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sur 412 notes
Malgré l'attrait de lever le voile de mon ignorance concernant le poète chanté par Ferrat, reprenant les textes d'Aragon

« Je pense à toi Desnos, qui partit de Compiègne,
comme un soir en rêvant , tu nous en fis récit,
accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie,
là-bas où le destin de notre siècle saigne »

malgré l'intérêt pour la plume magistrale de Gaëlle Nohant, j'avoue avoir eu des craintes pendant les 100 premières pages. C'est encore une fois mon inculture qui en est responsable, car il est difficile de s'accrocher à un récit quand ni les noms, ni les lieux ne sont évocateurs. Bien sûr j'ai entendu parler d'André Breton, mais bien d'autres célébrités croisées dans ces pages, et qui arpentent des rues inconnues étaient pour moi juste des noms plaqués au sein des phrases.

Heureusement la persévérance paie, et lorsque l'Histoire est venue hanter l'histoire, c'est avec un grand bonheur que j'ai pu combler mes lacunes et peut-être un peu mieux comprendre qui fût Robert Desnos. Et de revivre en mots cette période troublée qui va du Front populaire, à la libération des camps de la mort (avec un peu d'effroi aussi, si on ose établir un parallèle avec l'actualité de ce début de 21è siècle). Il est étonnant de constater à quel point les proches de Robert Desnos, sont aussi entrés dans la légende (Jean-Louis Barreau, Antonin Artaud, Prévert…)

C'est superbement écrit, très documenté, et l'on perçoit l'implication profonde de l'auteur pour restituer la biographie du poète en un hommage vibrant.
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Il parait " qu'en vieillissant les hommes pleurent". Comme je suis une vraie éponge, je m'imprègne, j'absorbe tout ce que je vois, entends et bien sur lis, et à la fin mes glandes lacrymales s'ouvrent.
Comment rester insensible à l'écriture de Gaëlle Nohant et à la " Légende d'un dormeur éveillé" qu'était Robert Desnos.
La vie du poète comme si vous y étiez, et quelle vie.
Tout commence en 1927, premier acte de résistance et de désobéissance face à un André Breton plutôt autoritaire, et son exclusion du mouvement surréaliste.
Comment décrire le Paris des années folles de Desnos ? le monde artistique semble s'être donné rendez-vous à Paris pour oublier la boucherie que fût 14-18. Prévert, Aragon, Eluard, Fujita, Hemingway….
La vie bohème de Montparnasse où l'alcool et le jazz coulent à flots. On dort peu, on se refait un monde plus poétique.
En 1936 l'assassinat de Garcia Lorca par la milice franquiste va réveiller Robert et ses ami(e)s à la dure réalité de l'époque, rien n'est jamais gagné surtout pas la liberté.
" Légende d'un dormeur éveillé" m'a permit de découvrir un autre univers, car on apprend beaucoup avec ce roman.
Il est difficile de parler de Robert Desnos sans évoquer Youki, madame Fujita. Celle qui fût sa muse, sa sirène, sa femme fatale.
" J'ai rêvé tellement fort de toi
J'ai tellement marché, tellement parlé,
Tellement aimé ton ombre,
Qu'il ne me reste plus rien de toi"..
Vous l'aurez compris ce livre de Gaëlle Nohant " Légende d'un dormeur éveillé" est une merveille de douceur.
" Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête,
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Une fourmi trainant un char
plein de pingouins et de canards,
ça n'existe pas, ça n'existe
une fourmi parlant Français, Latin et Javanais
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Eh ! pourquoi pas".

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« Légende d'un dormeur éveillé » : qu'il est beau ce titre ! Je l'avais retenu à la fois pour la contradiction entre ces deux termes – dormeur et éveillé - et son côté esthétique. Mon intérêt s'était ensuite porté sur Desnos dont j'ignorais la biographie. Après avoir rédigé mon billet sur le Bureau d'Eclaircissement des Destins de Gaëlle Nohant, @Sabine59 m'a incitée à me diriger vers ce très beau récit sur Desnos et je l'en remercie sincèrement.

