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En lisant les premières pages je me suis dit : « Oh non, de la Hard Science : cela va encore être long, lent et chiant, en plus d'être prétentieux et incompréhensible... » Oui mais non, Larry Niven fait tout son possible pour être accessible au plus grand nombre en mélangeant Hard Science et New Wave, Space Opera et Planet Opera ! Au lendemain des guerres entre humains et kzintis nous découvrons une posthumanité blasée à travers les yeux de Louis Wu, un touche-à-tout tout aussi blasé que l'ont pourrait qualifier d'aventurier et qui entre autocuisine et autodoc fête sans joie son 200e anniversaire. Au cours de la grosse fiesta qu'il a organisée il est contacté et engagé par un Marionnettiste de Pierson pour une mystérieuse et périlleuse mission d'exploration. La curiosité un vilain défaut, et Louis Wu ne manque pas d'y succomber ! Par bien des aspects Larry Niven est un héritier de Jack Vance, et il remplace l'exoplanète exotique par un Big Dump Objet : l'Anneau Monde qui représente trois million de fois la surface de la Terre fonctionne peu ou prou comme une Sphère de Dyson (l'écrivain SF s'inspire du physicien et mathématicien Freeman Dyson qui s'inspirait d'avantage de l'écrivain SF d'Olaf Stapledon que du physicien John Desmond Bernal... La vie est belle car la boucle est bouclée ! ^^ ). https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/40/Ringworld.jpg Arrivés à destination Louis Wu et ses compagnons se crashent sur l'Anneau Monde et en cherchant un moyen d'y échapper croisent différentes civilisations qui ont régressé au stade préindustriel : les supraconducteurs bases de toute civilisation avancée ont disparu du jour au lendemain il y a plus d'un millier d'années, et faute de métaux et d'hydrocarbures elles se sont retrouvés piégées sur l'Anneau Monde... Et après une mise en place très Space Opera , on reprend les classiques du Planet Opera et le récit prend la forme d'une expédition de sauvetage confronté aux nombreux défis de l'ethnologie... La grande force du récit c'est la dynamique de groupe de l'expédition qui nous offre un paquet de situations et de dialogues très drôles qui m'ont donné l'impression d'être dans une version hippie de "Star Strek" : Nessus est manipulateur et paranoïaque (on dirait un Romulien de "Star Strek", et il a peut-être un peu inspiré le personnage d'Alcantara dans la manga "Aqua Knight" de Yukito Kishiro ^^), herbivore ne ressemblant à rien du tout avec ses 3 pattes, ses 2 têtes et son sexe indéterminé, Chmeee / Parleur-aux-animaux est un guerrier polyglotte (on dirait un Klingon de "Star Strek", et il a sans doute beaucoup inspiré le personnage Monsieur Worf dans la série éponyme ^^), carnivore ressemblant à un chat orange carnivore de 2m50 avec des oreilles et une queue de rat, Teela Brown qui n'a jamais connu la peur, la douleur ou la peine met tout le monde en danger par son comportement autant insouciant qu'inconscient, et bien sûr Louis Wu se demande bien ce qu'il est venu faire dans ce gros bordel... Mention spéciale à la confrontation avec les Tournesols Esclavagistes, cauchemar végétal qui semble échappé d'un labo de la mégacorpo Monsanto, Louis Wu et Chmeee piégés dans un filet magnétique antiémeute, l'opposition entre Chiron le sage et Nessus le fou (remember la mythologie grecque ^^), ou le running gag du Gambit de Dieu ^^ Le roman appartient à son époque en étant fortement marquée par les réflexions du Club de Rome* nées en 1968 : explosion démographique, gestion des ressources, espace vital mondial, mais aussi contrôle des naissances, pollution thermique, épice de longévité... (après Larry Niven n'est toujours au niveau : en 1970 il maîtrise mal tout ce qui est contraception, donc les seules solutions semblent être l'abstinence ou la stérilisation) Je pense beaucoup de bien de ce tome 1 paru en 1970, qui en laissant moins de questions en suspens aurait parfaitement pu fonctionner comme un stande alone. Malheureusement il y a quand même des trucs qui tirent l'ensemble vers le bas : - alors oui la révolution sexuelle et passée par là et c'est décoincé du cul, mais cela reste presque aussi sexiste qu'un Jack Vance bas du front même si on prend la situation au 2e degré (avec ces espèces où seuls les mâles sont dotés de l'intelligence)... Les femmes femelles semblent n'être que des éléments d'hygiène et de loisir pour les mâles machistes : concrètement Teela Brown ne sert que d'agrément à Louis Wu (même si ce dernier se demande s'il n'est pas comme ses compagnons et la réalité toute entière esclave de son facteur chance qui aurait remplacé la main immanente du Destin), et tous les indigènes de l'Anneau-Monde la prenne pour une esclave sexuelle (et pourrait-on les détromper ?)