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3,73

sur 2845 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Dans ce roman, François Mauriac nous dresse le portrait d'une criminelle qui ne peut que susciter la pitié de ses lecteurs et lectrices. L'ensemble est écrit à la première personne du singulier, du point de vue de Thérèse.

Le récit commence par une longue séquence d'introspection, durant le trajet qui ramène Thérèse auprès de son mari. La jeune femme, inquiète, cherche ce qu'elle va pouvoir dire à Bernard, comment lui expliquer pourquoi elle en est arrivée là. Pour ce faire, elle se replonge dans son passé, jusqu'à son adolescence, quand elle a rencontré la soeur de Bernard et qu'elle a décidé de se marier.
Derrière la criminelle, Mauriac nous montre surtout une femme enfermée dans une existence qui ne lui convient pas. Alors qu'elle est très intelligente et cultivée [ce qui d'ailleurs, ne plait plus tant que cela à Bernard], elle doit se cantonner à son rôle de mère et d'épouse d'un homme qui manque cruellement de conversation, en dehors de la chasse et du développement de ses terres. Elle n'y trouve aucun épanouissement. Pire, elle semble même souffrir d'une dépression post-partum peu après la naissance de sa fille, ce qui lui vaut d'être très mal jugée par sa belle-famille. Alors, quand elle s'aperçoit que son mari se trompe dans la posologie de son traitement contre les problèmes cardiaques et qu'elle n'a pas le réflexe de l'avertir, elle s'en vient à imaginer un autre avenir. Et si elle pouvait se libérer de lui ?
J'ai beaucoup aimé les thèmes exploités dans ce roman : d'abord, tout ce qui tourne autour de la condition féminine, du poids des conventions, des rôles genrés, etc. Thérèse vit dans un milieu très conservateur et misogyne où elle sait qu'elle n'obtiendra aucun soutien. Vient ensuite la question de la vengeance et de la peur du regard des autres : jusqu'où sommes-nous prêt·es à aller pour protéger notre image auprès de notre entourage ?

Le personnage de Bernard est aussi très intéressant : comment un homme qui s'est toujours senti inférieur face à son épouse, si intelligente et cultivée, réagit-il lorsqu'il reprend le pouvoir sur celle-ci ? Curieusement, la victime et le/la coupable dans cette histoire ne sont peut-être pas celui ou celle que l'on croit…
François Mauriac est très fort pour construire la psychologie de ses personnages. J'ai été étonnée de la justesse avec laquelle il traite celui de Thérèse : il a admirablement su capter des sujets qui sont encore tabous aujourd'hui. Il parvient à instaurer une ambiance tendue pendant tout le récit, ce qui nous maintient dans l'expectative d'un drame. C'est finement joué !

Ce fut donc une agréable surprise que la lecture de Thérèse Desqueyroux : un roman qu'on pourrait qualifier de féministe, écrit par un homme, en 1927. Cela a de quoi étonner !
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Non-lieu c'est le verdict du procès de Thérèse Desqueyroux, accusée d'avoir tenté de tuer son mari par empoissonnement. C'est son mari, Bernard Desqueyroux, qui l'innocente en affirmant s'être trompé dans le dosage de son médicament.
Sauvé par un homme qu'elle n'aime pas depuis le jour de son mariage, Thérèse est enfermée chez elle et privée de sa fille.
C'est mon premier livre de François Mauriac et j'ai aimé le style moderne de ce livre. le portrait de Thérèse est un beau portrait de femme.
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Thérèse a tenté d'empoisonner son mari, mais est acquittée par le faux témoignage de celui-ci. Les raisons de son geste ? Ce qui semble être le quotidien de beaucoup de femmes. Vivre dans l'ombre de son mari, se plier à ses exigences, faire bonne figure pour la famille. Hypocrisie de ces milieux bourgeois où seule l'apparence compte. Livre troublant par les sentiments qu'il fait émerger. Faut-il détester Thérèse ? Difficile, elle semble tellement souffrir. Faut-il aimer son mari qui lui évite la prison ? Difficile également tellement il est méprisable. Ce livre fait émerger un joli chassé-croisé de sentiments.
Lien : https://redheadwithabrain.ch..
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Cette lecture a été une rencontre avec un personnage des plus troublants. Thérèse n'est pas de ses héroïnes que l'on comprend tout de go et jusqu'au bout, elle restera complexe.

Esprit en décalage avec celles et ceux qui l'entourent, elle qui lit, fume, raisonne et critique ne parvient pas à rentrer tout à fait dans le moule qui est fait pour elle. Ce milieu bourgeois est asphyxiant, et, même si elle n'a pas un mot plus haut que l'autre sur son état de femme mariée, le mariage est une prison dans laquelle elle suffoque et nous étouffons avec elle. La maternité ne lui amène pas davantage de joie et j'ai trouvé audacieux d'aborder cette absence d'amour maternel.