J'ai tout de suite senti, dès les premières pages, l'attraction que l'auteure ressentait pour Desnos. Je ne crois pas m'avancer en présageant qu'elle a écrit là son plus beau livre. Elle s'est laissée guidée par l'attachement qu'elle a ressenti très jeune pour ce poète. de surcroit, son écriture est en parfaite symbiose avec le récit, elle lui sied comme un gant de velours. Elle a choisi la forme romanesque pour permettre au plus grand nombre d'entrer dans la vie de Desnos et c'est une réussite. Ce livre est traversé par un souffle épique dans un style étourdissant, au lyrisme enchanteur.

Je ne peux qu'apprécier le texte, ignorant l'histoire en détail du poète, je ne peux porter un jugement critique sur le fond mais j'ai été fascinée par la beauté et la sensibilité qui émane de la forme : « qu'importe le flacon pourvu qu'on est l'ivresse ».

Si l'auteure s'est autorisée la forme romanesque, elle ne s'est pas écartée des sentiers tracés par Anne Egger et sa biographie sur les surréalistes ni de la somme de ses sources d'inspiration qui sont impressionnantes. Portée par sa passion pour le poète, elle a travaillé son récit après avoir étudié longuement les écrits, les documentaires. Elle a eu l'ingénieuse idée de semer de jolis extraits de poèmes qui viennent agrémenter à bon escient, les chapitres. Elle dépose des petits cailloux que l'on prend plaisir à savourer, comme pour laisser une trace indélébile dans nos mémoires de lecteur.

Alors je me suis laissée téléporter par ce récit étourdissant, dans les années vingt, dans ce Paris du 4ème arrondissement que je connais bien, où j'ai suivi Desnos et Alejo Carpentier, ou bien à la Coupole ou La Rotonde. J'ai partagé la table et le vin des surréalistes, totalement envoûtée par les dialogues enflammés. Je me suis fait un film portée par l'écriture visuelle de l'auteure, une véritable plongée dans ce monde de la nuit où j'ai pu croire entendre la voix éraillée des chanteuses de jazz. J'ai accompagné Desnos et Crevel dans leurs tourments amoureux, terminé la nuit dans la clarté lunaire d'une boîte à Montparnasse, ressenti leurs souffrances comme celle de Crevel, que de détresse en lui ! Quant à Robert, l'auteure nous invite à sonder le mystère de son univers, poète, conteur, journaliste curieux de tout, généreux, amoureux fou de la dispendieuse Youki aux sautes d'humeur éprouvants, se désespérant d'amour pour Yvonne Georges ce qui lui faisait écrire « Je ne serai jamais bien aimé ». Question : mais le voudrait-il, que ferait-il d'une existence lisse ? Excommunié par le sectaire André Breton, Robert qui n'autorise personne à lui dicter sa conduite, l'affronte avec férocité. Ils sont impitoyables l'un envers l'autre. « La nuit surréaliste s'éloigne dans une poussière d'étoiles mortes et d'amis disparus ».

Je reconnais que je commençais à m'essouffler, lassée des querelles entre surréalistes lorsque le récit a pris une nouvelle tournure. Les années trente voient le jour et avec elle, apparaît un climat de tensions délétères dont l'origine s'appuie sur la crise de vingt neuf, annonçant les évènements et les manifestations du Front Populaire, l'antisémitisme, engendrant ainsi de vifs affrontements dans les rues de Paris.

Des discussions passionnées enflamment le 45, rue Blomet, réunissant indépendamment des uns et des autres, et les dissidents « surréalistes » et les amies et amis fauchés comme les blés, toujours sur le fil ténu des sentiers les plus malaisés de cette vie de Bohème. On y croise Aragon, Prévert, Man Ray, Henri Jeanson, Eluard, Soupault, Cocteau, Théodore Fraenkel, André Masson et tant d'autres. Entre les sommeils hypnotiques, les dialogues féroces, les restes de nuits vécues dans la brume des opiacées, il règne une effervescence intellectuelle qui donne naissance à des talents dont nous avons hérités des écrits aujourd'hui. C'est un récit époustouflant qui nous emporte dans ce 20ème siècle si tourmenté, si éruptif, si brûlant et glacial à la fois, si monstrueux. La menace totalitaire est partout. Des amis disparaissent, les périls s'accumulent, Desnos abandonne ses positions pacifistes pour entrer en résistance. Il s'expose de plus en plus jusqu'à son arrestation par la Gestapo.

