elle vous rende l’objet aimé. Pour moi, chaque fois que j’ai tenté de persuader une femme qui s’éloignait de moi qu’elle faisait fausse route, essayé de l’émouvoir avec l’évocation de nos plaisirs, de nos amours, de notre douce complicité, j’ai échoué misérablement. Une femme qui cesse de vous aimer n’entend rien, ne se souvient de rien. Le langage de la raison, n’a pas sa place au lieu qui nous occupe. Dérouler à une jeune personne résolue de vous quitter les raisons pour quoi elle aurait tort de le faire est un leurre ; espérer l’attendrir par des propos argumentés est peine perdue. Ce serait jeter une pierre dans un puit sans eau, lancer une balle dans le vide : vous n’entendriez pas le moindre « plouf », ne percevriez pas le moindre rebond. Votre bien-aimée vous reviendra peut-être, les ruptures ne sont parfois que de fausses ruptures, mais sachez que ce retour ne devra rien à votre puissance de persuasion. Considérez que ce que les femmes supportent le moins, ce sont les remords. Nous, parce que avons le goût de notre destin, c’est-à-dire la conscience aiguë de notre passé, nous n’avons pas peur d’éprouver des regrets. Les femmes, elles, ont rarement le sens de la nostalgie, parce qu’elles ne s’intéressent guère au passé – à leur passé amoureux, s’entend. Parfois, elles n’hésitent pas à le travestir, à le recréer ou, mieux encore, à l’effacer.
Un médecin de mes amis explique par la biologie ce déplorable comportement : ce serait parce qu’elles mettent les enfants au monde, qu’elles donnent la vie, que les femmes auraient ce pouvoir de renouvellement, cette bizarre aptitude à se détacher de leurs belles amours, à en gommer les traces.
J’ai souvent observé, avec un étonnement toujours neuf, tant cette disposition m’est étrangère, aux antipodes de mon propre tempérament, l’incapacité des femmes à jouir de l’instant présent, leur impuissance au Carpe Diem, l’art qu’elles ont de ternir un bonheur actuel par de trompeuses inquiétudes touchant au lendemain, leur permanente insatisfaction, leur vague désir d’un je-ne-sais-quoi-en-plus, leur sempiternel bovarysme.
Si vous désirez qu’elle revienne, le mieux est de faire le mort. Prenez acte de sa décision de rompre et disparaissez.

3. Elle vous quittera et opérera cette rupture avec une froideur qui vous choquera, une dureté qui vous stupéfiera, un cynisme qui vous consternera. Brutalement, la petite fille éperdue d’amour que vous connaissiez s’est métamorphosée en une inconnue à la voix glaciale, aux yeux moqueurs, à la tête pleine de pensées qui ne sont déjà plus vous.

11. Un corps se remplace, non une intelligence, non une âme. J’ai connu Marie-Elisabeth quand elle avait 15 ans. Je suis devenu son amant un an plus tard, et nous nous sommes éperdument aimés pendant près de dix ans. Aujourd’hui, elle a épousé un minable et m’a rayé de sa vie. Dans la nostalgie que j’ai d’elle, le souvenir de ses yeux verts, des inflexions de sa voix, de la drôlerie de ses mots, de sa façon de se mouvoir, de ses colères, des petits noms tendres qu’elle me donnait, occupe une place plus grande que celui des joies sensuelles que j’ai vécues dans ses bras, si vives que celles-ci aient été. Les joies sensuelles, je les ai retrouvées dans d’autres bras ; mais tout ce qui lui était propre, et qui faisait son charme unique, son irremplaçable singularité, j’en suis dépossédé pour toujours.
Parce que l’amitié est toute spirituelle, la perte d’un ami a, et c’est là que je voulais en venir, mon cher filleul, un caractère plus irrémédiable encore que celui d’une amante. Ce que vous perdez en le perdant ne vous sera jamais rendu.

14. Ce ne sont pas les puceaux mais les grands pécheurs qui font les bons moines.

Les jeunes femmes qui vous ont renié, ne vous donnent pas de leurs nouvelles, ne vous font pas le moindre signe de vie. Peut-être sont-elles mariées, mères de familles, peut-être aussi sont-elles mortes, et vous n’en avez rien su. Oui, peut-être sont-elles mortes, et leurs corps, naguère si tendres et chauds contre le vôtre, sont-ils en train de se décomposer, ignobles et puants, dans leurs froids cercueils. En tout cas, pour vous elles sont mortes et bien mortes. Epouses ou cadavres, c’est la même chose. Désormais, elles ne vivent plus que dans les pages qu’elles vous ont inspirées :
« Alors, Ô ma beauté ! Dites à la vermine / Qui vous mangera de baisers / Que j’ai gardé la forme et l’essence divine / De mes amours décomposés

En outre, mon cher filleul, lorsque vous aurez un peu bourlingué parmi l’existence, vous observerez que les chagrins d’amour, à force de se superposer, finissent par faire une espèce d’agrégat où les visages, les voix, les peaux, les parfums et les caresses se confondent. Vous êtes d’humeur nostalgique, mais est-ce de Marie-Laurence, ou de Marie-Agnès, ou de Marie-Pascale, ou de Marie-Laure, ou de Maria dont vous éprouvez le regret ? Vous ne le savez plus très bien, et votre douleur, ainsi divisée entre tant de prénoms, répandue dans la multiplicité des créatures, perd de son intensité…

C’est la tâche de l’artiste de fixer l’éphémère, de vaincre le temps, de ressusciter les morts. La nature, ingrate et bête, oublie, efface, détruit, tourne la page. C’est l’impératrice de la rupture. L’écrivain est son antipode, et la tâche que lui confie Apollon est précisément de débeller cette muette et indifférente salope.
Seule la mémoire rend possible le désir. Parce que je souhaite que vous soyez un homme de désir, je vous demande d’être un homme de mémoire. Mémoire d’un bonheur évanoui, d’une innocence perdue, nostalgie paradisiaque. Mémoire de l’enfer, aussi. N’oubliez rien et inscrivez tout.

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Sachez que plus vos ruptures seront fécondes, plus elles vous vaudront le blâme; la société supporte mal qu'on lui échappe, et nous avons vu la touche violante qu'implique étymologiquement ce subversif mot de "rupture". Qu'il s'agisse d'un divorce, d'une retraite ou d'un exil, le monde tâchera de vous donner mauvaise conscience, de vous convaincre que vous êtes un déserteur.
Au demeurant, il n'aura pas tort. Partir, c'est déserter.
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Vidéo de Gabriel Matzneff
50 ans après avoir été victime de Gabriel Matzneff, le plus célèbre écrivain pédo-criminel de la Vème République, Francesca Gee raconte, évoque les politiques, éditeurs et journalistes qui le protégeaient.
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