... Et quand Louis Wu rencontre un femme du peuple des Bâtisseurs qui contrôle l'Anneau Monde, c'est forcément un péripatéticienne qui essaye de l'asservir par le sexe... (d'ailleurs on a toute un réflexion sur l'addiction avec le TASP, arme non létale provoquant une dépendance, avant d'aborder une réflexion sur l'asservissement par le sexe) - les tenants et aboutissants de l'intrigue sont mal amenés et mal exploités - au final on ne retrouve pas le plaisir de la ligne droite car le récit alterne sans prévenir récit picaresque léger et explications Hard Science lourdes (donc chassez le naturel il revient au galop vu que lesdites explications Hard Science nécessitent parfois un master en sciences pour être compréhensibles), avant d'aborder le problème des Deus ex Machina vanciens qui ici ressemblent à de fausses épiphanies à la Docteur House et gâchent la fin qui en devient décevante (les personnages ont les réponses, ou les ont trouvées, mais garde les informations pour eux et nous laissent dans le schwartz, du coup elles déboules un peu n'importe quand et c'est désagréable) - Argh, il aurait eu tellement mieux à faire sur le couple Teela Brown personnage de SF / Chercheur personnage de Fantasy... J'imagine sans peine le truc coolissime que Roger Zelazny ou l'un de ses héritiers aurait pu nous concocter sur le sujet ne mélangeant et croisant les genres de l'imaginaire ! Stylistiquement ce n'est pas de la haute littérature, mais le roman fascinant par son imagination a réalisé le Grand Chelem en remportant les prix Hugo, Locus et Nebula (on sent la grosse rage de Norman Spinrad et de ses potes bobos hipsters), son succès fut mondial, son influence sur la SF immense, mais en France on parle de daube réalisée par un tâcheron sans ambition et sans imagination... Encore un coup des cultistes de Gérard Kein, qui le haïssent car il l'ont catégorisé à droite parce que sous Reagan il a travaillé avec son mentor Robert Heinlein sur le projet Guerre des Etoiles (alors qu'il a été l'un des opposant les plus virulents à la Guerre du Vietnam 15 ans plus tôt). du coup il a fallu attendre la naissance des éditions Mnémos pour qu'il soit à nouveau traduit à nouveau en France, ce qui nous laisse orphelin de la majeur partie de sa bibliographie (il a écrit une quinzaine de cycle, dont une série sur les guerres Humains / Kzintis et une reprise de la légende de Beowulf !). D'ailleurs pour prendre conscience les dégâts incommensurables pour la SFFF en France, je je relaie le réquisitoire d'Alain Dorémieux, l'infâme nabot à solde du teigneux Gérard Klein (se piquer d'intellectualisme pour écrire de pareils brûlots haineux, il faut oser : à côté d'eux, Napoléon c'est un playmobil dans un évier !) : « Ce livre est infantile, inutile, illisible, insupportable, interminable, indéfendable, indécrottable, incommensurablement imbuvable et indissolublement imbécile. Et j'ajouterai, pour être objectif ( ? ? ?), qu'il a reçu en 1971 le Hugo du meilleur roman de l'année aux Etats-Unis. » Mais laissons les rageux à leur rage (et s'ils pouvaient rager uniquement entre eux ça nous ferait des vacances)... Larry Niven fut repris par John Varley, Iain Banks, Laurent Genefort, Michael Marrak, Juan Miguel Aguilera, Terry Pratchett, et comme nous appartenons tous à une culture transmédia je me dois de mentionner qu'il a très fortement inspiré les séries télé "Star Strek", "Babylon B", "Stargate", "Farscape", mais aussi les jeux vidéos "Wing Commander" et "Halo", le JdR arcanepunk "Planescape" et le CCG érotique "XXXenophile"... Du coup je recommande cet ouvrage à tous les amateurs des littératures de l'imaginaire pour découvrir une oeuvre pionnière qui a laissé un héritage à l'image de son Anneau Monde : trop grande pour être mesurée ! * le Club de Rome existe toujours de nos jours, mais de son propre aveu il est devenu inaudible car blacklisté par les médias prestitués aux ordres des grosses entreprises et des grands gouvernements qui ne veulent aucunement des changements qui pourraient gêner le Big Business et déranger le Veau d'Or (une taxe sur le sucre pour les consommateurs oui, des normes pour contrôler l'ajout de sucre dans tout et n'importe quoi par les producteurs NON ; une taxe diesel / essence pour les particuliers oui, un taxe diesel / essence pour les camions et les bateaux NON, une taxe sur les déchets oui ; des normes sur cette connerie de suremballage et cette saloperie d'obsolescence programmée NON) + Lire la suite |