Je suis admirative du travail accompli par Gaëlle Nohant, elle aurait pu trébucher tant la narration demande une construction minutieuse, ne tolérant aucun écart dans la chronologie et l'exactitude historique. C'est un pavé de cinq cent trente pages qui relate le courage d'un homme, un passionné, qui affrontera le nazisme et qui y laissera la vie !

Ce serait un sacrilège de ne pas évoquer la dernière partie du livre où l'auteure laisse Youki (Lucie Badoud) s'exprimer à travers les pages de son journal. S'il n'y avait qu'une partie de ce récit à lire, à mes yeux, c'eut été celle-ci. C'est très beau, sensible, émouvant, poignant. L'auteure a su, sans conteste, se substituer à cette femme qui tente d'obtenir, par tous les moyens des nouvelles de son compagnon, Robert, cette Reine de la nuit qui fut un temps, estimait qu'aucune personne n'était en droit de prétendre à l'exclusivité d'un amour, elle qui regrette aujourd'hui, ses attitudes d'hier.

« J'ai rêvé tellement fort de toi, J'ai tellement marché, tellement parlé, Tellement aimé ton ombre, Qu'il ne me reste plus rien de toi. Il me reste d'être l'ombre parmi les ombres, D'être cent fois plus ombre que l'ombre, D'être l'ombre qui viendra et reviendra dans ta vie ensoleillée ».


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Superbe, scintillant, libre ! Un roman magnifique pour ma première lecture de 2018 !

Gaëlle Nohant m'a comblé dans la découverte de cet homme que je ne connaissais pas. Uniquement par le nom de l'auteur de la poésie "La fourmi" que j'ai apprise à l'école primaire et qui est toujours ancrée dans ma tête largement 30 ans plus tard.

Gaëlle Nohant est née la même année que moi (1973) c'est sans doute par ce biais de cette poésie animalière que Robert Desnos est rentré dans sa vie.

Si l'entrée dans ce livre fût un peu difficile à la base je me suis très vite laissée guider par l'auteure et Robert Desnos dans le Paris des années 30.

On en croise des célébrités, c'est un véritable foisonnement culturel. On se promène dans le Paris d'avant guerre dans le Paris de la nuit, dans le Paris des ateliers d'artistes des bars et autres cabarets .

Il y a un brassage joyeux et parfois mondain la nuit dans Paris.

Robert Desnos participe de ce mélange joyeux et se construit en poésie.

Gaëlle Nohant est tombée amoureuse de ce poète, j'en suis persuadée !

L'auteur nous permet vraiment de découvrir cet homme dans cette période foisonnante et troublée nous plongeant ainsi au coeur de l'histoire dans un milieu particulier.

La seconde guerre mondiale va mettre à mal toutes les belles libertés prônées par les artistes de tout horizons.

Au nom de la liberté et fort de ses intimes convictions d'égalité entre les hommes Robert Desnos s'engagera dans la Résistance. Il en paiera le prix fort et sera déporté, il mourra le 8 juin 1945 à Terezin.

La quatrième partie de ce livre est un véritable condensé émotionnel. Gaëlle Nohant prends dans cette partie la parole de Youki la principale muse et amour de Robert Desnos. Comme si l'horreur vécue par le poète ne pouvait pas engendrer de mots et pourtant le poète lui trouvera refuge dans la poésie.

