The Hero

LE HÉROS
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En choisissant cet ouvrage de l'auteur britannique, William Somerset Maugham, né à Paris en 1874 et mort à Saint-Jean-Cap-Ferrat en 1965, "The Hero" de 1901, j'ai voulu vérifier si son oeuvre avait résisté à l'épreuve du temps. Surtout que "Le Héros" ne fait pas partie de ses ouvrages célèbres, comme "Liza de Lambeth" - un roman social de ses débuts - ou "Servitude humaine" - un Bildungsroman de 1915 - ou encore "L'envoûté" - inspiré par la vie de Paul Gauguin de 1919. En aficionado de ses "short stories", je sais que ses nouvelles ont gardé toute leur saveur, mais ses romans ?
Quoi qu'il en soit, ses nouvelles étaient les tous premiers textes que j'ai lus, adolescent, en Anglais. Certaines d'ailleurs, comme "Le sortilège malais" et "Le Fil du rasoir" plusieurs fois, pour être sûr d'avoir bien compris. Bref, il y a une part de gratitude et d'hommage en plus de nostalgie et de curiosité.

L'histoire démarre dans le salon des Parsons, où l'honorable colonel Richmond et sa charmante épouse Frances attendent avec émotion le retour du fils prodigue, James. "Jamie" a été envoyé, après de brillantes études à l'académie militaire de Sandhurst, en Afrique du Sud, où sévit la guerre des Boers. Cinq années d'absence, mais toujours, en tant que fils unique, présent dans ce salon et dans le coeur de Mary Clibborn, sa fiancée.

Seulement, Mary, malgré son bon coeur, manque totalement de charme féminin et Jamie justement, de passage en Inde, est tombé involontairement sous le charme d'une beauté exotique, tout en gardant sa dignité, mais... dans la fuite. Dans le petit village de Little Primpton, tout le monde s'attend à de très prochaines noces, à commencer par ses parents, Mary et sa famille, ce qui met notre héros dans une situation plutôt inconfortable. Il lui est, en effet, impossible de concevoir toute une vie avec Mary, pour la simple raison qu'il ne l'aime pas. S'il apprécie son dévouement, il est conscient qu'appréciation et amour ne sont pas des synonymes. Rassemblant tout son courage, il annonce à Mary la couleur. Elle est dévastée par la nouvelle, mais réagit admirablement, contrairement à la plupart des citoyens du village, qui le condamnent et rejettent. Même l'épouse du pasteur vient lui lire les lévites chez ses parents, qui eux sont fort déçus et essaient de le convaincre, en mobilisant même son oncle qui a la réputation d'être un homme du monde.

La coalition de toutes ces forces fait que notre héros étouffe à Little Primpton et il part pour Londres. Au bout d'une semaine cependant, la solitude l'induit à rentrer au bled de ses parents, où il tombe gravement malade d'une fièvre typhoïde. le médecin craint pour sa vie, mais la petite coalition constituée par ses parents et surtout - vous l'avez sûrement deviné - Mary, font qu'il se rétablit. Sa guérison inespérée l'amène à reconsider certaines valeurs fondamentales dans l'existence, notamment au niveau des relations humaines...

Si cette histoire n'a peut-être rien de sensationnel, elle illustre parfaitement l'art merveilleux de William Somerset Maugham à caractériser hommes et situations dans un style bien à lui et qui lui a garanti pendant de longues années un large public fidèle. Sa description des réactions des villageois après son annonce à Mary est exemplaire : l'homme qui en Afrique du Sud a risqué sa vie pour sauver celle d'une pauvre recrue de 19 ans, ce qui lui a valu la Croix de Victoria (la "Victoria Cross" - VC - ou la distinction suprême dans l'armée britannique) et une grande cérémonie à Little Primpton, passe du jour au lendemain du statut de héros admiré à celui de paria méprisé.

"Au contraire de ses romans, les nouvelles de Maugham n'ont pris que des rides superficielles. le décor n'est plus, mais les personnages demeurent plus actuels que jamais." Tel est le verdict de Véronique Maurus dans le Monde des Livres du 27-5-2010. À mon avis la critique littéraire n'a raison qu'a moitié. L'étroitesse d'esprit des villageois de Little Primpton, au passage du XIXe au XXe siècle, me rappelle, hélas, l'épisode du référendum sur le Brexit de l'année dernière : le sentiment de supériorité lié à un empire disparu depuis belle lurette, l'arrogance de certains leaders et une xénophobie latente. Dommage que William Somerset Maugham n'est plus de ce monde, je suis persuadé qu'il aurait produit un best-seller avec comme héros Nigel Farage, Boris Johnson et Theresa May.