On comprend que rien ne tout ça ne lui convient, qu'elle n'était pas faite pour cette vie, mais elle est difficile à approcher, mise à distance par sa froideur, son détachement. La torpeur qui envahit le roman rend d'autant plus marquante une certaine passivité de sa part. La première partie sonne comme un long monologue intérieur, tentant d'expliquer le pourquoi de son geste, mais il ressort de cette introspection peu à peu qu'il n'y a pas de réponse claire. Si réponse il y a, c'est celle d'une inadéquation avec son milieu, avec sa famille, d'une indifférence envers sa vie présente.
Il a fallu arriver à la seconde partie du roman, quand Bernard lui refuse brutalement le droit à la parole, pour réellement entrer en empathie avec ce personnage. On ploie sous le poids du regard familial, du conformisme, des apparences, du conservatisme. Ce n'est pas un portrait de grande criminelle, ce n'est pas un monstre : c'est une femme désespérée qui a tenté d'échapper à son milieu, de renouer avec une possibilité de vivre.

Ce roman ouvre diverses interprétations sur différents pans de la personnalité de Thérèse et, parmi les pistes possibles pour saisir sa discordance avec le monde qui l'entoure, ses amours nous ont donné à réfléchir tant il semble se dégager de ce récit des attirances homosexuelles qui se lisent entre les lignes. Entre sa relation avec Anne lors de leur adolescence (« son adolescence contre la mienne »), les temps passés cachées dans la palombière et certaines réactions lorsqu'Anne vit un amour de jeunesse avec un voisin, mais surtout lors d'un épisode de mi-rêverie, mi-délire, écrit de façon neutre, sans que l'on puisse le lire uniquement au masculin ou au féminin. Un temps où elle rêve de quelqu'un qu'elle seule connaît, de « ce corps contre son corps, aussi léger qu'il fût », « des bouches qu'elle avait chéri de loin »… Peut-être est-ce notre regard de 2023 ou peut-être était-ce bien là ? Certaines révélations sur la vie de Mauriac rendent l'hypothèse d'un alter ego bisexuel possible.

Ce roman s'est révélé plus riche que ce à quoi je m'attendais. Bien que ce mariage soit vécu comme une oppression, je n'ai pas pu purement et simplement blâmer Bernard. Certes, les passages où Thérèse focalise sur la présence envahissante dans le lit et ses mastications bruyantes rendent la cohabitation crispante ; la mentalité est assez frustre et pauvre intellectuellement, d'où des réactions parfois un peu ridicules et quelques répliques particulièrement insensibles. Néanmoins, lui aussi m'a semblé pris au piège par son milieu et sa famille, sous le joug d'une posture virile qui ne doute pas. Il est difficile de sortir des chemins tracés si rien ne vient provoquer le déclic.

Jusqu'à cette fin, douce-amère – tonalité parfaitement adaptée au roman –, qui m'a totalement satisfaite. C'est l'écho de quelque chose qui aurait pu être, tous deux regardant l'autre, l'écoutant. Tous deux doutant un instant. Tous deux devenant un tout petit peu plus humains. Un instant, une considération éphémère…