Gaëlle Nohant dit : "Écrire ce roman tenait du numéro de funambule, il fallait demeurer sur le fil ténu de la fiction tout en demeurant la plus fidèle possible à la vérité de l'histoire et des vies de tous les protagonistes. Inventer entre les clous, remplir les blancs, rejoindre la vérité par le biais de la fiction, ou en tout cas une vérité possible. Ce Robert Desnos est le mien, il ne saurait se substituer au vrai ni en épuiser le richesse, mais je veux croire qu'il lui ressemble."

et bien moi je dis Bravo, je trouve votre numéro de funambule absolument réussi.
Il m'a permis de rencontrer un homme bon et un poète généreux et libre qui a toute mon admiration.

Avec respect pour cette homme vous avez su lui redonner la parole, le refaire vivre auprès de vos lecteurs. Un portrait magnifique et scintillant !

" Légende d'un dormeur éveillé " est un livre qui restera en moi longtemps.
J'ai fait là une très belle rencontre avec cet homme,
ce poète doué pour vivre et pour aimer
que vous m'avez fait aimer à mon tour.
Un homme éperdu de liberté, d'amour et d'amitié.
Un poète qui fait danser les mots pour couvrir les maux !
Un homme bon et généreux.

Merci Gaëlle Nohant, oui sincèrement merci pour cette belle rencontre.


Lien : https://imagimots.blogspot.f..
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Le roman commence à Cuba en 1928.
Robert Desnos, en pleine jeunesse, revient à Paris avec un ami.
Robert est poète sans le sou, vit à Montparnasse, fréquente les cabarets, les surréalistes.
De nombreux noms célèbres comme André Breton, Aragon et j'en passe...parsèment le livre.
André Breton, meneur du groupe des surréalistes nous est décrit comme très autoritaire, rejetant les idées de ceux qui ne pensent pas comme lui.
Robert, poète avant tout, aime la vie nocturne. Il a la faculté de somnoler sur une chaise à tout moment. de là, le titre certainement "Légende d'un dormeur éveillé".
Un poète amoureux d'Yvonne, une danseuse atteinte de tuberculose et accro à l'opium. Robert en consomme aussi mais l'auteure nous montre qu'il ne veut succomber à aucune dépendance : liberté avant tout.
Il tombe amoureux de Youki, c'est encore une autre histoire, sa grande histoire d'amour.
Le roman change de ton, de prise de conscience après les années trente quand Robert va réagir contre le totalitarisme et l'intolérance montante.
Je le connaissais surtout pour ses poèmes dédiés aux enfants. Il les a écrits pour égayer les jours d'un enfant juif empêché de sortir de chez lui.
Robert Desnos mourra pour cette liberté qui l'a tant animé.
Gaëlle Nohant écrit merveilleusement bien, avec beaucoup de poésie elle aussi.
Elle nous livre en caractères gras, de courts extraits des poèmes de Robert Desnos, un homme très vrai, attachant, et surtout immensément humain.
Ah! J'oubliais, la fin est extrêmement déchirante car il les a vécues ces atrocités dans un camp notre poète et dans ses vers, on y lit une grande tristesse et une grande dignité. Assez dur pour moi, je dois dire mais nos semblables ont vécu de pareilles barbaries.

Challenge pavés 2018.
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Voici une biographie romancée, engagée, bien construite, parfaitement documentée et travaillée, riche d'énergie, de la vie tumultueuse --il a vécu mille vies---sans jamais se départir de sa soif de liberté ---- de Robert-Desnos, parsemée de ses plus beaux vers.
Je tiens à dire que j'ai eu beaucoup de difficultés à entrer dans ce livre--- un peu trop scolaire --au début ...(plus une panne internet inopportune pour poster pendant plusieurs jours.)

Ce récit offre à notre curiosité une plongée magistrale ressentie et re- transcrite par l'auteur de telle façon que l'on a l'impression qu'elle a vécu à l'époque !
Nous nous immergeons au coeur de la création artistique avec une longue liste d'artistes qui, parfois, se détestent , de Montmartre à Montparnasse ..
Notamment Andre-Breton, engoncé dans ses convictions politiques, qui entend "régenter" les surréalistes ..
Il attaque Robert-Desnos d'une façon cinglante : il aurait renié le surréalisme et serait "vendu" à la presse Bourgeoise pour les articles qu'il publie .

