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Dès les premières pages, Val McDermid plonge le lecteur dans le vif du sujet. En provenance de Londres, Stephanie Harker doit subir un contrôle douanier approfondi à l'aéroport de Chicago où elle est en transit. Au cours des quelques minutes où elle le laisse seul, Jimmy, le petit garçon de 5 ans qui l'accompagne, est enlevé par un inconnu, à quelques mètres d'elle, sous ses yeux. La panique de Stephanie, la vérification de ses allégations, la confusion des services de sécurité font perdre de précieuses heures dans le déclenchement de l'Amber Alert, plan « alerte- enlèvement » en vigueur aux Etats-Unis. L'enquête est confiée à Vivian McKuras, jeune et ambitieuse inspectrice du FBI, qui voit dans cette affaire l'opportunité de prouver ses compétences. Vivian et Stephanie partagent un bureau aéroportuaire, tandis que la lourde machine policière se met en branle pour retrouver Jimmy dans un coin inconnu du vaste continent nord-américain. Vivian recueille le témoignage de Stephanie, lui demande de fournir tous les éléments susceptibles d'orienter les recherches vers un possible suspect. Val McDermid révèle une fois encore son expérience et son talent à travers une construction romanesque ingénieuse et sophistiquée, élaborée sur deux temps et sur deux axes : le présent et la recherche de Jimmy, à partir de Chicago, le passé et l'histoire de Stephanie, en Grande-Bretagne. En alternance, les chapitres vont se répondre, se compléter et boucher lentement les innombrables trous qui font défaut au lecteur pour appréhender l'intégralité de l'histoire de l'enfant et de la jeune femme. Stephanie est nègre tout en étant blanche de peau. Elle écrit à la demande de son éditeur avide de scoops et de bons coups éditoriaux, des biographies enjolivées et/ou savamment scandaleuses sur des stars de la télé-réalité, des joueurs de foot, and so on... Parmi eux, Scarlett qui a participé à une sorte de Koh Lanta anglais, un jeu basé sur l'élimination des autres concurrents, où l'on demande aux participants d'être plus bêtes qu'ils ne le sont : “Les douze candidats retenus doivent être citadins et dépourvus de sens pratique. Ils sont conduits sur l'île en bateau où ils doivent se mettre à l'abri et trouver de la nourriture. L'émission est divertissante en cela qu'elle montre des citadins désoeuvrés sur une île déserte” (p. 65). Scarlett a sauté sur cette occasion pour sortir de son milieu pauvre, violent et alcoolisé, sans espoir, sans perspective d'avenir puisqu'elle appartient à cette sous-classe nouvelle créée par Thatcher, qui a détruit la fraternité qui unissait jadis la classe ouvrière (p. 195). Avec un talent manipulateur qu'on ne peut que saluer (en début de roman) puisqu'elle piège les piégeurs à leur piège, elle a su se rendre aussi conne que les producteurs de l'émission l'espéraient. Entre les deux femmes, Stephanie et Scarlett, malgré leurs différences culturelles et sociales, une amitié naît, imprévue mais profonde. C'est le début de l'intrigue alambiquée inventée par Val McDermid. Pour connaître cette auteure, je suis obligée d'admettre que ce roman n'est pas son meilleur parmi ceux que j'ai déjà lus. Seuls son talent, son écriture addictive qui empêchent de poser le bouquin avant son épilogue, parviennent à faire admettre au lecteur certaines coïncidences, qui chez un confrère moins doué passeraient pour des incohérences, la cousine sosie par exemple, mais il y en a d'autres, à découvrir. Malgré cette minuscule restriction, et parce que globalement j'apprécie beaucoup le travail effectué par Val McDermid qui n'a jamais renié ses origines minières (cf. L'excellent Sans laisser de traces), parce qu'elle a toujours défendu les femmes et combattu toutes les violences dont elles sont les victimes, je lui accorde bien volontiers le droit à une infime baisse de forme qui mérite quand même, selon mes critères subjectifs et surtout en l'occurrence affectifs, 4 ****. + Lire la suite |