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EAN : 9782070388042
88 pages
Gallimard (24/02/1993)
3.95/5   33 notes
Résumé :
Le roi dit : Il est possible que les oeuvres d'art soient le fruit des vengeances. Un de mes compagnons s'est peut-être vengé malgré l'interdiction que je lui avais faite [...]. Le désir nous affole tous les jours et sa carence nous abandonne aux ombres. Et il est vrai que les ombres sont bleues. C'est pourquoi je suis venu avec vous jusqu'ici.
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Dans le style de Tous les matins du monde, qu'il précède de peu dans la chronologie bibliographique de l'auteur, La frontière est un court roman aux allures de conte. Tous les ingrédients y sont présents pour en faire une lecture des plus agréables : inspiration historique, passions, vengeances, concision, et un style d'écriture bien reconnaissable fait de phrases courtes, sentencieuses et définitives, souvent mariées au subjonctif, ce qui confère à ce texte des accents classiques complètement en phase avec l'histoire.
L'action se passe au Portugal, dans les années 1660. Le Portugal jusqu'alors sous domination espagnole, s'en était libéré en 1640 avec l'aide de la France. Parmi ces français qui rétablirent un Portugais sur le trône, le Duc de Bragance, figurent Monsieur de Jaume, ami d'aristocrates proches du nouveau roi comme le duc de Mascarenhas et Monsieur d'Alcobaça. Il va connaître la fille d'Alcobaça alors qu'elle n'a que deux ans, et en riant affirme qu'il la prendra pour femme plus tard. Cet homme à femmes est déterminé, et lorsqu'il la reverra plus tard, amoureuse et bientôt mariée au jeune aristocrate Monsieur d'Oeiras, il ne le supporte pas, il est jaloux. Il va se rapprocher sournoisement du couple pour mieux ourdir sa vengeance et conquérir sa promise…Mais Madame d'Oeiras aimait décidément son mari, et passé les moments d'égarement, elle s'avère tout aussi diabolique que Jaume, dont l'orgueil et l'assurance excessive virant à l'imprudence vont lui coûter cher.
Histoire d'amour, de haine, de vengeance, de sang et de larmes, où règne une atmosphère de complot, de cruauté, ce récit est un petit bijou à peine romancé, puisque, outre son intérêt littéraire propre, il est réellement représenté sur les azulejos (les fameux carreaux de faïences peints) ornant les murs et les jardins du palais de la Fronteira (la Frontière) à Lisbonne.
Quignard rend donc là un hommage historique et artistique à ce lieu, et au Portugal, le récit ayant été d'abord publié là-bas, en 1992, avant de l'être quelques mois plus tard en France.
Pour moi un plaisir renouvelé de lire cet écrivain solitaire aux abords austères, qui construit une oeuvre originale, impressionnante par son classicisme de style hors du temps. Un véritable pilier de la littérature française contemporaine.
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Au retour d'une semaine de vacances au Portugal, quoi de plus justifié que cette petite friandise avec ce court roman de Pascal Quignard qui revient sur l'histoire de ce pays que je connais si mal.

Nous voici au 17e s, celui qui verra vraiment naître la Portugal. Dans ce royaume tout neuf une histoire d'amour et de haine, d'orgueil et de vengeance, et pour cadre un palais abritant une fabuleuse décoration. Des azulejos, carrés de faïence à dominante bleue…qui racontent une histoire sur laquelle l'auteur s'appuie pour broder et construire ce roman.

Il y est question d'un homme amoureux d'une enfant dont il décide qu'il fera sa femme lorsqu'elle en aura l'âge. Mais quand arrive le moment idéal, la belle en a épousé un autre. de là naîtra une double vengeance dont je ne dirai rien de plus pour laisser la surprise pleine et entière.

La plume de Pascal Quignard est agréable. Ce court roman se lit comme un conte et un bel hommage à un lieu historique et artistique.

Le livre a d'abord été publié au Portugal en 1992, puis en France quelques années plus, avec des photos de ces magnifiques azulejos.