L'histoire de l'emprisonnement d'une femme dans son quotidien, dans une société qui nie les personnalités individuelles et lisse le tout sous une vacuité émotionnelle. le portrait d'un mal-être, d'une dépression qui ne dit pas son nom. L'acte criminel devient accessoire finalement : il n'était peut-être qu'un moyen de se faire entendre, là où toute parole était vaine, inaudible pour ses proches. Un roman bien plus intense et subtil que ce à quoi je m'attendais.
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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Qui est Thérèse ? Une femme mariée qui se révolte contre son entourage bourgeois, qui ne supporte plus son mari, trop conventionnel, terre à terre et un peu rustre, ni son existence qu'elle trouve morne. Elle rêve d'être indépendante, de pouvoir choisir les siens et non les subir. Elle finit par tenter d'empoisonner son mari, est acquittée grâce au témoignage de son mari qu'elle retrouve après le procès. Sa situation empire alors, ce qu'elle voulait fuir est démultiplié : elle est presque séquestrée, montrée avec son mari à la messe le dimanche. Pour son père, pour son mari, pour sa belle-famille seul compte le qu'en-dira-t-on. Elle est perçue par eux comme un monstre, alors qu'elle se sent simplement malheureuse et dans l'impossibilité de se faire comprendre de son entourage.
Elle n'établit pas de lien d'amour maternel avec sa fille, mais n'est-ce pas la faute de ses proches qui pendant toute sa grossesse ne la voyait que comme le moyen d'avoir un héritier, la rejetant d'autant plus en tant que personne. François Mauriac nous fait ressentir dans le détail les émotions et les sentiments de Thérèse, son écriture des états d'âme est très réaliste, ce n'est pas une rêveuse comme Emma Bovary, elle raisonne, elle réfléchit, ne sait pas comment elle veut vivre, mais sait qu'elle ne veut pas de cette vie-là, en occupant une place que d'autres lui ont assignée. Malgré tout c'est plus une analyse sociale que psychologique. Impossible de ne pas se demander qui, de cette société ou de Thérèse, est la plus criminelle ? Qui tue à petit feu et pratique la mort lente des esprits ?
La fin est curieuse, relativement ouverte, sans que l'on sache ce que Thérèse fera de son avenir. C'est peut-être ce qui m'a le moins plu.
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Après avoir été accusée de tentative d'assassinat sur la personne de son mari, Thérèse Desqueyroux, née Larroque, sort du palais de justice après avoir bénéficié d'un non-lieu. Sur la route qui la ramène chez elle et avant la confrontation avec son mari, elle se souvient de ce qui l'a amené à ce geste.
Je n'ai pu qu'être très touchée en lisant la profonde douleur que ressent cette femme enfermée dans un carcan familial qui lui sert de prison. Et quel style ! Quel plaisir de lire de belles phrases ! "Les êtres les plus purs ignorent à quoi ils sont mêlés chaque jour, chaque nuit, et ce qui germe d'empoisonné sous leurs pas d'enfants".
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Le week-end dernier j'ai pioché dans la bibliothèque de ma mère qui contient des milliers d'ouvrages, quelques vieux livres de poche, cornés et jaunis, de la fameuse collection « J'ai lu »…
Pour moi ce sont donc des « J'ai lu », jamais lu ! des « J'ai lu, à lire » quoi…
Sur le chemin du retour j'avais déjà dévoré la moitié de ce roman de Mauriac, auteur passé avec le temps, un peu au second rang…
Le pitch, vous le connaissez certainement : Thérèse Desqueyroux, mariée tôt , tente d'empoisonner son mari, un sylviculteur de province. Elle est sauvée de la condamnation par sa belle famille qui préfère héberger une criminelle chez eux, plutôt que de se voir exposée au scandale… dès lors la maison familiale sera la prison de Thérèse.
L'histoire n'a pas perdu de sa force, c'est une critique féroce de la petite bourgeoisie de province, étriquée, obnubilée par la bien-pensance, l'apparence et le quand-dira-t'on …
Par contre, j'ai trouvé le style un peu« vieilli »… Oups ! Je ne devrais pas dire ça d'un prix Nobel de littérature, crime de lèse majesté !
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Je retiens de ce roman que c'est le portrait d'une femme profondément déprimée et seule, enfermée dans son éducation et dans sa place dans la société : « inutilité de ma vie - néant de ma vie - solitude sans bornes - destinée sans issue. »

La première moitié du roman revient sur sa jeunesse, et les raisons qui l'auraient poussé à son crime. La seconde, sur son après-procès.

Notre héroïne est éprise de liberté et la voila dans les ornières « à la voie » d'une vie écrite pour elle.

C'est donc le récit d'une prise de conscience de l'inéluctable vacuité de son existence, de sa condition de femme dépendante de son mari (elle est riche mais ne peut disposer de son argent sans son mari), de l'importance des apparences (pour le clan de sa belle famille).

« Être sans famille ! Ne laisser qu'à son coeur le soin de choisir les siens - non selon le sang, mais selon l'esprit, et selon la chair aussi » .

Intéressant, à lire.
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Seconde lecture 25 ans au moins après la première. Je comprends maintenant pourquoi je ne m'en souvenais pas: parce que j'ai moins aimé que le Sagouin ou le Baiser au lépreux. Et puis cette Thérèse, rien à faire, je ne l'aime pas. Thérèse est une fille des Landes. Elle a la propriété dans le sang et elle a beau se croire plus intelligente que tout le monde, c'est une fille du pays. Elle accepte d'épouser Bernard pour agrandir ses terres, pour tenir son rang, pour être à sa place, même si on devine, en lisant entre les lignes, qu'elle est amoureuse de Anne, sa jeune belle-soeur. Quand cette dernière tombe raide dingue d'un beau gosse parisien, les rouages de la mécanique qui vont aboutir au drame se mettent en branle. Beaucoup de commentateurs sont horrifiés par le sort que la famille fait subir à Thérèse mais moi c'est plutôt elle qui me fait horreur: je la trouve hypocrite, cruelle, égoïste et orgueilleuse. du coup, je la plains mollement.
Thérèse Desquéroux est un roman ultra contemporain sur une femme qui ne pense qu'à son épanouissement personnel ("mais moi, mais moi, mais moi" s'exclame-t-elle deux fois), d'abord au sein de la famille puis autrement mais c'est aussi un roman très classique dans l'écriture, tout en suggestion et en retenue. On n'est pas chez Virginie Despentes ! C'est bien mais sans plus.
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Un classique,elu parmi les douze meilleurs romans du demi siecle tant la description du caractere de l'heroine est parfait et plein de justesse.Aucun mots inutile ni phrase en trop ici,chaque passage est au service de l'ensemble du roman.J'ai beaucoup aimé le talent de l'auteur pourcpeindte cette fresque sociale dure mais tres realiste.Un classique indémodable.
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