Petit à petit Robert- Desnos s'éloigne du groupe surréaliste et rejoint Queneau, Jacques Prevert , Masson et Bataille aux Deux- Magots .



Ce foisonnement intellectuel, cette brillance sont parfois - souvent - gâchés -par un flot d'alcool et de paradis artificiels - opium et autres addictions .
Puis on revit la période amicale, créatrice , lumineuse entre des artistes créant un monde bien à eux, pur , dégagé et éloigné des contingences tels que J.L Barrault et sa Madeleine, que le mime passionne, Man-Ray, Antonin-Artaud, l'écorché vif, Alejo Charpentier ........

Las! Les batailles surréalistes ont fait long feu!
La troisième partie, -la plus intéressante - conte avec justesse, profondeur, lucidité cruelle , la montée des périls dans un Paris qui grelotte, immobile sous son vernis de gel ;

Comment résister , combattre dans cette France cynique , celle des arrangements et trafics sous le Maréchal ?
Sous tutelle et domination Allemande ?
Je n'en dirai pas plus ........
"Les robes légères des femmes bruissent d'une liberté clandestine ";
"Si au moins, je n'écris pas ce que je pense, je pense à tout ce que j'écris ".........
Sauf à écrire mon admiration pour la belle prose poétique , envoûtante de l'auteur .
A l'aide d'une plume talentueuse les personnages prennent vie et créent un tableau fascinant, chaleureux et vivant de cette époque ! Une atmosphère !
Un hommage fort rendu à un grand poéte attachant et sensible , mort en déportation, aux convictions fortes , aux amours fantasques, surtout pour Youki, sa muse, l'époustouflante, frivole et volage, femme amoureuse......
Cet homme , Libre- tour à tour - écrivain, chroniqueur radio,poéte, critique de cinéma, résistant de la première heure -.
Ceci n'est pas une biographie linéaire ni sage , plutôt un hymne à la création , aux passions, à la culture -à la politique et à l'histoire (, la petite et la Grande) . La fin douloureuse , poignante, très forte en émotions , réussie , sous forme de journal de Youki , nous transforme en "rêveurs éveillés ."
J'avais lu en 2015 "La-part-des-flammes " avec bonheur, du même auteur .
"C'est un matin souffreteux qui tousse entre les nuages et respire sous un couvercle de brume ..."
Attention, 520 pages !
Ce n'est que mon avis, bien sûr !
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Que j'ai aimé ce livre! Le roman flamboyant d'une vie, celle de Robert Desnos. Oui, un roman, car il est au-delà d'une" simple" biographie: après de longues recherches et avec des faits avérés en toile de fond, l'auteure réinvente le poète,dans un style poétique et saisissant de réalisme. C'est "son" Robert Desnos. Qui devient le nôtre aussi...

On plonge d'abord dans le Paris artiste des années vingt, ces années folles et trépidantes , aux nuits alcoolisées où on refait le monde, même si on a le ventre vide. On déambule en compagnie du poète aux yeux d'huître dans le quartier de Montparnasse. On y croise bien sûr les surréalistes et leur tyrannique chef de file, André Breton, dont Desnos ne supporte plus les diktats. Il s'en éloigne.

Car c'est un électron libre, aux réparties acerbes qui lui valent de se faire des ennemis, un être qui s'enflamme pour ses idées,qui défend la liberté des opprimés .Il est à la fois timide, maladroit, et prompt aux bons mots qui font mouche. Il s'enthousiasme pour les émissions radio qu'il anime, invente des formules publicitaires, rédige des articles, tout en écrivant des poèmes...

Mais c'est avant tout un homme amoureux, prêt à toutes les faiblesses pour les deux femmes qui hanteront sa vie: Yvonne, l'insaisissable chanteuse minée par la tuberculose et Youki, la femme de Foujita, papillon de nuit fantasque ,si difficile à retenir.