Ce palais de la Fronteira est à Lisbonne et, bien qu'habité il est partiellement possible de le visiter. Nul doute qu'il sera sur mon planning lorsque j'aurai le plaisir de visiter cette capitale.
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Pascal Quignard s'est laissé envoûter par les azulejos, du palais de la Quinta dos Marqueses de Fronteira à Lisbonne. A t-il ressuscité les énigmes des ombres bleues comme le dit la quatrième de couverture ? S'est-il laissé emporter dans un récit ou se côtoient les frontières de l'amour, du désir, de la vengeance ? Les frontières du Portugal suite à sa victoire sur « la tyrannie infecte de Séville » ? Cela n'a pas d'importance. Il adapte son style à l'époque et commence ainsi son histoire : « En 1979, j'ai écrit que j'espérais être lu en 1640. 1640 fut l'année où le destin du Portugal se joua. » Une jolie pirouette. Nous sommes en 2016 et j'ai aimé cette lecture, l'écriture.
L'histoire ?
Monsieur de Jeaume n'a pu épouser la belle Mademoiselle d'Alcobaça et se venge en tuant son mari (crime parfait au demeurant). La veuve émue de cette amitié qui dure depuis son enfance (ne l'a-t-il pas fait sauter sur ses genoux alors qu'elle n'avait que deux ou trois ans) succombe et tombe dans les bras de Jeaume. Plein de forfanterie, celui-ci lui avoue son crime et la veuve trouve un châtiment pour venger la mort de son mari adoré. Pascal Quignard a brodé son histoire à partir des carreaux de faïence, comme le singe maître de musique, le barbier et toujours, alors que, dans les coins, humains, animaux défèquent. Je n'en dirai pas plus pour vous laisser le plaisir de la découverte.
L'histoire de Pascal Quignard est riche en personnages, descriptions, rebondissements, tout cela dans un style superbe pour très peu de pages. Les deux autres parties du livre ne sont pas en reste. Nicolas Sapieha et Paulo Cintra offrent une centaine de superbes photos du bestiaire, support à l'histoire racontée et José Meco narre l'historique du palais de la Quinta dos Marqueses de Fronteira et des azulejos sans que ce soit redondant.
« C'est pourquoi les animaux sur les azulejos ont pris le visage des hommes. C'est pourquoi au coin des fresques, à l'angle de ces murs, on voit des figures accroupies qui relèvent leur jupe et excrètent dans l'ombre. »
Un superbe livre des éditions Chandeigne, lu dans le cadre de la voie des indés orchestrée par Libfly. Soyez remerciés pour ce beau livre qui m'a permis de retrouver Pascal Quignard.
A découvrir.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Un album de commande, semble-t-il, retraçant l'histoire de la genèse des jardins du palais Fronteira à Lisbonne, ainsi que celle de leurs Azulejos.
Et 78 pages de bonheur.
Nous sommes loin de ces longs romans contemporains de 800 pages aux points de vue croisés et répétitifs, au style plat et au copier / coller de playlist de musique ou de faits historiques.
Ici on découvre, par touches, l'histoire de ces lieux. le style est prenant. Tout est exprimé : lieux, personnages, faits et atmosphère.
Une lecture très agréable.
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texte de circonstance (à partir d'azulejos d'un palais) - bref, dense, terrible, savoureux. Une langue splendide et les thèmes de Quignard, jadis, amour, germination, mort
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Elle le fit asseoir sur un divan. Elle lui demanda de ne dévêtir que le lieu de son propre tatouage. Pour l'heure, Monsieur de Jaume ne bandait pas. Elle mêla au flacon plein du vin qu'il aimait un somnifère. Elle lui servit un verre et lui demanda un peu de temps encore pour que tout fût prêt. Il attendit. Il but plusieurs verres. Ses yeux peu à peu se fermèrent. Quand il fut dans un demi sommeil, elle revint couverte de voiles. Elle portait un flambeau. C'était la plus belle des femmes : plus belle que Marie sur les mosaïques des églises, plus belle que Vénus sur les toiles des peintres d'Italie. Elle approcha le flambeau de son ventre et, soulevant le voile léger, lui découvrit son pubis.
Il avait du mal à tenir ses yeux ouverts. Elle montra de la main son propre tatouage et lui demanda où était son désir et s'il ne pouvait dresser un peu sa propre figure. Elle tira son paquet sur son ventre. Il rit. Elle lui dit : "Voilà l'homme qui me désire : une couille flétrie. Voilà l'ami de mon époux : un assassin lâche. Tes yeux se ferment parce qu'ils pressentent les ténèbres qui les attendent. Dors. Fais un éternel cauchemar. Tu verras qu'il est possible que tu ne désireras plus beaucoup."
Il n'entend rien. Elle le caresse. Elle porte ses lèvres sur son sexe. Elle prend ses bourses avec ses doigts. Elle sort un petit couteau. Elle tranche d'un coup les deux bourses. Il hurle. Elle l'émascule enfin ; le sang jaillit à gros bouillon. Elle fourre dans la bouche de Monsieur de Jaume les deux couilles qu'elle lui a coupées. Elle conserve le pénis et le dessin qui est gravé sur son fourreau. Monsieur de Jaume s'évanouit en criant.
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Il aurait voulu dérober au soleil le mystère de l'océan, et à la lune celui des femmes et des rêves.
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Monsieur de Jaume était français et savait dissimuler mieux qu'un autre homme. Personne n'aurait pu deviner derrière ce visage de marbre et ces yeux de porcelaine bleue quelle fournaise était son coeur. Quand il se trouvait auprès d'elle, il avait l'impression qu'elle avait englouti dans un brasier toute sa vie et que, comme la nuit où il avait aperçu sa silhouette dans le jardin de Monsieur de Mascarenhas, elle incendiait la moindre de ses pensées et la moindre circonstance qui s'offrait.
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Le désir nous affole tous les jours et sa carence nous abandonne aux ombres.
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Il aurait voulu dérober le trésor des continents et des confins pour rappeler la fortune que les Mascarenhas y avaient acquise, et pour témoigner du courage qu'ils avaient montré. Il aurait voulu dérober au soleil le mystère de l'océan, et à la lune celui des femmes et des rêves.
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Vidéo de Pascal Quignard
L'auteur Pascal Quignard a bâti une oeuvre érudite et sensible. Avec "Compléments à la théorie sexuelle et sur l'amour", il poursuit sa réflexion sur la sexualité et la relation amoureuse et nous parle d'art, de masochisme, ou encore de sirènes... Il est l'invité de Géraldine Mosna-Savoye et Nicolas Herbeaux.
Visuel de la vignette : Les Amants / René Magritte
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