J'aimais déjà beaucoup le poète, il m'a toujours touchée. L'homme m'a bouleversée. Généreux envers ses amis, passionné , visionnaire, au monde onirique fascinant .Fragile aussi. Au destin si poignant...

Merci à Gaëlle Nohant de m'avoir permis de m'approcher un peu plus de lui...C'est un hommage vibrant et inspiré.
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Tour de force que ce dernier roman de Gaëlle Nohant: s'attaquer à la vie de Robert Desnos, figure du surréaliste, poète, amoureux, ami fidèle et noceur, journaliste et résistant. L'homme, un peu oublié derrière sa bibliographie, possède la stature de héros romanesque dans une vie trépidante et stoppée en plein vol.

Voici donc un (très) gros pavé de biographie joliment romancée, fort documentée et hautement littéraire par la plume poétique et inspirée de la romancière. Elle nous livre un homme dans son humanité et une époque reconstituée de façon très historique, par une galerie de personnages réels et souvent connus de la postérité, replacés dans leur temps. ( j'ai passé un temps fou à consulter les sources Wikipédia!)

Suivre les pas de Desnos, c'est vivre sa vie amoureuse compliquée et sa création artistique foisonnante. C'est aussi accompagner la société française de l'entre-deux-guerres, sa gaité des Années Folles, ses soubresauts politiques et économiques, son effervescence artistique, sur fond de bruits de bottes nationalistes.
C'est, pour ma part, le meilleur du livre, car il faut parfois maintenir ferme la barre pour ne pas couler sous l'avalanche de relations amicales ou amoureuses du poète et sa vie festive frénétique. J'avoue alors avoir trouvé le tout un peu long, pêchant par excès de détails.

La dernière partie est vraiment la plus touchante, dans la dramaturgie de l'occupation et de l'engagement de résistance. L'homme de lettres s'efface devant l'homme de liberté et de justice, et la conclusion par le journal de son épouse évite la narration de l'univers de camps de concentration. Choix tout à fait judicieux.

Excellente manière de redécouvrir Robert Desnos et de lui rendre un hommage lumineux justifié.

Rentrée littéraire 2017
Sélection du grand prix des lectrices de ELLE 2018
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J'ai perdu un ami ... Je le ne connaissais peu ou pas avant d'ouvrir le roman de Gaëlle Nohant , c'est chose faite, un peu tard me direz vous mais qu'importe ne vaut il pas mieux tard que jamais? Légende d'un dormeur éveillé est un roman biographique consacré à Robert Desnos, un homme hors du commun s'il en est! Il a trouvé en Gaëlle Nohant une inconditionnelle de l'homme et de sa plume. le récit commence en 1925 à son retour de Cuba et nous amène au bout du voyage en 1945. Une biographie certes romancée mais excessivement bien documentée qui nous parle d'un homme, d'un poète, journaliste, romancier , d'une époque foisonnante, du Paris des lumières, des années folles , des surréalistes . et puis de Youki , Youki et toujours Youki , la femme, la muse, la Sirène de Desnos . Liberté, amour, amitié, fidélité, valeurs incontournables et incontournées.
Un vibrant hommage qui se lit au rythme des ballades la nuit dans Paris en compagnie des poésies de Desnos . Une belle rencontre !
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Tableau vivant du paris littéraire surréaliste, « Légende d'un dormeur éveillé » est un livre passionné, une lecture exigeante.
Comme si elle s'était fondue dans ces années de liberté et d'urgence, où la création artistique bouillonnait, où la folie des hommes attisait le pire et le meilleur, Gaëlle Nohant nous offre un texte sensible et nerveux où l'émotion affleure partout, tout le temps.

Il ne s'agit pas d'un livre que l'on peut prendre pour quelques minutes, qu'on feuillète dans une salle d'attente ou entre deux arrêts de bus, non. Il faut avoir du temps devant soi pour encaisser la puissance du texte. Un peu comme ces promenades en bord de mer, face à un océan déchainé : le paysage vous coupe le souffle et vous devez batailler contre le vent, mais comme cela en vaut la peine !
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